Contestations Honoraires
ORDONNANCE
No 15/ 161
R. G : 14/ 04888
M. Yann X...
C/
Me Karine Y...
Copie exécutoire délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ORDONNANCE DE TAXE DU 10 NOVEMBRE 2015
Monsieur Jean-François DELCAN, Président délégué par ordonnance de Monsieur le Premier Président,
GREFFIER :
M. Bruno GENDROT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 13 Octobre 2015
ORDONNANCE :
Réputée contradictoire, prononcée à l'audience publique du 10 Novembre 2015, par mise à disposition au greffe
****
ENTRE :
Monsieur Yann X... ...11400 SOUILHE
comparant en personne
ET :
Maître Karine Y... ... 29200 BREST
non comparant
***
Maître Karine Y..., avocate au barreau de Brest, est intervenue au soutien des intérêts de M. Yann X... dans un litige relatif au montant d'une pension alimentaire et au droit de visite et d'hébergement d'une enfant.
Elle a facturé son intervention à la somme de 1609, 82 ¿.
Un différend est survenu entre l'avocate et son client au sujet du paiement des honoraires.
M. Yann X... a saisi le bâtonnier de Brest d'une contestation d'honoraires, le 5 février 2014.
Par décision du 20 mai 2014, le bâtonnier du barreau de Brest a fixé à la somme de 1609, 82 ¿ TTC les frais et honoraires dus à Maître Karine Y..., et a déclaré M. Yann X... redevable d'une somme de 618, 02 ¿ TTC, après déduction de la provision de 991, 80 ¿ TTC déjà versée.
Par lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 11 juin 2014, M. Yann X... a formé un recours contre l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Brest du 20 mai 2014, notifiée le 20 mai 2014.
À l'audience du 13 octobre 2015, il rappelle que l'avocate lui avait annoncé des honoraires " de l'ordre de 800 ¿ hors taxes ", qu'elle n'a jamais proposé de convention d'honoraires, ne répondait pas aux demandes d'explications des factures. Il estime que les honoraires sont excessifs : Maître Karine Y... a établi la requête à partir d'un modèle-type (en se trompant de personne), n'a accepté qu'un rendez-vous téléphonique le 15 février 2013, les autres échanges étant très brefs, ne justifie pas du travail fourni à l'audience devant le juge aux affaires familiales, n'a adressé qu'un seul courrier postal, pour demander le paiement de sa facture, et 11 courriels, a facturé un déplacement de Brest à Quimper sur une base exagérée d'un euro du kilomètre. L'avocate ne lui a pas donné d'information suffisante sur le montant prévisible de ses honoraires.
De plus, ses prestations ont été décevantes, ses carences ont été préjudiciables à la conduite de l'affaire (retard, entraînant la caducité de documents). M. Yann X... demande l'infirmation de l'ordonnance du 20 mai 2014.
Maître Karine Y..., par courrier, conteste ces affirmations, estime que ses honoraires sont justifiés et sollicite la confirmation de l'ordonnance du bâtonnier. Elle joint son entier dossier et sollicite une dispense de comparaître à l'audience, en raison de la distance.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité du recours n'est pas contestée.
Il convient de dispenser Maître Y... de se présenter à l'audience, en application des articles 446-1 et 946 du code de procédure civile. La décision sera contradictoire.
Il sera tout d'abord rappelé que dans le cadre limité de son intervention en matière de fixation d'honoraires d'avocats, le premier président ou son délégué n'a pas compétence pour statuer sur la responsabilité éventuelle de l'avocat vis à vis de son client, un tel litige relevant de la juridiction de droit commun, juge de proximité, tribunal d'instance ou tribunal de grande instance,
selon le montant de la demande ; M. Yann X... n'est donc pas fondé à invoquer des manquements ou fautes ou erreurs de son conseil pour prétendre à une minoration des honoraires (retard dans le traitement de son dossier, erreurs matérielles).
S'il est exact que l'avocat a, à l'égard de son client, une obligation d'information préalable des conditions de fixation de ses honoraires, ainsi que le précise désormais expressément l'article 10 alinéa 2 du décret du 12 juillet 2005, il n'en demeure pas moins que le bâtonnier puis le premier président saisi en appel n'ont pas le pouvoir de se prononcer sur l'éventuelle responsabilité de l'avocat au titre d'un manquement à son obligation d'information (Cour de Cassation 22 mai 2003, 10 mars 2004).
Il n'a pas été conclu de convention d'honoraires. Elle n'est obligatoire que pour les procédures de divorce.
L'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifié par celle du 10 juillet 1991 stipule, en son alinéa 2 : " A défaut de convention entre l'avocat et son client, l'honoraire est fixé selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l'affaire, des frais exposés par l'avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci ", ces critères ayant été réaffirmés par l'article 10 du décret du 12 juillet 2005.
En l'espèce, Maître Karine Y... a facturé les prestations suivantes :- une somme de 991, 80 ¿ à titre de provision, le 1er juillet 2013,- une somme de 478, 40 ¿ pour solde des honoraires de représentation et d'assistance à l'audience du juge aux affaires familiales du 4 novembre 2013, selon facture du 5 novembre 2013,- une somme de 146 ¿ pour frais de déplacement (Brest-Quimper aller-retour)
Le bâtonnier fait référence à une facture du 19 février 2014, d'un montant de 1 609, 82 ¿, qui n'est pas produite.
Maître Karine Y... a précisé, dans son courrier au bâtonnier, du 28 mars 2014, qu'elle avait facturé 1 200 ¿ hors taxes (plus les frais de déplacement) la rédaction de la requête, la préparation du dossier de plaidoirie, les rendez-vous téléphoniques, les courriers et e-mails, la représentation du client à l'audience.
Les rendez-vous téléphoniques peuvent être estimés à 2 h ; la rédaction de la requête, sans tenir compte du temps passé à rectifier une première requête erronée, représente 3 h de travail ; les courriers et e-mails, adressés non seulement à M. X... mais aussi au tribunal et à l'adversaire, ont nécessité 2 h de travail ; la préparation du dossier de plaidoirie, une heure, et l'assistance à l'audience une demi-heure (le client était absent). Le total est de 8 h 30.
Le coût horaire peut être estimé à 180 ¿, pour une affaire ne présentant pas de difficulté particulière, soit un total de 1 530 ¿. Le déplacement de Brest à Quimper a été facturé à 1 ¿ le kilomètre. Ce coût kilométrique est supérieur au barème fiscal (en général, 0, 53 ¿ du kilomètre) mais l'avocate n'a pas facturé le temps de déplacement, de sorte qu'il faut l'inclure dans le coût kilométrique et ce qui justifie le tarif d'un euro du kilomètre. Le total général est de 1676 ¿, une somme très proche de la facturation définitive.
En conséquence, l'ordonnance du bâtonnier de Brest, en date du 20 mai 2014 sera confirmée.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par décision réputée contradictoire,
Confirmons l'ordonnance du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Brest du 20 mai 2014 ;
Condamnons M. Yann X... aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,