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17/11/2015 | FRANCE | N°12/08489

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 17 novembre 2015, 12/08489


1ère Chambre





ARRÊT N° 430/2015



R.G : 12/08489













Mme [M] [I] épouse [T]

M. [Z] [T]



C/



Mme [W] [P] épouse [G]

M. [E] [G]

















Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
>AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2015





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors de...

1ère Chambre

ARRÊT N° 430/2015

R.G : 12/08489

Mme [M] [I] épouse [T]

M. [Z] [T]

C/

Mme [W] [P] épouse [G]

M. [E] [G]

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors de la mise à disposition

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 Octobre 2015

devant Monsieur Marc JANIN, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 17 Novembre 2015 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTS :

Madame [M] [I] épouse [T]

née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 5]

[Adresse 6]

[Adresse 1]

[Adresse 4]

Représentée par Me Maurice MASSART, avocat au barreau de RENNES

Monsieur [Z] [T]

né le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 4]

[Adresse 6]

[Adresse 1]

[Adresse 4]

Représenté par Me Maurice MASSART, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Madame [W] [P] épouse [G]

née le [Date naissance 3] 1957 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 5]

Représentée par Me Rosine D'ABOVILLE de la SELARL CABINET GOURVES-D'ABOVILLE & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représentée par Me Jean-Pierre MARTIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [E] [G]

né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 5]

Représenté par Me Rosine D'ABOVILLE de la SELARL CABINET GOURVES-D'ABOVILLE & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Représenté par Me Jean-Pierre MARTIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

FAITS ET PROCÉDURE:

Monsieur [Z] [T] et Madame [M] [I], épouse [T], possèdent depuis 1986, dans un lotissement dénommé [X] sur la commune d'[Localité 2], une propriété, cadastrée AE n° [Cadastre 1] ; Monsieur [E] [G] et Madame [W] [P], épouse [G], ont acquis en 2004 la propriété voisine, cadastrée AE n° [Cadastre 2].

Les époux [T] ont fait édifier sur leur propriété un garage et un atelier et installer des clôtures, au mépris des règles fixées par le cahier des charges du lotissement, selon les époux [G].

Saisi par ces derniers du litige, le tribunal de grande instance de Vannes a, par jugement du 2 octobre 2012 :

déclaré opposable aux époux [T] le cahier des charges du lotissement déposé au rang des minutes de Maître [U], notaire à [Localité 6], suivant acte dressé par lui le 4 mars 1955,

condamné les époux [T] à démolir le bâtiment annexe sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification du jugement, durant un mois,

condamné les époux [T] à démolir les panneaux de clôture sur la voie qui ne sont pas à claire-voie, et ce sous la même astreinte,

condamné les époux [T] à démolir la seconde clôture située en limite séparative des parcelles afin que seule subsiste la clôture respectant le cahier des charges soit celle formée d'un grillage avec piquets d'une hauteur inférieure à un mètre cinquante, sous la même astreinte,

débouté les époux [G] de leur demande de dommages et intérêts,

débouté les époux [T] de leurs demandes reconventionelles ;

condamné les époux [T] à payer aux époux [G] la somme de 2 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

condamné les époux [T] aux dépens de première instance avec droit de recouvrement pour ceux dont il a été fait l'avance,

dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.

Les époux [T] ont interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt du 27 mai 2014, la cour a :

sursis à statuer sur l'entier litige jusqu'à l'issue du processus de médiation engagé par les parties devant le Centre de médiation de [Localité 4],

renvoyé l'affaire devant le conseiller de la mise en état,

réservé les dépens.

Les parties ont fait part de l'échec de la mesure de médiation.

Par conclusions du 13 août 2015, auxquelles il sera renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments, les époux [T] demandent à la cour :

de débouter les époux [G] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

subsidiairement, de les condamner 'conjointement et solidairement' à mettre l'implantation des bâtiments annexes à leur construction en conformité avec les dispositions du cahier des charges dont ils demandent eux-mêmes l'application, à savoir implanter les bâtiments annexes, seulement sur la limite séparative de fond de leur lot et ce, faute de justifier d'un permis de construire définitif, purgé du droit des tiers relatif à la construction de ces bâtiments annexes,

de les condamner à élaguer l'ensemble de leurs plantations situées en limite de propriété à deux mètres pour celles plantées à moins de deux mètres des limites divisoires des parcelles AE [Cadastre 1] et AE [Cadastre 2], sous astreinte de 25 € par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir,

de les condamner 'conjointement et solidairement' à verser une somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

de les condamner sous la même solidarité aux dépens d'instance et d'appel.

Par conclusions du 24 juin 2015, auxquelles il sera renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments, les époux [G] demandent à la cour :

de confirmer le jugement déféré, sauf à préciser, pour les besoins éventuels de l'exécution forcée, que la construction à démolir est un bâtiment annexe édifié commune d'[Localité 2], sur la parcelle cadastrée AE [Cadastre 1], à la marge latérale droite, entre la façade pignon côté nord du bâtiment principal des époux [T] et la limite de la parcelle cadastrée AE [Cadastre 2] dont sont propriétaires les époux [G],

de condamner in solidum les époux [T] à leur payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

de les condamner in solidum aux entiers dépens, en ce compris le coût de la publication de la décision à intervenir à la conservation des hypothèques, avec le bénéfice de la faculté de recouvrement direct prévue par l'article 699 du même code.

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 22 septembre 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION DE LA COUR :

Les époux [T] font essentiellement valoir, au soutien de leur appel, que le cahier des charges du lotissement, sur le fondement duquel le tribunal les a condamnés à démolir un bâtiment annexe implanté sur leur fonds et à ôter ou remplacer des clôtures, ne leur est pas opposable au regard des dispositions combinées des articles L. 442-9 et L. 111-5 du Code de l'urbanisme, et subsidiairement, s'il s'applique, que les conséquences que le tribunal en a tirées sont erronées.

1/ Sur l'opposabilité du cahier des charges du lotissement :

Il résulte des dispositions de l'article L. 442-9 du Code l'urbanisme que, si les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement deviennent caduques, en l'absence d'opposition d'une majorité qualifiée de colotis, au terme de dix années à compter de l'autorisation de lotir lorsque, à cette date, le lotissement est couvert par un plan local d'urbanisme ou un document en tenant lieu, les stipulations du cahier des charges du lotissement continuent néanmoins à régir les rapports entre colotis, si elles revêtent un caractère contractuel et les obligent entre eux, en ce cas, en vertu des dispositions de l'article 1134 du Code civil.

Mais, selon l'article L. 111-5 du Code de l'urbanisme, on ne peut tirer de la seule reproduction ou mention d'un document d'urbanisme ou d'un règlement de lotissement dans un cahier des charges, un acte ou une promesse de vente, que ce document ou ce règlement présentent un caractère contractuel.

En l'occurrence, le cahier des charges du lotissement [X] déposé en l'étude de Maître [U], notaire à [Localité 6], le 4 mars 1955 par Monsieur [F] [X], créateur de ce lotissement, qui décrit les obligations des acquéreurs des lots notamment en ce qui concerne les constructions et clôtures, ne fait référence à aucun document ni règlement d'urbanisme, qui d'ailleurs n'existait alors pas pour la commune d'[Localité 2], la seule contrainte émanant d'une autorité extérieure étant la réserve faite par l'architecte des bâtiments de France, relativement à l'aspect général des bâtiments et des clôtures, à l'avis favorable qu'il émettait alors.

Il en ressort que les exigences précises et détaillées figurant aux articles 4 et 5, concernant les types et hauteurs de clôtures sur les voies et entre voisins, et aux articles 10 à 14, concernant l'aspect, le volume, l'implantation, le caractère et la destination des bâtiments principaux et annexes à construire sur les lots, voulues par le lotisseur pour préserver la bonne 'tenue générale du lotissement et l'harmonie du paysage' selon le document, sont d'ordre exclusivement contractuel et ne peuvent donc être atteintes par la caducité prévue à l'article L. 442-9 du Code l'urbanisme.

Ce caractère contractuel est d'ailleurs clairement confirmé par les procès-verbaux d'assemblée générale des copropriétaires du lotissement en date des 16 août 2010 et 18 août 2011 dont il ressort que si l'ensemble d'entre eux souhaitait une révision et une actualisation du cahier des charges, le projet établi par le cabinet de géomètres Géo Bretagne Sud à la demande de Monsieur [T] a finalement été rejeté car il est apparu aux copropriétaires excessivement aligné sur le règlement d'urbanisme de la commune, de sorte qu'il pouvait ' de ce fait menacer le côté privé de (la) résidence '.

Ainsi, s'il n'est pas établi qu'une majorité qualifiée des colotis avait entendu, dans le délai de dix ans visé à l'article L. 442-9 du Code l'urbanisme, maintenir les règles du cahier des charges nonobstant l'intervention du plan local d'urbanisme approuvé le 15 octobre 1976, il est néanmoins constant que les prescriptions que renferme ce cahier des charges, qui n'a pas fait à ce jour l'objet de modification conventionnelle, demeurent applicables dans les rapports entre eux.

Et les époux [T] ne peuvent utilement se prévaloir de son inopposabilité du fait qu'il n'aurait pas été publié à la conservation des hypothèques, dès lors qu'il est constant que ce cahier des charges était expressément mentionné à l'acte authentique du 2 avril 1986 suivant lequel ils ont fait l'acquisition de leur lot, ainsi avant de faire réaliser la construction contestée.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il l'a déclaré opposable aux époux [T].

2/ Sur l'application du cahier des charges du lotissement :

A/ S'agissant des bâtiments :

Ainsi que l'a justement relevé le tribunal, il résulte littéralement de l'article 11, b) du cahier des charges, sans qu'il y ait lieu à interprétation, que si un bâtiment annexe peut être adossé aux limites séparatives de propriété, il doit l'être alors sur la limite séparative de fond de lot.

a) Bâtiment annexe sur le lot [T] :

Tel n'est pas le cas de l'extension à usage de garage et atelier, qui est un bâtiment annexe relevant de l'article 11, b) puisqu'il ne répond pas à la définition des bâtiments principaux visés au a), que les époux [T] ont fait construire sur la parcelle AE [Cadastre 1] leur appartenant, au nord de leur maison, et dont l'emprise au sol couvre intégralement la largeur comprise entre la maison et la limite séparant leur propriété de celle des époux [G].

En effet, cette extension est ainsi adossée non à la limite du fond de leur lot, qui se situe à l'ouest de celui-ci, mais à sa limite latérale au nord et viole ainsi la convention, peu important que cette extension ait bénéficié d'un permis de construire dont la délivrance n'autorisait pas pour autant à préjudicier aux droits des colotis.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné la démolition de ce bâtiment sous les modalités qu'il a indiquées, la désignation du bâtiment en cause étant précisée au dispositif du présent arrêt.

b) Bâtiment annexe sur le lot [G] :

L'abri de jardin que les époux [G] ont fait édifier contre leur maison sur la parcelle AE [Cadastre 2], ne constitue pas un immeuble distinct au sens de l'article 11, a), et, n'étant pas adossé à l'une des limites séparatives du lot mais accolé à la maison située au centre de la parcelle, il n'est pas soumis à la règle prévue au b).

Les époux [T] ne sont donc pas fondés à solliciter la condamnation des époux [G] à démolir cette construction sur le fondement du cahier des charges.

B/ S'agissant des clôtures :

L'article 4 du cahier des charges stipule que les clôtures sur les voies du lotissement consisteront en un mur bahut d'un mètre de hauteur au plus surmonté de lisses à claire-voie en bois ou ciment, le tout n'excédant pas un mètre quatre vingts, ou en grillage, et que les haies vives ne pourront dépasser un mètre cinquante de hauteur.

Et selon l'article 5, les clôtures entre les lots ne pourront consister qu'en un grillage avec piquets n'excédant pas un mètre cinquante de hauteur.

Il ressort d'un rapport de Monsieur [L], géomètre, sollicité par les époux [G], élément d'appréciation de fait soumis au débat judiciaire, conforté par les photographies produites par ceux-ci et par un constat de l'huissier de justice requis le 3 août 2010 par les époux [T], que la clôture installée par ceux-ci sur leur lot en limite de celui des époux [G], en panneaux pleins d'une hauteur supérieure à un mètre cinquante, et la clôture sur la voie du lotissement, en panneaux jointifs ne laissant passer aucun jour entre eux, ne répondent pas aux obligations contractuelles.

Ces observations ne sont d'ailleurs pas contestées par les époux [T], qui font valoir, quant aux types de clôtures, que le cahier des charges est obsolète et n'est plus respecté au sein du lotissement.

Mais le constat d'éventuels manquements d'autres colotis ne peut suffire à délier les époux [T] de leurs obligations contractuelles à l'égard de leurs voisins, les époux [G].

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné les époux [T] à démolir les clôtures non conformes.

C/ S'agissant des plantations :

Le tribunal a considéré que les plantations des époux [G], que les époux [T] voudraient les voir condamnés à élaguer, respectent les dispositions de l'article 671 du Code civil.

Ni le constat d'huissier daté du 3 août 2010, ni les photographies non datées produites par les époux [T], appelants, ne sont susceptibles de démontrer que tel n'est pas le cas actuellement.

La prétention des époux [T] à cet égard doit être rejetée.

3/ Sur les frais et dépens :

Le jugement déféré sera encore confirmé en ses dispositions sur les dépens de première instance et les frais non compris en ceux-ci.

Les époux [T], qui succombent en leur appel, seront condamnés à payer aux époux [G] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et aux dépens d'appel, avec la faculté de recouvrement direct prévue par l'article 699 du même code.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Après rapport fait à l'audience ;

Déboute Monsieur [Z] [T] et Madame [M] [I], épouse [T], de l'ensemble de leurs demandes ;

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant :

Dit que le bâtiment annexe dont la démolition est ordonnée est celui qui est édifié sur la parcelle cadastrée AE n° [Cadastre 1] située dans le lotissement dénommé [X] sur la commune d'[Localité 2], entre la façade pignon côté nord du bâtiment principal que constitue la maison d'habitation implantée sur cette parcelle, et la limite sud de la parcelle cadastrée AE n° [Cadastre 2] ;

Condamne in solidum Monsieur [Z] [T] et Madame [M] [I], épouse [T], à payer à Monsieur [E] [G] et Madame [W] [P], épouse [G], la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Les condamne in solidum en tous les dépens d'appel, comprenant le coût de la publicité foncière de la présente décision s'il y a lieu, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12/08489
Date de la décision : 17/11/2015

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°12/08489 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-11-17;12.08489 ?
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