La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/11/2018 | FRANCE | N°16/00711

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 27 novembre 2018, 16/00711


1ère Chambre








ARRÊT N°464/2018





N° RG 16/00711 - N° Portalis DBVL-V-B7A-MVX5




















Mme Françoise Lucette M... Y... épouse X...


Mme Armelle Josée N... Y...


Mme Sandra Vanessa Y... épouse Z...


Mme Nathalie Carine Y... épouse A...


M. Fabien François M... E...





C/





M. Bruno B...


Mme Anne-M... E... O... veuve B...


Melle Laurence B...


M.

Pierre-Yves C...


M. Lucien F...


Mme Maryannick D... épouse E... F... G... B...





























Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée




















Copie exécutoire délivrée





le :





à...

1ère Chambre

ARRÊT N°464/2018

N° RG 16/00711 - N° Portalis DBVL-V-B7A-MVX5

Mme Françoise Lucette M... Y... épouse X...

Mme Armelle Josée N... Y...

Mme Sandra Vanessa Y... épouse Z...

Mme Nathalie Carine Y... épouse A...

M. Fabien François M... E...

C/

M. Bruno B...

Mme Anne-M... E... O... veuve B...

Melle Laurence B...

M. Pierre-Yves C...

M. Lucien F...

Mme Maryannick D... épouse E... F... G... B...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 27 NOVEMBRE 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame M...-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Octobre 2018 devant Madame Christine GROS, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

par défaut, prononcé publiquement le 27 Novembre 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTS :

Madame Françoise Lucette M... Y... épouse X...

née le [...] à PONTIVY

[...]

Représentée par Me Delphine H... de la SCP KERMARREC-H..., avocat au barreau de QUIMPER

Madame Armelle Josée N... Y...

née le [...] à VALENCES

[...]

Représentée par Me Delphine H... de la SCP KERMARREC-H..., avocat au barreau de QUIMPER

Madame Sandra Vanessa Y... épouse Z...

née le [...] à CANNES LA BOCCA

[...]

Représentée par Me Delphine H... de la SCP KERMARREC-H..., avocat au barreau de QUIMPER

Madame Nathalie Carine Y... épouse A...

née le [...] à CANNES LA BOCCA

[...]

[...]

Représentée par Me Delphine H... de la SCP KERMARREC-H..., avocat au barreau de QUIMPER

Monsieur Fabien François M... E...

né le [...] à CANNES LA BOCCA

[...]

Représenté par Me Delphine H... de la SCP KERMARREC-H..., avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉS :

Monsieur Bruno B...

né le [...] à QUIMPERLE

[...]

Représenté par Me Julien E... P... , avocat au barreau de QUIMPER

Madame Anne-M... E... O... veuve B...

née le [...] à GUIDEL

[...]

Représentée par Me Julien E... P... , avocat au barreau de QUIMPER

Mademoiselle Laurence B...

née le [...] à QUIMPERLE

[...]

Représentée par Me Julien E... P... , avocat au barreau de QUIMPER

G... B..., Groupement Agricole d'Exploitation en Commun agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[...]

Représentée par Me Julien E... P... , avocat au barreau de QUIMPER

Monsieur Pierre-Yves C...

né le [...] à QUIMPERLE

[...]

Régulièrement assigné à personne, n'a pas constitué

Monsieur Lucien F... , es qualité d'ayant droit de M. Jean-Marc F...

né le [...] à CLEGUER (56620)

[...]

Régulièrement assigné en intervention forcée à personne présente au domicile, n'a pas constitué

Madame Maryannick D... épouse E... F..., es qualité d'ayant droit de M. Jean-Marc F...

née le [...] à HENNEBONT (56700)

[...]

Régulièrement assignée en intervention forcée à sa personne, n'a pas constitué

Par acte authentique du 30 septembre 1996, Monsieur Bruno B... a fait l'acquisition auprès de Madame X... et de son frère, Monsieur Y... (aux droits desquels se trouvent désormais Mesdemoiselles Armelle et Sandra Y..., Madame Nathalie Y... et Monsieur Fabien I...) de diverses parcelles de terre sises au [...] , cadastrées [...], d'une contenance totale de 20ha 75a 70ca.

Monsieur Bruno B... exerce la profession d'exploitant agricole, associé au sein du G... B... avec sa s'ur, Laurence B... et sa mère, Anne-M... O... , épouse B....

Monsieur B... a sollicité et obtenu un permis de construire afin d'édifier son bâtiment d'élevage sur la parcelle cadastrée [...], acquise auprès des consorts Y....

En raison d'un différend portant sur un chemin permettant l'accès aux bâtiments d'exploitation que les consorts Y... considéraient leur appartenir, ces derniers ont saisi le tribunal d'instance de Quimperlé le 22 septembre 1998 en complainte et réintégrande portant sur ce chemin. Le tribunal d'instance de Quimperlé par une décision du 22 septembre 1998 a déclaré cette demande irrecevable. La cour d'appel a confirmé ce jugement par un arrêt du 19 décembre 2000.

Les consorts Y... ont ensuite fait assigner devant le juge des référés les consorts B... ainsi que la commune de Quimperlé, aux fins de désignation d'un expert judiciaire afin qu'il établisse des éléments d'information sur la situation du chemin permettant l'accès aux bâtiments d'exploitation appartenant au G... B.... Par ordonnance de référé du 2 février 2005, Monsieur J... a été désigné en qualité d'expert judiciaire. Aux termes de son rapport déposé le 23 mars 2007, il a considéré que le chemin litigieux constituait un voie rurale faisant partie du domaine privé de la commune de Quimperlé et que ce chemin servait d'accès au fonds appartenant à M. B....

Par exploit du 23 septembre 2008, les consorts Y... ont saisi le tribunal de grande instance de Quimper aux fins de voir constater que la commune de Quimperlé ne disposait d'aucun titre de propriété portant sur le chemin permettant d'accéder aux bâtiments exploités par le G... B... et implantés sur la parcelle cadastrée [...] et, que Monsieur B... n'était pas titulaire d'un droit de passage sur la voie litigieuse.

Par jugement du 15 septembre 2009, le tribunal de grande instance de Quimper a jugé que le [...] n'est pas un chemin rural appartenant au domaine privé de la commune de Quimperlé, que la bande à usage de chemin longeant au Sud de la parcelle cadastrée même commune, [...], jusqu'au chemin privé de [...], fait partie de la parcelle cadastrée même commune section CD, numéro [...], et a été vendue par les consorts Y... à Monsieur Bruno B..., le 30 septembre 1996, dit que la parcelle cadastrée CD, numéro [...] n'est pas enclavée, constaté que l'acte du 30 septembre 1996 ne confère à M. B... aucun droit de passage sur le chemin privé de [...].

Par arrêt du 15 septembre 2009, la cour d'appel de Rennes a confirmé ce jugement sauf en ce qu'il a dit que la bande de terre à usage de chemin (...) faisait partie de la parcelle cadastrée section CD, numéro [...], vendue par les consorts Y... à Monsieur Bruno B... le 30 septembre 1996 ainsi qu'à ses dispositions relatives à l'indemnité allouée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et a dit que ledit chemin est exclu des parcelles vendues suivant acte du 30 septembre 1996.

Par acte authentique en date du 12 janvier 2007, les consorts Y... ont cédé à Monsieur C... [...] , cadastré section CD, [...], ainsi que les parcelles de terre cadastrées section CD, [...] (ces deux dernières provenant de la division des parcelles cadastrées section CD, numéros [...] dont le surplus est demeuré la propriété des consorts Y...).

Les consorts B... ainsi que Monsieur C... ont aménagé une voie d'accès à l'angle de la parcelle cadastrée section CD, numéro [...], ouvert sur la route [...] empruntant les parcelles cadastrées section CD, [...](cette dernière étant l'ancien chemin qui traversait le corps de ferme), et rejoignant le chemin existant implanté sur les parcelles cadastrées [...] appartenant aux consorts Y....

Se plaignant de ce que les consorts Y... empêchent l'accès à leur exploitation, Monsieur Bruno B..., Mademoiselle Laurence B..., Madame Anne-M... O... , épouse B..., ainsi que le G... B... les ont fait assigner suivant exploits des 6, 10 et 14 janvier 2014 devant le tribunal de grande instance de Quimper notamment aux fins de voir constater l'enclavement de leurs parcelles, que les fonds appartenant à Monsieur C... (cadastrés [...]) ainsi qu'aux consorts Y... (cadastrés [...]), sis au [...] sont grevés d'une servitude de passage.

Par un jugement du 12 janvier 2016, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de grande instance de Quimper a :

-déclaré irrecevable l'action engagée par Madame Anne-M... O... , Madame Laurence B... et le G... B..., faute d'intérêt à agir ;

-déclaré recevable l'action engagée par Monsieur Bruno B... ;

-dit que la parcelle cadastrée [...], est enclavée ;

-dit que les fonds appartenant à Monsieur C... (cadastrés [...]) ainsi qu'aux consorts Y... (cadastrés [...]), sis au [...] sont grevés d'une servitude légale de passage pour cause d'enclave profitant au fonds appartenant à Monsieur B..., sis au [...] , cadastré [...], sur la base de l'assiette du chemin existant, à savoir entre 5 et 7 mètres de large ;

-dit que cette servitude de passage pour cause d'enclave grevant le fonds appartenant aux consorts Y... (cadastré [...]), sis au [...] profite aux réseaux et canalisations d'électricité et d'eau, outre les compteurs y afférents, présents sur les parcelles cadastrées [...] ;

-débouté Monsieur Bruno B... de sa demande d'enlèvement d'obstacles mis en place sur l'assiette de la servitude ;

-condamné in solidum Madame Françoise Y... épouse X..., Mademoiselle Armelle Y..., Madame Sandra Y... et Monsieur Fabien I... à payer à Monsieur Bruno B... la somme de 3.500 €uros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné in solidum Madame Françoise Y... épouse X..., Mademoiselle Armelle Y..., Madame Sandra Y... et Monsieur Fabien I... à supporter la charge des dépens, à l'exclusion des constats d'huissier établis par Maître E... P... , les 9 octobre 2013 et 11 décembre 2013 et de l'analyse économique réalisée par Monsieur K..., qui ne font pas partie des dépens.

Les consorts Y... ont relevé appel de ce jugement par déclaration du 26 janvier 2016.

Par acte authentique du 5 avril 2013, Monsieur C... a cédé à Monsieur Jean-Marc F... un tiers de droits indivis portant sur la parcelle de terre cadastrée [...] affectée à l'usage de chemin. Les époux B... qui ignoraient ce fait ont assigné Monsieur F... en intervention forcée. Monsieur F... est décédé au [...] , laissant pour lui succéder ses parents, Monsieur Lucien F... et Madame Maryannick F... . Les consorts B... les ont appelés à la cause par la voie de l'intervention forcée.

Vu les conclusions du 9 août 2018, auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et arguments des consorts Y... qui demandent à la cour de :

-les recevoir en leur appel,

-dire irrecevables les demandes de Monsieur Bruno B..., Madame Anne-M... O... , de Mademoiselle Laurence B... et du G... B...,

-constater pour ce faire que ni Madame O... ni Mademoiselle B... ni le G... B... n'ont qualité pour agir,

-les condamner au paiement d'une indemnité de 5 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-constater que les demandes de Monsieur Bruno B... se heurtent à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 5 Juillet 2011 et au principe de concentration des demandes et moyens,

-les déclarer irrecevables ;

A titre subsidiaire,

-les dire non fondées,

-constater que la parcelle cadastrée section [...] n'est nullement enclavée,

-débouter en conséquence les consorts B... et G... B... de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

-recevoir les consorts Y... en leurs demandes reconventionnelles,

-condamner in solidum Monsieur Bruno B..., Madame Anne-M... O... , Mademoiselle Laurence B... et le G... B... au paiement d'une somme de 20000 € à titre de dommages intérêts,

-condamner in solidum M. Bruno B..., Mme Anne-M... O... , Mlle Laurence B... et le G... B... à remettre en place la clôture mise en place par les consorts Y... et ce sous une astreinte de:

*500 € par jour à compter de la signification de la décision à intervenir,

*1 000 € par jour passé le délai d'un mois à compter de cette même signification.

-condamner in solidum Monsieur Bruno B..., Madame Anne-M... O... , Mademoiselle Laurence B... et le G... B... à procéder à l'enlèvement des canalisations d'eau et d'électricité, voire gaz, qui passent dans le sol des parcelles restées la propriété des consorts Y... et ce sous une astreinte de :

*500 € par jour à compter de la signification de la décision à intervenir,

*1 000 € par jour passé le délai d'un mois à compter de cette même signification.

-les condamner aussi in solidum au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

*10 000,00 € pour la première instance,

*10 000,00 € en cour d'Appel.

-constater que Monsieur C... n'est plus le seul propriétaire de la parcelle cadastrée section [...] ,

-débouter Monsieur Bruno B... de l'intégralité de ses demandes à raison du caractère impossible de toute reconnaissance d'un quelconque droit de passage sur les parcelles cadastrées section [...] , [...] et [...], [...] et [...],

-les condamner in solidum aux entiers dépens, lesquels comprendront tous les frais et honoraires du ou des huissiers qui seront chargés de l'exécution du jugement à intervenir.

Vu les conclusions du 12 septembre 2018, auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et arguments des consorts B... qui demandent à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Quimper, le 12 janvier 2016, en ce qu'il a :

'déclaré recevable l'action engagée par M. Bruno B....

'dit que la parcelle cadastrée [...], est enclavée.

'dit que les fonds appartenant à Monsieur C... (cadastrées [...]) ainsi qu'aux consorts Y... (cadastrés [...]), sis au [...] sont grevés d'une servitude légale de passage pour cause d'enclave profitant au fonds appartenant à Monsieur B..., sis au [...] , cadastré [...], sur la base de l'assiette du chemin existant, à savoir entre 5 et 7 mètres de large.

'dit que cette servitude de passage pour cause d'enclave grevant le fonds appartenant aux consorts Y... (cadastré [...]), sis au [...] profite aux réseaux et canalisations d'électricité et d'eau, outre les compteurs y afférents, présents sur les parcelles cadastrées [...].

'condamné in solidum Madame Françoise Y... épouse X..., Mademoiselle Armelle Y..., Madame Sandra Y... et Monsieur Fabien I... à payer à Monsieur Bruno B... la somme de 3.500 €uros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

'condamné in solidum Madame Françoise Y... épouse X..., Mademoiselle Armelle Y..., Madame Sandra Y... et Monsieur Fabien I... à supporter la charge des dépens,

Y ajoutant :

-dire et que le fonds appartenant indivisément pour un tiers à Monsieur Lucien F... et à Madame Maryannick D..., épouse F... , cadastré [...], sis au [...] , est grevé d'une servitude légale de passage pour cause d'enclave profitant au fonds appartenant à Monsieur B..., sis au [...] , cadastré [...], sur la base de l'assiette du chemin existant, à savoir entre 5 et 7 mètres de large.

A titre subsidiaire,

-déclarer Monsieur Bruno B... recevable et bien fondé en son action,

-dire et que le fonds appartenant aux consorts Y... (cadastré [...]), sis au [...] , est grevé d'une servitude de passage par destination du père de famille bénéficiant au fonds appartenant à Monsieur B..., sis au lieudit « [...] » [...]300 quimperle, cadastré [...], sur la base de l'assiette du chemin existant, à savoir entre 5 et 7 mètres de large,

-dire que cette servitude de passage par destination du père de famille grevant le fonds appartenant aux consorts Y... (cadastré [...]), sis au [...] , profite également aux réseaux et canalisations d'électricité et d'eau, outre les compteurs y afférents, présents sur les parcelles cadastrées [...],

-dire que les consorts Y... sont irrecevables en leurs demandes indemnitaires,

-à tout le moins, débouter les consorts Y... de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

-condamner conjointement et solidairement les consorts Y... à verser à Monsieur Bruno B..., à Mademoiselle Laurence B..., à Madame Anne-M... O... , épouse B..., ainsi qu'au G... B..., une somme de 7.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

-condamner conjointement et solidairement les consorts Y... aux entiers dépens en cause d'appel.

Monsieur Pierre-Yves C..., Monsieur Lucien F... et Madame Maryannick F... n'ont pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture était rendue le 18 septembre 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION:

Sur la recevabilité de l'action engagée par Madame Anne-M... O... , Madame Laurence B... et le G... B...:

L'action diligentée tend à la reconnaissance d'une servitude de passage au profit du fonds appartenant à Monsieur Bruno B.... Cette action qui tend à la reconnaissance d'un droit réel n'est ouverte qu'au propriétaire du fonds. Le G... B..., et ses associés non propriétaires, même s'ils sont intéressés par la procédure, n'ont pas qualité pour agir. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la recevabilité de l'action de Monsieur Bruno B...:

Il résulte des dispositions de l'article 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement, ce qui implique que la demande soit entre les mêmes parties.

Les consorts Y... se prévalent de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 5 juillet 2011 et exposent que Monsieur B... s'était déjà prévalu de l'enclave de sa propriété et pas uniquement de la parcelle [...], ou à tout le moins qu'en application du principe de concentration des moyens il devait invoquer l'état d'enclave de la parcelle [...] dans le précédent litige dès lors que ses demandes présentes dérivaient de celles qu'il soutenait en ce qui concerne la parcelle [...] .

Mais dès lors que l'action de Monsieur B... est présentée à l'encontre de Monsieur C... et des consorts F... , qui n'étaient pas partie à l'instance ayant donné lieu à l'arrêt du 5 juillet 2011, infirmant partiellement le jugement du 15 septembre 2009, la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ne peut qu'être écartée.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action engagée par Monsieur B....

Sur l'enclave:

Aux termes de l'article 682 du code civil : «Le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner.»

Aux termes de l'article 697 du même code : «Celui auquel est due une servitude, a droit de faire tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la conserver»

Les parties sont convenues dans l'acte authentique de vente d'une création de servitude au profit de Monsieur B... dans les termes suivants : « Pour permettre à Monsieur B... «acquéreur» d'accéder aux biens présentement vendus, les consorts Y... «vendeur» lui concèdent, ce qu'il accepte, à titre de servitude réelle un droit de passage sur la parcelle cadastrée section [...] mais uniquement le long des parcelles cadastrées section C et [...] et [...] jusqu'à la limite de la parcelle cadastrée section [...] .

Le droit de passage ainsi concédé pourra être exercé en tout temps et en toute heure exclusivement par «l'acquéreur», les membres de sa famille, ainsi que ses domestiques et employés du fonds enclavé, pour se rendre à celui-ci et en revenir. Ce droit de passage est strictement personnel et en conséquence ne pourra être transmis aux héritiers ou aux propriétaires successifs de Monsieur B....

Le droit de passage ainsi concédé profitera également tant à Monsieur Jean-François L... qu'à ses employés et à ses machines agricoles.»

Contrairement à ce que soutient Monsieur B..., cette clause n'institue pas à son profit une simple tolérance mais un droit personnel de nature à lui permettre un passage suffisant jusqu'à la voie publique, et ce pour un usage tant personnel que d'exploitation agricole.

Monsieur B... a fait constater le 9 octobre 2013 par Me E... P... , huissier de justice que le chemin d'environ 2m de large qui correspond à la servitude est bordé de talus boisés, non entretenu et présente des ornières. Mais dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article 697 du code civil que l'obligation d'entretien de la servitude est à la charge de celui qui en profite, Monsieur B... ne peut se prévaloir du caractère impraticable du chemin pour soutenir que la parcelle [...] est enclavée.

Monsieur B... soutient ensuite que ce chemin ne permet pas d'accéder à la parcelle [...]. Il ressort du plan des lieux que ce chemin débouche sur la parcelle [...] qui aspecte elle-même la parcelle [...] contiguë à la parcelle [...]. Il ressort du constat d'huissier que ces parcelles sont en herbe et en l'état, impraticables pour un véhicule. Monsieur E... P... a constaté que la création d'une voie traversant les parcelles [...], [...], [...] et [...], soit depuis la voie publique jusqu'au bâtiment agricole représenterait des travaux importants. Monsieur B... a fait réaliser une étude par Monsieur K..., ingénieur conseil en aménagement foncier près de la chambre d'agriculture du Finistère qui a envisagé un accès depuis la voie publique et qui a estimé que ce chemin nécessitait de déplacer les réseaux ERDF. Toutefois, le tracé envisagé dans l'étude ne suit pas celui qui serait possible à partir des parcelles [...], [...] jusqu'à la parcelle [...]. Monsieur B... ne démontre pas l'impossibilité de se créer un chemin d'accès dans la continuité de la servitude personnelle qui lui est accordée, sur ses parcelles [...] et [...] qui rejoint la parcelle [...]. C'est procédant par un raisonnement similaire que la cour, dans son arrêt du 5 juillet 2011 confirme la motivation du premier juge qui retient qu'il n'est pas démontré que la servitude personnelle de passage ne permet pas d'accéder à la parcelle [...], elle même dans la continuité de la parcelle [...].

Ainsi, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a dit que la parcelle [...] était enclavée; que les fonds cadastrés [...] [...] et [...] appartenant à Monsieur C...; [...] appartenant aux consorts Y... sont grevés d'une servitude légale de passage pour cause d'enclave au profit du fonds appartenant à Monsieur B... et que cette servitude profite aux réseaux.

Monsieur B... sera débouté de ses demandes.

Sur la demande indemnitaire des consorts Y...:

Les consorts Y... produisent un constat d'huissier du 11 décembre 2013 dont il ressort qu'ils avaient érigé une clôture entre les parcelles [...] et [...] et que celle-ci a été partiellement mise au sol, des engins agricoles s'autorisant ainsi à traverser leur propriété. Les consorts B... et G... B... se bornent à demander le rejet des prétentions adverses estimant fondée leur demande principale.

Le constat a été effectué en 2013, soit avant que le jugement du 12 janvier 2016, assorti de l'exécution provisoire, ait dit que les parcelles [...] et [...] étaient grevées d'une servitude. Par voie de conséquence, le passage constaté et la destruction partielle de la clôture étaient illicites.

Ainsi, même s'il n'est pas démontré que les consorts B... et G... B..., qui ont pu se méprendre sur l'étendue de leurs droits, ont diligenté leur action avec une intention de nuire Les consorts Y... seront justement indemnisés du trouble qui leur a été causé dans la jouissance de leur propriété par le versement d'une somme de 2000€.

Sur les demandes remise en état des lieux:

En ce qui concerne la clôture partiellement détruite, les Consorts B... et G... B... seront condamnés à la remise en place de la clôture érigée sur le fonds des consorts Y..., à leurs frais, sous astreinte de 50 € par jour passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt.

Les consorts Y... demandent également la condamnation des consorts B... et G... B... à l'enlèvement des canalisations dans le sous-sol de leur propriété destinées à desservir les bâtiments construits sur la parcelle [...].

Dès lors qu'il n'est rapporté la preuve d'aucune servitude de tréfonds sur les parcelles [...] et [...] au profit des bâtiments construits sur la parcelle [...], les consorts B... et G... B... seront condamnés in solidum à retirer toutes les canalisations souterraines qui ont été illicitement posées en sous sol de ces parcelles. Cette obligation sera assortie d'une astreinte de 10 € par jour passé le délai de huit mois à compter de la signification du présent arrêt.

Sur les dépens:

Aucune circonstance particulière ne justifie que dès le présent arrêt, la totalité des frais d'exécution soient supportés par la partie perdante.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a:

-dit que la parcelle cadastrée [...], est enclavée ;

-dit que les fonds appartenant à M. C... (cadastrées [...]) ainsi qu'aux consorts Y... (cadastrés [...]), sis au [...] sont grevés d'une servitude légale de passage pour cause d'enclave profitant au fonds appartenant à M. B..., sis au [...] , cadastré [...], sur la base de l'assiette du chemin existant, à savoir entre 5 et 7 mètres de large ;

-dit que cette servitude de passage pour cause d'enclave grevant le fonds appartenant aux consorts Y... (cadastré [...]), sis au [...] profite aux réseaux et canalisations d'électricité et d'eau, outre les compteurs y afférents, présents sur les parcelles cadastrées [...] ;

-condamné in solidum Mme Françoise Y... épouse X..., Mlle Armelle Y..., Mme Sandra Y... et M. Fabien I... à payer à Monsieur Bruno B... la somme de 3.500 €uros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné in solidum Mme Françoise Y... épouse X..., Mlle Armelle Y..., Mme Sandra Y... et Monsieur Fabien I... à supporter la charge des dépens, à l'exclusion des constats d'huissier établis par Maître E... P... , les 9 octobre 2013 et 11 décembre 2013 et de l'analyse économique réalisée par Monsieur K..., qui ne font pas partie des dépens.

Statuant à nouveau:

Dit que la parcelle cadastrée [...] sur la commune de Quimperlé appartenant à Monsieur Bruno B... n'est pas enclavée;

Déboute Monsieur B... de ses demandes;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions;

Y ajoutant :

Condamne in solidum les consorts B... et G... B... à payer aux consorts Y... une somme de 2 000 € de dommages et intérêts;

Condamne in solidum les consorts B... et G... B... à remettre en place la clôture érigée sur le fonds des consorts Y..., à leurs frais, sous astreinte de 50 € par jour passé le délai d'un mois à compter de la signification du présent arrêt;

Condamne in solidum les consorts B... et G... B... à retirer toutes les canalisations souterraines qui ont été illicitement posées en sous sol des parcelles [...] et [...] appartenant aux consorts Y... et destinées à alimenter les bâtiments construits sur la parcelle [...]; et ce, sous astreinte de 10 € par jour passé le délai de huit mois à compter de la signification du présent arrêt;

Condamne in solidum les consorts B... et G... B... à verser aux consorts Y... une somme de 2 000 € au titre de leurs frais irrépétibles de première instance et de 3 000 € au titre de leurs frais irrépétibles en cause d'appel.

Condamne in solidum les consorts B... et G... B... aux dépens de première instance et d'appel, sans que ceux-ci soient entendus comme étant par avance la totalité des frais d'exécution.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16/00711
Date de la décision : 27/11/2018

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°16/00711 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-27;16.00711 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award