1ère Chambre
ARRÊT N°124/2016
R.G : 15/00623
Mme [H] [X] épouse [D]
M. [E] [D]
M. [E] [D]
Mme [A] [D] épouse [W]
C/
M. [S] [T]
Mme [F] [T] épouse [V]
M. [Y] [T]
Décision tranchant pour partie le principal / Sursis à statuer
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 01 MARS 2016
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Xavier BEUZIT, Président,
Monsieur Marc JANIN, Conseiller,
Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller, entendue en son rapport
GREFFIER :
Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 19 Janvier 2016
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 01 Mars 2016 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
****
APPELANTS :
Madame [H] [X] épouse [D]
née le [Date naissance 4] 1955 à [Localité 1] [Localité 1]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Elisabeth PHILY de la SCP GLOAGUEN & PHILY, avocat au barreau de BREST
Monsieur [E] [D]
né le [Date naissance 6] 1953 à [Localité 1] [Localité 1]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représenté par Me Elisabeth PHILY de la SCP GLOAGUEN & PHILY, avocat au barreau de BREST
Monsieur [E] [D]
né le [Date naissance 7] 1984 à [Localité 1] [Localité 1]
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représenté par Me Elisabeth PHILY de la SCP GLOAGUEN & PHILY, avocat au barreau de BREST
Madame [A] [D] épouse [W]
née le [Date naissance 5] 1981 à [Localité 1] [Localité 1]
[Adresse 3]
[Localité 3]
Représentée par Me Elisabeth PHILY de la SCP GLOAGUEN & PHILY, avocat au barreau de BREST
INTIMÉS :
Monsieur [S] [T]
né le [Date naissance 2] 1950 à [Localité 8]
[Adresse 5]
[Localité 6]
Représenté par Me Gaëlle BERGER-LUCAS, Postulant, avocat au barreau de RENNES et par Me Michel LE ROY, Plaidant, avocat au barreau de BREST
Madame [F] [T] épouse [V]
née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 1] [Localité 1]
[C]
[Localité 2]
Représentée par Me Gaëlle BERGER-LUCAS, Postulant, avocat au barreau de RENNES et par Me Michel LE ROY, Plaidant, avocat au barreau de BREST
Monsieur [Y] [T]
né le [Date naissance 3] 1981 à [Localité 1] [Localité 1]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représenté par Me Gaëlle BERGER-LUCAS, Postulant, avocat au barreau de RENNES et par Me Michel LE ROY, Plaidant, avocat au barreau de BREST
FAITS ET PROCÉDURE:
Monsieur [J] [X] et son épouse, née [G] sont respectivement décédés les [Date décès 1] 2010 et [Date décès 2] 2009 en laissant pour leur succéder leurs deux filles:
- [M] [X] épouse [T],
- [H] [X] épouse [D].
Monsieur [X], qui avait lui-même procuration sur les comptes bancaires de son épouse, avait donné procuration en 2006 à Madame [D] sur les comptes du couple puis en a demandé l'annulation.
Par acte du 02 mars 2007, Monsieur [X] a institué Madame [D] sa légataire universelle en précisant qu'il lui serait attribué en priorité la maison de [Localité 3], [Adresse 6], et subsidiairement, la maison de [Localité 5].
Par ordonnance du 07 février 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Brest a ordonné une expertise, confiée à Monsieur [P] puis à Madame [Q], qui a déposé son rapport le 28 juin 2012.
Madame [M] [T] est décédée le [Date décès 2] 2011 en laissant pour lui succéder son époux [S] [T] et ses enfants, [F] et [Y].
Par acte du 05 mars 2012, Monsieur [S] [T], Madame [F] [T] et Monsieur [Y] [T] (les consorts [T]) ont assigné Madame [H] [D], Monsieur [E] [D], Monsieur [E] [D] et Madame [A] [D] (les consorts [D]) devant le tribunal de grande instance de Brest afin de solliciter l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Monsieur [X], l'homologation du rapport d'expertise et la condamnation de Madame [D] à rapporter à la succession la somme de 484.250,96 euros avec application de la peine du recel successoral à hauteur de la somme de 408.750,96 euros ;
Par jugement du 17 décembre 2014, le tribunal de grande instance de Brest a:
- ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Monsieur [X] et désigné pour y procéder Me [I], notaire à [Localité 5] outre un juge commissaire,
- dit que le montant total des sommes recelées par [H] [D] s'élève en définitive à la somme de 394.137,82 euros et condamné Madame [D] à rapporter cette somme à la succession,
- dit que Madame [D] sera privée de ses droits sur cette somme de 394.137,82 euros,
- dit que Madame [D] devra rapporter, en outre à la succession de Monsieur [X], la somme de 73.955 euros au titre des sommes retirées en espèces,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- dit n'y avoir lieu à prononcer ou non l'homologation du rapport d'expertise,
- condamné Madame [H] [D] à payer aux consorts [T] la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- rejeté la demande d'exécution provisoire,
- condamné Madame [D] aux dépens de première instance en ce compris les frais d'expertise, avec droit de recouvrement pour ceux dont il a été fait l'avance,
- déclaré le jugement commun et opposable à Monsieur [E] [D], Monsieur [E] [D], Madame [A] [D].
Appelants de ce jugement, Madame [H] [X] épouse [D], Monsieur [E] [D], Monsieur [E] [D] et Madame [A] [D], par conclusions du 24 novembre 2015, ont demandé que la Cour:
- infirme le jugement déféré en ce qu'il a fixé à la somme de 394.137,82 euros la somme recelée par Madame [D] et a dit qu'elle devait rapporter la somme de 73.955 euros,
- dise irrecevable, en application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, la prétention à partage rectificatif de la succession de Madame [B] [G] épouse [X],
- l'infirme en ce qu'elle a condamné Madame [D] au paiement de la somme de 2.000 euros de frais irrépétibles et aux dépens,
- le confirme pour le surplus,
- condamne les consorts [T] au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que les dépens seront frais privilégiés de partage.
Par conclusions du 11 décembre 2015, les consorts [T] ont sollicité que la Cour:
- à titre principal, confirme le jugement déféré,
- à titre subsidiaire, ordonne le partage rectificatif de la succession de Madame [B] [G] et confirme le jugement déféré en ses autres dispositions,
- condamne Madame [D] au paiement de la somme de 6.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamne aux dépens.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la Cour renvoie aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
La disposition ordonnant l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Monsieur [X] ainsi que celle ayant désigné Me [I] notaire à [Localité 5] ne font l'objet d'aucune critique.
Le litige porte sur les conséquences à attacher aux opérations (émission de chèques, virements, retraits en espèces) réalisées sur les comptes de Monsieur [J] [X] et de son épouse [B] [G], pendant la période durant laquelle Madame [D] a bénéficié de procurations sur ces comptes, soit à compter du 29 juin et 06 juillet 2006 pour ceux ouverts auprès du Crédit Agricole, du 21 juin et du 31 juin 2006 pour ceux ouverts auprès de la Caisse d'Epargne, du 30 novembre 2006, du 16 février 2007 et du 21 janvier 2009 pour ceux ouverts auprès de la Banque Postale, du 13 octobre 2006 pour ceux ouverts auprès de la Banque Postale.
Au mois de Mai 2009, ces procurations ont été révoquées par Monsieur [J] [X], qui lui-même avait procuration sur ceux de son épouse.
Les opérations incriminées ont donc eu lieu avant le décès de Madame [G] (survenu le [Date décès 2] 2009), conduisant Madame [D] à conclure en défense que, pour le cas où il serait fait droit à la demande de rapport des consorts [T], celui-ci ne pourrait être ordonné qu'à hauteur de la moitié des sommes litigieuses, le premier juge n'étant saisi que des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Monsieur [X] alors même que tous les comptes étaient des biens de communauté.
En réplique, les consorts [T] ont conclu à titre subsidiaire, à l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Madame [G], sans toutefois tirer aucune conséquence d'une telle prétention.
Les pièces versées aux débats démontrent que la succession de Madame [B] [G] n'a pas été liquidée puisque seul un partage partiel est intervenu par acte du 26 février 2010 ; la communauté des époux [G]-[X] ne l'a pas été non plus alors que cette formalité est indispensable à la liquidation de la succession de Monsieur [J] [X].
Dès lors, la demande d'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Madame [B] [G] est recevable, même présentée pour la première fois en appel, d'une part, car elle est l'accessoire indispensable de la demande visant à la liquidation de la succession de Monsieur [X], d'autre part, car en matière de partage, les parties sont respectivement demanderesse et défenderesse quant à l'établissement de l'actif et du passif et que toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.
Sont ordonnées l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage tant de la succession de Madame [B] [G] que de la communauté ayant existé entre elle et Monsieur [X].
Toutefois, les parties n'ayant tiré aucune conséquence d'une telle éventualité, il apparaît indispensable de rouvrir les débats pour les inviter à conclure sur ces opérations.
Les mouvements litigieux sont des opérations réalisées au bénéfice de Madame [D], de ses enfants, de son époux, ou en paiement d'entreprises ayant travaillé pour leur compte, dont le rapport est demandé par les consorts [T].
En défense, Madame [D] conclut notamment que les opérations réalisées au bénéfice de ses enfants ou de son conjoint ne sont pas rapportables, ceux-ci n'étant pas tenus au rapport, ce à quoi les consorts [T], suivis en cela par le premier juge, ont répliqué que la preuve de l'intention libérale n'était pas rapportée, s'agissant d'opérations réalisées par Madame [D] elle-même.
Toutefois, si la Cour devait considérer qu'aucune intention libérale n'est démontrée, se poserait alors la question de savoir dans quelle mesure les dispositions de l'article 843 du code civil peuvent trouver à s'appliquer plutôt que celles de l'article 1993 du même code et dans quelle mesure, plutôt qu'un rapport aux successions, les sommes utilisées en dehors du mandat seraient des créances des indivisions successorales, sur lesquelles les peines du recel successoral pourrait le cas échéant être appliquées.
Ces deux questions justifient que les débats soient rouverts et qu'il soit sursis à statuer sur le solde du litige.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a ouvert les opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Monsieur [J] [X], désigné Me [I] pour y procéder et un juge commissaire pour les surveiller.
Ajoutant au jugement :
Ordonne l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Madame [B] [G] et de la communauté ayant existé entre elle et Monsieur [X], et désigne Me [I] pour y procéder ainsi que le juge commissaire du tribunal de grande instance de Brest pour les surveiller.
Sursoit à statuer sur le solde du litige.
Ordonne la réouverture les débats et invite les parties à conclure sur les conséquences à attacher à l'ouverture des opération de compte, liquidation et partage de la succession de Mme [G] et de la communauté des époux [G]-[X] ainsi que sur l'éventualité d'une application à l'espèce des dispositions du code civil relatives au mandat et à une créance des indivisions successorales.
Renvoie l'affaire à l'audience du mardi 20 septembre 2016 à 14 heures ;
Dit que les consorts [D] devront remettre leurs conclusions au greffe et les communiquer à la partie adverse au plus tard le 3 mai 2016 ;
Dit que les consorts [T], intimés, devront répondre par voie de conclusions au plus tard le 4 juillet 2016 ;
Fixe la date de l'ordonnance de clôture le 06 septembre 2016.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT