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26/06/2018 | FRANCE | N°15/07824

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 26 juin 2018, 15/07824


1ère Chambre





ARRÊT N° 281/2018



N° RG 15/07824













Mme Catherine X...

Mme Danielle Y... épouse Z...



C/



M. Jean A... Y...



















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée













Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAIS

E

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2018





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:



Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Marie-...

1ère Chambre

ARRÊT N° 281/2018

N° RG 15/07824

Mme Catherine X...

Mme Danielle Y... épouse Z...

C/

M. Jean A... Y...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 26 JUIN 2018

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Avril 2018 devant Madame Christine GROS, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Juin 2018 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré initialement annoncé au 19 juin 2018, date indiquée à l'issue des débats

****

APPELANTES :

Madame Catherine X...

née le [...] à HENNEBONT (56700)

[...]

Représentée par Me Nathalie B..., avocate au barreau de LORIENT

Madame Danielle Y... épouse Z...

née le [...] à HENNEBONT (56700)

[...]

Représentée par Me Nathalie B..., avocate au barreau de LORIENT

INTIMÉ :

Monsieur Jean A... Y...

né le [...] à HENNEBONT (56700)

Lieudit Fontaine Galeze

[...]

Représenté par Me Françoise H..., avocat au barreau de LORIENT

M. C... Y... et Mme Marguerite I..., son épouse, ont eu de leur union trois enfants, Mme Danielle Y..., épouse Z..., Mme Catherine Y..., veuve X..., et M. Jean-A... Y....

Marguerite I... est décédée le [...], C... Y..., le 6 octobre 2008.

Le règlement de leur succession a été confié à Me Jeanne J..., notaire à Hennebont. Il dépend de la succession plusieurs biens immobiliers situés au lieudit «Chateauneuf» à Hennebont.

Les tentatives de partage amiable ayant échoué, Mme Catherine X... a, le 22 mai 2012, fait assigner ses s'ur et frère, Mme Danielle Z... et M. Jean-A... Y..., devant le tribunal de grande instance de Lorient aux fins de partage judiciaire.

Par jugement du 4 juin 2014, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a:

-ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions et de la communauté ayant existé entre C... Y... et Marguerite I..., commis pour y procéder Me Jeanne J..., notaire associée à Hennebont et dit que celle-ci disposera d'un délai de 12 mois pour parvenir à la signature d'un acte de partage ou à défaut dressera un procès verbal de difficultés mentionnant les dires de chaque partie et annexant son projet;

-désigné Madame Armelle D..., vice présidente du tribunal de grande instance de Lorient, poir la surveillance de ces opérations;

-ordonné le rapport à la succession par M. Jean-A... Y... de la donation dont il a bénéficié par acte notarié du 6 octobre 1984, le rapport étant dû de la valeur du bien donné, à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation, outre une somme de 9 000 € au titre des loyers perçus à la place de ses parents, qui s'analysent en une libéralité,

-dit que M. Jean-A... Y... a une créance de 80 000 € sur la succession au titre de travaux réalisés et financés par lui-même au profit des biens immobiliers de ses parents,

-ordonné le rapport à la succession par Mme Danielle Z... d'une somme de 5 000 €,

-ordonné le versement par le notaire désigné d'une avance de 50 000 € sur la succession à Mme Danielle Z... et à Mme Catherine X...,

-rejeté les autres demandes,

-dit que chaque partie conservera à sa charge ses frais d'instance et que les dépens seront inclus dans les frais de partage.

Mme Danielle Z... et Mme Catherine X... ont relevé appel de ce jugement le 8 octobre 2015.

Par ordonnance du 12 décembre 2016, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions du 29 février et du 8 juin 2016 de Monsieur Jean-A... Y....

Par ordonnance du 4 décembre 2017, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions du 4 septembre 2017 de Monsieur Jean-A... Y... et dit que celui-ci est irrecevable à conclure au fond ou à soulever un incident de procédure.

Vu les conclusions du 4 septembre 2017 auxquelles il est renvoyé pour exposé des moyens et arguments de Mesdames Z... et X... qui demandent à la cour de:

A titre liminaire,

-écarter des débats les pièces communiquées par Monsieur Jean-A... Y...;

-débouter Monsieur Jean-A... Y... de ses demandes, fins et conclusions;

-infirmer partiellement le jugement du 4 juin 2014;

-dire que le bien objet de la donation du 6 octobre 1984 doit être rapporté à la succession par Monsieur Jean-A... Y...;

-dire que la description du bien figurant à l'acte de donation, soit un appartement comprenant salle à manger, salon, kitchenette, la chambre, salle de bains, WC, dégagement et emplacement de parking s'impose jusqu'à inscription de faux;

-dire que le montant du rapport sera de la valeur de ce bien à l'époque du partage à intervenir, et non à l'époque de la donation;

-ordonner le rapport à la succession par Monsieur Jean-A... Y... d'une somme de 24.246 € au titre des loyers perçus à la place de ses parents;

-dire n'y avoir lieu à créance sur la succession au profit de Monsieur Jean-A... Y... au titre des travaux réalisés par lui au profit des biens immobiliers de ses parents;

A titre subsidiaire,

-dire que cette créance ne saurait excéder la somme de 20.118,61 €;

[...]

-condamner Monsieur Jean-A... Y... à rembourser à Madame Danielle Z... la somme de 40.000 € qu'elle lui a indûment versée, avec intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2013;

-confirmer le jugement quant au surplus;

-condamner Monsieur Jean-A... Y... à payer à Madame Danielle Z... et à Madame Catherine X..., la somme de 3.000 € chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;

-inclure les dépens dans les frais de partage.

MOTIFS DE LA DÉCISION:

La demande présentée à titre liminaire n'a plus d'objet dès lors que Monsieur Y... n'a pas produit ses pièces à l'issue de l'ordonnance du 4 septembre 2017.

Sur le rapport à la succession de la donation du 6 octobre 1984:

Il ressort des motifs du jugement entrepris que le premier juge ne s'est pas prononcé sur l'état du bien à la date de la donation, exprimant deux possibilités: un grenier dont l'acte de donation précise la transformation à venir, ou un grenier déjà transformé.

Mesdames Z... et X... demandent que l'état retenu soit celui décrit à l'acte de donation, soit un appartement comprenant différentes pièces.

Il ressort de l'acte de donation que le bien donné à Monsieur Y... est «un appartement situé au premier étage d'un immeuble en copropriété avec accès par le vestibule situé au rez de chaussée, comprenant: Salle à manger, salon, kitchenette, deux chambres, Salle de bains, WC, dégagement, outre les tantièmes de parties commune et un emplacement privatif de parking, outre les tantièmes de parties communes. Ainsi, le jugement entrepris sera confirmé en ce ce qu'il a jugé que le rapport sera de la valeur du bien donné à l'époque du partage, d'après son état à l'époque de la donation, étant précisé que ce bien est celui décrit dans l'acte de donation.

Sur les loyers perçus par Monsieur Y... aux lieu et place de ses parents:

Aux termes de l'article 843 du code civil : «Tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale»

Le premier juge a condamné Monsieur Jean-A... Y... à rapporter à la succession la somme de 9 000 € représentant les loyers perçus aux lieu et place de ses parents pour la location à Monsieur E..., d'un bien dépendant de l'ensemble des habitations du lieu-dit «Chateauneuf». Mesdames Z... et X... demandent que soit ajouté à cette somme le dépôt de garantie encaissé par Monsieur Jean-A... Y... mais restitué au locataire par Monsieur C... Y... en fin de bail.

Le bail a été établi au nom de Monsieur Y... Jean-A.... Il en ressort que le locataire a versé un dépôt de garantie de 686 € lors de sa signature, le 29 janvier 2003. Le compte joint des époux Y... C... ne fait état d'aucun crédit de ce montant. En revanche, il y apparaît le débit d'un chèque de 686 € le 9 août 2006. Il est ainsi rapporté la preuve de ce que le dépôt de garantie a été conservé par Monsieur Jean-A... Y..., ce qui constitue une donation rapportable.

Mesdames Z... et X... soutiennent que Monsieur Jean-A... Y... a également perçu aux lieu et place de ses parents les loyers d'une autre habitation de l'ensemble immobilier du lieu-dit «Chateauneuf». Elles produisent une attestation de Madame Simeon F... qui déclare avoir loué avec son mari une maison d'habitation sise «Chateauneuf» à Hennebont du mois de septembre 2002 au 30 avril 2004 et avoir réglé le dépôt de garantie et les loyers mensuels de 560 € à Monsieur Y... Jean- A... «puis le papa de Jean-A... est venu me donner un nouveau RIB pour le paiement des loyers, nous avons fait le changement à partir de novembre 2004». Ces déclarations sont corroborées par les relevés du compte bancaire des époux Y... C... qui font apparaître des virements mensuels de 560 € à compter de mois de novembre 2004 avec en intitulé de l'opération «virement Simeon G...».

Cet encaissement de loyer par Monsieur Jean-A... Y... du mois de septembre 2002 au mois d'octobre 2004 s'analyse comme une donation rapportable à hauteur de 14 560 € (560€x26).

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a ordonné le rapport d'une somme de 9 000 €, et celle-ci sera de 24 246 € ( 9 000 + 686 +14 560).

Sur la créance de Monsieur Y... au titre des travaux réalisés par lui au profit des biens immobiliers de ses parents:

Le premier juge a retenu que Monsieur Jean-A... Y... avait effectué des travaux d'amélioration des biens immobiliers de ses parents à hauteur de 80 000 €, sans que cette somme doive être compensée avec la valeur d'une occupation des biens par Monsieur Jean-A... Y... à titre gratuit.

Les améliorations apportées par Monsieur Jean-A... Y... ont été évaluées par Me J..., notaire, à la somme de 80 000 €. Le notaire a basé son estimation sur le coût de 450 €/m² de remise en état d'un bien immobilier . Il ressort de l'inventaire effectué par le notaire des dépenses de Monsieur Jean-A... Y..., qu'elles sont de 20 118,61 €. Le 7 septembre 2011, Madame Z... a versé à son frère la somme de 40 000 € «en règlement de la quote-part m'incombant dans la dette des successions de mes parents, Monsieur et Madame C... Y..., à son égard, au titre des travaux de rénovation et amélioration réalisés par lui dans les biens sis à Hennebont (56 700), lieu-dit «Chateauneuf».

Mesdames Z... et X... soutiennent que ces travaux trouvaient leur cause dans une intention libérale. Contrairement à ce qu'elles affirment, il leur appartient de rapporter la preuve de cette intention qui n'est pas présumée, et cette preuve n'est pas rapportée, d'autant moins qu'elles confirment que leur frère avait l'intention d'acquérir les immeubles concernés.

Il ressort de la lettre du 27 janvier 2011, adressée par Me J... au conseil de Madame X..., que les travaux ont été effectués au cours des années 2000 à 2003. Pour rapporter la preuve d'une occupation gratuite des lieux par leur frère, Mesdames X... et Z... produisent aux débats un écrit de Monsieur C... Y... mentionnant que Jean-A... a déménagé de la «grande maison» le 25 janvier 2003. Cette simple mention n'est pas suffisante pour établir la preuve d'un hébergement à titre gratuit de nature à venir partiellement en déduction de la créance de Jean-A... Y....

Mesdames Z... et X... contestent que les travaux aient apporté une amélioration.

Les travaux ont été décrits par le notaire comme une réfection totale d'un appartement de 73m² et d'une maison de 110m². Toutefois, il ressort du détail des prestations apportées que cette réfection ne comprend pas l'installation électrique. Ainsi, le caractère vétuste de l'installation électrique de l'appartement, relevé dans le diagnostic de 2010, est sans incidence sur le montant de la créance de Monsieur Y.... En ce qui concerne l'isolation, il ressort du diagnostic de performance énergétique que le bien est classé C, ce qui ne vient pas démontrer une mauvaise isolation. Il est également sans incidence que le remplacement de la chaudière à fuel de la «grande maison» ait été remplacé par le chauffage au gaz en 2002 ou 2003, dès lors qu'aucun élément ne vient contredire que ce remplacement a été effectué par Monsieur Jean-A... Y.... Enfin, le mail d'anciens locataires qui reconnaissent la salle de bains sur photographie n'est pas suffisant pour contester utilement que Monsieur Y... y a réalisé des travaux.

La somme de 80 000 € retenue par l'expert est équivalente au montant de l'enrichissement de la succession. Toutefois, la créance de Monsieur Y... ne peut être équivalente qu'à la moindre des deux sommes représentatives l'une de l'enrichissement, l'autre de l'appauvrissement. Monsieur Y... ne démontre pas que le montant de la main d'oeuvre économisée par la succession, a été pour lui l'occasion d'un appauvrissement supplémentaire . Par voie de conséquence, l'indemnité qui lui est due par la succession ne peut être que du montant des dépenses qu'il a effectuées, soit 20 118,61 €.

Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

Au titre de l'article 1376 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 : «Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.» Il résulte de ce qui précède que c'est par erreur que Madame Z... a versé à son frère la somme de 40 000 € et celui-ci sera condamné à lui restituer cette somme, outre intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2013, date de la demande par voie de conclusions.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a:

-ordonné le rapport à la succession par M. Jean-A... Y... d'une somme de 9 000 € au titre des loyers perçus à la place de ses parents;

-dit que M. Jean-A... Y... a une créance de 80 000 € sur la succession au titre de travaux réalisés et financés par lui-même au profit des biens immobiliers de ses parents,

-rejeté la demande de restitution de la somme de 40 000 € à Madame Danielle Y... épouse Z...;

Statuant à nouveau:

Ordonne le rapport à la succession par Monsieur Jean-A... Y... d'une somme de 24 246 € au titre des loyers et dépôt de garantie perçus aux lieu et place de ses parents;

Dit que M. Jean-A... Y... a une créance de 20 118,61 € sur la succession au titre de travaux réalisés et financés par lui-même au profit des biens immobiliers de ses parents,

Condamne Monsieur Jean-A... Y... à restituer à Madame Danielle Y... épouse Z... la somme de 40 000 € outre intérêts au taux légal à compter du 12 avril 2013.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions;

Y ajoutant:

Dit que le bien objet de la donation du 6 octobre 1984 est celui décrit dans l'acte de donation;

Déboute Mesdames Danielle Y... épouse Z... et Catherine X... de leur demande au titre de leurs frais irrépétibles en cause d'appel;

Dit que les dépens de l'appel seront inclus dans les frais de partage.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15/07824
Date de la décision : 26/06/2018

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°15/07824 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-26;15.07824 ?
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