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27/11/2018 | FRANCE | N°18/00028

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 27 novembre 2018, 18/00028


1ère Chambre





ARRÊT N°469/2018



N° RG 18/00028 - 18/2829













SCI GESTINVEST



C/

SA CENTRALE KREDIETVERLENING

SA RECORD CREDITS

SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL



























Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES
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COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Marie-Pierre ROLLAND, Conseiller,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors ...

1ère Chambre

ARRÊT N°469/2018

N° RG 18/00028 - 18/2829

SCI GESTINVEST

C/

SA CENTRALE KREDIETVERLENING

SA RECORD CREDITS

SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Marie-Pierre ROLLAND, Conseiller,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 15 Octobre 2018 devant Madame Françoise COCCHIELLO, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

réputé contradictoire, prononcé publiquement le 27 Novembre 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SCI GESTINVEST agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Adresse 2][Adresse 1]

Représentée par Me Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Jean-Pierre SOMMELET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

Société anonyme de droit belge CENTRALE KREDIETVERLENING, venant aux droits de la société anonyme de droit belge RECORD CRÉDITS, anciennement dénommée RECORD BANKRECORD BANK, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Adresse 3] - BELGIQUE

Représentée par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Eric SIMONNET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Société anonyme de droit belge RECORD CRÉDITS, anciennement dénommée RECORD BANKRECORD BANK, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

Représentée par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP PHILIPPE COLLEU, DOMINIQUE LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Eric SIMONNET, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL, prise en la personne de ses représentants légaux

créancier inscrit élisant domicile chez Me [U], notaire

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Régulièrement assignée à personne habilitée, n'a pas constitué

La SA Record BankRecord Bank (la banque) a consenti, selon un acte notarié du 29 mars 2012, un prêt de 1 000 000 euros à la SCI Gestinvest.

A la suite de difficultés rencontrées par la SCI Gestinvest pour rembourser le prêt, un protocole transactionnel a été conclu entre les parties, le 15 janvier 2015, aux termes duquel la SCI Gestinvest se reconnaissait débitrice de la somme de 926.126,98 euros en principal, intérêts et frais arrêtés au 2 octobre 2014.

Le 17 novembre 2016, la banque a fait délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière des biens appartenant à la SCI Gestinvest situés [Adresse 4][Localité 1], lieudit 'Kergurine' et cadastrés section YC n°[Cadastre 1] pour 2 ha 4 a 96 ca.

Faute de paiement, la banque a poursuivi la procédure de vente de l'immeuble saisi.

I Par jugement du 14 décembre 2017, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient a :

- déclaré la demande recevable,

- constaté que la créance de la banque s'élève à 967940, 30 euros en principal, intérêts et accessoires, arrêtée au 28 septembre 2017,

- autorisé la Sci Gestinvest à vendre amiablement le bien saisi et fixé le prix en deçà duquel la vente ne pourrait avoir lieu à 890000 euros,

- taxé les frais du poursuivant à la somme de 8425, 45 euros,

- renvoyé à l'audience du 12 avril pour s'assurer de la vente,

- condamné la Sci Gestinvest à payer à la banque la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'emploi des dépens en frais de poursuite soumis à taxe.

La Sci Gestinvest a interjeté appel de ce jugement le 2 janvier 2018. L'affaire a été enrôlée sous le numéro RG 18/28.

II Par un jugement du 12 avril 2018, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient a :

- ordonné la vente forcée de l'immeuble saisi,

- fixé la date de l'audience d'adjudication au 5 juillet 2018 à 14 heures 00,

- désigné la SELARL ABC Huissiers, huissiers de justice à [Localité 2], aux fins de faire visiter l'immeuble, au besoin avec l'assistance de la force publique,

- ordonné l'emploi des dépens en frais taxables de poursuites.

La société Gestinvest a interjeté appel de ce jugement, le 27 avril 2018. L'affaire a été enrôlée sous le numéro 18/2829.

III Dossier RG 18/28

La Sci Gestinvest et la banque Record BankRecord Bank ont conclu.

Le Crédit Industriel et Commercial, créancier inscrit, n'a pas constitué avocat.

L'affaire a été plaidée par la cour à l'audience du 16 avril 2018 et la décision mise en délibéré au 12 juin 2018.

Par une note adressée à la cour le 25 avril 2018, en cours de délibéré, le conseil de la SCI Gestinvest indique avoir eu connaissance le 20 avril 2018 de ce que la société Record BankRecord Bank avait cédé le 15 janvier 2018 la créance qu'elle détenait contre elle à une société Centrale Kredietverlening (CKV) de sorte que, selon lui, la banque n'aurait plus depuis le 15 janvier 2018, qualité pour agir en exécution du titre de créance.

Par arrêt du 12 juin 2018, la cour a :

- ordonné la réouverture des débats, à seule fin de permettre aux parties de conclure sur la qualité de la Sa Record BankRecord Bank à agir aux fins de vente de l'immeuble appartenant à la Sci Gestinvest suivant commandement de payer valant saisir signifié à celle-ci le 17 novembre 2016,

- dit que la Sci Gestinvest devra conclure pour le 3 septembre 2018,

- dit que la Sa Record BankRecord Bank devra conclure pour le 1er octobre 2018,

- renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience du 15 octobre 2018.

L'affaire a été plaidée et retenue le 15 octobre 2018 .

La cour doit statuer sur les demandes de la société Gestinvest formulées par conclusions du 9 avril 2018 et du 11 octobre 2018 et sur celles de la société Record BankRecord Bank formulées par les conclusions de la société Record BankRecord Bank selon ses écritures du 7 mars 2018 et du 28 septembre 2018.

Par écritures du 9 avril 2018, la société Gestinvest demande à la cour de :

-Déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la SCI Gestinvest,

-Réformer la décision dont appel à l'exception de la disposition autorisant la SCI Gestinvest de vendre amiablement l'immeuble situé [Adresse 4],

A titre principal,

Vu les articles 56 et 58 du Code de Procédure Civile,

Vu les fins de non-recevoir soulevée à ce titre par la SCI Gestinvest, pour défaut de recherche amiable de solution de la société Record BankRecord Bank et d'indication dans la signification de ses diligences à ce titre,

-Déclarer irrecevable en l'état en sa demande la société record Bankrecord Bank,

Vu l'assignation en date du 23 janvier 2017,

-Principalement,

Prononcer la nullité de l'assignation en date du 23 janvier 2017 pour défaut d'indication des diligences en vue d'une recherche amiable de solution, subsidiairement, prononcer l'irrecevabilité de ladite assignation en l'état,

-Subsidiairement,

Vu l'article 117 du Code de procédure civile,

-Juger qu'à défaut d'une recherche amiable de solution antérieurement à l'introduction de l'instance, il y a lieu d'ordonner, soit une conciliation, soit une médiation,

-En conséquence, ordonner entre les parties une médiation ou renvoyer sur ce point devant le Tribunal afin qu'il en fixe les modalités,

-À défaut, prononcer l'irrecevabilité en l'état de la demande faute de respect de l'obligation de recherche amiable de solution formalité nécessaire dont le non-respect entraîne l'irrecevabilité en l'état de la demande,

À titre subsidiaire,

Vu les dispositions des articles 1139 et 1146 du Code civil le protocole du 15 janvier 2015 et l'absence de mise en demeure,

-Juger que la lettre du 21 décembre 2015 faute de mise en demeure et du respect des conditions stipulées à l'article 9 du protocole n'a pu faire jouer la déchéance du terme et ne vaut pas mis en demeure,

-juger que faute d'avoir visé une ou des échéances impayées et d'avoir indiqué et justifié à quel titre des intérêts seraient dus ainsi que des accessoires, la lettre en date du 21 décembre 2015 causant les poursuites ne peut constituer une interpellation suffisante, est nulle et de nul d'effet et n'a pu faire jouer la déchéance du terme, n'ayant pas été mise en 'uvre de bonne foi,

Vu les articles 1271 et suivants du Code civil (ancien applicable aux faits),

-Juger que la créance visée à l'acte du 29 mars 2012 a été novée, par les dispositions des articles 1 et 2 le protocole du 15 janvier 2015, suivant lesquels la SCI Gestinvest a contracté envers la société record Bankrecord Bank une nouvelle dette qui s'est substituée à l'ancienne,

En conséquence,

-Juger que la créance au titre du premier prêt a été éteinte, par suite de l'intention expresse de nover conformément à l'article 6 du protocole « la société record Bankrecord Bank et la SCI Gestinvest renoncent ' au montant de la créance de la société Record BankRecord Bank contenu dans l'acte de prêt notarié en date du 29 mars 2012» et ce conformément aux articles 1 et 2 du protocole du 15 janvier 2015 dont les parties ont expressément convenu qu'ils restaient en vigueur nonobstant la résiliation du protocole,

- Juger que la société RecordbankRecordbank est sans droit en vertu du protocole du 15 janvier 2015 articles 1 et 2, à délivrer un commandement de payer aux fins de saisie immobilière en vertu d'un acte sous seing privé date du 15 janvier 2015 qui cause la créance en raison de la novation intervenue à l'acte du 29 mars 2012,

-Et en conséquence, prononcer la nullité du commandement de payer du 17 septembre 2016 et de tous les actes subséquents.

Vu l'absence d'exigibilité de la créance invoquée,

Vu la lettre en date du 21 décembre 2015 d'avoir à payer la somme de 20 659,87€ eu

-Juger que la demande en date du 21 décembre 2015 comprenant les échéances futures des échéances arriérées ainsi que les intérêts les capitalisant, est nulle et par suite en prononcer la nullité et n'a pas eu pour effet de faire jouer la clause de résolutoire,

-En conséquence, prononcer la nullité du commandement de payer en date du 17 novembre 2016,

À titre très subsidiaire,

-Renvoyer la présente instance devant la juridiction d'exécution de Lorient afin qu'elle fixe les modalités de poursuite de la procédure, ordonne la vente amiable des biens saisis conformément à l'accord des parties,

-Condamner la société Record BankRecord Bank à payer à la SCI Gestinvest la somme de 3000 € au titre de l'article 700 ainsi qu'en tous les dépens dont distraction au profit de la SPCA Garnier représentée par Maître Aurélie Grenard.

Par conclusions du 11 octobre 2018, la société Gestinvest demande à la cour de :

Vu les dispositions du règlement du parlement Européen du 17 juin 2008 notamment l'article 9, vu les dispositions des articles 77 et 78 de la Loi belge du 25 avril 2014, vu les dispositions des articles L 214-43 et 163 du Code monétaire et financier français, vu les dispositions des 122 et suivants et 668 du Code de procédure civile, vu les fins de la fin de non- recevoir,

- dire et juger que la convention du 15 janvier 2018 ayant pour objet d'un transfert de

portefeuille de créances dont celle de la Sci Gestinvest soumis à agrément de la Banque Nationale de Belgique ressort des dispositions de la loi belge du 25 avril 2014 qui en raison de sa nature, à la qualification de loi de police économique,

- dire et juger que les dispositions des articles 77 et 78 de la loi belge du 25 avril 2014 d'ordre public, qui ressortent de l'article 9 loi de police, du règlement du Parlement Européen du 17 juin 2008, ne dérogent à aucune disposition impérative du droit français qui prévoient, pour cette même nature de transfert ou cession de créances, entre établissements financiers l'absence de notification individuelle de cession, doivent recevoir application,

- dire et juger que conformément aux dispositions de l'article 1690 du code civil belge et 1341 du code civil français, la Sci Gestinvest est bien fondé à reconnaître l'effectivité de la cession à son égard tant au 30 mars 2018 qu'au 3 avril 2018, date à laquelle elle a pris acte de la cession de créances dans le cadre du transfert de portefeuille,

- dire et juger qu'au 16 avril 2018, pour les motifs exposés, la société Record BankRecord Bank n'avait pas qualité, depuis le 1er avril 2018, pour exercer l'action,

- dire et juger qu'à compter du 1er avril 2018, l'action de la société Record BankRecord Bank, en raison de la fusion-absorption, et de la cession d'universalité de ses droits et actions, devait être exercée par la société ING Belgique,

- En conséquence, prononcer la nullité des actes effectués par la société Record BankRecord Bank à compter du 1 er avril 2018, et par suite, la nullité de la procédure de saisie immobilière initiée par commandement en date du 17 novembre 2016 par la société Record BankRecord Bank, en raison du fait qu'à compter du 1 er avril 2018, elle n'avait plus qualité pour exercer l'action, et faute de reprise de l'action avant l'audience du 12 Juin 2018, soit par la société ING Belgique, soit par la société Centrale KredietVerlening,

- condamner la société Centrale KredietVerlening à payer à la SCI Gestinvest la somme de 10000 euros hors-taxes au titre de l'article 700 ainsi qu'en tous les dépens, dont distraction au profit de La SELARL Ares, représentée par Maître Aurélie Grenard, Avocat aux offres de droit.

Intimée, la société Record BankRecord Bank demande à la cour par conclusions du 7 mars 2018 de :

- Vu l'acte de prêt notarié en date du 29 mars 2012 ;

- Vu le protocole d'accord du 15 janvier 2015 ;

- Vu les articles L.311-12, L.311-14 et L.311-16 et suivants du Code des procédures civiles d'exécution ;

- Vu les articles R.322-15 a R.322-29 du Code des procédures civiles d'exécution ;

- Vu les articles 1271, 1273 anciens et 1329 et 1330 nouveaux du Code civil ainsi que la jurisprudence y afférente ;

- Vu les articles 564 et 700 du Code de procédure civile ;

- Vu les pièces versées aux débats,

Débouter la société Gestinvest de l'ensemble de ses demandes,

En conséquence,

Confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution près le tribunal de grande instance de Lorient du 14 décembre 2017 en toutes ses dispositions,

Constater la validité de la présente procédure de saisie immobilière,

Constater que le créancier poursuivant, titulaire d'une créance liquide et exigible, agit

en vertu d'un titre exécutoire, comme il est dit aux articles L.311-2 et L.311-4 du Code des procédures civiles d'exécution,

Constater que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables au sens de l'article L.311-6 du Code des procédures civiles d'exécution,

Déterminer les modalités de poursuite de la procédure,

Fixer la créance de la société Record BankRecord Bank à la somme de 974014,30 € en principal, intérêts et frais arrêtée au 25 septembre 2017, outre les intérêts de retard au taux contractuel de 5,75 % l'an courus depuis le 25 septembre 2017 jusqu'au jour du parfait paiement,

Ordonner la vente amiable des biens saisis dans le délai de 3 mois,

A défaut,

Ordonner la vente forcée des biens ci-dessus désignés sur la mise à prix de 890000 € pour l'audience de vente qu'il plaira de fixer, conformément aux dispositions de l'article R.322-26 du Code des procédures civiles d'exécution,

Désigner tel Huissier qu'il vous plaira de commettre pour procéder à la visite, dans la quinzaine précédant la vente avec 1'assistance, si besoin est, d'un serrurier, du Commissaire Áíde Police et/ou de deux personnes visées à l'article L.142-1 du Code des Procédures Civiles d'Exécution,

Déterminer les conditions et les modalités de la publicité de la vente aux enchères, laquelle pourra également être faite sur un site internet,

En tout état de cause,

- Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamner la société SCI Gestinvest à payer à la société Record BankRecord Bank la somme de 5000 €,

Ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente, dont distraction au profit

de SCP Philippe Colleu, Dominique Le Couls-Bouvet, Avocats au Barreau de Rennes.

La société Record BankRecord Bank a dénoncé ses conclusions au Crédit industriel et commercial par acte du 9 mars 2018.

Par conclusions du 28 septembre 2018, les sociétés de droit belge Centrale KredietVerlening (CKV) et Record Crédit, anciennement dénommé Record BankRecord Bank, demandent à la cour de :

-Vu le Règlement (CE) 11° 593/2008 dit « Rome I»,

-Vu les article L311-12, L311-14 et L311-16 et suivants du code des procédures civiles d'exécution,

-Vu les articles R322-75 à R322-29 du code de procédures civiles d'exécution;

-Vu les articles et 1690, 1692 et suivants anciens et 1327, 1324 et suivants nouveaux du code civil,

-Vu l'article 668 et 670 du code de procédure civile et la jurisprudence y afférente,

-Vu les articles 9, 699 et 700 du code de procédure civile,

-Vu les pièces versées aux débats,

À titre liminaire :

- débouter la Sci Gestinvest de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions tendant à l'irrecevabilité de la société Record BankRecord Bank et désormais à la société CKV, venant aux droit de la société Record BankRecord Bank, dénommée à présent Record Crédit, à agir aux fins de vente de l'immeuble lui appartenant, suivant commandement de payer valant saisie immobilière signifié le 17 novembre 2016,

Sur la loi applicable :

- constater que les critères du champs d'application territorial, matériel et temporel du Règlement Rome I sont remplis,

- dire et juger le règlement Rome I applicable au présent litige,

Ce faisant :

- dire et juger que la Société CKV, venant aux droits de la Société Record BankRecord Bank, dénommée à présent Record Crédit, et la Sci Gestinvest sont liées par une clause de loi applicable qui désigne expressément le droit français,

- dire et juger que le contrat de prêt du 12 mars 2012, objet de la cession de créance hypothécaire, est soumis au droit français,

- dire et juger qu'en raison de l'application de la loi française à la créance, l'opposabilité au débiteur cédé en cas de cession ne peut qu'être régie par le droit français ;

- ce faisant, dire et juger que seule la loi française doit être prise en compte pour la détermination de la date à prendre en compte pour l'opposabilité de la cession de créance à la Sci Gestinvest,

Sur l'opposabilité de la cession de créance à la Sci Gestinvest :

- dire et juger qu'en application des articles 668 et 670 du Code de procédure civile, la notification de ladite cession de portefeuille à la Sci Gestinvest, est intervenue le 20 avril 2018, date de réception de la lettre recommandée avec accusé de réception,

Sur la cession de créance et ses accessoires entre la société Record BankRecord Bank et CKV :

- dire et juger que la société Record Bank SARecord Bank SA avait toute qualité pour agir dans le cadre de la présente instance jusqu'à la notification de la cession de créance à la SCI Gestinvest le 20 avril 2018,

- constater qu'à compter de la notification de la cession de créance du 20 avril 2018 et dans le cadre de la présente procédure, la société CKV est désormais titulaire de la créance hypothécaire que la société Record BankRecord Bank détenait à l'égard de la Sci Gestinvest,

- constater qu'à compter de la notification de la cession de créance du 20 avril 2018 et dans le cadre de la présente procédure, la société CKV peut se prévaloir du titre exécutoire ayant fondé la saisie-immobilière à l'encontre de la Sci Gestinvest, à savoir le contrat de prêt notarié du 29 mars 2012,

- constater qu'à compter de la notification de la cession de créance du 20 avril 2018 et dans le cadre de la présente procédure, la société CKV a tout droit de se substituer à la société Record BankRecord Bank, dénommée à présent Record Crédit, dans le cadre de l'action initialement diligentée par elle à l'encontre de la Sci Gestinvest,

- dire et juger qu'en raison des effets de la cession de créance et de ses accessoires, la société CKV est désormais recevable à venir aux droits de la société Record BankRecord Bank, dénommée à présent Record Crédit,

En conséquence :

- dire et juger qu'en raison des effets de la cession de créance et de ses accessoires, la société CKV est désormais recevable et bien fondée à agir aux fins de vente de l'immeuble appartenant à la Sci Gestinvest, suivant commandement de payer valant saisie-immobilière signifiée à celle-ci le 17 novembre 2016,

En tout état de cause :

- condamner la Sci Gestinvest à payer à la société CKV, venant aux droit de la société Record BankRecord Bank, dénommée à présent Record Crédit, la somme de 10000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Sci Gestinvest à l'emploi des dépens au profit de SCP Philippe Colleu Dominique Le Couls-Bouvet, Avocats au Barreau de Rennes.

IV Dossier RG 18/2928

Par conclusions du 9 octobre 2018, la société Gestinvest demande à la cour de :

- statuant sur l'appel interjeté par la SCI Gestinvest du jugement du 12 avril 2018 de la juridiction d'exécution de Lorient,

- Statuant sur la question préjudicielle et la fin de non-recevoir, et pour une bonne administration de la justice,

- surseoir a statuer dans l'attente de l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes saisie au fond RG 18/00028 (arrêt du 12 juin 2018) sur la qualité à agir du créancier poursuivant, la société Record BankRecord Bank.

Subsidiairement,

- dire et juger que la convention du 15 janvier 2018 ayant pour objet d'un transfert de portefeuille de créances dont celle de la Sci Gestinvest soumis à agrément de la Banque Nationale de Belgique ressort des dispositions de la loi belge du 25 avril 2014 qui en raison de sa nature, à la qualification de loi de police économique,

- dire et juger que les dispositions des articles 77 et 78 de la loi belge du 25 avril 2014 d'ordre public, qui ressortent de l'article 9 loi de police, du règlement du Parlement Européen du 17 juin 2008, ne dérogent à aucune disposition impérative du droit français qui prévoient, pour cette même nature de transfert ou cession de créances, entre établissements financiers l'absence de notification individuelle de cession, doivent recevoir application,

- dire et juger que conformément aux dispositions de l'article 1690 du Code civil belge et 1341 du code civil français, la Sci Gestinvest est bien fondé à reconnaître l'effectivité de la cession à son égard tant, au 30 mars 2018 qu'au 3 avril 2018, date à laquelle elle a pris acte de la cession de créances dans le cadre du transfert de portefeuille,

- dire et juger que la société Record BankRecord Bank n'avait plus qualité pour agir à compter du 1er janvier 2018, subsidiairement pour exercer l'action à compter du 1er avril 2018 en raison de la fusion-absorption et de la session d'universalité de ses droits et en conséquence ni la société Record BankRecord Bank ni la société Centrale Kredietverlening n'ont qualité pour intervenir à la présente procédure,

- en conséquence, prononcer la nullité des actes effectués par la société Record BankRecord Bank à compter du 1er avril 2018, et par suite, la nullité de la procédure de saisie immobilière initiée par commandement en date du 17 novembre 2016 par la société Record BankRecord Bank, en raison du fait qu'à compter du 1 er avril 2018, elle n'avait plus qualité pour exercer l'action, et ce, faute de reprise de l'action avant l'audience du 12 Juin 2018, soit par la société ING Belgique, soit par la société Centrale Kredietverlening,

- Condamner la société Centrale Kredietverlening à payer à la SCI Gestinvest la somme de 10 000 € hors-taxes au titre de l'article 700 ainsi qu'en tous les dépens, dont distraction au profit de la SELARL Ares.

Vu les dispositions de l'article R 322-26 du Code des procédures civiles d'exécution,

Vu le principe constitutionnel d'égalité devant la loi au titre de la déclaration universelle des droits de l'homme,

- juger recevable et bien fondé l'appel de la SCI Gestinvest du jugement du 12 avril 2018,

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a désigné la SELARL ABC, huissier de justice « aux fins de faire visiter l'immeuble, au besoin avec l'assistance de la force publique »,

- en conséquence, prononcer la nullité de la procédure de saisie immobilière faute de respect de ses conditions impératives notamment pour violation des dispositions de l'article R 322-26 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamner solidairement les sociétés Record BankRecord Bank et la société Centrale Kredietverlening, au paiement de la somme de 5000 € au titre de l'article 700, ainsi qu'en tous les dépens, dont distraction au profit de la SELARL Ares, représentée par Maître Aurélie Grenard, société d'avocats à Rennes, avocat aux offres de droit.

Par conclusions du 1er octobre 2018, les sociétés anonymes de droit belge Centrale Kredietverlening (venant aux droits de la société anonyme de droit belge Record CRÉDITS anciennement dénommée record Bankrecord Bank ) et Record CRÉDITS (anciennement dénommée Record BankRecord Bank) demandent à la cour de :

vu les articles R. 322-19, R 322-25, R. 322-22 et suivants du code des procédures civiles d'exécution et la jurisprudence y afférente,

vu les article L 311-12, L311-14 et L 311-16 et suivants du code des procédures civiles d'exécution et la jurisprudence y afférente,

vu les articles R 322-15 à R 322-29 du code des procédures civiles d'exécution et la jurisprudence y afférente,

vu les articles 1690, 1692 et suivants anciens et 1321, 1324 et suivants nouveaux du code civil ainsi que la jurisprudence y afférente,

vu les articles 9, 699 et l'article 700 du code de procédure civile,

vu les pièces versées aux débats,

A titre liminaire :

Sur la nullité et l'irrecevabilité de l'appel interjeté à l'encontre du jugement d'orientation du 12 avril 2018 :

- dire et juger que la SCI Gestinvest a interjeté appel-nullité du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande Instance de Lorient le 12 avril 2018 en violation des articles R. 322-25 et R. 322-22 du code des procédures civiles d'exécution,

- dire et juger que la SCI Gestinvest a interjeté appel-nullité du jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient le 12 avril 2018 en violation de l'article R. 322-19 du Codes des procédures civiles d'exécution ;

Ce faisant :

- dire et juger nul et irrecevable l'appel interjeté à l'encontre du jugement d'orientation rendu par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient le 12 avril 2018,

A titre subsidiaire :

Sur le caractère infondé de la demande de sursis à statuer formulée par la SCI Gestinvest :

- dire et juger qu'aucune question préjudicielle, au sens des article 378 et 49 du code de procédure civile, n'a été soulevée dans le cadre de cette instance,

- dire et juger que la qualité à agir de la SA Record BankRecord Bank, aux fins de vente de l'immeuble appartenant à la SCI Gestinvest, ne peut aucunement être assimilée à une question préjudicielle,

- dire et juger que la demande de sursis à statuer formulée par la SCI Gestinvest est infondée.

Ce faisant :

- rejeter la demande de sursis à statuer formulée par la SCI Gestinvest.

A titre infiniment subsidiaire :

- constater que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient a désigné la SELARL ABC en parfaite application de l'article R. 322-26 du code des procédures civiles d'exécution,

- constater que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient a été saisi de cette demande en premier lieu,

- dire et juger que l'appel n'a pas d'effet suspensif sur la procédure de saisie-immobilière ;

Ce faisant :

- dire et juger que le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lorient n'a commis aucun excès de pouvoir en désignant la SELARL ABC aux fins de visite de l'immeuble appartenant à la SCI Gestinvest, objet de la saisie-immobilière,

- confirmer le jugement du 12 avril 2018 rendu par le juge de l'Exécution du tribunal de grande Instance de Lorient en ce qu'il a désigné la SELARL ABC Huissiers, Huissiers de justice à Lorient, aux fins de faire visiter l'immeuble, objet de la saisie immobilière, au besoin avec l'assistance de la force publique,

A titre infiniment subsidiaire :

- dire et juger qu'en raison des effets de la cession de créance et de ses accessoires, la société CKV est désormais recevable à venir aux droits de la société Record BankRecord Bank, dénommée à présent Record Crédits,

En conséquence :

- dire et juger qu'en raison des effets de la cession de créance et de ses accessoires, la société CKV est désormais recevable et bien fondée à agir aux fins de vente de l'immeuble appartenant à la SCI Gestinvest, suivant commandement de payer valant saisie-immobilière signifiée à celle-ci le 17 novembre 2016,

En conséquence,

- débouter la sci gestinvest de l'ensemble de ses demandes,

En tout état de cause :

- condamner la sci Gestinvest à payer à la Société CKV, venant aux droit de la Société Record BankRecord Bank, dénommée à présent Record Crédit, la somme de 10.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la Sci Gestinvest à l'emploi des dépens au profit de la SCP Philippe Colleu, Dominique Le Couls-Bouvet, Avocats au barreau de Rennes.

MOTIFS :

Considérant que les deux instances doivent être jointes et les demandes jugées ensemble,

I APPEL DU JUGEMENT DU 14 DÉCEMBRE 2017 :

Sur l'absence de qualité de la société Record BankRecord Bank pour poursuivre à compter du premier avril 2018 la procédure et les conséquences sur la procédure de saisie immobilière :

Considérant que la société Gestinvest soutient :

principalement :

- que la cession de créance était soumise à la loi belge,

-que la convention du 15 janvier 2018 ayant pour objet d'un transfert de portefeuille de créances dont celle de la SCI Gestinvest est soumise à l'agrément de la Banque Nationale de Belgique en application des dispositions des articles 77 et 78 de la loi de police économique belge du 25 avril 2015, que dès la publication de l'agrément au Moniteur Belge le 30 mars 2018, la cession est opposable aux tiers, notamment au débiteur cédé,

-que conformément aux dispositions de l'article L 214-43 et L 214 -169 du code monétaire et financier, dès qu'elle est faite par voie de bordereau, la cession est opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau ; qu'en l'espèce, les sociétés Record BankRecord Bank et Centrale Kredietverlening sont des établissements financiers spécialisés et les dispositions de l'article L 214-169 du Code monétaire et financier leur sont applicables, que 'L'acte du 15 janvier 2018 qui a été agréé par la Banque de Belgique tient lieu de bordereau',

subsidiairement :

-que la cession de créance a effet le 3 avril 2018, date d'expédition de la notification,

qu'elle ajoute qu'il y a eu fusion absorption avec effet au premier avril 2018 des sociétés Record Bank filialeRecord Bank filiale à 100 % d'ING Bank Belge et ING Bank belge, que par acte authentique du 12 avril 2018, une 'scission partielle de Record BankRecord Bank par transfert d'une partie de son patrimoine à ING Belgique' est intervenue, selon laquelle les opérations de Record BankRecord Bank portant sur le patrimoine transféré seront accomplies par ING Belgique à compter du premier janvier 2018 ; qu'il y a eu également une cession d'universalité de la société Record BankRecord Bank au profit d'ING Belgique par acte authentique du 14 mars publié le 22 mars qui précise que la scission aura effet au premier avril 2018 sur les plans comptable, fiscal et juridique ; qu'il résulte de ces divers éléments que la société Record BankRecord Bank n'avait plus qualité à agir à compter du premier avril,

- que la société Centrale Kredietverlening a reconnu qu'elle tirait ses droits vis-à-vis des tiers de la convention homologuée du 30 mars 2018, date de sa publication,

Considérant que la société Centrale Kredietverlening ( CKV) et la société Record CRÉDITS (anciennement dénommée Record BankRecord Bank) exposent :

-que contrairement à ce que soutient Gestinvest, la société Record BankRecord Bank a toujours la personnalité morale, n'ayant fait l'objet que d'une scission partielle, au profit d'ING Belgique,

- que la loi applicable à l'opposabilité de la cession de créance à l'égard de la société Gestinvest doit être déterminée par les articles 3 et 14-2 du règlement CE 593/2008 du 17 juin 2008 dit ' Rome I' concernant les obligations contractuelles, et qu'au regard de ces dispositions, la loi française est applicable,

- que selon le droit français (article 1324 nouveau du code civil, jurisprudence de l'article 1690 ancien du Code civil), jusqu' à la notification de la cession au débiteur cédé, le cédant demeure créancier et a qualité pour agir ; que la date de l'information donnée à Gestinvest est celle de la réception de la lettre, de sa remise selon les termes des articles 668 et 670 du code de procédure civile, soit le 20 avril 2018, qu'à la date où elle a agi et déposé des conclusions, Record BankRecord Bank qui a toujours conservé sa personnalité morale, avait qualité à agir jusqu'au 20 avril 2018 ; que la société CKV qui, en qualité de cessionnaire a, aux termes de l'article 1321 du code civil, la position juridique du cédant et agit dans tous ses droits, profitant des garanties de paiement de la créance, de toutes les actions en justice tirées de la qualité de créancier, est recevable à intervenir à la procédure à compter du 20 avril 2018,

- que l'article L 214-169 du code monétaire et financier ne peut être valablement invoqué, qu'il concerne les organismes de titrisation et les organismes de financement spécialisés, que ce texte ne peut être appliqué à la créance hypothécaire ; que par ailleurs, la société Gestinvest ne rapporte pas la preuve que la cession de créance a été faite par bordereau,

Mais considérant que les sociétés de droit belge Record BankRecord Bank et CKVont signé une convention de portefeuille de prêts hypothécaires le 15 janvier 2018, que la convention est soumise à la loi belge, que la cession a pris effet entre les deux sociétés de droit belge le 29 mars 2018 et a été publiée dans le Moniteur Belge le 30 mars 2018, conformément au droit belge ;

Que la convention de portefeuille est intervenue entre Record BankRecord Bank et CKV, qu'elle porte sur des créances nées de contrats existant entre Crédit Bank et des tiers ; que, contrairement à ce que Gestinvest soutient, la loi applicable à la convention de portefeuille ne s'impose nullement comme loi des contrats à l'origine des créances cédées ; qu'en présence de sujets de différents Etats membres de l'Union européenne, la société de droit belge Record BankRecord Bank, la société de droit français Gestinvest ayant conclu le contrat de prêt, il y a lieu de rechercher la loi applicable à leurs rapports contractuels, partant, à la cession de créance intervenue,

Considérant que le règlement 308/2008 dit ' Rome I' est applicable à la relation contractuelle entre des personnes situées dans différents Etats membres de l'Union européenne, que l'article 3 de ce règlement détermine la loi applicable au contrat et l'article 14-2 la loi applicable à la cession de créance,

- qu'en application de l'article 3 du règlement, le contrat est régi par la loi choisie par les parties, qu'en l'espèce, celles-ci ont soumis celui- là la loi française selon l'article XVI du contrat,

- qu'en application de l'article 14 -2 du règlement, la loi qui régit la créance détermine les conditions d'opposabilité de la cession, qu'en l'espèce, le droit français s'applique à la cession et aux rapports avec le débiteur cédé,

Considérant que selon l'article 1690 ancien du code civil applicable à ce contrat conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, 'Le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur.', que dès lors , et jusqu'à la notification de la cession à Gestinvest, la société record Bankrecord Bank, créancier cédant, reste avoir qualité pour agir ; qu'en l'espèce, la cession a été notifiée, selon les termes des articles 668 et 670 alinéa 1 du code de procédure civile le 20 avril 2018 ;

Considérant que la société Record BankRecord Bank qui avait conservé la personnalité morale à la suite de la scission partielle au profit d'ING Belgique, agissait par conséquent régulièrement en déposant des conclusions le 7 mars 2018 ; que la société CKV, investie des droits et actions du cédant, intervenait régulièrement par conclusions du 28 septembre 2018,

Considérant que vainement, la société Gestinvest soutiendra que le droit belge serait applicable à l'opposabilité de la cession de créance, alors que les termes du règlement 'Rome I' invitent, en présence d'éléments d'extranéité, à rechercher la loi applicable au contrat signé par les parties,

Que tout aussi vainement, elle invoquera les dispositions du code monétaire et financier alors quelle ne fait qu'alléguer, sans le moindre élément de preuve, que la créance cédée l'a été par un bordereau,

Que vainement encore, elle soutiendra que c'est la date d'expédition de la lettre de notification qu'il convient de retenir comme date d'opposabilité alors que l'article 668 du code de procédure civile précise que la date est à l'égard de celui à qui elle est faite, celle de la réception de la lettre,

Considérant que la procédure poursuivie par Record BankRecord Bank puis par CKV est régulière,

II Sur l'irrecevabilité de la demande pour défaut de recherche amiable :

Considérant que Gestinvest soutient, au visa des articles 56 et 58 du code de procédure civile que Record BankRecord Bank n'a fait aucune diligence pour parvenir à la résolution amiable du conflit et ne justifie pas qu'elle avait des motifs légitimes de ne pas le faire, qu'elle soutient que l'assignation est nulle, que la recherche amiable doit être faite après l'introduction de la demande en justice, que les dispositions de ces articles s'appliquent à la procédure de saisie immobilière,

Considérant que l'intimée expose que les dispositions des textes invoqués ne s'appliquent pas à la procédure de saisie immobilière, qu'elles n'entraînent pas la nullité de l'acte introductif d'instance, que par ailleurs, la banque a tenté de trouver des solutions amiables, qu'un protocole avait été signé, qu'une ultime mise en demeure a eu lieu,

Mais considérant que la recherche de solution amiable n'est pas prescrite à peine de nullité de l'assignation, qu'elle n'est pas plus prescrite à peine d'irrecevabilité de la demande ; que le juge peut tout au plus, en application de l'article 127 (et non 117) du code de procédure civile, proposer une mesure de conciliation ou de médiation,

Considérant que la matière particulière de la saisie immobilière s'oppose, alors que des recherches de solutions amiables ont pu être faites, comme la signature du protocole du 15 janvier 2015 qui était destiné à donner une solution au litige, à ce que le juge propose une telle mesure,

Considérant que la fin de non recevoir soulevée par la société Gestinvest n'est pas justifiée, qu'elle sera rejetée,

Sur la nullité du commandement

En raison de la novation :

Considérant que la société Gestinvest expose qu'il y a eu novation par la signature du protocole sous seing privé du 15 janvier 2015 dès lors que les termes de l'article 1271 ancien du code civil sont respectés ; qu'ainsi, les modalités du prêt notarié initial ne peuvent être invoquées au soutien de la procédure de saisie,

Considérant que l'intimée expose que la novation suppose une intention de l'opérer selon les termes de l'article 1273 ancien du code civil et qu'en l'espèce, les deux parties n'ont eu cette volonté,

Mais considérant que la société Record BankRecord Bank et la société Gestinvest signaient le 15 janvier 2015 un protocole, dans lequel il était exposé notamment que la société Gestinvest avait cessé de procéder au remboursement régulier du prêt que la société Record BankRecord Bank lui avait consenti par acte notarié du 29 mars 2012, que Record BankRecord Bank l'avait mise en demeure, ainsi que les cautions, de payer sous quinzaine la somme de 47841,49 euros correspondant à l'arriéré arrêté au 4 mars 2014, qu'aucun paiement n'était intervenu et que la société Gestinvest avait assigné Record BankRecord Bank devant le juge des référés pour obtenir des délais de paiement,

selon lequel (art 1) la société Gestinvest reconnaissait devoir la somme de 926126, 98 Euros décomposée en arriéré (80325,502 Euros), capital restant du (845764,30 Euros) et frais ( 37, 18 Euros),

selon lequel (art 2) les parties convenaient de capitaliser les arriérés de sorte que la somme due de 926126, 98 Euros soit remboursée en 114 mensualités de 10334, 93 Euros au taux de 5, 25%, précisant : " le nouveau tableau d'amortissement ne portera pas novation, ni autre dérogation quelconque aux clauses et conditions de l'acte de prêt qui reste en application et dont la présente doit être considérée comme partie intégrante",

selon lequel (art 6), "à titre transactionnel et en contrepartie des engagements contractés aux présentes, la société Record BankRecord Bank et la SCI gestinvest renoncent à tous litiges, et/ou réclamations sur quelque fondement que ce soit et pour quelque motif qui seraient relatifs au principe et au montant de la créance de la société Record BankRecord Bank contenues dans l'acte de prêt notarié en date du 29 mars 2012 et mentionné à l'article 1 des présentes",

selon lequel (art 7), les frais de renouvellement d'inscription des garanties d'hypothèques conventionnelles, du privilège du préteur de deniers et du nantissement des parts sociales de la SCI Rima Kergurione dont est assorti le prêt du 29 mars 2012 seront supportés par la SCI Gestinvest,

selon lequel (art 9 alinéa 1), à défaut de respect par les parties de l'une quelconque des obligations mises à leur charge en vertu du protocole et notamment à défaut de règlement à bonne date des sommes telles que visées aux articles 1 et 2 et selon le tableau d'amortissement, le protocole était résolu de plein droit à l'exception des stipulations des articles 1 et 2, huit jours après une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec accusé de réception demeurée infructueuse,

Considérant que selon les termes de l'article 1273 ancien du code civil, la novation ne se présume point et il faut que la volonté de l'opérer résulte clairement de l'acte ; qu'en l'espèce, il ne résulte nullement des termes employés dans la rédaction du protocole que les parties ont entendu opérer une novation, qu'au contraire, elles l'ont formellement exclue dans l'article 2, souhaitant maintenir le contrat de prêt originaire, précisant que la résolution du protocole laissait subsister cet article 2 qui renvoie aux "clauses et conditions de l'acte de prêt qui reste en application", que les garanties étaient maintenues ; que le fait que les parties aient convenu du montant de la créance et du nombre de mensualités de remboursement est de l'essence même du contenu d'une transaction ; que la renonciation des parties au montant de la créance initiale résultant du contrat de prêt n'a pas eu pour effet d'opérer l'extinction des obligations nées de l'acte notarié à l'origine de leurs relations et ses accessoires, que l'usage de références nouvelles pour l'exécution du protocole n'est pas sur ce point probant, s'agissant d'une simple modalité technique de l'exécution du protocole ;

Considérant alors que la société Record BankRecord Bank était fondée à se prévaloir de l'acte notarié du 29 mars 2012 pour engager la procédure de saisie immobilière contre la société Gestinvest,

En raison de l'absence d'exigibilité de la créance :

Considérant que la société Gestinvest fait valoir que la lettre du 21 décembre 2015 ne vaut pas mise en demeure au sens du protocole, qu'elle reste imprécise sans dire quelles sont les sommes non réglées, l'imputation des intérêts aux retard de paiement, visant des 'accessoires' non explicités, qu'elle ne procède pas de la bonne foi,

qu'elle ajoute qu''aux termes du protocole, a été ajouté au solde du capital les échéances arriérées et les intérêts dus, ce qui a eu pour effet d'augmenter la charge de remboursement', que 'la demande en date du 21 décembre 2015, comprenant les échéances futures, les échéances arriérées ainsi que les intérêts, ce qui a eu pour effet de les capitaliser' est nulle, pour ne pas respecter les dispositions des articles L 312-21 et L 312-22 du code de la consommation,

Considérant que l'intimée fait valoir que la lettre adressée le 21 décembre 2015 est parfaitement claire, que par ailleurs, Gestinvest a reçu une autre mise en demeure le 31 mai 2016, qu'elle précise que les articles L 312-21 et L 312-22 ne sont pas applicables au litige,

Mais considérant que l'article 9 du protocole précisait en son alinéa 1 que le protocole était résolu de plein droit en cas de non paiement des sommes dues à leur échéance, à l'issue d'un délai de huit jours expirant après l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception demeurée infructueuse,

Considérant que par une lettre datée du 21 décembre 2015 adressée en recommandée avec accusé de réception, la société Record BankRecord Bank a informé la société Gestinvest que son compte présentait un arriéré de 20669, 87 Euros, et précisait que si elle n'était pas effectivement créditée de cette somme dans la quinzaine des présentes au plus tard, Gestinvest perdrait de plein droit le bénéfice du terme, auquel cas le montant de la créance en capital, intérêts et accessoires deviendrait immédiatement exigible, qu'elle ajoutait que s'appuyant sur les clauses et conditions de l'acte de prêt, elle serait obligée de mettre en oeuvre ... la procédure de saisie exécution immobilière,

Considérant que nonobstant l'absence d'emploi de l'expression " mise en demeure", ce courrier est une mise en demeure de payer, ce que la société Gestinvest a reconnu dans ses écritures devant le premier juge et ce que le contenu du courrier traduit parfaitement, lorsque la société Record BankRecord Bank demande le paiement de l'arriéré sous quinzaine avant l'exigibilité immédiate de la créance dans son intégralité à l'issue du délai de quinze jours resté infructueux,

Que la société Gestinvest soutiendra vainement que la société Record BankRecord Bank aurait commis des erreurs dans le décompte, faisant état d'un courrier antérieur du 30 mars 2015 lequel n'est d'aucune utilité pour contester la validité de la mise en demeure intervenue postérieurement, que par ailleurs, l'extension du délai à quinze jours (au lieu de huit jours) n'a aucune conséquence sur la validité de la mise en demeure,

Considérant enfin que le prêt consenti à la société Gestinvest est soumis aux dispositions concernant les prêts immobiliers insérées dans le Code de la consommation dans sa version en vigueur au moment du contrat, notamment des articles L 312-21 et L 312-22, contrairement à ce que soutiennent les intimées ; que toutefois, la société Gestinvest ne peut remettre en cause les termes du protocole qu'elle a acceptés à titre transactionnel en le signant le 15 janvier 2015, qui prévoyaient que les stipulations de l'article 2 ( les arriérés sont capitalisés) subsistent malgré la résolution de plein droit du protocole ; que ce moyen tiré de la violation de l'article L 312-22 et destiné, selon Gestinvest, à voir dire que la demande est nulle et partant le commandement nul n'est pas fondé,

II Appel du jugement du 12 avril 2018 :

Considérant que la société CKV et la société Record BankRecord Bank font valoir que cet appel interjeté par Gestinvest est nul et irrecevable ; que Gestinvest n'a pas pris de conclusions devant le premier juge de sorte qu'elle ne peut faire valoir aucun moyen devant la cour ; que le jugement du 12 avril 2018 n'est pas susceptible d'appel ; que le pourvoi en cassation était ouvert de sorte que l'appel nullité ne pouvait être interjeté, qu'elle rappelle que l'appel du jugement d'orientation est instruit et jugé selon la procédure à jour fixe, ce qui n'a pas été respecté ; qu'enfin, elles exposent avoir demandé du juge de l'exécution par conclusions du 9 novembre 2017, de désigner un huissier, qu'elles rappellent que le délai d'appel et l'appel ne sont pas suspensifs, que les dispositions de l'article R 322-26 du code des procédures civiles d'exécution ont été respectées,

Considérant que la société Gestinvest entend contester la décision qui a désigné un huissier pour effectuer des visites, qu'elle invoque les dispositions de l'article R 322-26 du Code des procédures civiles d'exécution, qui selon elle, n'excluent pas un double degré de juridiction, ce qui est 'conforme à l'application du principe constitutionnel d'égalité devant la loi en vertu duquel, pour une même situation, les dispositions légales doivent être les mêmes sauf circonstances exceptionnelles dument justifiées' ; qu'elle invoque également la voie de l'appel- nullité, voie de recours extraordinaire 'd'un jugement non susceptible d'appel, lorsque le premier juge a excédé ses pouvoirs ou violé les droits de la défense, ou lorsque la décision est entachée d'une violation flagrante de la loi ou d'une erreur de droit manifeste ou que le juge a statué sans être saisi d'une demande', qu'elle expose que le créancier n'avait pas demandé la désignation d'un huissier, de sorte que le juge a excédé ses pouvoirs et violé les droits de la défense, que le premier juge ne pouvait en outre statuer alors que la cour était saisie de l'appel du premier jugement, et que le créancier a poursuivi ' une fraude par rétention de pièces décisives',

Sur la recevabilité de l'appel :

Considérant que le jugement du 12 avril 2018 a ordonné la vente forcée après avoir constaté le défaut de vente amiable ordonné par le jugement du 14 décembre 2017 ; que le jugement du 12 avril 2018 n'est pas un jugement d'orientation et n'a statué sur aucune contestation, que la société Sogestinvest n'a d'ailleurs pas conclu pour l'audience du juge de l'exécution ; qu'en application de l'article R 322-60 du Code des procédures civiles d'exécution, le jugement n'est pas susceptible d'appel ; que par conséquent, l'appel de ce jugement est irrecevable,

Sur l'appel-nullité :

Considérant que le pourvoi en cassation contre une telle décision qui n'a pas le caractère d'un jugement et n'est susceptible d'aucun recours n'est pas possible, qu'il y a par conséquent lieu de statuer sur l'appel - nullité invoqué par Gestinvest,

Considérant que par conclusions prises pour l'audience du 9 novembre 2017, la société Record BankRecord Bank sollicitait le prononcé de la vente forcée et le prononcé des modalités de la vente, notamment la désignation d'un huissier ; que le premier juge était par conséquent nécessairement saisi de la demande de la banque dès lors qu'il était constaté que la vente amiable n'avait pu avoir lieu et il n'existe par conséquent aucun excès de pouvoir de la part du premier juge à avoir désigné un huissier pour organiser les visites du bien ; qu' à supposer qu'il aurait statué ultra petita, il n'en résulterait pas pour autant un excès de pouvoir ouvrant la voie de l'appel-nullité ; que par ailleurs, il est rappelé que le jugement d'orientation, quand bien même appel en était interjeté, était exécutoire par provision (et surabondamment, la cour observe que saisi par Gestinvest, certes après le jugement intervenu le 12 avril 2018, le premier président a, par ordonnance du 19 juin 2018, débouté celle-ci de sa demande de suspension de l'exécution provisoire des deux jugements) ; que rien ne justifie enfin la fraude du créancier invoquée sans la moindre pièce justificative par Gestinvest ; que la demande d'appel - nullité du jugement du 16 avril 2018 sera rejetée,

Sur le sursis à statuer :

Considérant que le sursis à statuer de la société Gestinvest est sans objet ;

PAR CES MOTIFS :

Ordonne la jonction des procédures enrôlées sous les numéros de RG 18/028 et 18//2829

Sur l'appel du jugement du 14 décembre 2017 ( RG n° 18/28) :

Rejette la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société Record BankRecord Bank et de la société CKV,

Confirme le jugement du 14 décembre 2017 en ce qu'il a débouté la société Gestinvest de sa demande " d'irrecevabilité" pour défaut de recherche amiable, de sa demande de nullité du commandement pour novation et défaut d'exigibilité de la créance,

Condamne la société Gesinvest à payer à la société Record BankRecord Bank et à la société Centrale Kredietverlening la somme de 5000 Euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles,

Sur l'appel du jugement du 12 avril 2018 ( RG n° 18/2829) :

Déclare l'appel irrecevable,

Déboute la société Gestinvest de sa demande de nullité du jugement,

Condamne la société Gestinvest à payer à la société Centrale Kredietverlening la somme de 3000 Euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Gestinvest aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18/00028
Date de la décision : 27/11/2018

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°18/00028 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-27;18.00028 ?
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