1ère Chambre
ARRÊT N°269/2017
R.G : 16/06100
SA SAFER BRETAGNE
C/
M. [U] [T] [X] [S]
SCP [L] - [G]
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 30 MAI 2017
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : M. Xavier BEUZIT, Président,
Assesseur :M. Marc JANIN, Conseiller, entendu en son rapport
Assesseur : Mme Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 04 Avril 2017
ARRÊT :
rendu par défaut, prononcé publiquement le 30 Mai 2017 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTE :
SA SAFER BRETAGNE
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Représentée par Me Bertrand FAURE de la SELARL JURIS'ARMOR, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
INTIMÉS :
M. [U] [T] [X] [S]
né le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 1]
[Adresse 3]
[Adresse 4]
régulièrement assigné à sa personne, n'a pas constitué
SCP [L] - [G]
mandataires judiciaires
[Adresse 5]
[Adresse 6]
Régulièrement assignée en l'étude d'huissier, n'a pas constitué
FAITS ET PROCÉDURE:
Les consorts [J]-[S], propriétaires indivis par succession de parcelles agricoles sur le territoire de la commune de [Localité 2] cadastrées section [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6] pour une superficie totale de 9 ha 26 a 10 ca, ont, en 2015, entendu les vendre aux époux [X] au prix de 80 000 €.
L'un des indivisaires, M. [U] [S], étant en liquidation judiciaire suivant un jugement du 25 août 2009, la cession a été autorisée pour ce qui concerne les droits indivis de celui-ci, par une ordonnance du juge commissaire en date du 9 juin 2015.
Me [N], notaire à [Localité 3], a, conformément aux dispositions de l'article L. 141-1-1 du Code rural et de la pêche maritime, informé la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Bretagne (Safer), titulaire d'un droit de préemption, de ce projet de cession le 22 juillet 2015.
La Safer faisait connaître son intention d'exercer son droit de préemption dans le cadre de sa mission de régulation du marché foncier, mais avec révision du prix, qu'elle estimait exagéré, pour le voir fixer à 46 305 € conformément à l'avis des commissaires du gouvernement.
Après divers échanges de correspondance, Me [N] établissait un projet d'acte de cession et avisait la Safer de ce que, si les indivisaires validaient le projet d'acquisition dans ces conditions, il y avait lieu toutefois d'obtenir l'autorisation du juge commissaire à la liquidation judiciaire de M. [U] [S] pour régulariser la vente au prix envisagé par la Safer.
Statuant sur la requête présentée par Me [B] [L], mandataire judiciaire, pour se voir autoriser à intervenir à la régularisation de l'acte, le vice-président du tribunal de grande instance de Nantes, juge commissaire, a, par ordonnance du 26 juillet 2016, rejeté la demande.
La Safer a interjeté appel de cette décision 1er août 2016.
Par conclusions du 28 octobre 2016, signifiées à M. [U] [S] et à la Scp [L]-[G], mandataires judiciaires, qui n'ont pas constitué avocat devant la cour, et auxquelles il sera renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments, la Safer demande à la cour:
d'infirmer l'ordonnance déférée,
d'autoriser la Scp [L]-[G], mandataires judiciaires, à régulariser l'acte de vente des parcelles agricoles situées sur le territoire de la commune de [Localité 2], lieudit '[Adresse 7]', cadastrées section [Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 6], à son profit au prix de 46 305 €,
de statuer ce que de droit sur les dépens.
La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 14 mars 2017.
MOTIFS DE LA DÉCISION DE LA COUR:
Il résulte de l'article L. 143-10 du Code rural et de la pêche maritime que lorsque la Safer déclare vouloir faire usage de son droit de préemption et qu'elle estime que le prix de cession est exagéré, notamment en fonction des prix pratiqués dans la région pour des immeubles de même ordre, elle adresse une offre d'achat établie à ses propres conditions, et qu'en ce cas, si le vendeur n'accepte pas cette offre, il peut soit retirer le bien de la vente, soit demander la révision du prix proposé par la Safer au tribunal compétent de l'ordre judiciaire.
Mais dans le cas particulier où les biens cédés constituent des actifs d'un débiteur en liquidation judiciaire, l'article L. 642-18 du Code de commerce dispose que la vente a lieu selon la procédure d'adjudication prévue par les articles L. 322-5 à L. 322-13 du Code des procédures civiles d'exécution; toutefois, si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions, le juge-commissaire peut ordonner la vente par adjudication amiable sur la mise à prix qu'il fixe ou autoriser la vente de gré à gré aux prix et conditions qu'il détermine.
Il en ressort que, dès lors que la vente a été autorisée par le juge commissaire, l'exercice de la préemption par la Safer ne peut avoir pour effet de modifier les conditions de la vente amiable autorisée par le juge commissaire dans le cadre de la liquidation judiciaire.
En l'occurrence, il est constant que M. [U] [S], copropriétaire indivis des biens objets de l'exercice par la Safer de son droit de préemption, était alors en liquidation judiciaire, de sorte que la cession de ses droits indivis relevait des conditions déterminées par le juge commissaire par son ordonnance du 9 juin 2015, qui avait autorisé la cession au prix de 80 000 € aux époux [X] et dont il n'est pas contesté qu'elle avait acquis force de chose jugée, et il n'est pas justifié à cet égard de ce que les époux [X] ont renoncé à acquérir à ces conditions.
Ce faisant, le juge commissaire s'est nécessairement prononcé sur le juste prix au regard des dispositions d'ordre public de la liquidation judiciaire qui visent au désintéressement des créanciers, et cette fixation judiciaire de ce prix est opposable à la Safer, peu important que celle-ci n'ait pu faire valoir une offre établie à ses propres conditions dans le cadre des dispositions de l'article L. 143-10 du Code rural et de la pêche maritime.
C'est en conséquence à juste titre que le juge commissaire a considéré, par l'ordonnance dont appel, qu'il n'y avait pas lieu d'autoriser le mandataire judiciaire à intervenir à la régularisation de l'acte de vente établi dans des conditions de prix différentes de celles pour lesquelles il avait délivré son autorisation, et a rejeté la requête.
L'ordonnance sera confirmée, et la Safer condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Après rapport fait à l'audience;
Déboute la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Bretagne de ses demandes;
Confirme l'ordonnance déférée;
Condamne la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural Bretagne aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT