1ère Chambre
ARRÊT N°81/2018
R.G : 15/06795
Mme [Y] [W] [M] [B] [V] épouse [C]
Mme [U] [T] [B] [C] épouse [Z]
Melle [G] [C]
M. [E] [C]
C/
Mme [P] [V]
M. [D] [V]
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 20 FÉVRIER 2018
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,
Assesseur : Monsieur Marc JANIN, Conseiller, entendu en son rapport
Assesseur : Madame Christine GROS, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 19 Décembre 2017
ARRÊT :
réputé contradictoire, prononcé publiquement le 20 Février 2018 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Madame [Y] [W] [M] [B] [V] épouse [C]
née le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Lucy ABRAHAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Madame [U] [T] [B] [C] épouse [Z] es qualité de petit-enfant donataire de Madame [B] [O]
née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 1]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Intervenante volontaire, représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Lucy ABRAHAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Mademoiselle [G] [C] es qualité de petit-enfant donataire de Madame [B] [O]
née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 1]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Intervenante volontaire, représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Lucy ABRAHAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
Monsieur [E] [C] , es qualité de petit-enfant donataire de Madame [B] [O]
né le [Date naissance 3] 1961 à [Localité 4]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Intervenant volontaire, représenté par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Lucy ABRAHAM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS :
Madame [P] [V]
née le [Date naissance 4] 1964 à [Localité 1]
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représentée par Me Jean-Michel YVON de la SELARL JEAN MICHEL YVON AVOCAT, avocat au barreau de LORIENT
Monsieur [D] [V]
né le [Date naissance 5] 1965 à [Localité 1]
[G]
[Localité 1]
Régulièrement assignée à sa personne, n'a pas constitué
FAITS ET PROCÉDURE:
Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O], épouse [V], ont, par acte authentique des 20 et 27 décembre 1979, fait donation à leurs deux enfants, Monsieur [E] [V] et Madame [Y] [V], à titre de partage anticipé, de la nue propriété de divers biens immobiliers leur appartenant en commun ainsi que de biens propres à Madame [B] [O].
Puis, par acte authentique du 17 janvier 1984, les époux [C] [V] ont fait donation, en avancement d'hoirie, à leur fils, Monsieur [E] [V], d'une somme de 175 000 F.
Ce dernier a employé cette somme d'argent dans l'acquisition, le 20 janvier 1984, d'une parcelle de terre à [Localité 1], cadastrée section D n° [Cadastre 1], qu'il a ensuite divisée en deux parcelles D n° [Cadastre 2], qu'il a vendue en 2009 au prix de 3 000 €, et D n° [Cadastre 3], aujourd'hui constructible.
Monsieur [C] [V] est décédé le [Date décès 1] 1992.
Madame [B] [O] a, par acte authentique du 20 août 1999, fait donation de la nue propriété en parts indivises de diverses parcelles lui appartenant en propre, à ses deux enfants, Monsieur [E] [V] et Madame [Y] [V], épouse [C], et ses cinq petits-enfants, Madame [P] [V], Monsieur [D] [V], Monsieur [E] [C], Madame [U] [C], épouse [Z], et Madame [G] [C].
Madame [B] [O] est décédée le [Date décès 2] 1999.
Monsieur [E] [V] est décédé le [Date décès 3] 2004.
Madame [Y] [C] a, le 17 décembre 2007, fait assigner ses neveux, Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V], devant le tribunal de grande instance de Lorient aux fins de partage judiciaire de la communauté et des successions de ses parents, Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O].
Le tribunal a, par jugement du 3 février 2010:
ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage, et désigné le président de la chambre départementale des notaires pour y procéder,
tranché des contestations entre copartageants.
Le notaire délégué, Maître [F] [U], a établi un projet de partage prévoyant notamment la réunion fictive des donations pour déterminer la masse de calcul de la quotité disponible et les réductions éventuelles de ces donations pour atteinte à la réserve.
Considérant que les donations faites, notamment à Monsieur [E] [V], même pour les valeurs de rapports retenues par le projet du notaire, qu'elle estime sous-évaluées en particulier pour la parcelle anciennement cadastrée D n° [Cadastre 1], portent atteinte à ses droits à réserve, Madame [Y] [C] a, par acte du 17 juin 2013, fait citer de nouveau Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V] devant le tribunal pour voir fixer à la charge de ceux-ci une indemnité de réduction.
Par jugement du 24 mars 2015, le tribunal a:
déclaré recevable l'action en réduction concernant les opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté et des successions de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O],
constaté qu'aucune autre action en réduction n'est formée,
dit que Madame [Y] [C] n'est pas recevable à présenter des demandes au nom de ses enfants majeurs,
dit que le notaire commis devra augmenter les droits des ayants droits de Monsieur [E] [V] dans le partage des successions confondues de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O], de la somme de 40 486,04 € correspondant à une créance de salaires différés de Monsieur [E] [V],
dit que les ayants droits de Monsieur [E] [V] devront faire rapport à la succession de Madame [B] [O] des sommes de 26 702,06 € et 20 000 €, avec intérêt au taux légal à compter du jour d'ouverture de la succession,
dit que la donation consentie par Madame [B] [O] à ses enfants et petits-enfants le 20 août 2009 (en réalité 1999) est une donation simple rapportable à sa succession,
ordonné au notaire commis de réévaluer tous les biens visés par la donation simple du 20 août 2009 (en réalité 1999), à la date du partage,
dit qu'il n'y a pas lieu de réévaluer les biens ayant fait l'objet de la donation-partage partielle des 20 et 27 décembre 1979,
ordonné la restitution des intérêts des indemnités de réduction à calculer à compter du 17 juin 2013,
renvoyé les parties devant le notaire pour poursuivre ses opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté et des successions Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O],
ordonné à celui-ci de terminer ses opérations dans un délai maximum d'un an à compter du jugement et de transmettre au tribunal, dans ce délai, soit l'acte de partage signé des parties, soit un procès-verbal de difficultés reprenant les dires de celles-ci, avec en annexe le dernier projet de partage qu'il leur aura présenté,
commis un juge pour surveiller les opérations de partage,
dit que chaque partie conservera à sa charge les frais par elle engagés,
rejeté toute autre demande,
rejeté la demande d'exécution provisoire.
Madame [Y] [C] a interjeté appel de ce jugement le 24 août 2015.
Par conclusions du 16 octobre 2017, auxquelles il sera renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments, Madame [Y] [C], Monsieur [E] [C], Madame [U] [S] et Madame [G] [C] (consorts [C]) demandent à la cour:
de déclarer Madame [Y] [C] recevable et bien fondée en son appel,
de rectifier les erreurs matérielles affectant le jugement en ce que la donation indivise rapportable consentie par Madame Madame [B] [O] à ses enfants et petits-enfants l'a été le 20 août 1999 au lieu de 2009, et que les ayants droits de Monsieur [E] [V] devront faire rapport à la succession de Madame [B] [O] des sommes de 26 702,06 € et 27 000 €, au lieu de 20 000 €, avec intérêt au taux légal à compter du jour d'ouverture de la succession,
de confirmer sous ces réserves le jugement déféré en ce qu'il a:
dit que Madame [Y] [C] n'est pas recevable à présenter des demandes au nom de ses enfants majeurs,
dit que le notaire commis devra augmenter les droits des ayants droits de Monsieur [E] [V] dans le partage des successions confondues de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O], de la somme de 40 486,04 € correspondant à une créance de salaires différés de Monsieur [E] [V],
dit que les ayants droits de Monsieur [E] [V] devront faire rapport à la succession de Madame [B] [O] des sommes de 26 702,06 € et 27 000 €, avec intérêt au taux légal à compter du jour d'ouverture de la succession,
dit que la donation consentie par Madame [B] [O] à ses enfants et petits-enfants le 20 août 1999 est une donation simple rapportable à sa succession,
ordonné au notaire commis de réévaluer tous les biens visés par la donation simple du 20 août 1999, à la date du partage,
dit qu'il n'y a pas lieu de réévaluer les biens ayant fait l'objet de la donation-partage partielle des 20 et 27 décembre 1979,
ordonné la restitution des intérêts des indemnités de réduction à calculer à compter du 17 juin 2013,
de l'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau:
de rejeter la pièce adverse n° 4,
de donner acte à Monsieur [E] [C], Madame [U] [S] et Madame [G] [C] de leur intervention volontaire, et les dire recevables et bien fondés,
de dire que toute action en réduction à leur encontre est prescrite depuis le 18 juin 2013,
de constater que les ayants droits de Monsieur [E] [V] n'ont jamais précédemment demandé implicitement la réduction de toutes donations faites par Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O],
de faire droit à la demande de réduction engagée avant prescription contre Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V], en qualités d'ayants droits de leur père et en qualité de donataires préciputaires de leur grand-mère,
d'ordonner que ne soient plus réparties par souches ni attribuées par moitié aux droits de Monsieur [E] [V] les indemnités de réduction après déduction du montant de la créance de salaire différé dès lors que l'actif net à partager est inférieur au solde des réserves de Madame [Y] [C],
de dire que, pour le calcul des indemnités de réduction, la créance de salaire différé de Monsieur [E] [V] doit être déduite de la seule masse active de la succession de Monsieur [C] [V], seul exploitant agricole depuis la naissance de ses enfants, avant calcul de la réserve, quotité disponible et réduction,
d'ordonner la déduction des frais funéraires et des frais de liquidation et partage, des masses actives successorales avant calcul de la réserve, quotité disponible et réduction,
de dire qu'en cas de vente totale ou partielle des biens donnés à Monsieur [E] [V] et/ou Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V], les sommes restant dues à Madame [Y] [C] seront immédiatement exigibles,
de dire que les héritiers de Monsieur [E] [V] devront restituer à la succession de Madame [B] [O] les sommes correspondant aux opérations bancaires effectuées par celui-ci à son seul profit sur le compte de sa mère,
de dire que les ayants droits de Monsieur [E] [V] devront rapporter à la succession de Madame [B] [O], à titre d'indemnité d'occupation, l'équivalent monétaire de l'avantage en nature constitué par l'occupation par celui-ci de la maison neuve située à [Localité 1] de 1995 à 1999,
de désigner un autre notaire que les notaires de la Selarl [U]-[I],
de débouter les intimés de toutes leurs demandes,
de les condamner 'conjointement et solidairement' à verser à Madame [Y] [C] la somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
de les condamner de même en tous les dépens.
Par conclusions du 2 septembre 2016, auxquelles il sera renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments, Madame [P] [V] demande à la cour:
de confirmer le jugement déféré,
de constater que les ayants droits de Monsieur [E] [V], et elle-même notamment, ont précédemment demandé implicitement la réduction de toutes donations faites par Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O],
de débouter les consorts [C] de leurs demandes,
de les condamner à lui verser une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
de les condamner aux entiers dépens d'appel.
Monsieur [D] [V] n'a pas constitué avocat.
La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 21 novembre 2017.
MOTIFS DE LA DÉCISION DE LA COUR:
1/: - Sur les prétentions d'ordre procédural:
Il convient de donner acte à Monsieur [E] [C], Madame [U] [S] et Madame [G] [C] de leur intervention volontaire devant la cour.
En revanche, rien ne justifie d'écarter des débats la pièce communiquée devant la cour sous le n° 4, le projet d'état liquidatif établi par Maître [F] [U] dont on ne voit pas en quoi, même contesté par eux, il serait inapplicable à l'espèce comme le prétendent les consorts [C].
2/: - Sur la demande de rectification d'erreurs matérielles:
Il est constant et non contesté que c'est par erreur purement matérielle qu'il a été fait mention au dispositif du jugement déféré à la cour, d'une donation consentie par Madame [B] [O] à ses enfants et petits-enfants le 20 août 2009 alors que la dite donation a en réalité été faite le 20 août 1999.
Et c'est par une erreur de même nature qu'il a également été dit que les ayants droits de Monsieur [E] [V] devront faire rapport à la succession de Madame [B] [O] d'une somme de 20 000 €, alors que la somme qui doit être rapportée, au titre de l'avantage en nature constitué par la jouissance exclusive par Monsieur [E] [V] d'une maison située à [Adresse 6], de 1995 à 1999 a été chiffrée par une évaluation non discutée du notaire à 27 000 €, ainsi qu'il ressort de la motivation du jugement.
Il y a lieu, en conséquence, d'ordonner la rectification de ces deux erreurs matérielles par application des dispositions de l'article 462 du Code de procédure civile.
3/: - Sur les autres demandes:
A/:- Sur la réduction des libéralités:
La question essentielle soumise par les conclusions des appelants semble, au vu de ce qui paraît devoir être qualifié de prétentions énoncées au dispositif des conclusions des appelants au sens de l'article 954 du Code de procédure civile, être celle de la réduction des libéralités consenties:
-par Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O], les 20 et 27 décembre 1979, à leurs deux enfants, Monsieur [E] [V] et Madame [Y] [V],
- par Madame [B] [O], le 20 août 1999, à ses deux enfants, Monsieur [E] [V] et Madame [Y] [V], épouse [C], et ses cinq petits-enfants, Madame [P] [V], Monsieur [D] [V] (enfants de Monsieur [E] [V]), Monsieur [E] [C], Madame [U] [C], épouse [Z], et Madame [G] [C] (enfants de Madame [Y] [C]).
Le notaire a intégré des indemnités de réduction de ces libéralités dans son projet de partage, ce que conteste Madame [Y] [C], et ses enfants avec elle, en soutenant qu'aucune action en réduction de la libéralité consentie à ces derniers n'aurait été exercée dans le délai de la prescription.
Il est constant que Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V] sont à la fois ayants-droit de leur père, Monsieur [E] [V], décédé le [Date décès 3] 2004, lui-même héritier réservataire des époux [C] [V] et Madame [B] [O], et ayants-droit de cette dernière par l'effet de la donation du 20 août 1999.
Madame [Y] [C] avait, en 2007, fait assigner ses nièce et neveu, Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V], devant le tribunal de grande instance de Lorient aux fins de partage judiciaire des successions de ses parents, Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O].
Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V] avaient alors demandé quant à eux au tribunal de dire 'qu'il devra être réuni aux successions dont s'agit et avant calcul des quotités disponibles et réserves, les donations du 21 décembre 1979 et du 29 août 1999".
Le tribunal a, au dispositif du jugement du 3 février 2010, 'dit que le notaire désigné devra tenir compte des donations partages du 21/12/1979 et du 29/8/1999 avant calcul des quotités disponibles et réserves'.
Il n'est pas contesté que les donations visées tant par la demande reconventionnelle que par la disposition du jugement y faisant droit étaient en réalité celles des 20 et 27 décembre 1979 et 20 août 1999.
Il est utile de rappeler ici qu'aux termes des dispositions du Code civil, dans leur rédaction applicable au règlement des successions en cause, sous le paragraphe intitulé 'De la réduction des donations et legs':
- l'article 920 du Code civil dispose que: 'Les dispositions soit entre vifs, soit à cause de mort, qui excéderont la quotité disponible, seront réductibles à cette quotité lors de l'ouverture de la succession',
- et l'article 922, que: ' La réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur. On y réunit fictivement, après en avoir déduit les dettes, ceux dont il a été disposé par donation entre vifs d'après leur état à l'époque de la donation et leur valeur à l'ouverture de la succession...On calcule sur tous ces biens, eu égard à la qualité des héritiers qu'il laisse, quelle est la quotité dont le défunt a pu disposer'.
Il est encore précisé à l'article 868 que: 'Lorsque la réduction n'est pas exigible en nature, le donataire ou légataire est débiteur d'une indemnité équivalente à la portion excessive de la libéralité réductible'.
Et aussi:
- à l'article 828, que: 'On procède, devant (le notaire commis), aux comptes que les copartageants peuvent se devoir, à la formation de la masse générale, à la composition des lots, et aux fournissements à faire à chacun des copartageants',
- et à l'article 837, que: 'Si, dans les opérations renvoyées devant un notaire, il s'élève des contestations, le notaire dressera procès-verbal des difficultés et des dires respectifs des parties, les renverra devant le commissaire nommé pour le partage; et, au surplus, il sera procédé suivant les formes prescrites par les lois sur la procédure'.
Une demande en réduction n'est ainsi soumise à aucun formalisme particulier, et il est certain que la prétention formée par Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V], accueillie par le jugement du 3 février 2010, n'avait d'autre objet que d'inviter le notaire à tenir compte des indemnités de réduction pouvant être dues, ce que le notaire a effectivement fait dans son projet de partage.
Ainsi que l'a dit à juste titre le tribunal par le jugement déféré à la cour, le principe même de la réduction des libéralités consenties par les actes précités, s'il y a lieu en conséquence d'un excédent de celles-ci sur les quotités disponibles des successions de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O], ce pourquoi il devait être procédé au calcul de la réserve après réunion fictive des libéralités, n'a fait l'objet d'aucune contestation.
Bien au contraire, Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V] l'avaient invoqué dès l'instance initiale en partage judiciaire pour ce qui concerne les donations des 20 et 27 décembre 1979 et du 20 août 1999, et mission avait été donnée par le jugement du 3 février 2010 qui est passé en force de chose jugée, au notaire de les prendre en considération au titre des droits à réserve dans le projet de partage, ce qui incluait nécessairement leur réduction en tant que de besoin.
Et Madame [Y] [C] a quant à elle sollicité la réduction à l'encontre de Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V] pour les deux successions, par son assignation du 17 juin 2013.
Dès lors, aucun débat sur une éventuelle prescription d'une action en réduction n'a lieu d'être.
C'est donc à juste titre également que le tribunal a:
- considéré que, par son assignation du 17 juin 2013, Madame [Y] [C] exerçait une action en réduction qui était recevable en la forme mais qui ne faisait que reprendre une prétention déjà formée par ses copartageants, admise par le tribunal et mise en oeuvre par le notaire,
- déclaré en conséquence recevable l'action en réduction concernant les opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté et des successions de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O], et constaté qu'aucune autre action en réduction n'est formée par Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V] en qualité de bénéficiaires de la donation faite par leur grand-mère.
B/: - Sur les contestations relatives aux attributions:
La cour croit comprendre des écritures des consorts [C] qu'il n'y aurait pas lieu à attribution par moitié aux ayants-droits de Monsieur [E] [V] du total des indemnités de réduction, sous prétexte que la réduction de la donation consentie par Madame [O] le 20 août 1999 aux enfants de Madame [Y] [O] n'aurait jamais été sollicitée.
Mais il a été dit au contraire que non seulement cette réduction avait été demandée, mais qu'il avait été donné mission au notaire d'y procéder par un jugement devenu insusceptible de recours, et les consorts [C] ne justifient pas en quoi le projet d'état liquidatif serait, quant aux attributions concernées, erroné.
C/: - Sur les autres contestations:
a): - Créance de salaire différé:
S'agissant de l'imputation de la créance de salaire différé due à Monsieur [E] [V], dont les consorts [C] demandent qu'elle soit affectée à la seule succession de Monsieur [C] [V], il doit être observé d'abord que les prétentions des consorts [C] se contredisent dès lors qu'ils sollicitent dans le même dispositif de leurs conclusions la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a dit que le notaire commis devra tenir compte de la dite créance dans le partage des successions confondues de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O].
Il sera ensuite rappelé que le principe de la créance a été retenu par le jugement du 3 février 2010, lequel avait constaté au vu des attestations produites que Monsieur [E] [V] avait participé bénévolement à l'exploitation agricole de ses parents, non de son père, pendant trente huit mois à compter de ses dix huit ans, en notant d'ailleurs que Madame [Y] [C] avait admis ce principe, contestant seulement son assiette dans le temps.
C'est, en conséquence de cette décision sur laquelle il ne peut être revenu, à raison que le notaire a, dans le projet d'état liquidatif, inscrit la créance de salaire différé au passif des successions confondues de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O].
b): - Exigibilité des sommes dues:
La demande des consorts [C] tendant à voir dire par la cour ce que dit l'article 868 du Code civil dans sa rédaction applicable au litige, est dépourvue d'intérêt.
c): - Avantages indirects:
Il a également été statué par le jugement du 3 février 2010 sur le sort des avantages indirects dont a bénéficié Monsieur [E] [V] par le fait de prélèvements effectués sur les comptes bancaires de Madame [B] [O], le tribunal ayant alors dit qu'à défaut de justification par les héritiers de Monsieur [E] [V] de justifier d'une créance de ce dernier correspondant aux sommes dont le notaire aura vérifié qu'il les avait perçues, ces sommes seront rapportables à la succession.
Il l'a encore été quant à l'incidence de l'occupation par Monsieur [E] [V] d'une maison à [Localité 1], dont le tribunal a dit que l'équivalent monétaire de l'avantage ainsi procuré à leur père devrait être rapporté par Madame [P] [V] et Monsieur [D] [V] à la succession de Madame [B] [O] de 1995 jusqu'au décès de celle-ci.
Il ne peut être revenu, pour les causes précitées, sur ces dispositions.
d): - Déduction des dettes:
Il est vrai, comme le soutiennent les consorts [C], que les frais funéraires et les frais de liquidation et de partage des successions constituent des charges grevant les successions et doivent, conformément aux dispositions de l'article 922 du Code civil dans sa version applicable au litige, être déduits de la masse de calcul de la quotité disponible.
Il appartiendra au notaire d'imputer ces charges pour chacune des successions pour le calcul de la dite quotité.
e): - Désignation du notaire:
Les consorts [C] ne justifient d'aucun motif sérieux conduisant à mettre en doute l'impartialité du notaire chargé des opérations de comptes, liquidation et partage des successions, Maître [F] [U].
Leur demande tendant à voir ce notaire déchargé de sa mission sera rejetée.
4/: - Sur les frais et dépens:
Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens de première instance et aux frais non compris en ceux-ci seront confirmées.
S'agissant de l'instance d'appel, il n'y a pas davantage lieu à indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile; les dépens seront à la charge des consorts [C].
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Après rapport fait à l'audience;
Donne acte à Monsieur [E] [C], Madame [U] [C], épouse [Z], et Madame [G] [C] de leur intervention volontaire dans l'instance d'appel;
Ordonne la rectification des erreurs matérielles contenues au dispositif du jugement déféré en ce que:
- la mention 'dit que les ayants droits de Monsieur [E] [V] devront faire rapport à la succession de Madame [B] [O] des sommes de 26 702,06 € et 20 000 €' est remplacée par la mention: 'dit que les ayants droits de Monsieur [E] [V] devront faire rapport à la succession de Madame [B] [O] des sommes de 26 702,06 € et 27000 €', le reste de la phrase sans changement,
- la mention 'dit que la donation consentie par Madame [B] [O] à ses enfants et petits-enfants le 20 août 2009' est remplacée par la mention 'dit que la donation consentie par Madame [B] [O] à ses enfants et petits-enfants le 20 août 1999", le reste de la phrase sans changement,
- la mention 'ordonne au notaire commis de réévaluer tous les biens visés par la donation simple du 20 août 2009' est remplacée par la mention 'ordonne au notaire commis de réévaluer tous les biens visés par la donation simple du 20 août 1999", le reste de la phrase sans changement;
Confirme le jugement déféré, ainsi rectifié, en toutes ses dispositions;
Y ajoutant, dit que le notaire commis pour procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté et des successions de Monsieur [C] [V] et Madame [B] [O], épouse [V], devra déduire de la masse de calcul de la quotité disponible de chacune des successions, les frais funéraires et les frais de liquidation et de partage;
Rejette toutes autres demandes;
Condamne Madame [Y] [V], épouse [C], aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT