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13/11/2018 | FRANCE | N°17/02181

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 13 novembre 2018, 17/02181


1ère Chambre





ARRÊT N°441/2018



N° RG 17/02181 - N° Portalis DBVL-V-B7B-NZYM













Mme [P] [C] veuve [D]



C/



DIRECTION RÉGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES [Localité 1]



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours













Copie exécutoire délivrée



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2018





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,

Assesseur : Mada...

1ère Chambre

ARRÊT N°441/2018

N° RG 17/02181 - N° Portalis DBVL-V-B7B-NZYM

Mme [P] [C] veuve [D]

C/

DIRECTION RÉGIONALE DES FINANCES PUBLIQUES [Localité 1]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 13 NOVEMBRE 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 01 Octobre 2018 devant Madame Brigitte ANDRÉ, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 13 Novembre 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [P] [C] veuve [D]

née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Michel ROUMIER, plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Monsieur le Directeur de la Direction Régionale des Finances Publiques [Localité 1]

Pôle fiscal parisien 1 - Pôle juridictionnel judiciaire

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Anne DENIS de la SELARL ANNE DENIS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par la SCP PAVET BENOIST et associés, plaidant, avocat au barreau du MANS

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [D] [D] détenait 558 actions des mille actions composant le capital social de la société Saint Nicolas Distribution (la société SND) tandis que Mme [P] [C], son épouse, en détenait 426, l'ensemble représentant 98,4 % du dit capital. M. [D] était le président directeur général de la société, son épouse, la directrice générale. Par testament du 14 juin 2001, M. [D] [D] a légué à son épouse l'usufruit temporaire de 474 de ses actions pendant une période de six ans courant à compter de son décès, ses cinq enfants en devenant les nus-propriétaires. A son décès survenu le 23 août 2001, Mme [D] a été nommée président directeur général de la société. Elle a, le 31 mars 2006, cédé les titres dont elle était propriétaire tandis que son usufruit des 474 actions léguées par son époux a pris fin le 23 août 2007. Le 31 mars 2006 également, Mme [D] a pris sa retraite, devenant à cette date présidente du conseil de surveillance de la société jusqu'au 24 octobre 2007, date à laquelle elle a été remplacée à cette fonction par sa fille [I], puis à compter du 26 novembre 2010 par son fils [K].

Par acte authentique des 30 et 31 mars 2006, Mme [D] et ses enfants ont souscrit un engagement collectif de conservation des 474 titres pendant une durée de six ans aux fins de bénéficier des dispositions de l'article 885-I bis du code général des impôts prévoyant une exonération de 75 % de leur valeur pour le calcul de l'assiette de l'impôt sur la fortune (engagement dit Pacte Dutreil). Cependant, Mme [R] [D] a cédé ses 94 titres le 10 décembre 2009, Mme [I] [D] ses 95 titres le 2 décembre 2010 et M. [K] [D] ses 95 titres le 26 septembre 2011, de sorte qu'à cette date, les consorts [D] ne possédaient plus que 190 des 474 titres objet du pacte. Ceux-ci ont été cédés en 2014.

Le 6 juillet 2012, l'administration fiscale, constatant que Mme veuve [D] avait omis, dans sa déclaration au titre de l'impôt sur la fortune de l'année 2007, la valeur des 474 actions qu'elle détenait toujours en usufruit au 1er janvier 2007, lui a adressé une proposition de rectification réintégrant la valeur de ces parts pour un montant de 6 741 337 euros. L'imposition supplémentaire a été mise en recouvrement le 24 juin 2013 pour la somme de 177 381 euros comprenant des droits de 107.896 euros, des intérêts de 26 327 euros et des majorations pour manquement délibéré calculés au taux de 40 %, s'élevant à 43 158 euros.

Par acte du 29 août 2013, Mme [D] a assigné l'administration fiscale devant le tribunal de grande instance de Rennes qui l'a, par jugement du 6 mars 2017, déboutée de sa demande et a confirmé la décision du 15 juillet 2013 rejetant sa réclamation, sauf en ce qui concerne la majoration de 40 %, en retenant qu'en l'absence de mauvaise foi, celle-ci n'était pas due.

Mme [D] a relevé appel de ce jugement, demandant à la cour :

- d'ordonner la décharge :

à titre principal, des droits et intérêts de retard mis en recouvrement le 24 juin 2013, soit respectivement 107.896 euros et 26.327 euros,

à titre subsidiaire, des rappels d'impôt de solidarité sur la fortune pour leur montant supérieur à celui assis sur un quart de la valeur des 474 titres de la SA Saint Nicolas Distribution, soit 80.922 euros en droits, à majorer des intérêts de retard y afférents,

à titre infiniment subsidiaire, des rappels d'impôt de solidarité sur la fortune pour leur montant supérieur à celui assis sur un quart de la valeur de 190 des 474 titres susvisés, soit 32 437 euros en droits à majorer des intérêts de retard y afférents,

- de condamner l'intimée aux entiers dépens de première instance et d'appel,

- de condamner l'Etat, Direction générale des Finances Publiques, à lui verser une somme de 5.000 euros HT, majorée de la TVA au taux en vigueur, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En réponse, la Direction des finances publiques conclut au débouté des demandes de Mme [D] et à la confirmation du jugement. Elle sollicite une somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées le 30 août 2018 par le Directeur régional des finances publiques [Localité 1] et le 3 septembre 2018 par Mme [D].

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mme [D] ne soulève aucun moyen à l'appui de sa demande d'exonération totale des impositions litigieuses de sorte que sa demande principale ne peut qu'être rejetée. En effet l'argumentation de Mme [D] porte uniquement sur l'exonération de 75 % de la valeur des titres qu'elle détenait en usufruit et ce, sur trois fondements juridiques alternatifs :

- l'article 885 I quater II du CGI, en sa qualité de conjoint survivant de son mari ayant bénéficié de l'exonération de l'article 8850 bis ;

- l'article 885 I quater II du CGI, à titre personnel,

- l'article 885 I bis du CGI.

Etant rappelé que le litige ne concerne que son imposition sur la fortune de l'année 2007, sa revendication porte principalement, sur le bénéfice de l'exonération partielle, à concurrence de 75 %, de la valeur des 474 actions qu'elle détenait en usufruit au 1er janvier 2007 et, subsidiairement, sur l'exonération partielle à concurrence de75 % de la valeur des 190 titres qui n'ont été cédés qu'en 2014. Ces réclamations, tant principale que subsidiaire, seront successivement examinées au regard des trois fondements invoqués.

I Sur l'application du II de l'article 885 I quater du GGI

L'article 885 I quater énonce :

"I. Les parts ou actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ne sont pas comprises dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune, à concurrence des trois quarts de leur valeur, lorsque leur propriétaire exerce son activité principale dans cette société comme salarié ou mandataire social, ou y exerce son activité principale lorsque la société est une société de personnes soumise à l'impôt sur le revenu visée aux articles 8 à 8 ter.

L'exonération est subordonnée à la condition que les parts ou actions restent la propriété du redevable pendant une durée minimale de six ans courant à compter du premier fait générateur au titre duquel l'exonération a été demandée...

II. Les parts ou actions mentionnées au I et détenues par le redevable depuis au moins trois ans au moment de la cessation de ses fonctions ou activités pour faire valoir ses droits à la retraite sont exonérées, à hauteur des trois quarts de leur valeur, d'impôt de solidarité sur la fortune, sous réserve du respect des conditions de conservation figurant au deuxième alinéa du I.

III. En cas de non-respect de la condition de détention prévue au deuxième alinéa du I et au II par suite d'une fusion ou d'une scission au sens de l'article 817 A, l'exonération partielle accordée au titre de l'année en cours et de celles précédant ces opérations n'est pas remise en cause si les titres reçus en contrepartie sont conservés jusqu'au même terme. Cette exonération n'est pas non plus remise en cause lorsque la condition prévue au deuxième alinéa du I et au II n'est pas respectée par suite d'une annulation des titres pour cause de pertes ou de liquidation judiciaire.

IV. L'exonération partielle prévue au présent article est exclusive de l'application de tout autre régime de faveur."

A) Sur l'application du II de l'article 885 I quater en qualité de conjoint survivant

Il n'est pas discuté que le fait générateur de l'impôt litigieux se situe au 1er janvier 2007.

Mme [D] demande l'application d'une instruction administrative publiée le 15 mai 2007, interprétant la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005, en vigueur au 1er janvier 2006, instaurant l'article 885 I quater du CGI, qui étend, sous certaines conditions, au conjoint survivant d'un redevable décédé le bénéfice du II de cette disposition. Elle fait valoir que cette instruction a certes été publiée le 15 mai 2007, soit postérieurement au fait générateur de l'impôt le 1er janvier 2007, mais que sa publication est antérieure à l'expiration, le 15 juin 2007, du délai de déclaration et qu'elle était destinée à éclairer le redevable pour l'établissement de cette déclaration.

Il est effectivement constant que les instructions et circulaires de l'administration fiscale ont pour but d'expliciter le contenu des lois et conventions et d'en combler les lacunes. Aussi lorsqu'elles accordent aux contribuables un traitement plus favorable que celui qui, en droit strict, découle de la loi (en l'occurrence celle du 31 décembre 2005), leur interprétation peut être revendiquée immédiatement par le redevable.

Le bulletin officiel des impôts (BOI) n° 70 du 15 mai 2007 expose que :

'2 Dans le cadre du dispositif de l'article 885 I quater, il a été admis (bulletin officiel des impôts (BOI) 7 S-3-06 § 52) que, dans l'hypothèse du décès du redevable qui remplissait la condition de fonction ou qui avait la qualité de retraité, pendant le délai de conservation de six ans, le conjoint survivant puisse continuer à bénéficier de l'exonération partielle, à condition qu'il conserve les titres jusqu'au terme du délai initialement prévu. En outre, il a été précisé qu'au-delà de cette période de six ans, l'époux survivant continuera à bénéficier de l'exonération, tant qu'il conservera les titres.

3 Afin de renforcer la stabilité du capital social des entreprises, il est admis que lorsque les titres sont conservés par l'époux survivant, cette mesure de faveur s'applique au conjoint survivant d'un redevable décédé qui bénéficiait du régime des biens professionnels prévu par l'article 885 O bis et qui remplissait, au 1er janvier de l'année du décès, toutes les conditions prévues par l'article 885 I quater pour pouvoir bénéficier de l'exonération partielle des trois quarts.

4. En conséquence, dans cette hypothèse, dès l'année suivant le décès du redevable dont les titres étaient exonérés en application des dispositions de l'article 885 O bis précité, l'époux survivant pourra bénéficier de l'exonération partielle prévue par l'article 885 I quater, sous réserve que soient satisfaites l'ensemble des conditions d'application de ce dispositif et notamment celle relative à la conservation des titres pour lesquels l'exonération partielle est demandée pendant six ans à compter de la première année d'application du régime de faveur.'

Mme [D] demande l'application du régime de faveur à compter du 1er janvier 2007, étant rappelé qu'elle a bénéficié du régime d'exonération totale accordé par l'article 885 O bis du CGI pour les années 2002 à 2006. C'est donc à compter du 1er janvier 2007, première année d'application du régime de faveur revendiqué, qu'il convient d'apprécier les conditions d'application de cette doctrine administrative, s'agissant notamment de la condition relative à la durée de conservation des titres pendant six ans énoncée par l'article 885 I quater alinéa 2.

Or à compter du 23 août 2007, Mme [D] n'avait plus de droits sur les titres litigieux de sorte qu'elle ne remplissait pas la condition de conservation des dits titres, laquelle doit être appréciée dans la personne du redevable de l'impôt lui-même. Ceci résulte de l'application de l'alinéa 2 du texte et de son interprétation par l'instruction en cause selon laquelle l'exonération est subordonnée à la condition que les parts ou actions restent la propriété du redevable pendant une durée minimale de six ans courant à compter du premier fait générateur au titre duquel l'exonération a été demandée.

En effet, la doctrine administrative invoquée, d'interprétation littérale, n'opère pas de distinction selon les motifs pour lesquels l'usufruitier redevable de l'impôt n'est plus titulaire de droits sur les titres de sorte que Mme [D] ne peut en extrapoler l'application en revendiquant l'accomplissement de la condition en la personne de ses descendants devenus propriétaires des actions à compter du 23 août 2007.

Dès lors non seulement, Mme [D] ne peut invoquer l'exonération, à concurrence de 75 %, de la valeur des titres cédés par leurs propriétaires dans le délai de six ans courant à compter du 1er janvier 2007 mais encore, elle ne peut se prévaloir de la dite exonération pour les 190 actions demeurées la propriété de deux de ses enfants pendant ce délai dès lors qu'elle-même, seule redevable de l'impôt, n'en était plus usufruitière depuis le 23 août 2007 et ne pouvait donc prétendre les avoir personnellement conservés.

B) Sur l'application du II de l'article 885 I quater à titre personnel

Il sera rappelé que la disposition invoquée est ainsi rédigée :

'II. Les parts ou actions mentionnées au I et détenues par le redevable depuis au moins trois ans au moment de la cessation de ses fonctions ou activités pour faire valoir ses droits à la retraite sont exonérées, à hauteur des trois quarts de leur valeur, d'impôt de solidarité sur la fortune, sous réserve du respect des conditions de conservation figurant au deuxième alinéa du I.'

Mme [D] a pris sa retraite le 31 mars 2006. Elle pouvait donc bénéficier de ces dispositions applicables à compter du 1er janvier 2006 à la condition toutefois de conserver les actions pendant une durée minimale de six ans courant à compter du premier fait générateur au titre duquel elle demandait l'exonération, soit le 1er janvier 2007.

Or à compter du 23 août 2007, Mme [D] n'avait plus de droits sur les titres litigieux de sorte qu'elle ne remplissait pas la condition de conservation des titres figurant au deuxième alinéa du I de l'article 885 I quater laquelle doit être appréciée dans la personne du redevable de l'impôt lui-même.

Il s'ensuit que Mme [D] ne peut invoquer l'exonération, à concurrence de 75 %, de la valeur des titres cédés par leurs propriétaires dans le délai de six ans courant à compter du 1er janvier 2007 mais encore, elle ne peut se prévaloir de la dite exonération pour les 190 actions demeurées la propriété de deux de ses enfants pendant ce délai dès lors qu'elle-même, seule redevable de l'impôt, n'en était plus usufruitière depuis le 23 août 2007 et ne pouvait donc prétendre les avoir personnellement conservés.

II Sur l'application du II de l'article 885 I bis du CGI

Aux termes de l'article 885 I bis du CGI dans sa version en vigueur au 1er janvier 2007 applicable jusqu'au 26 septembre 2007 :

'Les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ne sont pas comprises dans les bases d'imposition à l'impôt de solidarité sur la fortune, à concurrence des trois quarts de leur valeur si les conditions suivantes sont réunies :

a. Les parts ou les actions mentionnées ci-dessus doivent faire l'objet d'un engagement collectif de conservation pris par le propriétaire, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit avec d'autres associés ;

b. L'engagement collectif de conservation doit porter sur au moins 20 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 % des parts ou actions de la société.

Ces pourcentages doivent être respectés tout au long de la durée de l'engagement collectif de conservation qui ne peut être inférieure à six ans. Les associés de l'engagement collectif de conservation peuvent effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l'engagement.

La durée initiale de l'engagement collectif de conservation peut être automatiquement prorogée par disposition expresse, ou modifiée par avenant sans pouvoir être inférieure à six ans. La dénonciation de la reconduction doit être notifiée à l'administration pour lui être opposable.

L'engagement collectif de conservation est opposable à l'administration à compter de la date de l'enregistrement de l'acte qui le constate...

c. L'un des associés mentionnés au a exerce effectivement dans la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation son activité professionnelle principale si celle-ci est une société de personnes visée aux articles 8 et 8 ter, ou l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis lorsque celle-ci est soumise à l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option ;

d. La déclaration visée à l'article 885 W doit être appuyée d'une attestation de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation certifiant que les conditions prévues aux a et b ont été remplies l'année précédant celle au titre de laquelle la déclaration est souscrite ;

e. En cas de non-respect de la condition prévue au a par l'un des signataires, l'exonération n'est pas remise en cause à l'égard des autres signataires, dès lors qu'ils conservent entre eux leurs titres jusqu'au terme initialement prévu et que la condition prévue au b demeure respectée. Dans le cas où cette dernière condition n'est pas respectée, l'exonération pour l'année en cours et celles précédant la rupture n'est pas remise en cause pour les autres signataires s'ils concluent, dans un délai d'un an, un nouvel engagement collectif de conservation, incluant a minima les titres soumis à l'engagement précédent, éventuellement avec un ou plusieurs autres associés, dans les conditions prévues au a et au b.

...

Au-delà du délai de six ans, l'exonération partielle accordée au titre de la période d'un an en cours lors du non-respect de l'une des conditions prévues au a ou au b est seule remise en cause.

Mme [D], alors usufruitière des titres, et ses cinq enfants nus-propriétaires, ont signé, les 30 et 31 mars 2006 un engagement de conservation des titres pendant six ans, soit jusqu'au 31 mars 2012. Mais cet engagement n'a pas été respecté par trois des cinq enfants signataires du pacte devenus plein propriétaires des titres puisque :

- [R] [D] a cédé ses 94 actions le 10 décembre 2009,

- [I] [D] a cédé ses 95 actions le 2 décembre 2010,

- [K] [D] a cédé ses 95 actions le 26 septembre 2011.

En outre à compter du 2 décembre 2010, la condition imposée par l'alinéa b de cet article relative au pourcentage minimum d'actions concernées par l'engagement collectif n'était plus respectée, puisque du fait des deux premières cessions intervenues, le pourcentage détenu par les associés non vendeurs devenait inférieur au seuil de 34 %. Les signataires du pacte ayant respecté leur engagement ne pouvaient donc se prévaloir de l'article e du dit article.

Cependant, Mme [D] estime pouvoir bénéficier rétroactivement de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 qui a réduit de six ans minimum à deux ans minimum, la durée minimale de conservation collective des titres, laquelle doit être ensuite suivie d'un engagement individuel de conservation des dits titres pour ouvrir le bénéfice de l'exonération partielle au redevable de l'impôt.

Mais la durée de l'engagement collectif souscrit les 30 et 31 mars 2006 n'était pas remise en cause par la loi du 24 décembre 2007, laquelle n'a pas réduit automatiquement à deux ans la durée minimale des engagements de conservation en cours. Pour bénéficier de l'application de ces nouvelles dispositions, les associés devaient révoquer l'engagement en cours et souscrire un nouvel engagement d'une durée plus courte qui n'était opposable à l'administration qu'à compter de son enregistrement, ce qu'ils n'ont pas fait.

Mme [D] ne justifie pas dès lors pouvoir bénéficier d'une exonération sur le fondement de ces dispositions, même à les supposer applicables rétroactivement au 1er janvier 2007. A titre superfétatoire, il sera relevé qu'en cas de conclusion d'un nouveau pacte réduisant la durée de l'engagement collectif de conservation des titres, elle serait tombée sous le coup de l'article c de l'article 815 I bis dans sa nouvelle rédaction laquelle énonce qu'à compter de la date d'expiration de l'engagement collectif, l'exonération partielle est subordonnée à la condition que les parts ou actions restent la propriété du redevable, ce qui n'était plus le cas pour elle depuis le 23 août 2007.

L'appel formé par Mme [D] sera donc intégralement rejeté.

PAR CES MOTIFS , LA COUR :

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 6 mars 2017 par le tribunal de grande instance de Rennes ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [P] [C] veuve [D] à payer à M. Le Directeur régional des finances publiques [Localité 1] une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [P] [C] veuve [D] aux dépens de la procédure d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17/02181
Date de la décision : 13/11/2018

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°17/02181 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-13;17.02181 ?
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