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27/10/2015 | FRANCE | N°14/04935

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 27 octobre 2015, 14/04935


6ème Chambre B

ARRÊT No 633

R. G : 14/ 04935

Mme Marie-annick X...

C/
M. Julien X... M. Jean-Pierre X... Mme Sandy Y... M. Claudine Z...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller, m

agistrats délégués à la protection des majeurs,

GREFFIER : Madame Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé
...

6ème Chambre B

ARRÊT No 633

R. G : 14/ 04935

Mme Marie-annick X...

C/
M. Julien X... M. Jean-Pierre X... Mme Sandy Y... M. Claudine Z...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Copie exécutoire délivrée le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller, magistrats délégués à la protection des majeurs,

GREFFIER : Madame Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé

MINISTERE PUBLIC : Monsieur François TOURET de COUCY, substitut général, lequel a pris des réquisitions ;

DÉBATS :
En chambre du Conseil du 21 Septembre 2015 devant Monsieur Jean-Luc BUCKEL et Monsieur Pierre FONTAINE, magistrats délégués à la protection des majeurs, tenant l'audience en double rapporteur sans opposition des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :
réputé contradictoire, prononcé hors la présence du public le 27 Octobre 2015 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.

****

ENTRE
APPELANTE : Madame Marie-Annick X...... 35000 RENNES comparante en personne, assistée de Me Catherine JOSSE-TIRIAU, avocat au barreau de RENNES (bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 14/ 9038 du 17/ 10/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)

ET :
Monsieur Jean-Pierre X... accompagné de Mme Claudine Z...... 17180 PERIGNY comparant en personne

Madame Sandy Y......... 78290 CROISSY SUR SEINE non comparante

Monsieur Julien X..., majeur protégé...... 78290 CROISSY SUR SEINE

Par décision du 17 mars 1988, le juge des tutelles du Tribunal d'instance de Rennes plaçait Monsieur Julien X... sous le régime de la tutelle et désignait, en qualité de tuteur, sa mère, Madame Marie-Annick A... divorcée X....

Le 14 août 2013, le Docteur Christiane B..., médecin inscrit sur la liste établie par le procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Versailles (78) sur le fondement des dispositions de l'article 431 du Code civil, rédigeait un certificat médical mentionnant que Julien X... présentait une déficience intellectuelle moyenne et une épilepsie stabilisée par une thérapie anti-comitiale, générant des troubles du comportement, de l'attention, de la concentration avec interférence délétère des facteurs émotionnels ou affectifs ; une orientation temporo-spatiale fragile ; une immaturité affective et une intolérance à la frustration. Le praticien indiquait que l'altération des facultés mentales de la personne concernée nécessitait sa représentation continue dans les actes de la vie civile, et que le maintien de la mesure de tutelle était indispensable.
Par jugement de révision du 26 novembre 2013, le juge des tutelles saisi de la procédure renouvelait la mesure de protection pour une durée de 300 mois ; ordonnait la suppression du droit de vote du majeur protégé et maintenait sa mère aux fonctions de tutrice.
Par courrier adressé à ce magistrat le 23 janvier 2014, la directrice du ...(78) exposait que son établissement accueillait Julien X... depuis janvier 2009 ; que ce dernier présentait des épisodes de violences et d'agressivité portant atteinte à sa sécurité physique ainsi qu'à la sécurité physique et psychique des autres résidents de la structure ; qu'il a dû être hospitalisé en milieu psychiatrique à six ou sept reprises ; que seize rapports d'incidents avaient été établis courant 2013, amenant la mise en place d'un dispositif d'encadrement par un ou deux éducateurs, tant pendant la journée que, parfois, durant la nuit ; que ses comportements étant imprévisibles et dangereux, sa participation aux activités à l'extérieur de l'établissement avait été suspendue ; qu'une orientation en Foyer d'accueil médicalisé avait été envisagée, mais s'était heurtée à des refus, au vu du dossier de l'intéressé ; que courant décembre 2013, la tutrice avait été prévenue de ce que des établissements implantés en Belgique étaient également contactés ; que celle-ci ne s'y opposait pas dans un premier temps, puis, par courrier du 16 décembre 2013, faisait connaître qu'elle ne souhaitait pas que son fils soit placé dans une structure dans le pays précité ; que lors d'une rencontre s'étant déroulée le 13 janvier 2014, la tutrice avait été informée de ce que la prise en charge de son fils ne pouvait plus se poursuivre au Foyer " Les Mésanges " et que son accord était sollicité pour que les démarches entreprises auprès des établissements belges puissent continuer ; qu'elle a demandé à bénéficier d'un temps de réflexion avant de donner sa réponse. Par courrier adressé au juge des tutelles le 24 février 2014, Madame Marie-Annick A... divorcée X... indiquait à ce magistrat qu'il existait un risque majeur pour elle d'être contrainte d'accepter un placement qu'elle qualifiait d'arbitraire et de non pertinent pour son fils ; que la directrice du Foyer " Les Mésanges " mettait tout en oeuvre pour l'obliger à entériner un placement dans une structure en Belgique ; qu'elle lui a posé un ultimatum, selon lequel soit elle acceptait cette solution, soit son fils était exclu du Foyer. Elle indiquait être persuadée qu'il était possible de trouver un Foyer d'accueil médicalisé en France, mai que peu de recherches avaient été faites en ce sens.

Le 10 février 2014, la Commission d'harmonisation partenariale adultes de la Maison départementale des personnes handicapées des Yvelines émettait un avis selon lequel le Foyer " Les Mésanges " n'était plus en capacité d'accueillir Julien X... et que sa prise en charge relevait d'un Foyer d'accueil médicalisé, avec un suivi thérapeutique et un étayage par un établissement psychiatrique. Cet avis était porté à la connaissance de la tutrice le 4 mars 2014, à laquelle il était demandé de faire connaître sa réponse s'agissant de la réorientation de son fils en Foyer d'accueil médicalisé en région Bretagne ou, à défaut, en Belgique et de s'engager à soutenir le suivi thérapeutique de Julien X... au regard de la nécessité d'une permanence des soins ambulatoires le concernant.
Entendue par le juge des tutelles le 31 mars 2014, Madame Marie-Annick X... affirmait qu'il était impossible que Julien X... parte en Belgique ; qu'il allait de mieux en mieux ; qu'elle était en recherche d'un Foyer d'accueil médicalisé susceptible de l'accueillir.
La directrice du Foyer de vie " Les Mésanges ", entendue le même jour, exposait à nouveau les difficultés rencontrées par la structure s'agissant de la prise en charge du majeur protégé en raison de son comportement et affirmait avoir cherché des établissements adaptés tant en Ile de France qu'en Ille-et-Vilaine, puis en Belgique, faute d'avoir trouvé en France ; que l'admission du susnommé était systématiquement refusée, à cause des manifestations de sa pathologie ; que la tutrice n'ayant toujours pas fait connaître son accord, aucune demande n'a pu être faite auprès d'un Foyer d'accueil médicalisé.
Par courrier du 3 avril 2014, la tutrice indiquait au juge des tutelles que la directrice du Foyer " Les Mésanges " continuait à exercer une très forte pression sur elle pour que Julien X... soit transféré dans une autre structure ; qu'elle allait trouver un prétexte pour que son fils soit mis à la porte de l'établissement ; que les rapports qu'elle établit sont tendancieux et ont pour objectif de démontrer l'urgence à trouver une solution pour que Julien X... quitte le Foyer, alors qu'il va mieux ; qu'elle avait besoin de temps pour trouver une nouvelle solution d'accueil de son fils.

Elle donnait son accord à la prise en charge de ce dernier par un Foyer d'accueil médicalisé et s'engageait à soutenir le suivi thérapeutique décidé, mais refusait toujours le départ de Julien X... pour la Belgique.

Enfin, le 7 avril 2014, le psychiatre traitant de Julien X... estimait que l'état de ce dernier justifiait son insertion en Foyer d'accueil médicalisé.
Par ordonnance du 22 avril 2014, le juge des tutelles du Tribunal d'instance de Rennes, statuant sur le lieu de résidence du majeur protégé, fixait son lieu de vie dans un foyer d'accueil médicalisé, de préférence en France, et à défaut en Belgique. Cette décision était notifiée aux parties par lettres recommandées avec demandes d'avis de réception du 25 avril 2014. Madame Marie-Annick A... divorcée X... signait l'accusé de réception le 29 avril 2014.
Par lettre recommandée postée le 10 mai 2014, reçue au greffe du Tribunal d'instance de Rennes le 12 mai 2014, la susnommée interjetait appel de cette ordonnance.
SUR CE :

Pour statuer comme il l'a fait, le premier juge a relevé que la situation médicale de Julien X... ne permettait incontestablement plus son maintien au Foyer " Les Mésanges ", seule une structure médicalisée, offrant un encadrement psychiatrique adapté, étant susceptible de l'accueillir ; que nonobstant le désaccord exprimé par la mère de la personne protégée, il y avait lieu de fixer le lieu de vie de Julien X... dans un Foyer d'accueil médicalisé de préférence en France et, à défaut, en Belgique ; qu'à défaut de places possibles dans les établissements français, l'impératif lié à l'accueil de Julien X... dans les meilleurs délais dans une structure adaptée commandait de prospecter en Belgique, pays dans lequel deux établissements seraient en capacité de le recevoir.

Le juge des tutelles rappelait à Madame X... qu'en sa qualité de tutrice de la personne de son fils, il lui appartenait de procéder à des recherches actives de Foyers.
Dans un courrier qu'elle avait adressé au juge des tutelles le 10 mai 2014, de même que dans les conclusions déposées par son conseil à l'audience de la cour, développées oralement par ce dernier, Madame X... sollicite l'infirmation de la décision déférée et la fixation du lieu de résidence de Julien X...au ...et, à défaut, dans un autre établissement en France.
À l'appui de son recours, elle fait principalement valoir : * que les difficultés de son fils ont été exagérées, et le tableau clinique noirci, par la directrice de la structure précitée ; que l'arrivée de celle-ci dans l'établissement a coïncidé avec le début de la dégradation de la prise en charge de Julien X... ; * que le suivi thérapeutique de ce dernier a également été mis à mal, un nouveau psychiatre traitant ayant été choisi et les entretiens avec un psychologue extérieur à la structure ayant été interrompus ; * que le régime alimentaire spécifique (intolérance au gluten) n'a plus été respecté ; * que l'orientation de son fils en Foyer d'accueil médicalisé ne constituait pas la solution la plus adéquate, un tel établissement ayant vocation à recevoir des personnes handicapées physiquement ou mentalement, totalement ou partiellement dépendantes, ce qui n'est pas le cas de Julien X... ; * qu'elle s'oppose fermement à tout transfert de son fils en Belgique, en raison de l'éloignement qui en résulterait, ainsi que des conditions catastrophiques d'hébergement et de prise en charge des personnes handicapées françaises se trouvant dans les institutions de ce pays, dont la presse s'est faite l'écho.

Le ministère public a émis, le 17 septembre 2015, un avis de confirmation de l'ordonnance querellée.
Aux termes de l'article 415 du Code civil, la mesure de protection concernant un majeur dont les facultés mentales sont altérées est instaurée et assurée dans le respect des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la dignité de la personne. Elle a pour finalité l'intérêt de la personne protégée et doit favoriser, dans la mesure du possible, son autonomie.
Dans le cadre de ces principes généraux, l'article 459-2 du même Code dispose que la personne protégée choisit le lieu de sa résidence et qu'en cas de difficulté, le juge statue.
Il résulte des dernières pièces communiquées à la cour et des débats que, consécutivement à une fausse route, Julien X... a été hospitalisé à Poissy (78) le 13 mai 2015 ; qu'il a ensuite été admis à l'Établissement public de santé mentale interdépartemental de Montesson (78) où il se trouvait toujours au jour de l'audience de la cour ; que le ...Sur-Seine a fait connaître son refus définitif de réintégrer la personne protégée ; que, de son côté, l'établissement hospitalier précité a indiqué, par courrier du 21 juillet 2015, que Julien X... n'y avait plus sa place et mobilisait inutilement un lit dans le service.

Par ailleurs, Madame X... a confirmé que son fils n'était plus au Foyer de vie précité ; qu'elle avait fait des démarches et obtenu une réponse favorable de la part d'un autre Foyer de vie ; qu'une journée " découverte " y était programmée pour son fils le 7 octobre 2015.
Il se déduit de ce qui précède qu'il n'est plus possible de fixer comme lieu de vie du majeur protégé le ...

D'autre part, imposer la recherche d'un établissement adapté à l'état de Julien X... en Belgique n'apparaît pas conforme à l'intérêt de ce dernier, en raison de l'éloignement géographique qu'une telle solution impliquerait pour lui et de l'incertitude des conditions de sa prise en charge qui en résulterait.

Enfin, même si Madame Marie-Annick X... ne l'admet pas, la solution d'un Foyer d'accueil médicalisé ne saurait être a priori exclue concernant son fils.
En effet, si les derniers documents transmis parle conseil de l'appelante à la cour le 20 octobre 2015 font état de ce que la journée " découverte " du 7 octobre 2015 au Foyer de vie de Le Tronchet (35) s'est déroulée de manière positive pour Julien X..., lequel a exprimé son désir d'intégrer cette structure, et que la procédure d'admission est actuellement en cours, il y a lieu de ne pas écarter d'autres solutions éventuelles pour le cas où les démarches entreprises n'aboutiraient finalement pas.
En conséquence, il convient de dire que le lieu de vie de Julien X... sera fixé en France, soit dans un Foyer de vie, soit dans un Foyer d'accueil médicalisé.
Étant donné l'objet de l'appel, la cour n'est pas juridiquement saisie de la question du choix du tuteur. Il n'y a donc pas lieu à statuer sur ce point.

PAR CES MOTIFS

La cour,
Déclare l'appel régulier en la forme et recevable quant aux délais ;
Infirme partiellement l'ordonnance déférée ;
Fixe le lieu de vie de Julien X... en France, soit dans un Foyer de vie, soit dans un Foyer d'accueil médicalisé ;
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la question du choix du tuteur, la cour n'en étant pas juridiquement saisie ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 14/04935
Date de la décision : 27/10/2015
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2015-10-27;14.04935 ?
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