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03/11/2016 | FRANCE | N°15/01531

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre des baux ruraux, 03 novembre 2016, 15/01531


Chambre des Baux Ruraux





ARRÊT N° 41



R.G : 15/01531













EARL [E]



C/



M. [S] [G]

Mme [A] [F] épouse [G]

















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEU

PLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 NOVEMBRE 2016





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Maurice LACHAL, Président,

Assesseur : Madame Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Conseiller,

Assesseur : Madame Geneviève SOCHACKI, Conseiller,



GREFFIER :



Madame...

Chambre des Baux Ruraux

ARRÊT N° 41

R.G : 15/01531

EARL [E]

C/

M. [S] [G]

Mme [A] [F] épouse [G]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 03 NOVEMBRE 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Maurice LACHAL, Président,

Assesseur : Madame Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, Conseiller,

Assesseur : Madame Geneviève SOCHACKI, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Françoise FOUVILLE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 01 Septembre 2016

devant Madame Marie-Françoise D'ARDAILHON MIRAMON, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 03 Novembre 2016 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

EARL [E] prise en la personne de son représentant légal, Madame [W] [E] domiciliée en cette qualité au siège,

« [Adresse 1] »

[Localité 1]

Représentée par Me Julien DERVILLERS de la SELARL LAHALLE/DERVILLERS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Monsieur [S] [G]

né le [Date naissance 1] 1923 à [Localité 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Jean BOUESSEL DU BOURG de la SELARL JEAN BOUESSEL DU BOURG SOCIETE D'AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

- 2 -

Madame [A] [F] épouse [G]

née le [Date naissance 2] 1927 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean BOUESSEL DU BOURG de la SELARL JEAN BOUESSEL DU BOURG SOCIETE D'AVOCATS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

EXPOSE DU LITIGE

M. et Mme [S] [G] ont donné à bail rural à l'EARL [E], selon acte authentique du 2 avril 1992, diverses parcelles de terre sises à [Localité 2] d'une contenance totale de 12 ha 41 a 74 ca pour une durée de neuf ans à compter du 30 septembre 1991. Ce bail a été renouvelé le 30 septembre 2000 puis le 30 septembre 2009.

M. et Mme [G] ont fait délivrer un premier congé pour reprise par leur fille qui a été annulé par jugement du tribunal paritaire des baux ruraux du 19 janvier 2009.

Par acte d'huissier du 4 septembre 2013, ils ont fait délivrer un nouveau congé aux fins de reprise sexennale par leur fille Mme [R] [T] pour exploiter à effet au 29 septembre 2015.

L'EARL [E] a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Saint-Brieuc d'une contestation de ce congé, le 11 décembre 2013.

Par jugement du 26 janvier 2015, le tribunal paritaire des baux ruraux de Saint-Brieuc a':

débouté l'EARL [E] de l'ensemble de ses demandes,

l'a condamnée aux dépens et à payer à M. et Mme [G] la somme de 400 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la requête de Mme [R] [T] tendant à obtenir l'annulation de l'arrêté du 14 avril 2014 par lequel le préfet des Côtes d'Armor lui a refusé l'autorisation d'exploiter les terres d'une superficie de 12 ha 42 a situées sur la commune de Pordic.

L' EARL [E], appelante, demande à la cour de':

déclarer recevable son action en nullité du congé,

réformer la décision entreprise,

déclarer nul et de nul effet le congé délivré le 4 septembre 2013,

condamner M. et Mme [G] à lui verser la somme de 3 000 €, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [G], intimés, demandent à la cour de':

confirmer le jugement,

valider le congé,

débouter l' EARL [E] de toutes ses demandes,

la condamner à leur verser la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières écritures déposées le 30 août 2016 pour l'appelante et le 31 août 2016 pour les intimés, lesquelles ont été développées oralement à l'audience.

MOTIFS DE LA DECISION

1. M. et Mme [G] soulèvent en premier lieu le défaut de qualité du preneur à agir en contestation du congé au motif que le bail est nul puisque l' EARL [E] ne justifie pas d'une autorisation régulière d'exploiter, celle-ci ne visant pas les parcelles louées. Ils estiment qu'il leur est possible de se prévaloir de cette nullité sans considération de délai dès lors qu'ils invoquent cette nullité par voie d'exception.

L' EARL [E] rétorque que cet argument est absurde comme l'a relevé le tribunal puisqu'il émane des bailleurs qui ont délivré congé et qu'elle dispose d'une autorisation d'exploiter régulière, n'étant pas responsable de la rédaction des autorisations par les services de la préfecture.

L'exception de nullité ne peut être soulevée que pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté et la nullité du bail pour inobservation de la législation sur le contrôle des structures ne peut être opposée au preneur qui conteste la validité d'un congé aux fins de reprise. Elle sera donc rejetée comme l'irrecevabilité tirée du défaut de qualité à agir de la société preneuse qui en découle.

2. L'EARL [E] fait valoir que Mme [T], bénéficiaire de la reprise, s'est vue refuser par jugement définitif du tribunal administratif de Rennes l'autorisation d'exploiter les parcelles faisant l'objet du congé après qu'il a relevé qu'elle ne pouvait bénéficier du régime déclaratif. Elle ajoute que cette évidence est d'autant plus établie que les dispositions nouvelles de l'article L 331-2 II du code rural et de la pêche maritime modifiées par la loi d'avenir de l'agriculture du 13 octobre 2014 prévoient une quatrième condition tenant au fait que le candidat à la reprise souhaitant bénéficier du régime déclaratif ne peut, après consolidation de son exploitation, disposer d'une superficie supérieure à un seuil fixé par le schéma directeur régional des structures, lequel a été fixé à 20 ha par l'arrêté préfectoral du 28 juin 2016. Elle précise que la déclaration d'exploiter ne pourra intervenir qu'après la libération des terres et qu'à cette date, le nouveau schéma sera entré en vigueur et que sa demande sera irrecevable.

M. et Mme [G] rétorquent que le jugement du tribunal administratif n'a aucune portée puisque leur fille relève du régime dérogatoire de la déclaration prévu par l'article L 331-2 II précité dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 octobre 2014, raison pour laquelle ils n'ont pas interjeté appel. Ils font valoir que les conditions du régime applicable doivent être appréciées à la date pour laquelle le congé a été donné soit le 29 septembre 2015 et qu'à cette date où l'arrêté du 28 juin 2016 n'était pas pris, l'article 4 du décret du 22 juin 2015 prévoyait que les demandes et déclarations déposées avant la date du futur schéma directeur régional demeuraient soumises aux dispositions des articles R 331-1 et R 331-12 dans leur rédaction antérieure audit décret.

Les premiers juges ont justement relevé que l'article L 411-6 du code rural prévoyait la possibilité d'introduire une clause de reprise à la fin de la sixième année suivant le renouvellement du bail au profit notamment d'un descendant qui devra exploiter personnellement dans les conditions fixées à l'article L 411-59 et que le congé devait être notifié au preneur au moins deux ans à l'avance dans les formes prescrites à l'article L 411-47, ce qui est le cas, en l'espèce.

En vertu de l'article L 411-59 du code précité, le bénéficiaire de la reprise doit, à partir de celle-ci, se consacrer à l'exploitation du bien repris pendant au moins neuf ans soit à titre individuel, soit au sein d'une société dotée de la personnalité morale, soit au sein d'une société en participation dont les statuts sont établis par un écrit ayant acquis date certaine. Il ne peut se limiter à la direction et à la surveillance de l'exploitation et doit participer sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation. Il doit posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir.

Le bénéficiaire de la reprise doit occuper lui-même les bâtiments d'habitation du bien repris ou une habitation située à proximité du fonds et en permettant l'exploitation directe.

Le bénéficiaire de la reprise doit justifier par tous moyens qu'il satisfait aux obligations qui lui incombent en application des deux alinéas précédents et qu'il répond aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnées aux articles L. 331-2 à L. 331-5 ou qu'il a bénéficié d'une autorisation d'exploiter en application de ces dispositions.

Toutefois, l'exercice du droit de reprise constitue une installation, un agrandissement ou une réunion d'exploitation par le bénéficiaire et, à ce titre, l'opération est soumise au contrôle des structures des articles L 331-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime.

Le tribunal administratif de Rennes par jugement du 18 décembre 2015 a seulement rejeté la demande d'annulation de l'arrêt préfectoral du 14 avril 2014 refusant à Mme [T] l'autorisation d'exploiter les parcelles objet de la reprise. Les motifs de ce jugement, aux termes desquels Mme [T] ne pouvait bénéficier du régime dérogatoire de la déclaration puisqu'elle ne justifiait pas que la condition du caractère libre des biens était remplie au jour de la décision attaquée dans la mesure où le congé délivré le 4 septembre 2013 ne prenait effet que le 29 septembre 2015, n'ont pas autorité de la chose jugée et ce , d'autant plus que cette appréciation relève du juge judiciaire.

Celle-ci peut donc arguer devant la cour du bénéfice de la déclaration.

Le paragraphe I de l'article L 331-2 du code rural et de la pêche maritime précise les opérations qui sont soumises au régime de l'autorisation préalable. Le paragraphe II du même article prévoit un régime dérogatoire à l'autorisation d'exploiter au profit des biens de famille.

L'article 331-II dans sa rédaction antérieure à la loi d'avenir pour l'agriculture du 13 octobre 2014 prévoyait qu'était soumise à déclaration préalable la mise en valeur d'un bien agricole reçu par donation, location, vente ou succession d'un parent ou allié jusqu'au troisième degré lorsque les conditions suivantes sont remplies:

1° le déclarant satisfait aux conditions de capacité ou d'expérience professionnelle mentionnée au 3° du I,

2° les biens sont libres de location,

3° les biens sont détenus par ce parent ou allié depuis neuf ans au moins.

Dans sa version issue de la loi précitée, cet article a rajouté un 4° ainsi rédigé': «' Les biens sont destinés à l'installation d'un nouvel agriculteur ou à la consolidation de l'exploitation du déclarant, dès lors que la surface totale de celle-ci après consolidation n'excède pas le seuil de surface fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles en application de l'article L 312-1'.'»

Ce seuil a été fixé par l'arrêté du préfet de la région Bretagne du 28 juin 2016 fixant le schéma directeur régional des exploitations agricoles à 20 hectares alors que Mme [T] exploite déjà près de 100 hectares.

Toutefois, les conditions du régime applicable doivent être appréciées à la date à laquelle le congé doit prendre effet soit le 29 septembre 2015 et à cette date, la loi du 13 octobre 2014 était applicable mais le schéma directeur général n'était pas fixé de sorte que la quatrième condition n'était pas déterminée à cette date. Elle doit donc être déclarée inopposable à Mme [T]

qui remplissait à cette date les trois premières conditions pour bénéficier du régime dérogatoire de la déclaration puisque:

- il n'est pas contesté que les biens sont détenus par M. et Mme [G] parents de la bénéficiaire de la reprise depuis 1985 soit depuis plus de neuf ans';

- les biens sont libres de location au jour de la déclaration puisque cette condition doit être considérée comme remplie dès lors que par application de l'article R. 331-7 du code rural, le bénéficiaire devra adresser sa déclaration au plus tard dans le mois suivant le départ effectif du preneur en place, ce dont il résulte que la procédure de déclaration est utilisable même lorsque la transmission suppose l'éviction du preneur en place ;

- Mme [T] justifie d'une expérience professionnelle de plus de cinq ans en qualité d'exploitante acquise sur une surface de plus de 99 hectares puisqu'elle est exploitante depuis avril 2007.

M. et Mme [G] prouvent encore que leur fille dispose du matériel et du cheptel lui permettant cette reprise puisqu'elle exploite déjà près de 100 hectares et qu'elle est domiciliée à [Localité 2] commune où sont situées les terres à reprendre, de sorte qu'elle remplit toutes les conditions prévues à l'article L 411-59 du code rural.

Le jugement devra donc être confirmé en ce qu'il a validé le congé pour reprise donné par M. Et Mme [G].

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, publiquement et contradictoirement,

Rejette l'exception de nullité et la demande d'irrecevabilité de l'action de l' EARL [E] pour défaut de qualité à agir ;

Confirme le jugement ;

Condamne l' EARL [E] aux dépens,

Dit n'y avoir lieu à indemnité de procédure ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre des baux ruraux
Numéro d'arrêt : 15/01531
Date de la décision : 03/11/2016

Références :

Cour d'appel de Rennes BR, arrêt n°15/01531 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-03;15.01531 ?
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