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29/03/2016 | FRANCE | N°15/01667

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 29 mars 2016, 15/01667


1ère Chambre





ARRÊT N° 173/2016



R.G : 15/01667













SARL DEVINE ID



C/



M. [W] [Z]

















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



C

OUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 29 MARS 2016





COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



M. Xavier BEUZIT, Président, entendu en son rapport

M. Marc JANIN, Conseiller,

Mme Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,



GREFFIER :



Mme Stéphanie LE CALVE, lors des débats, et Mme Marie-Claude COURQUIN...

1ère Chambre

ARRÊT N° 173/2016

R.G : 15/01667

SARL DEVINE ID

C/

M. [W] [Z]

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 29 MARS 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. Xavier BEUZIT, Président, entendu en son rapport

M. Marc JANIN, Conseiller,

Mme Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,

GREFFIER :

Mme Stéphanie LE CALVE, lors des débats, et Mme Marie-Claude COURQUIN, lors du prononcé,

DÉBATS :

A l'audience publique du 16 Février 2016

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 29 Mars 2016 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE :

SARL DEVINE ID

[Adresse 1]

Bâtiment B

[Localité 1]

Représentée par Me Patrick EVENO de la SELARL P & A, avocat au barreau de VANNES

INTIMÉ :

M. [W] [Z]

né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 2] ([Localité 2])

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Me Bernard BREZULIER de la SCP BREZULIER - LAROQUE-BREZULIER, avocat au barreau de VANNES

FAITS ET PROCÉDURE

La société Devine, envisageant d'acquérir une emprise foncière située [Adresse 3], à [Localité 3], sur laquelle elle allait entreprendre la construction d'un ensemble immobilier, a par acte sous seing privé du 2 mai 2012, signé avec M. [W] [Z], un contrat de réservation au profit de ce dernier des lots 1 et 2 ainsi que des emplacements de parking 1 à 11, valable jusqu'au 31 novembre 2012.

Le prix prévisionnel, hors frais des deux lots réservés par M. [Z], était fixé à 760.355 € TTC, payable au fur et à mesure de l'avancement des travaux.

Le réservant devait verser le même jour, entre les mains de Me [B], notaire à [Localité 4], chargé de réitérer l'acte de vente au plus tard le 1er décembre 2012, après réalisation des conditions suspensives, une somme de 38.000 € à titre de dépôt de garantie qui serait conservée par le notaire pour le compte de l'acquéreur.

Parmi les conditions suspensives du contrat figurait celle de l'obtention d'un prêt maximum de 600.000 € au taux maximum de 4,20 %, hors frais et assurances, avec obligation pour le réservataire de déposer un dossier de demande de prêt dans les 15 jours de la signature du contrat de réservation et de justifier de l'obtention ou non du prêt au plus tard, 45 jours après cette signature, à défaut de quoi, le contrat serait nul et non avenu.

M. [Z] a versé un chèque de 38.000 € émis le 2 mai 2002 par Mme [J] [Z] à l'ordre de la Sarl Devine.

Le notaire, malgré plusieurs courriers de relance de juin à août 2012, n'a pas obtenu de réponse de M. [Z] à ses demandes de justifier de l'obtention du crédit et le chèque de 38.000 €, présenté à l'encaissement, s'est révélé impayé.

La Sarl Devine a fait assigner M. [W] [Z] devant le tribunal de grande instance de Lorient aux fins d'obtenir paiement de la somme de 38.000 € avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 8 août 2013.

Par jugement du 25 novembre 2014, le tribunal de grande instance de Lorient a :

rejeté les demandes de la Sarl Devine ;

rejeté les demandes reconventionnelles de M. [W] [Z] ;

condamné la Sarl Devine à payer à M. [W] [Z] la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

condamné la Sarl Devine aux dépens.

La Sarl Devine a, par déclaration au greffe du 2 janvier 2015, interjeté appel contre ce jugement.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe le 27 juillet 2015, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, elle demande à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [W] [Z] de ses demandes reconventionnelles,

le réformer pour le surplus,

condamner M. [W] [Z] à lui payer la somme de 38.000 € avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation ;

condamner M. [W] [Z] à payer la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe le 19 août 2015, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [W] [Z] demande à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes de la Sarl Devine et l'a condamnée à lui payer la somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

réformer le jugement en ce qu'il a débouté M. [Z] de ses demandes reconventionnelles ;

Statuant à nouveau,

ordonner la restitution, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt, du chèque de 38.000 € qui se trouve en possession de la Sarl Devine ;

condamner la Sarl Devine à payer la somme de 1.000 € par mois à compter de la présentation du chèque à l'encaissement par la société Devine à titre de dommages et intérêts ;

En toute hypothèse,

condamner la société Devine à lui payer la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- sur la nullité du contrat de réservation :

L'acte sous seing privé du 16 mars 2012, valant contrat de réservation, stipulait : ' le réservataire remet ce jour entre les mains de Me [B] [P], notaire à [Localité 4], une somme non productive d'intérêts de 38.000 € à titre de dépôt de garantie. Cette somme sera conservée par le notaire susnommé qui la détiendra pour le compte de l'acquéreur'.

A l'inverse des autres versements prévus au contrat, qui devaient être faits directement entre les mains du réservant au fur et à mesure de l'avancement des travaux suivant le calendrier de dates prévisionnelles d'échéances qui serait annexé à l'acte authentique, le versement du chèque de 38.000 € devait s'opérer entre les mains du notaire qui en était désigné comme dépositaire pour le compte de l'acquéreur, et qui, selon les mentions mêmes de l'acte, correspondait aux frais d'acte pour lesquels le notaire doit disposer des fonds correspondants, en vue de la passation d'un acte soumis à des droits d'enregistrement et d'autres frais non limitativement énumérés.

Les termes de cette convention ont été modifiés en ce que le notaire, dans une lettre datée du 2 juin 2012 adressée à M. [W] [Z], précise avoir bien reçu le chèque de garantie émis le 2 mai 2012 et dont il indique, qu'en accord avec M. [Z] [I], gérant de la société Devine, il ne l'encaissera que le 2 juillet prochain.

Par la suite, le 7 juillet 2012, le notaire a constaté que ce même chèque avait en réalité été émis à l'ordre du réservant, la Sarl Devine, et a attiré l'attention de M. [Z] que, s'agissant d'un dépôt de garantie, il ne pouvait l'encaisser sur son propre compte, de sorte qu'il lui demandait d'établir un autre chèque à l'ordre de son étude, le premier chèque étant alors restitué à M. [Z] ou détruit par le notaire suivent le choix de M. [Z].

Ces lettres du notaire, dont M. [Z] ne pouvait ignorer le sens et l'obligation pour lui de satisfaire à celle non remplie depuis le jour de la signature du contrat de réservation soit le 16 mars 2012, de verser la somme de 38.000 € à titre de garantie, n'ayant pas été suivies d'effet, pas plus au demeurant, qu'une dernière lettre de rappel du 23 août 2012, ont conduit le notaire à remettre le chèque émis à l'ordre de la société Devine à celle-ci qui l'a fait porter à l'encaissement mais a vu le chèque rejeté le 19 octobre 2012 par le crédit mutuel de Bretagne pour ' provision insuffisante - le chèque est impayé pour son montant total'.

Au vu de ces circonstances, qui démontrent que la tentative d'encaissement du chèque par le réservant est la suite des manquements répétés de M. [W] [Z] à son obligation, malgré les trois rappels écrits que lui a adressés Me [B] au cours de l'été 2012, de verser la somme de 38.000 € sur un compte ouvert à l'ordre du notaire et conservé par ce dernier pour son compte à titre de dépôt de garantie.

Aussi, M. [W] [Z] ne peut soutenir, en raison de sa propre attitude par laquelle il a délibérément tenté de contourner les dispositions légales en matière de vente en l'état futur d'achèvement, que ces dispositions n'ont pas été respectées puisque c'est lui-même qui y a conduit en se soustrayant à ses obligations contractuelles de réservataire et ce, dès le jour de la signature du contrat.

En conséquence, le moyen tiré de la nullité du contrat de réservation sera rejeté et le jugement infirmé de ce chef.

- sur la caducité du contrat de réservation :

M. [W] [Z] soutient que le contrat prévoyait la réitération de l'acte au plus tard le 1er décembre 2012 et que lui-même, n'ayant reçu de la Sarl Devine de sommation à régulariser l'acte sous seing privé, celui-ci est devenu caduc, les courriers adressés par Me [B], qui n'était pas le conseil de la Sarl Devine, ne pouvant valoir mise en demeure adressée par le réservant.

Cependant, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 12 octobre 2012 par Me [B], ce notaire qui était chargé de la réitération de l'acte et dont les injonctions ou convocations valent ainsi mise en demeure à l'égard de l'une ou l'autre des parties à l'acte, a rappelé à M. [Z] qu'il n'avait pas encore justifié du dépôt d'une demande de prêt comme il s'était engagé dans le contrat de réservation du 16 mars 2012 et ce, dans un délai de quinze jours de la signature de l'acte, soit le 31 mars 2012 au plus tard.

Aussi, faute par M. [Z] d'avoir répondu à cette mise en demeure du notaire qui constatait la non réalisation de la condition suspensive par la défaillance du réservataire, la réitération de l'acte ne pouvait avoir lieu sans qu'il y ait lieu de faire procéder par le réservant à une nouvelle mise en demeure du réservataire.

Aussi, le moyen tiré de la caducité du contrat de réservation faute de sa réitération par acte authentique dans le délai convenu sera également rejeté.

- sur la demande de dommages et intérêts de la Sarl Devine:

Dans la mesure où le dépôt de garantie prévu au contrat n'a jamais pu être réalisé par le virement au crédit du compte du notaire du chèque de 38.000 € émis par Mme [J] [Z], faute d'une part, d'avoir été émis à l'ordre du notaire et d'autre part, de provision, la clause du contrat selon laquelle le dépôt de garantie et les intérêts qu'il aura produits demeureront acquis au réservant si le défaut de réalisation des conditions suspensives stipulées au profit du réservataire résulte de la faute ou de la négligence de ce dernier, ne peut être mise en oeuvre, aucune somme ne pouvant en effet être restituée puisque non versée.

Cependant, l'article 1147 du code civil dispose que le débiteur est condamné au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de son obligation toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée.

M. [W] [Z] avait, de manière claire et précise, l'obligation de verser la somme de 38.000 € à titre de dépôt de garantie en exécution de son obligation contractuelle de réservataire.

N'ayant pas rempli son obligation et ne rapportant pas la preuve d'une cause étrangère qui l'aurait mis dans l'impossibilité de la remplir et étant, au contraire, entièrement responsable de l'absence de paiement par les manoeuvres auxquelles il s'est livré pour donner l'apparence de satisfaire à l'obligation tout en ne mettant pas en place les moyens financiers et juridiques pour y parvenir, c'est à dire en émettant un chèque de 38.000 € provisionné au nom de Me [B] comme celui-ci le lui a réclamé plusieurs fois, M. [W] [Z] a ainsi commis une faute dont il doit réparation à sa cocontractante, la Sarl Devine.

En effet, cette société justifie que le 22 février 2013, après la rupture de ses relations contractuelles avec M. [W] [Z], elle a conclu un nouveau contrat de réservation portant sur les mêmes biens que ceux réservés à ce dernier, avec la société Auray Océane mais à un prix inférieur de 31.000 €.

Cette perte sur le prix ainsi que le retard subi en raison de l'attitude fautive de M. [W] [Z] justifient que soient alloués à la société Devine des dommages et intérêts d'un montant de 38.000 €.

- sur la demande de restitution du chèque de 38.000 € :

Cette demande est dépourvue d'intérêt dès lors que ce chèque a été rejeté lors de sa présentation pour absence totale de provision.

-sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Il sera alloué à la Sarl Devine la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.

M. [W] [Z] sera en outre condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Lorient en date du 25 novembre 2014 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Vu l'article 1147 du code civil,

Condamne M. [W] [Z] à payer à la Sarl Devine ID la somme de 38.000 € à titre de dommages et intérêts ;

Déclare sans objet la demande reconventionnelle de M. [W] [Z] aux fins de restitution du chèque de 38.000 € émis par Mme [J] [Z] le 2 mai 2012 ;

Condamne M. [W] [Z] à payer à la Sarl Devine ID la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

Condamne M. [W] [Z] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15/01667
Date de la décision : 29/03/2016

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°15/01667 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-29;15.01667 ?
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