La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/12/2018 | FRANCE | N°17/05259

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 07 décembre 2018, 17/05259


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°455



R.G : N° RG 17/05259 - N° Portalis DBVL-V-B7B-ODSO













SAS DISTRIBUTION MATERIAUX BOIS PANNEAUX (DMBP)



C/



M. Sylvain X...

















Confirmation













Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES
>ARRÊT DU 07 DECEMBRE 2018





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:



Monsieur C... L'HENORET, Président de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,



GREFFIER :



Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé







DÉBATS :



A l...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°455

R.G : N° RG 17/05259 - N° Portalis DBVL-V-B7B-ODSO

SAS DISTRIBUTION MATERIAUX BOIS PANNEAUX (DMBP)

C/

M. Sylvain X...

Confirmation

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 07 DECEMBRE 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Monsieur C... L'HENORET, Président de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 26 Octobre 2018

devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 07 Décembre 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE et intimée à titre incident :

La SAS DISTRIBUTION MATERIAUX BOIS PANNEAUX (DMBP) prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[...]

représentée par Me Benoît Y... de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Avocat postulant du Barreau de RENNES et par Me Marie Z... substituant à l'audience Me François A..., Avocat plaidant du Barreau de PARIS

INTIME et appelant à titre incident :

Monsieur Sylvain X...

né le [...] à LA FLECHE (72)

et demeurant : [...]

représenté par Me Bruno B... de la SCP IPSO FACTO AVOCATS, Avocat au Barreau de NANTES

M. Sylvain X... a été engagé le 6 janvier 2014 par la SAS DISTRIBUTION MATÉRIAUX BOIS PANNEAUX (DMBP), qui distribue et commercialise, sous l'enseigne DISPANO, des produits issus du bois, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée en qualité de technico-commercial, statut employé, niveau III, échelon C, coefficient 245 de la convention collective du négoce de matériaux de construction.

Le 13 décembre 2014, M. X... a informé son employeur de son élection au fonction d'adjoint délégué au sport de la commune de BOUGUENAIS le 20 novembre précédent.

Le 23 février 2015, M. X... a fait l'objet d'un avertissement pour manque de réactivité dans les devis, erreurs dans leur traitement et manque de précision concernant les modalités de transport.

Une convention de rupture conventionnelle a été signée le 10 décembre 2015 et homologuée tacitement par la DIRECCTE. Le contrat de travail a pris fin le 26 janvier 2016.

M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de NANTES le 10 mai 2016 d'une demande d'annulation de la rupture conventionnelle pour absence d'autorisation de la DIRECCTE malgré son statut de salarié protégé et obtenir le règlement de diverses sommes :

- 30.000 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 67.530 € au titre de salaire pendant la période de protection,

- 4.502 € au titre de l'indemnité de préavis.

La cour est saisie d'un appel régulièrement formé par la société DMBP le 20 juillet 2017 contre le jugement du 22 juin 2017, par lequel le conseil de prud'hommes a :

- Dit que la rupture conventionnelle du contrat de travail de M. X... est nulle,

- Condamné la société DMBP à payer à M. X... les sommes suivantes :

- 18.000 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 67.530 € au titre de salaire pendant la période de protection,

- 4.502 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 450,20 € au titre des congés payés afférents,

- 1.100 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Ordonné à la société DMBP de remettre à M. X... les documents sociaux rectifiés conformes à la décision ci-dessus (bulletin de paie, certificat de travail, attestation Pôle Emploi) sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard à compter du 30ème jusqu'au 60ème jour suivant le prononcé,

- Rappelé que l'exécution provisoire du présent jugement est de droit, le salaire mensuel moyen de référence étant fixé à 2 251 €,

- Débouté la société DMBP de ses demandes reconventionnelles,

- Condamné en outre d'office la société DMBP à rembourser aux organismes intéressés, les indemnités de chômage versées à M. X... dans la limite de 2 mois d'indemnités,

- Condamné la société DMBP aux dépens éventuels.

Le 22 janvier 2018, M. X... a déposé des conclusions aux fins de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation suivant laquelle 'l'absence de mention des élus, visés dans, des les dispositions de l'article L. 2411-1 du code du travail, telles qu'interprétées par les juridictions du fond en ce qu'elles impliquent que ces élus seraient exclus de la protection des salariés protégés en matière de rupture amiable du contrat de travail porte-t-elle atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et plus particulièrement aux principes d'intelligibilité et de clarté de la loi et d'égalité devant la loi '.

Par arrêt du 6 juillet 2018, la cour d'appel de RENNES a déclaré recevable la question prioritaire de constitutionnalité, dit n'y avoir lieu à sa transmission à la Cour de cassation.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 3 août 2018, la société DMBP demande à la cour de :

- Infirmer le jugement rendu le 22 juin 2017 par le Conseil de prud'hommes de NANTES, en l'ensemble de ses dispositions,

- Dire que la rupture conventionnelle est valable,

- Dire qu'elle n'a commis aucun manquement à l'égard de M. X...,

- Rejeter l'appel incident formé par M.. X... à l'encontre du jugement,

- Débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner M. X... à lui verser la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Le condamner également aux dépens de première instance et d'appel, avec distraction pour ces derniers au profit de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS aux offres de droit,

- Rappeler que l'infirmation du jugement emporte obligation pour M. X... de rembourser les sommes versées au titre de l'exécution de droit à titre provisoire avec intérêts au taux légal à compter de la date du paiement.

Au soutien de ses prétentions, la société DMBP expose en substance que':

- M. X... est mal fondé à soulever la nullité de la rupture conventionnelle de son contrat de travail qu'il a lui même sollicitée, à laquelle il a librement consenti et qui a été régulièrement homologuée par la DIRECCTE en janvier 2016'; la société DMBP n'était pas tenue de solliciter l'autorisation préalable de l'inspection du travail';

- Le salarié bénéficiant d'un mandat d'adjoint au maire d'une commune de 10 000 habitants au moins ne figure pas parmi les salariés visés aux articles L2411-1 et L2411-2 du Code du travail auxquels renvoie l'article L1237-15 du même code';

- Pour les salariés bénéficiant d'une protection mentionnés aux articles L22411-1 et L2411-2 du Code du travail, la rupture conventionnelle est soumise à l'autorisation de l'inspecteur du travail';

- En toute hypothèse, la nullité d'une rupture conventionnelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et non d'un licenciement nul';

- M X... ne rapporte pas la preuve d'une quelconque dégradation de ses conditions de travail ni de prétendues répercussions sur son état de santé.

Par conclusions communiquées par la voie électronique le 7 septembre 2018, M. X... demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a dit que la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement nul et de nul effet pour violation du statut protecteur et confirmer les condamnations afférentes,

- Réformer le jugement sur le montant de la condamnation des dommages-intérêts au visa de l'article L 1235-3 du Code du travail,

- Débouter la société DMBP de l'ensemble de ses demandes,

- Condamner la société DMBP à lui verser les sommes suivantes :

- 30.000 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamner la société DMBP aux dépens,

- Confirmer le jugement pour le surplus.

M. X... prétend que':

- En application de l'article L2123-9 du Code général des collectivités territoriales, lorsqu'ils n'ont pas cessé d'exercer leur activité professionnelle, les élus mentionnés au premier alinéa du présent article sont considérés comme des salariés protégés au sens du livre IV de la deuxième partie du Code du travail'; en conséquence, l'employeur était tenu de solliciter l'autorisation préalable de l'inspecteur du travail'; à défaut, la rupture conventionnelle est nulle et produit les effets d'un licenciement nul';

- Le salarié qui ne demande pas la poursuite de son contrat de travail illégalement rompu a le droit d'obtenir non seulement les indemnités de rupture mais aussi une indemnité réparant l'intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement.

L'affaire a été clôturée le 12 octobre 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La rupture du contrat

En vertu de l'article L 2123-9 du Code général des collectivités territoriales, les maires et les adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins qui n'ont pas cessé d'exercer leur activité professionnelle, sont considérés comme des salariés protégés au sens du Livre IV de la deuxième partie du Code du travail.

L'article L 1237-15 du Code du travail soumet le dispositif de la rupture conventionnelle à une autorisation préalable de l'inspecteur du travail au profit des salariés protégés visés aux articles L 2411-1 et L 2411-2 du même code.

Or si l'article L 1237-15 du Code du travail relatif à la rupture conventionnelle est dans le Livre II de la première partie du Code du travail, il renvoie cependant aux salariés protégés visés aux articles L 2411-1 et L 2411-2 du Livre IV du même code, de telle sorte que la rupture conventionnelle des maires et adjoints au maire des communes de 10 000 habitants au moins qui n'ont pas cessé leur activité professionnelle doit être autorisée préalablement par l'inspecteur du travail.

En l'espèce, la rupture conventionnelle du contrat de travail de M X... a fait l'objet d'une homologation par l'inspecteur du travail et non d'une autorisation préalable alors même que l'employeur avait connaissance depuis le 13 novembre 2014, du mandat d'adjoint «'au sport'» de M X... au sein de la commune de BOUGUENAIS. En conséquence, cette rupture conventionnelle est nulle et produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur du salarié.

M. X..., qui ne demande pas la réintégration dans son emploi, a donc droit aux salaires qu'il aurait dû percevoir entre la date de son éviction le 20 janvier 2016 et la date qui aurait été celle de la fin de sa période de protection s'il n'avait pas été licencié, soit le 20 novembre 2020, dans la limite de la durée de protection accordée aux représentants du personnel, soit dans la limite de 30 mois de salaire.

La moyenne des 12 derniers mois de travail étant plus favorable que la moyenne des 3 derniers mois, il convient de retenir un salaire de référence d'un montant de 2.251 € et de confirmer la décision des premiers juges en ce qu'ils ont alloué à M X... la somme de 67.530 €.

M. X... bénéficiant de plus de 2 années d'ancienneté, il pouvait prétendre à un préavis de 2 mois en application de la convention collective de matériaux de construction et négoce.

Il convient donc de confirmer la décision des premiers juges en ce qu'ils ont condamné la société DMBP à payer à M. X... la somme de 4.502 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 450,20 € bruts au titre des congés payés afférents.

La demande de dommages et intérêts

Il est constant que le salarié licencié sans autorisation administrative, alors que celle-ci était nécessaire, a vocation à obtenir, d'une part, une somme correspondant aux salaires qu'il aurait perçus pendant la période comprise entre son éviction et l'expiration de sa période de protection et, d'autre part à l'indemnité réparant le préjudice résultant du caractère illicite de son licenciement, au moins égale en toute hypothèse à l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail.

M. X... était âgé de 50 ans au jour de la prise d'effet de la rupture conventionnelle. Il justifie avoir perçu l'allocation d'aide au retour à l'emploi. Il a travaillé à temps partiel pour une durée déterminée du 28 novembre 2016 au 12 mai 2017 en qualité de «'chargé d'assistance'» pour un salaire mensuel brut de 1.203,71 €. Il bénéficie d'une formation au diplôme d'état d'accompagnant éducatif et social du 3 septembre 2018 au 28 juin 2019.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné la société DMBP à verser à M X... la somme de 18.000 € à titre de d'indemnité en réparation du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement.

Sur les frais irrépétibles

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société DMBP qui succombe en appel, doit être condamnée à indemniser le salarié intimé des frais irrépétibles qu'il a pu exposer pour assurer sa défense en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, en dernier ressort, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe':

CONFIRME le jugement en tout point';

Y ajoutant

CONDAMNE la SAS DISTRIBUTION MATÉRIAUX BOIS PANNEAUX aux dépens de première instance et d'appel';

CONDAMNE la SAS DISTRIBUTION MATÉRIAUX BOIS PANNEAUX à verser à M. Sylvain X... la somme de 2.800 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 17/05259
Date de la décision : 07/12/2018

Références :

Cour d'appel de Rennes 08, arrêt n°17/05259 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-07;17.05259 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award