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10/11/2015 | FRANCE | N°13/07519

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 10 novembre 2015, 13/07519


6ème Chambre B

ARRÊT No 664

R. G : 13/ 07519

Mme Chahrazete X...

C/

M. Samuel Y...

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée
le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président,
Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller,
Mme Françoise ROQUES, Conseiller,



GREFFIER :

Madame Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé,

DÉBATS :

En chambre du Conseil du 13 Octobre 2015
devant Mme Françoise R...

6ème Chambre B

ARRÊT No 664

R. G : 13/ 07519

Mme Chahrazete X...

C/

M. Samuel Y...

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée
le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président,
Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller,
Mme Françoise ROQUES, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé,

DÉBATS :

En chambre du Conseil du 13 Octobre 2015
devant Mme Françoise ROQUES, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé hors la présence du public le 10 Novembre 2015 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.

****

APPELANTE :

Madame Chahrazete X...
née le 23 Juin 1980 à TOULOUSE (31000)
...
31700 CORNEBARRIEU

Représentée par Me Céline DEMAY, avocat au barreau de RENNES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 13/ 11614 du 29/ 11/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

INTIMÉ :

Monsieur Samuel Y...
né le 01 Novembre 1981 à SAINT-MALO (35400)
...
35400 SAINT MALO

Représenté par Me Yvonnick GAUTIER de la SCP GAUTIER/ LHERMITTE, Plaidant/ Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me Valérie HOMO, avocat plaidant au barreau de SAINT-MALO

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 13/ 11500 du 29/ 11/ 2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES

Des relations de M. Samuel Y... et de Mme Chahrazete X... est née Inaya le 15 décembre 2009 à Saint Malo. Le couple s'est séparé courant 2011.

Selon jugement en date du 13 mars 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint Malo a notamment :
- constaté que l'autorité parentale sur l'enfant est exercée conjointement par ses deux parents,
- fixé la résidence habituelle de l'enfant en alternance,
- dit n'y avoir lieu à fixation d'une pension alimentaire,
- dit que les dépenses pour l'enfant seront partagées par moitié.

En raison du départ de Mme X... dans la région de Toulouse pour se rapprocher de sa famille, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Saint Malo a, selon jugement en date du 27 septembre 2013 :
- ordonné le transfert de la résidence habituelle de l'enfant Inaya chez son père,
- organisé le droit de visite et d'hébergement de la mère la première moitié des vacances scolaires de Noël et d'été les années paires outre l'intégralité des vacances de Toussaint, février et Pâques,
- dit que la mère assumera matériellement et financièrement les transports,
- l'a dispensée de toute contribution alimentaire,
- dit que chacune des parties prendra en charge ses dépens.

Mme X... a interjeté appel de cette décision.

Faisant état de la survenance d'éléments nouveaux venant confirmer selon elle ses inquiétudes quant aux modalités de résidence offertes par le père à son domicile, elle a régularisé un incident par conclusions du 30 juin 2014 aux fins de solliciter un transfert immédiat de la résidence de l'enfant chez elle.

Selon ordonnance en date du 18 novembre 2014, le conseiller de la mise en état a déclaré l'incident recevable et a ordonné une enquête sociale au domicile de chacun des parents.

Le rapport d'enquête sociale a été déposé le 23 mars 2015.

Selon dernières écritures en date du 11 septembre 2015, Mme X... demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de :
- fixer la résidence de l'enfant chez elle,
- lui attribuer les droits sociaux,

- fixer le droit de visite et d'hébergement du père à l'intégralité des vacances scolaires de février, Pâques et Toussaint et à la moitié des vacances de Noël et d'été, première moitié les années impaires, seconde moitié les années paires, à charge pour le père d'assurer les transports de l'enfant,
- prévoir une clause de déchéance à défaut d'exercice du droit au cours de la première journée de la période de vacances qui lui est dévolue,
- fixer la contribution du père à l'entretien et l'éducation de l'enfant à la somme de 200 ¿ par mois,
- débouter M. Y... de toutes ses demandes,
- condamner M. Y... au versement de la somme de 2 000 ¿ au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile qui sera recouvrée au profit de Maître Boissel,
- le condamner aux dépens au profit de Maître Demay.

Selon dernières écritures en date du 15 septembre 2015, M. Samuel Y... demande à la cour la confirmation du jugement entrepris. A titre subsidiaire et si par extraordinaire la résidence de l'enfant était fixée au domicile de sa mère, il sollicite un droit d'accueil élargi à l'intégralité des vacances scolaires sauf à lui accorder la 1ère moitié des vacances de Noël et d'été les années paires et la seconde moitié les années impaires outre la prise en charge des frais de transport par la mère et une dispense de contribution à l'entretien de l'enfant au regard de son impécuniosité.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé des faits de la cause, prétentions et moyens des parties, à leurs dernières écritures.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 septembre 2015.

Selon conclusions de procédure en date du 15 septembre 2014, Mme X... demande à la cour de rejeter les conclusions no3 établies le matin de l'ordonnance de clôture.

Selon conclusions du 18 septembre 2014, M. Y... conclut au débouté de la demande de rejet des pièces et conclusions et indique ne pas s'opposer à un rabat de la clôture. Il fait valoir qu'il n'a pas réellement modifié sa demande mais qu'il s'est contenté de répondre à des conclusions de l'appelante établies le vendredi 11 septembre 2015, veille d'une fin de semaine.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les conclusions tardives :

S'il est en effet critiquable de conclure la matinée de la clôture de l'instruction, il y a lieu de relever que les dites conclusions reprennent les mêmes moyens et viennent répondre à des conclusions récentes de la partie adverse accompagnées de nouvelles pièces. Il convient par conséquent de débouter l'appelante de sa demande tendant à voir rejeter les dernières conclusions.

Sur la résidence de l'enfant commun :

Mme X... fait valoir qu'elle a toujours eu une relation privilégiée avec l'enfant Inaya au regard des nombreux débordements anciens et actuels commis par le père à l'origine de la rupture du couple et des difficultés actuelles. Elle lui reproche ses addictions régulières (alcool, cannabis), le dénigrement de l'autre parent, le non respect de la parole donnée quant à la tentative du couple de s'installer à Toulouse pour repartir sur de meilleures bases. Elle soutient que depuis la décision du premier juge, la fillette est en souffrance et que M. Y... continue d'avoir un mode de vie incompatible avec la résidence habituelle d'un jeune enfant. Elle expose qu'elle a trouvé un emploi et qu'elle est très entourée par sa famille alors que la précarité professionnelle dont fait montre le père caractérise les errements de ce dernier : engagement dans l'armée, reprise de l'activité professionnelle de son père en la menant à la liquidation judiciaire, Rsa.

M. Y... conteste toutes les assertions de l'appelante, faisant valoir que les échanges de textos ont été houleux de manière réciproque par le passé mais que ce n'est plus d'actualité depuis septembre 2013. Il dénonce l'attitude de Mme X... qui refuse toute communication avec lui, y compris sur les questions médicales relatives à leur fille comme l'intervention médicale (les végétations) ou le changement d'école. Il conteste consommer des stupéfiants et fait valoir que le trafic reproché remonte à près de deux années et qu'il a en réalité commis les faits sur une période circonscrite pour faire face à des difficultés financières.

Le premier juge a confié la résidence principale de la fillette à son père au motif que le bilan de la résidence alternée est positif et que la mère ne rapporte aucun élément pour justifier qu'il soit mis fin à ce mode de résidence, si ce n'est son projet personnel de s'établir sur Toulouse où vit sa famille.

Selon l'article 373-2-6 du Code civil, le juge règle les mesures relatives aux enfants mineurs en veillant spécialement à la sauvegarde de leurs intérêts. C'est sous cette condition générale qu'il fixe en particulier la résidence des enfants, soit en alternance au domicile de chacun des parents, soit au domicile de l'un d'eux, auquel cas il statue sur le droit de visite et d'hébergement de l'autre parent, ainsi que le prévoit l'article 373-2-9.

L'enquêtrice estime que le père offre un cadre structurant et équilibré en dépit de la condamnation pénale visant selon elle des fait anciens. Elle dit craindre que Mme X... fasse obstacle aux droits du père si la résidence de l'enfant lui était confiée au regard du ressentiment qu'elle éprouve vis à vis de son ex-compagnon et de son incapacité encore actuelle à communiquer sur toutes les questions qui concernent leur fille.

Les attestations de l'entourage familial et les observations de l'enquêtrice sociale viennent établir que la relation de M. Y... avec Mme X... a été chaotique et ponctuée de projets de séparation durant plusieurs années, ce même avant la naissance de l'enfant commun. Les témoins rapportent que la mère de l'enfant a cessé tout contact avec le père suite à la volte-face de ce dernier de revendiquer la résidence de l'enfant après que l'intéressée ait poursuivi son projet de s'installer sur Toulouse, même sans lui.

Il ressort des pièces versées aux débats que l'absence de co-parentalité dénoncée par l'intimé résulte aussi de sa propre attitude :. ainsi les textos échangés entre les parties confirment le manque de respect de M. Y... vis à vis de sa compagne durant le temps de la vie commune. Il est à craindre, si un tel mode relationnel est maintenu, que le dialogue se dégrade encore et que les non-dits qui actuellement le parasitent, le rompent durablement, au détriment de l'enfant qui, pour se développer harmonieusement, a besoin de son père et de sa mère.

Dans cette perspective, la Cour invite d'ores et déjà les parents à rencontrer un médiateur familial afin de permettre une reprise du dialogue constructive dans le seul intérêt de leur enfant.

Pour conclure au maintien de la résidence chez le père, il y a lieu de relever que l'enquêtrice se contente de mentionner que la fillette a toujours vécu en région malouine où elle a ses habitudes, écartant les problèmes de concentration mentionnés par l'instituteur au motif que rien ne démontre qu'ils sont en lien avec la situation familiale.

L'enquêtrice ne fournit par ailleurs aucune donnée actualisée sur la situation personnelle ou professionnelle du père.

Pour autant, la cour considère que le père n'est pas le plus apte à assurer les besoins affectifs de l'enfant et un modèle éducatif sécurisant. En effet ce dernier a été condamné le 17 mars 2014 dans le cadre d'une procédure de reconnaissance préalable de culpabilité à deux mois d'emprisonnement avec sursis pour avoir acquis de la résine de cannabis, en avoir fait usage et en avoir cédé à un tiers entre le 1er novembre 2013 et le 13 février 2014 soit à une période où la jeune enfant lui avait déjà été confiée, prioritairement à la mère. Même s'il se défend d'avoir des conduites addictives, la cour ne peut que s'interroger sur un mode de vie consistant à rechercher de l'argent facile pour faire face à ses dettes.

En outre et surtout, il est attesté de la souffrance de la fillette d'être séparée de sa mère. L'instituteur de la classe de grande section de l'école publique de Saint Malo décrit Inaya comme une enfant assez énigmatique qu'il a du mal à cerner. Il précise que si l'enfant n'a pas de réelles difficultés scolaires, ses résultats ne sont pas la hauteur de ses capacités, elle manque d'assurance, paraît craintive et ne semble pas toujours disponible pour les apprentissages, elle est souvent perdue dans ses pensées. L'instituteur emploie le terme de " mélancolique " pour la dépeindre ; elle peut parfois s'isoler dans la cour de l'école ou à l'inverse " peut faire la folle " et être très dispersée. Il est à noter que l'instituteur a souhaité faire établir un bilan par le réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficulté.

Au regard de la nouvelle situation professionnelle de Mme X..., des attestations circonstanciées de son entourage familial qui la soutient et du comportement à certains égards fragilisé de l'enfant, il y a lieu de transférer la résidence de l'enfant au domicile de sa mère, ce dans l'intérêt bien compris de la fillette, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le rattachement social de la mineure en l'absence de fondement textuel à cette demande.

Le droit d'accueil du père sera fixé conformément aux propositions concordantes faites par les parties sans qu'il y ait lieu d'instituer une clause de déchéance comme le revendique la mère de l'enfant sans la moindre raison.

Les frais de trajet du voyage aller de l'enfant resteront à la charge financière de M. Y... mais il n'y a pas lieu de lui faire supporter l'organisation matérielle et le coût du trajet retour de l'enfant

dès lors que Mme X... a fait le choix de s'éloigner de plus de 800 kms de l'ancien domicile des parents.

Sur la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant :

La contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants est, selon l'article 371-2 du Code civil, fixée à proportion des ressources de l'un et l'autre des parents et des besoins de l'enfant.

M. Y... a occupé plusieurs contrats à durée déterminée depuis le 5 mai 2015 lui procurant une moyenne de revenus de l'ordre de 1 500 ¿/ mois (2 320 ¿ + 3 869 ¿), ce en qualité de vendeur dans une jardinerie. Il assume un résiduel de loyer de 56 ¿/ mois.

Mme X... indique être employée dans une entreprise de restauration rapide et occupe le poste d'hôtesse d'accueil depuis le 1er juin 2014.

En considération de ces éléments et des besoins de l'enfant la contribution paternelle à l'entretien d'Inaya sera fixée à somme forfaitaire de 170 ¿/ mois à compter du transfert effectif du lieu de résidence de l'enfant..

Sur les frais et dépens :

La nature familiale du litige conduit à dire que chaque partie conservera la charge de ses entiers dépens. Il n'ya pas lieu à application des disposition de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après rapport à l'audience,

Infirme le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau :

Fixe la résidence habituelle de l'enfant Inaya au domicile de sa mère, ce après les vacances de Noël 2015 ;

Accorde à M. Y..., sauf meilleur accord entre les parties, un droit d'accueil qui s'exercera l'intégralité des vacances scolaires de février, Pâques et Toussaint outre la moitié des vacances de Noël et d'été première moitié des vacances de Noël les années impaires, seconde moitié les années paires, à charge pour le père d'assumer financièrement la moitié des frais de transport de l'enfant ;

Fixe la contribution de M. Y... à l'entretien et à l'éducation d'Inaya à la somme de 170 ¿/ mois, avec l'indexation d'usage, ce à compter du transfert effectif de la résidence de l'enfant ;

Rejette les autres demandes ;

Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 13/07519
Date de la décision : 10/11/2015
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2015-11-10;13.07519 ?
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