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05/01/2016 | FRANCE | N°14/03292

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 05 janvier 2016, 14/03292


6ème Chambre B

ARRÊT No 11

R. G : 14/ 03292

Mme Emmanuelle Marie Jeanne X...épouse Y...

C/
M. Erwan Alain Albert François Y...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 05 JANVIER 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Consei

ller,

GREFFIER :
Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
DÉBATS :
En chambre du Consei...

6ème Chambre B

ARRÊT No 11

R. G : 14/ 03292

Mme Emmanuelle Marie Jeanne X...épouse Y...

C/
M. Erwan Alain Albert François Y...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 05 JANVIER 2016

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,

GREFFIER :
Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
DÉBATS :
En chambre du Conseil du 17 Novembre 2015 devant Mme Françoise ROQUES, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 05 Janvier 2016 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.
****
APPELANTE :
Madame Emmanuelle Marie Jeanne X...épouse Y...née le 29 Avril 1972 à Paris (75015) ...22300 LANNION

Représentée par Me Tiphaine LE BERRE-BOIVIN, avocat au barreau de RENNES
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle à 85 % numéro 14/ 4346 du 16/ 05/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)
INTIMÉ :
Monsieur Erwan Alain Albert François Y... né le 10 Avril 1973 à LANNION (22300) ... 22300 LANNION

Représenté par la SCP BREBION-CHAUDET, avocat postulant au barreau de RENNES Représenté par Me Guillaume PRAT, avocat plaidant au barreau de SAINT-BRIEUC

M. Erwan Y... et Mme Emmanuelle X...se sont mariés le 31 décembre 2004 et un contrat de mariage portant séparation des biens a été dressé le 6 décembre 2004. Ils ont eu ensemble deux filles :- Camille, née le 8 juillet 2000 à Lannion,- Audrey, née le 1er novembre 2001 à Lannion.

Selon ordonnance en date du 16 février 2012, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc a principalement :- attribué la jouissance du domicile familial à Mme X...à titre onéreux à charge pour les époux de régler les prêts immobiliers (969, 10 ¿/ mois), la cotisation d'assurance et la taxe foncière à hauteur de 75 % pour Monsieur et à hauteur de 25 % pour Madame, à titre d'avance sur la liquidation du régime matrimonial,- attribué la jouissance du véhicule Renault espace à l'épouse,- attribué la jouissance des véhicules Peugeot 205 et Opel Zafira au mari,- rejeté la demande de pension alimentaire formée par Mme X...au titre du devoir de secours et de demande provision ad litem,- fixé la résidence habituelle des enfants en alternance,- ordonné une enquête sociale,- enjoint aux époux de rencontrer un médiateur.

Par arrêt du 5 mars 2013, cette cour a confirmé l'ordonnance précitée à l'exception de sa disposition relative à la contribution paternelle à l'entretien des enfants communs, fixant celle-ci à la somme de 100 ¿/ mois et par enfant.
Sur assignation de Madame, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint-Brieuc a principalement :- prononcé le divorce des époux en application des articles 233 et 234 du code civil,- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux,- débouté Mme X...de sa demande d'attribution à titre préférentiel,- fixé les effets du jugement dans les rapports entre époux en ce qui concerne leurs biens à la date de l'ordonnance de non conciliation,- dit que l'épouse ne conservera pas l'usage du nom de l'époux après le divorce,- débouté Mme X...de sa demande de prestation compensatoire,- fixé la résidence habituelle des enfants alternativement au domicile de chacun des parents, le changement intervenant le vendredi à 18h,- dit que chacun des parents conservera la charge des frais relatifs aux enfants au cours des périodes où ils résideront à son domicile, les frais scolaires, extra-scolaires et de mutuelle étant partagés,.- dit que la mère percevra le bénéficie des allocations familiales versées pour le compte des enfants,- fixé à 150 ¿/ mois et par enfant le montant de la contribution paternelle à l'entretien des enfants, ce avec l'indexation d'usage,- rejeté la demande présentée par Mme X...sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné les parties aux dépens, chacune par moitié.

Mme X...a relevé appel de cette décision.
Dans ses dernières écritures en date du 30 octobre 2015, elle demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris et de :- lui accorder l'attribution préférentielle de la maison indivise ...à Lannion,- condamner Monsieur au paiement d'une prestation compensatoire de 80 000 ¿ nette de tout prélèvement,- fixer la part contributive du père à l'entretien de ses enfants à la somme de 290 ¿/ mois et par enfant,- dire que pour l'année 2015/ 2016, son droit de visite et d'hébergement sera fixé selon les modalités classiques, sauf meilleur accord des parties,- fixer la résidence habituelle des enfants en alternance sur le rythme de 15 jours chez l'un des parents pour la période postérieure au mois de mai 2015, et pendant les vacances dès à présent,- condamner Monsieur aux entiers dépens de première instance et d'appel lesquels seront recouvrés comme en matière juridictionnelle.

Dans ses écritures du 23 octobre 2015, M. Y...demande à la cour de :- débouter Mme X...de toutes ses demandes,- confirmer le jugement sauf à fixer la résidence d'Audrey à son domicile à compter du 1er octobre 2015 avec octroi d'un droit d'accueil classique pour sa mère et suppression corrélative des contributions forfaitaires à compter du 1er octobre 2015,- dire qu'en cas de retour de Mme X...à Lannion et arrêt de son activité professionnelle à Paris, la résidence de l'enfant Audrey pourra s'exercer à nouveau en alternance une semaine sur deux à compter de septembre 2016,- condamner Mme X...aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Il sera renvoyé pour plus ample exposé des faits de la cause, prétentions et moyens des parties, à leurs dernières écritures.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 novembre 2015.
MOTIFS DE LA DECISION
Sont remises en cause les dispositions du jugement relatives à l'attribution préférentielle de l'immeuble de Lannion, le principe d'une prestation compensatoire et les contributions forfaitaires du père à l'entretien de ses filles.
Les parties réclament de voir fixer la résidence de celles-ci à compter de septembre 2016.
Les autres dispositions du jugement qui ne sont pas contestées seront confirmées.

Sur la prestation compensatoire :

Mme X...fait grief au premier juge d'avoir refusé de prendre en compte les années de vie commune du couple soit plus de 18 années alors même qu'elle a travaillé au mois d'octobre 1996 en qualité d'infirmière, subvenant au besoin du couple, tandis que M. Y...poursuivait ses études jusqu'en octobre 1998. Elle ajoute qu'elle vit seule et non avec M. B...dont la relation avec lui peut prendre fin à tout moment.
Le principe de la disparité créé, au détriment de l'épouse, par la rupture du mariage dans les conditions respectives des parties, est contesté par l'époux au motif que la durée du mariage a été très brève et que Mme X...s'est mise en disponibilité pour des raisons personnelles et non pour des raisons de santé du fait qu'elle est en rémission totale de son cancer depuis 2007.
Le premier juge a retenu que la disparité évidente entre les revenus respectifs des époux était largement compensée par la liaison qu'entretenait l'épouse avec un homme à fort potentiel de revenus, professeur de médecine de son état, dans un contexte de vie commune très brève.
En l'espèce, le divorce met un terme à un mariage qui aura duré 11 ans au moment de son prononcé dont 7 ans de vie commune. Il n'y a pas lieu de tenir compte de la vie commune antérieure au mariage.
Or aux termes des dispositions de l'article 270 du Code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser autant qu'il est possible la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux. L'article 271 ajoute que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.
Pour en apprécier le montant, le juge doit prendre en considération certains critères tels que l'âge et l'état de santé des époux, la durée du mariage, les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, leur qualification et leur situation professionnelle, leurs droits existants et prévisibles, leur situation respective en matière de pension de retraite, leur patrimoine estime et prévisible, tant capital qu'en revenus, après la liquidation du régime matrimonial.
Les parties sont âgées de 43 ans pour l'épouse et de 42 ans pour le mari. Ils ont eu deux filles nées avant le mariage.
Ils sont propriétaires indivis, chacun pour moitié, de l'immeuble situé à Lannion qui a constitué le domicile.
M. Y..., ingénieur, a déclaré un revenu mensuel de 3. 810 ¿ en 2010, de 3 956 ¿ en 2011, de 4 206 ¿ pour 2012 et de 4 351 ¿ pour l'année 2014.
Il est propriétaire à 50 % avec une tierce personne d'une maison située à Lannion acquise le 24 juin 2014 pour laquelle le nouveau couple acquitte un prêt de 1 603 ¿/ mois à compter de mars 2015.
Il fait état d'une imposition sur le revenu de 253 ¿/ mois en 2014 outre 247 ¿/ mois d'impôts fonciers et d'habitation pour l'ancien domicile conjugal.
Mme X...a travaillé en qualité d'infirmière et a exercé son activité à temps partiel après la naissance de l'aînée de la fratrie.
Mme X...ne justifie pas s'être mise en disponibilité pour des raisons thérapeutiques. En revanche, il est parfaitement établi qu'elle a poursuivi son activité professionnelle à temps partiel durant le mariage pour à la fois pouvoir s'occuper des enfants communs et en raison d'un état de santé amoindri. D'ailleurs, elle a bénéficié d'un mi-temps thérapeutique jusqu'à la fin de l'année 2004.
Pour l'année 2014, Mme X...a déclaré un revenu total moyen de l'ordre de 810 ¿ par mois.
Elle justifie bénéficier depuis septembre 2015 d'un contrat de professionnalisation conclu pour douze mois moyennant une rémunération brute de 1456 ¿/ mois afin d'obtenir le diplôme de secrétaire juridique.
Même si Mme X...a fait le choix de ne pas justifier au moyen d'une attestation régulière le coût de son hébergement, il n'en demeure pas moins constant qu'elle poursuit une reconversion professionnelle à Paris qui engendre pour elle des frais fixes liés au minimum à ses charges de trajet pour exercer son droit d'accueil à l'égard de ses filles.
Le réel préjudice économique, lié à la répartition des rôles dans le couple selon un choix commun, justifie pleinement une réparation financière, quand bien même Mme X...poursuit une relation sentimentale avec une personne à haut potentiel de revenus.
En revanche, l'inégalité des situations des époux liés au choix de Mme X...de procéder à une reconversion professionnelle ne peut servir de fondement à un rééquilibrage des situations.
Les éléments précités sur le passé matrimonial et la disparité des revenus prévisibles des époux justifient une compensation financière, qu'il convient de fixer à la somme de 20 000 ¿ en capital dû à titre de prestation compensatoire, net de frais d'enregistrement.
Le jugement de première instance sera infirmé de ce chef.

Sur l'attribution préférentielle :

L'article 832 du code civil auquel renvoie l'article 1542 du même code permet l'attribution préférentielle à l'un des époux d'un immeuble, si celui-ci lui sert effectivement d'habitation ou s'il y a sa résidence au moment de la séparation.
Même en l'absence d'une demande concurrente formée par l'époux, l'attribution préférentielle du logement familial après la dissolution du mariage par divorce n'est pas de droit.

Mme X...occupe l'immeuble indivis depuis son acquisition et y demeure encore. Elle remplit donc les conditions de l'attribution préférentielle et il peut être fait droit à sa demande mais à charge pour elle et en tant que de besoin de respecter les dispositions de l'article 132-4 du Code civil lesquelles prévoient le règlement comptant de la soulte si elle existe, à défaut d'accord du conjoint.

Cependant même en cause d'appel, Mme X...ne justifie pas du montant de la valeur de l'immeuble indivis, ni des ressources dont elle disposera pour payer à son copartageant la soulte qui sera mise à sa charge. Il s'impose donc de rejeter sa demande d'attribution de l'immeuble au regard du risque que cette attribution ferait courir à M. Y...à raison de l'insolvabilité de l'attributaire.

Sur la résidence de l'enfant Audrey :

Les parties conviennent qu'Audrey réside au domicile de son père depuis le 1 octobre 2015 du fait du départ de sa mère sur Paris, pour poursuivre une formation qualifiante.
Il échet de modifier le jugement de première instance sur ce point.

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants communs :

La contribution à l'entretien l'éducation des enfants est, selon l'article 371-2 du Code civil, fixée à proportion des ressources de l'un et de l'autre des parents et des besoins de l'enfant.
Au regard de la situation économique des parents ci dessus examinée et des besoins des adolescentes, il convient d'infirmer le jugement qui a fixé à 150 ¿ par mois et par enfant la contribution paternelle forfaitaire dès lors qu'il ressort des écritures concordantes des parties que chacun des parents contribue par moitié aux frais scolaires et extra-scolaires de leurs filles.
En effet, cette contribution n'est manifestement pas en proportion des revenus du père par rapport aux ressources modestes de la mère pour la période considérée, ce eu égard aux besoins d'adolescentes de 14 et 13 ans. Il s'ensuit que la contribution paternelle sera fixée à la somme de 250 ¿/ mois et par enfant.
En revanche, cette contribution paternelle sera à nouveau fixée à la somme de 150 ¿/ mois à compter du 1er octobre 2015, précisément en ce que les jeunes filles vivent à titre principal chez leur père pour Audrey et en internat pour l'aînée.
Cette contribution devra être le cas échéant revue si la situation des mineures évolue en raison notamment du retour de leur mère à Lannion après l'obtention de son diplôme. En l'état la cour ne saurait statuer sur des données hypothétiques non encore avérées.
Les demandes respectives des parties formées sous diverses conditions pour septembre 2016 seront donc rejetées.

Sur les dépens :

Le prononcé du divorce en application de l'article 233 du Code civil, conduit à confirmer l'arbitrage du premier juge quant à la charge des dépens de première instance.
M. Y... qui succombe au principal supportera la charge des dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après rapport fait à l'audience ;

Confirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire et au montant de la contribution paternelle pour l'entretien de ses filles pour la période antérieure au 1er octobre 2015 ;
Statuant à nouveau de ces chefs :
Fixe à 20 000 ¿ nets de frais d'enregistrement, le montant du capital dû à titre de prestation compensatoire par M. Y...à Mme X...et au besoin, l'y condamne ;
Fixe la contribution paternelle à l'entretien et l'éducation de ses filles à la somme de 250 ¿/ mois et par enfant jusqu'au 1er octobre 2015 ;
Y ajoutant :
Fixe la résidence habituelle d'Audrey au domicile de son père à compter du 1er octobre 2015 ;
Accorde à Mme X...un droit de visite et d'hébergement à l'égard d'Audrey selon les modalités classiques, à savoir une fin de semaine sur deux et la moitié des vacances scolaires à charge pour la mère d'assurer les trajets de l'enfant ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne M. Y...aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 14/03292
Date de la décision : 05/01/2016
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2016-01-05;14.03292 ?
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