2ème Chambre
ARRÊT N°427
N° RG 15/04485
M. Jean-Jacques X...
Mme Laure X... née Y...
C/
Société BPO
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me Hervé Z...
Me Hélène A...
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 7 SEPTEMBRE 2018
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN,
Assesseur : Madame Isabelle LE POTIER, Conseiller,
Assesseur : Madame Pascale DOTTE-CHARVY, Conseiller, rédacteur,
GREFFIER :
Monsieur Régis ZIEGLER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 25 mai 2018, devant Madame Pascale DOTTE- CHARVY, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 7 septembre 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur Jean-Jacques X...
né le [...] à PONT L'ABBÉ
[...]
Madame Laure X... née Y...
née le [...] à CARHAIX PLOUGUER
[...]
Représentés par Me Hervé Z... de la SELARL AVOCATS OUEST CONSEILS, avocat au barreau de QUIMPER
INTIMÉE :
La société coopérative BPO
dont le siège social est [...]
Représentée par Me Hélène A... de la B...., avocat au barreau de QUIMPER
FAITS et PROCÉDURE :
Selon offre acceptée le 18 décembre 2002, la société Banque Populaire de l'Ouest (la BPO) a consenti aux époux Jean-Jacques X... et Laure Y... deux prêts immobiliers en vue de l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison à Loctudy :
- un prêt à taux zéro, d'un montant de 18293,88euros et d'une durée de 216 mois,
- un prêt habitat d'un montant de 153985euros d'une durée de 240 mois, au taux de 5,20% l'an et taux effectif global annuel de 5,321%.
Ces prêts ont été réitérés dans l'acte notarié du 29 mars 2003 aux termes duquel les époux X... ont acquis un terrain à bâtir moyennant le prix principal de 32000euros, payé par la totalité du prêt à taux zéro et le surplus (13706,12euros) par partie du prêt habitat.
Selon offre acceptée le 09 juin 2004, la BPO a consenti aux époux X... un prêt habitat modulable de 36862euros, d'une durée de 180 mois et au taux annuel de 4,10% aux fins de financer des travaux complémentaires à la construction de leur résidence principale.
Par avenant du 16 janvier 2011, la durée du prêt habitat n°91154078 de 153985euros initialement prévue (240 mensualités) a été prolongée de 60 mois.
Par courrier du 19 mars 2012, le conseil des époux X... a fait valoir auprès de la banque que les taux effectifs globaux des prêts de 153985euros consenti le 23 mars 2003 et de 36862euros consenti le 21 mai 2004 étaient erronés et l'a interrogée quant à une régularisation de la situation, à savoir une réduction des sommes restant dues, ce que la BPO a refusé par courrier du 27 mars 2012.
Les époux X... ont fait assigner la banque par acte du 24 mai 2013, et par jugement en date du 09 décembre 2014, le tribunal de grande instance de Quimper a:
- déclaré prescrite l'action en déchéance du droit aux intérêts concernant le prêt n°91154078,
- déclaré recevable l'action en déchéance du droit aux intérêts concernant le prêt n°01170335,
- débouté les époux X... de leur demande au titre du second prêt,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,
- condamné in solidum les époux X... à payer la somme de 1200euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance.
Les époux X..., appelants, demandent à la cour d'infirmer le jugement dont appel et de:
- débouter la BPO de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,
- prononcer la déchéance du droit aux intérêts des deux prêts, et en conséquence :
- ordonner à la banque de rectifier les tableaux d'amortissement en détaillant la créance en distinguant capital et intérêts et de reconstituer cette créance par l'application du seul taux légal après imputation des intérêts conventionnels perçus sur le capital, et ce sous astreinte de 200euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir,
- condamner la BPO à leur verser la somme de 4000euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La BPO conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en demande de déchéance du droit aux intérêts, en tout état de cause débouter les époux X... de leurs demandes et les condamner à payer la somme de 3000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées pour les époux X... le 11 octobre 2017, et pour la BPO le 19 octobre 2015.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 mars 2018.
SUR CE :
Concernant le prêt habitat n°91154078 :
Par acte authentique du 29 mars 2003, intégrant l'offre du prêt du 05 décembre 2002 acceptée par les époux X... le 18 décembre 2002 et par ailleurs annexée à l'acte, le BPO leur a consenti un prêt immobilier de 153985euros sur une durée de 240 mois.
L'offre de prêt mentionne le taux d'intérêt, son coût total, les frais de dossier et de garantie, le taux effectif global annuel et de période ; il est précisé au titre des garanties une promesse de cession de deux contrats d'assurance décès invalidité à souscrire à 100% par chacun des emprunteurs auprès d'une compagnie Afi Europe, ladite promesse devant être régularisée dans un délai de deux mois suite au décaissement du prêt.
Le point de départ de la prescription de l'action doit être fixé au jour de l'acceptation de l'offre, qui contient tous les éléments de calcul du taux effectif global, soit le 18 décembre 2002 ; le délai pour prescrire, fixé à 10 ans par l'article L.110-4 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable, est désormais de 5 ans ; en application de l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, les dispositions qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure ; le délai de prescription était en tout état de cause expiré depuis le 18 décembre 2012 lorsque les époux X... ont fait assigner la banque le 24 mai 2013; il en serait de même en retenant la date de l'acte notarié (29 mars 2003) comme le soutiennent les appelants.
Enfin l'avenant du 16 janvier 2011 porte uniquement sur la durée du prêt, prolongée de 60 mois ; il précise ne pas entraîner novation au contrat initial, toutes les autres clauses et conditions contenues dans l'acte étant maintenues; ledit avenant n'a par conséquent pas fait courir un nouveau délai de prescription comme le soutiennent les appelants, et la décision dont appel sera confirmée sur ce chef.
Concernant le prêt n°01170335:
Les époux X... ont accepté le 09 juin 2004 l'offre d'un prêt habitat modulable de 36862euros, d'une durée de 180 mois et au taux annuel de 4,10% aux fins de financer des travaux complémentaires à la construction de leur résidence principale.
Les articles du code de la consommation cités ci-dessous sont ceux du code dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 1er juillet 2010, applicable au contrat de l'espèce dont l'offre a été émise avant le 1er mai 2011.
Selon l'article L.313-1 du code de la consommation, pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects ; toutefois en matière de crédit immobilier, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat.
L'article R.313-1 précise que le TEG est un taux annuel, proportionnel au taux de période à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires pour les crédits immobiliers.
En l'espèce les conditions de l'offre de prêt précisent que le coût des intérêts est de 12549,80euros au taux de 4,10% l'an, le coût de l'assurance de 4644euros au taux de 0,84%, les frais de dossier de 188 et la commission de caution de 276,47euros, soit un taux effectif global de 4,287930% et de période de 0,357327%.
Pour rejeter la demande des époux X..., le tribunal a considéré que les emprunteurs s'appuyaient sur une étude réalisée par M. C..., analyste en mathématiques, établie de façon non contradictoire et non corroborée par un quelconque autre élément de preuve, par conséquent insuffisante pour rapporter la preuve du caractère erroné du taux effectif global, et a rappelé à juste titre que cette étude incluait dans son calcul du taux effectif global l'assurance invalidité décès, alors que ce coût ne doit pas être pris en compte dès lors que la souscription de cette assurance est facultative, ce qui est expressément mentionné dans l'offre ; par conséquent la souscription de cette assurance n'est pas une condition de l'octroi du prêt.
Devant la cour, les appelants produisent une nouvelle étude de M. C..., qui convient à nouveau de l'exactitude du taux effectif global (page 6) avec les frais de dossier (188euros) et de commission de caution (276,47euros), mais de son inexactitude si on y inclut le coût de la part sociale (8euros) et du 'fonds de garantie Socamio' (460,78euros), sans le paiement desquels le prêt n'aurait pas été accordé selon lui, et pour parvenir à un taux effectif global erroné de 4,481%, il réduit sans explication le montant net du prêt à 35928,75euros.
Il ressort de ces éléments que les appelants sont défaillants à justifier d'une erreur du taux effectif global qui serait de plus supérieure à la décimale prescrite par l'article R.313-1 du code de la consommation.
Ce faisant, la décision dont appel sera également confirmée sur ce chef.
Sur les dépens et les frais :
Les dépens et frais irrépétibles de première instance seront confirmés; succombant à l'appel qu'ils ont interjeté, les époux X... seront tenus aux dépens d'appel, déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civileet devront verser à la BPO une somme supplémentaire de 1700euros.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Confirme le jugement dont appel dans toutes ses dispositions;
Y ajoutant ;
Condamne solidairement les époux Jean-Jacques X... et Laure Y... aux dépens de la procédure d'appel, et à payer à la société Banque Populaire de l'Ouest la somme de 1700euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de toutes autres demandes.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,