La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2018 | FRANCE | N°14/07256

France | France, Cour d'appel de Rennes, 4ème chambre, 28 juin 2018, 14/07256


4ème Chambre





ARRÊT N° 269



N° RG 14/07256





















Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 JUIN 2018





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:



Président : Monsieur Louis-Denis HUBERT, Président de chambre,

Assesseur : Madame Andrée GEORGEAULT, Conseiller,



Assesseur : Madame Catherine PELTIER-MENARDAIS, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé





DÉBATS :



A l'audience publique du 29 Mai 2018

devant Monsieur Louis-Denis HUBERT, magistrat rapporteur, tenant seul l'a...

4ème Chambre

ARRÊT N° 269

N° RG 14/07256

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 JUIN 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Président : Monsieur Louis-Denis HUBERT, Président de chambre,

Assesseur : Madame Andrée GEORGEAULT, Conseiller,

Assesseur : Madame Catherine PELTIER-MENARDAIS, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 29 Mai 2018

devant Monsieur Louis-Denis HUBERT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 28 Juin 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

Société QUARTA

SARL venant aux droits de la SARL TERRAGONE prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

Représentée par Me Z... A... de la SCP PHILIPPE COLLEU, Z... A..., Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Luc FURET, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

INTIMÉS :

SARL ALAN TRISKELL AMENAGEUR LOTISSEUR (A.T.A.L)

agissant poursuites et diligences de son gérant Monsieur Pierre B... domicilié [...]

Représentée par Me Michel PEIGNARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES

Maître C...

pris en sa qualité de mandataire judiciaire de la Société ALAN TRISKELL AMENAGEUR LOTISSEUR

assigné en reprise d'instance

[...]

Représenté par Me Michel PEIGNARD, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VANNES

FAITS ET PROCÉDURE

Par deux conventions de prestations de services du 30 mars 2007 signées le 13 avril 2007 par la société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (la société ATAL), maître de l'ouvrage, cette dernière a confié à Monsieur Z... X..., géomètre-expert, une « mission urbanisme et foncier» et une « mission ingénierie - maîtrise d''uvre des travaux de viabilité » pour la création de deux lotissements : le premier dénommé « Résidence de Botnoche » à BAUD, et le second dénommé «Résidence Er Verger » à CAMORS.

Pour les prestations relatives à la « Résidence de Botnoche » à BAUD, deux factures d'un montant total de 62'030,54 euros TTC (33'834,84 et 28'195,70) ont été émises le 27 décembre 2007 par la société X... & ASSOCIÉS succédant par cession depuis le 1er mai 2007 à Monsieur Z... X... parti en retraite.

Pour les prestations relatives à la « Résidence Er Verger » à CAMORS, deux factures d'un montant total de 19'276,53 euros TTC (10'297,56 et 8978,97) ont été émises le 7 avril 2011 la société TERRAGONE venant aux droits, par cession, depuis le 22 décembre 2010, de la société X... & ASSOCIÉS.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 7 avril 2011, la société TERRAGONE a mis en demeure la société ATAL de lui régler ses prestations relatives à l'opération « Résidence Le Triskell » sur la commune de CAMORS.

Le 19 avril 2011, la société TERRAGONE a mis en demeure la société ATAL de lui régler les factures du 27 décembre 2007.

Par courrier du 19 mai 2011, la société ATAL s'est opposée au règlement des factures en l'absence de réitération des actes authentiques.

Le 19 octobre 2011, la société TERRAGONE a fait assigner la société ATAL en paiement des quatre factures au titre des intérêts au taux légal à compter des mises en demeure et capitalisation des intérêts.

Par jugement en date du 23 juillet 2014 le tribunal de commerce de Vannes a

- débouté la société TERRAGONE de toutes ses demandes, fins et conclusions pour les causes sus-énoncées ;

-débouté la société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive pour les causes sus-énoncées ;

- laissé à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles exposés par elle ;

- condamné la société TERRAGONE aux entiers dépens de l'instance ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes fins et conclusions ;

- arrêté et liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 70,20 euros TTC dont TVA 11,70 euros.

La société TERRAGONE a interjeté appel de ce jugement le 5 septembre 2014.

Par jugement rendu par le tribunal de commerce de Vannes le 22 février 2017, la société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) a été placée en redressement judiciaire, Maître C... étant désigné en qualité de mandataire judiciaire.

Le 3 mai 2017, la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE a déclaré sa créance à titre chirographaire pour la somme totale de 86'631,06 euros outre intérêts.

Par acte d'huissier du 26 mai 2017, la SARL QUARTA anciennement dénommée TERRAGONE a fait assigner Maître C... ès qualités de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR.

Les parties ont conclu.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 3 avril 2018.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions en date du 30 août 2017 de la société QUARTA SARL venant aux droits de la société TERRAGONE qui demande à la cour de

Vu les dispositions de l'article 1134, 1147 du Code Civil,

Vu les deux contrats en date du 30 mars 2007,

- Réformer le jugement du Tribunal de Commerce de Vannes en date du 23 Juillet 2014,

Statuant à nouveau,

- Dire et juger que la Société QUARTA venant aux droits de la Société TERRAGONE recevable et fondée dans ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de Maître C..., mandataire judiciaire, ès qualité de mandataire judiciaire de la Société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL).

- Dire et juger que la Société QUARTA venant aux droits de la Société TERRAGONE est bien fondée à solliciter que la somme de 62.030,54 € soit inscrite au passif du redressement judiciaire de la Société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) en règlement de ses factures en date du 27 décembre 2007 outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 19 avril 2011.

- Dire et juger que la Société QUARTA venant aux droits de la Société TERRAGONE est bien fondée à solliciter que la somme de 19.276,53 € soit inscrite au passif du redressement judiciaire de la Société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) en règlement de ses facture en date des 07 avril 2011 outre intérêts au taux légal à compter du Jugement à intervenir.

- Ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code Civil.

- Débouter la Société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) de son appel incident,

- Dire et juger que la Société QUARTA venant aux droits de la Société TERRAGONE est bien fondée à solliciter que la somme de 5.000,00 € soit inscrite au passif du redressement judiciaire de la Société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

- Dire et juger que la Société QUARTA venant aux droits de la Société TERRAGONE est bien fondée à solliciter que les entiers dépens de première instance et d'appel soient inscrits au passif du redressement judiciaire de la Société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) qui seront recouvrés par la SCP COLLEU LE COULS BOUVET conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.

L'argumentation de la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE est pour l'essentiel la suivante :

- Les échanges de courriels des 24 janvier et 16 avril 2009 prouvent que la société ATAL n'a pas réglé les factures au prétexte de l'intégration de nouveaux associés ;

- les « échéanciers de règlement » ne constituent qu'une modalité de règlement des prestations ;

- les « échéanciers de règlement » ne doivent pas être dénaturés en conditions suspensives puisque la société TERRAGONE n'était ni associée, ni intéressée aux résultats financiers des opérations et la signature des actes authentiques ne lui aurait permis que de poursuivre normalement son travail et d'être rémunérée pour celui-ci ;

- pour l'opération « Er Verger » à CAMORS, le transfert de l'autorisation de lotir à la société ASCALON FONCIER en date du 16 juillet 2008 a été fait à la demande conjointe de cette société et de la société ATAL et non de la société TERRAGONE venant aux droits du cabinet X... ; Monsieur Z... X... est également gérant de la société ASCALON qui a été dissoute le 3 novembre 2010 ; la société TERRAGONE n'a pas été appelée à consentir à ce transfert comme elle aurait dû l'être si elle avait été associée au projet ; ce transfert n'est pas opposable à la société TERRAGONE en application de l'article 1275 du Code civil ; le 14 février 2008, soit cinq jours avant la délivrance de l'autorisation de lotir, une convention de passage en terrain privé pour le raccordement au réseau existant rue du Presbytère a été signée entre la société ATAL et la SCI DU PENHER de sorte que le projet pouvait être poursuivi et que la prétendue condition suspensive n'a défailli que du seul fait de la société ATAL ;

-pour l'opération « [...], l'exécution de sa mission par la société cabinet X... est prouvée par la convention signée par la société ATAL avec GRDF ainsi que par le choix de la société SDEL et la fixation du planning d'intervention ; la mission urbanisme a été réalisée par l'obtention d'un permis purgé de recours et la société X... a effectué l'appel d'offres travaux et la consultation des entreprises ; la société ATAL a décidé de ne pas signer les marchés en abandonnant le dossier alors que Monsieur Z... X..., par courriel du 6 février 2008, a donné l'instruction de programmer les travaux de la société SDEL entre le 15 juin et le 30 juillet 2008.

Vu les conclusions en date du 11 septembre 2017 de la société TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) et de Maître C... mandataire judiciaire de la société ATAL qui demandent à la cour de

Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil,

- CONFIRMER le jugement du tribunal de commerce de Vannes du 23 juillet 2014 en ce qu'il a débouté la société TERRAGONE de toutes ses demandes, fins et conclusions;

Y additant,

-CONDAMNER la société QUARTA au paiement de la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts;

- LA CONDAMNER au paiement de la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- DÉBOUTER la société QUARTA de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- LA CONDAMNER aux entiers dépens tant de première instance que d'appel, avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) et Maître C... mandataire judiciaire de la société ATAL soutiennent pour l'essentiel que :

- les « échéanciers de règlement » sont des conditions suspensives ; le cabinet X... a accepté de prendre le risque de n'être pas réglé de ses honoraires en l'absence de signature de l'acte authentique.

* sur l'opération « Er Verger » à CAMORS :

- malgré la décision préfectorale du 31 octobre 2006, le cabinet Z... X... a obtenu la modification du schéma d'organisation de l'opération à CAMORS avant la signature de la convention de prestation de services en date des 30 mars et 13 avril 2007;

après la reprise du cabinet X... par la société X... & ASSOCIÉS, un refus d'autorisation de lotir sur le terrain « Er Verger » a été opposé par la commune de CAMORS le 27 juillet 2007 ; l'autorisation de lotir n'a été obtenue le 19 février 2008 que « sous condition du raccordement aux eaux usées Rue du Vieux Presbytère » alors que la SCI DU PENHER, voisine, refuse tout passage sur son terrain tant qu'elle n'aura pas elle-même obtenu son arrêté de lotir terrain ; ce refus a interdit la réalisation du projet ; la convention conclue avec la SCI du PENHER n'a pas permis d'obtenir un arrêté de permis d'aménager de sorte que les travaux de raccordement n'ont jamais pu être réalisés; en obtenant à sa demande, le 16 juillet 2008, le transfert du permis de lotir au bénéfice de la société ASCALON FONCIER, le cabinet X... & ASSOCIÉS a accepté le transfert de débiteur ; comme l'indique le courrier du 17 mai 2011 de la société ATAL à la société TERRAGONE, Monsieur Y..., cogérant de la société TERRAGONE, s'était engagé à n'émettre aucune facture en raison de l'impossibilité de réitérer l'acte authentique ; les factures n'ont été émises que le 7 avril 2011 c'est-à-dire bien après le transfert de l'autorisation de lotir;

- la société TERRAGONE ne prouve pas avoir réalisé la mission d'ingénierie par établissement du projet du dossier de consultation des entreprises ; aucune de ces deux pièces n'est versées aux débats ; le bilan prévisionnel du 13 juin 2002 de la société X... & ASSOCIÉS relatifs à l'opération « Er Verger » ne fait état d'aucune entreprise ; la seconde facture F-GC-1104-11150 de 8978,97 euros TTC relative à la mission « Ingénierie et maîtrise d''uvre VRD » n'est donc pas due ;

* sur l'opération « Résidence de Botnoche »

- les factures n'ont été émises que le 27 décembre 2007,c'est-à-dire postérieurement à la reprise du dossier par le cabinet X... & ASSOCIÉS ; le 19 juin 2008, Monsieur Y... de la société TERRAGONE a admis l'impossibilité de poursuivre l'opération et de facturer ses prestations ; le 6 avril 2011 la société TERRAGONE a obtenu un permis d'aménager au nom des propriétaires du terrain, preuve que la société ATAL n'en était pas propriétaire ; l'échange de courriels en janvier et avril 2009 est postérieur à l'émission des factures de 2007 et antérieur aux factures de 2011 ; il ne prouve pas que la société n'a pas renoncé au règlement de ses factures ; cet échange prouve que la société TERRAGONE, mécontente de l'absence de collaboration avec la société ATAL dans d'autres affaires, a tenté de recouvrer des honoraires en raison de prestation effectuée dans le passé ;

- la facturation F07G11535 d'un montant de 28'195,70 euros TTC se fonde sur des honoraires pour la mission « Ingénierie Maîtrise d''uvre VRD » de 47'150 € alors qu'ils étaient prévus à hauteur de 44'850 € ; la société TERRAGONE ne prouve pas avoir réalisé le projet le dossier de consultation des entreprises dont elle sollicite le paiement dans sa facture F07G1535 ; elle ne peut donc solliciter le paiement de 45 % des honoraires de la mission Ingénierie ; elle ne pourrait réclamer que 10 % des honoraires qu'en rapportant la preuve qu'elle a consulté les entreprises.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions ci-dessus rappelées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la clause « échéancier des règlements »

Les conventions de prestation de services signées le 13 avril 2007 par le maître de l'ouvrage confient à Monsieur Z... X..., géomètre-expert, une mission « urbanisme et foncier » et une mission «ingénierie-maîtrise d''uvre des travaux de viabilité » pour le lotissement « Résidence Er Verger » à CAMORS (14 lots) et pour le lotissement « Résidence de Botnoche » à BAUD (46 lots).

Le montant forfaitaire des honoraires de Monsieur Z... X... pour la «mission urbanisme et foncier » dans les deux contrats est de 1025 € HT par lot, soit

14'350 € HT (17'162,60 euros TTC) pour l'opération à CAMORS et 47'150 € HT (56'391,40 euros TTC) pour l'opération à BAUD.

Au paragraphe1/2 intitulé « Honoraires » figure un sous-paragraphe 1/2-2 intitulé « Échéancier des règlements » ainsi rédigé :

« Le Maître D... se libérera des sommes dues suivant l'échéancier ci-après :

. 0 % à la conception du plan de masse

. 0 % au dépôt de la demande de l'Arrêté de lotissement,

. 60 % à l'obtention de l'Arrêté de lotissement purgé de recours à la réitération de l'acte authentique [...] »

La société ATAL soutient que la rémunération du géomètre-expert est ainsi subordonnée à deux conditions suspensives : l'obtention de l'arrêté de lotissement purgé de recours et la réitération de l'acte authentique.

La société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE affirme au contraire que, n'étant pas partie prenante aux projets de lotissement et n'ayant aucun intérêt personnel à leur réalisation, la rémunération de son travail ne peut dépendre de la décision du maître de l'ouvrage de ne pas poursuivre le projet.

Aux termes de l'article 1168 du code civil dans sa version applicable à l'espèce, l'obligation est conditionnelle lorsqu'on la fait dépendre d'un événement futur et incertain soit en la suspendant jusqu'à ce que l'événement arrive, soit en la résiliant selon que l'événement arrivera ou n'arrivera pas.

Cet événement doit être futur et incertain ou actuellement réalisé mais inconnu des parties et il doit être indépendant de leur volonté.

L'article 1174 du Code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 dispose que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige.

En l'espèce, le courrier de Monsieur Z... X... en date du 8 janvier 2014 à la société ATAL prouve suffisamment l'intention commune des parties de soumettre le paiement de ses honoraires à deux conditions suspensives.

Cependant, si l'obtention de l'arrêté de lotissement préparé et demandé par le géomètre-expert constitue une condition suspensive légale, il n'en est pas de même de la réitération de l'acte authentique qui dépend, comme l'indique Monsieur Z... X... dans son courrier du 8 janvier 2014, non seulement des « prévisibles difficultés techniques conjoncturelles » indépendantes de la volonté des contractants mais aussi de la seule volonté du maître de l'ouvrage lotisseur de signer l'acte authentique ou de ne pas le signer, renonçant ainsi à l'opération de lotissement.

Aucune des pièces versées aux débats ne permet d'affirmer que, au jour de la conclusion des contrats, le 13 avril 2007, Monsieur Z... X... était partie prenante et partenaire dans la réalisation des opérations de lotissement et qu'il a ainsi, « en toute connaissance de cause » accepté de n'être pas rémunéré pour ses prestations déjà effectuées en cas de non réitération des actes authentiques. En effet, ça n'est que postérieurement à la signature des contrats que Monsieur Z... X... a créé la société ASCALON FONCIER qui a repris l'opération « Résidence Er Verger » en se faisant transférer l'autorisation de lotir le 16 juillet 2008 et a instauré un partenariat avec la société ATAL.

La condition soumettant la rémunération des prestations effectuées par le géomètre-expert à la signature d'un acte authentique par la société ATAL est donc une condition simplement potestative qui ne peut être prise en compte, étant observé au surplus que, dans son courrier du 20 novembre 2009, la société ATAL, indique que c'est la « crise intervenue depuis près de deux ans » qui est à l'origine de sa décision d'arrêter les opérations.

Le droit à rémunération de la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE est donc subordonné à la preuve d'une part de la délivrance d'un arrêté de lotissement dans chacune de deux opérations et d'autre part de la réalité de la réalisation de ses prestations.

Sur la demande d'honoraires au titre de l'opération « Résidence de Botnoche » à BAUD

La société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE demande, pour cette opération, la somme de 33'834,84 euros TTC (facture F07G1534 du 27 décembre 2007) au titre de sa « mission urbanisme foncier », et celle de 28'195,70 € TTC (facture F07G1535 du 27 décembre 2007) au titre de sa « mission ingénierie et maîtrise d''uvre VRD », soit un total de 62'030,54 euros TTC.

Par courriel du 24 janvier 2009, Monsieur Antoine Y..., co-gérant de la société X... & ASSOCIÉS, géomètre-expert, a rappelé à la société ATAL le non- règlement de ses factures.

Par courriel du 31 mars 2009, Monsieur Pierre B..., de la société ATAL, a admis sa créance d'honoraires en indiquant avoir pris contact avec la société FRANCELOT ainsi qu'avec deux autres confrères pour céder une ou deux de ses opérations « ce qui permettrait : 1 - de mettre à jour plus rapidement le paiement des honoraires des travaux effectués par le Cabinet ; 2 - de nous consacrer aux nouvelles opérations. »

Aucune pièce ne permet de prouver la véracité de l'allégation de la société intimée selon laquelle la société TERRAGONE a renoncé au paiement de ses factures.

L'autorisation de lotir a été délivrée par le maire de BAUD le 21 septembre 2007 sur la base du dossier constitué par le cabinet D. X... que la société appelante verse aux débats.

Cette dernière doit donc être rémunérée de ses prestations effectuées dans le cadre de sa mission «urbanisme et foncier » à hauteur de 33'834,84 euros TTC, soit 60 % du montant prévu de ses honoraires.

S'agissant de la mission « ingénierie maîtrise d''uvre VRD », l'« échéancier des règlements » prévoit le règlement de 45 % des honoraires au stade du dossier de consultation des entreprises, 10 % à la consultation des entreprises et 5 % la signature des marchés. La société appelante produit aux débats la preuve qu'elle a établi le dossier de consultation des entreprises puisqu'elle a procédé à des appels d'offres auxquels ont répondu plusieurs entreprises en octobre 2007, qu'elle a procédé à l'ouverture des enveloppes, qu'une convention de desserte a été signée entre GAZ DE FRANCE et la société ATAL le 7 novembre 2007 et que ce lotisseur a planifié le démarrage des travaux pour le lot réseaux souples de la société SDEL à partir de la deuxième quinzaine du mois de juin 2008.

La société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE doit donc être rémunérée au titre de sa « mission ingénierie et maîtrise d''uvre VRD » à hauteur de la somme de 26 820, 30 € TTC

( 22 425 € HT), soit 50 % de 44 850 € HT.

En rémunération de ses prestations contractuelles effectuées dans le cadre de l'opération « Résidence de Botnoche » à BAUD, la cour condamnera donc, par voie d'inscription au passif de sa liquidation judiciaire, la société ATAL à payer à la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE la somme de 60 655,14 € (33'834,84 + 26 820, 30).

Sur la demande d'honoraires au titre de l'opération « Résidence Er Verger (Le Triskell) » à CAMORS

La société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE demande, pour cette opération, la somme de 10'297,56 € TTC (facture F GC 1104-11149 du 7 avril 2011) au titre de sa « mission urbanisme et foncier », et celle de 8978,97 € TTC (facture F GC 1104-11150 du 7 avril 2011) au titre de sa mission « ingénierie maîtrise d''uvre VRD», soit un total de 19'276,53 € TTC.

L'autorisation municipale de lotir a été délivrée le 19 février 2008 sur la base d'un dossier préparé par Monsieur Z... X....

Contrairement à ce que soutient la société intimée, cette autorisation de lotir n'est soumise à aucune condition suspensive tenant à la possibilité de raccordement au réseau

[...] En effet, elle ne fait qu'entériner la demande de la société ATAL qui indique : « Raccordements aux réseaux existants sur la rue du Presbytère (à la charge du lotisseur) ».

Au surplus, en tout état de cause, à supposer prouvée une telle condition suspensive, celle-ci a été levée par la signature en date du 14 février 2008 d'une convention de passage en terrain privé entre la SCI du PENHER et la SARL Alan TRISKELL aménageur-lotisseur qui consent à cette dernière une servitude de passage de canalisations d'eau potable ainsi que des eaux usées et pluviales comprenant la création de regards. Il incombait donc à la société intimée de faire définir précisément cette servitude et de créer les conditions d'obtention d'un permis d'aménager qu'elle ne prouve pas avoir demandé.

C'est donc à bon droit que la société appelante sollicite la somme de 10'297,56 euros TTC au titre de sa mission « urbanisme et foncier ».

S'agissant de la preuve de l'exécution de sa mission d'établissement du dossier de consultation des entreprises et d'appel d'offres que la société intimée conteste, la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE ne produit aux débats qu'un document à l'en-tête de la société X... & ASSOCIÉS portant la date non certaine du 3 juillet 2008 intitulé « Résultat d'appel d'offres (montant HT)» sur lequel ne figure aucune signature, ainsi qu'un « Bilan prévisionnel au 13 juin 2008 - Résidence Le Triskell» qu'elle a établi elle-même.

Ces deux pièces ne permettent pas de rapporter la preuve qui lui incombe qu'elle a exécuté les prestations figurant dans sa facture de 8978,97 € TTC du 7 avril 2011.

Au titre de ses prestations contractuelles réalisées dans le cadre de l'opération « Résidence Er Verger (Le Triskell) » à CAMORS, la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE sera donc rémunérée à hauteur de 10'297,56 €.

Sur les autres demandes

Compte tenu de la teneur du présent arrêt infirmatif, la société ATAL et Maître C... ès qualités, parties perdantes, seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel et déboutés de leur demande indemnitaire.

Ils seront en outre condamnés, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE la somme de 5000 € au titre de ses frais non répétibles de procédure de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

INFIRME le jugement rendu le 23 juillet 2014 par le tribunal de commerce de Vannes;

Statuant à nouveau,

CONDAMNE, par voie d'inscription au passif de son redressement judiciaire, la société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) et Maître C... ès qualités de mandataire judiciaire à son redressement judiciaire, à payer à la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE la somme de 60655,14€ en rémunération de ses prestations contractuelles dans le cadre de l'opération « Résidence de Botnoche » à BAUD, et celle de 10'297,56 € en rémunération de ses prestations contractuelles dans le cadre de l'opération « Résidence Er Verger (Le Triskell) » à CAMORS,

DIT que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et que les intérêts seront capitalisés conformément aux dispositions de l'article 1154 devenu 1343-2 du Code civil ;

CONDAMNE, par voie d'inscription au passif de son redressement judiciaire, la société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL) et Maître C... ès qualités de mandataire judiciaire à son redressement judiciaire, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, à payer à la société QUARTA venant aux droits de la société TERRAGONE la somme de 5000 € au titre de ses frais non répétibles de procédure de première instance et d'appel ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNE, par voie d'inscription au passif de son redressement judiciaire, la société ALAN TRISKELL AMÉNAGEUR LOTISSEUR (ATAL)et Maître C... ès qualités de mandataire judiciaire à son redressement judiciaire, au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14/07256
Date de la décision : 28/06/2018

Références :

Cour d'appel de Rennes 04, arrêt n°14/07256 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-28;14.07256 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award