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27/10/2015 | FRANCE | N°14/01690

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 27 octobre 2015, 14/01690


6ème Chambre B

ARRÊT No 627
R. G : 14/ 01690

Mme Andrée X... épouse Y... M. Jean-Paul Y...
C/
Mme Isabelle Z... divorcée Y... M. Pascal Y...

Confirme la décision déférée

Copie exécutoire délivrée le :
à :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2015
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Huguette NEVEU, lors des débats et

lors du prononcé
MINISTERE PUBLIC :
Monsieur Martial GUILLOIS, substitut général, lequel a pris des réquisitions
DÉBATS :...

6ème Chambre B

ARRÊT No 627
R. G : 14/ 01690

Mme Andrée X... épouse Y... M. Jean-Paul Y...
C/
Mme Isabelle Z... divorcée Y... M. Pascal Y...

Confirme la décision déférée

Copie exécutoire délivrée le :
à :

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2015
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé
MINISTERE PUBLIC :
Monsieur Martial GUILLOIS, substitut général, lequel a pris des réquisitions
DÉBATS :
En chambre du Conseil du 21 Septembre 2015 devant Monsieur Jean-Luc BUCKEL et Monsieur Pierre FONTAINE, magistrats tenant l'audience en double rapporteur sans opposition des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
réputé contradictoire, prononcé hors la présence du public le 27 Octobre 2015 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.
****
APPELANTS : Madame Andrée X... épouse Y... née le 28 Octobre 1947 à TREVRON (22100) et Monsieur Jean-Paul Y... né le 11 Mai 1945 à DINAN (22100)
...22100 QUEVERT Représentés par Me COSTANTINO substituant Me TELLIER de la SELARL ALPHA LEGIS, avocat au barreau de SAINT-MALO
INTIMÉS : Madame Isabelle Z... divorcée Y... née le 19 Janvier 1975 à Saint-Malo ...35400 SAINT-MALO Représentée par Me Jean-Michel SOURDIN,, avocat au barreau de SAINT-MALO (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle à 40 % numéro 14/ 4165 du 05/ 05/ 2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)
Monsieur Pascal Y... né le 30 Août 1973 à LEHON (22100) ...22100 QUEVERT signifié à sa personne par acte du 31 juillet 2014

Monsieur Pascal Y... et Madame Isabelle Z... se sont mariés à Saint-Lunaire le 15 avril 2000.
Un enfant, Marine, est né de leur union le 2 août 2002.
Par décision du 14 janvier 2010, le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Dinan, prononçant le divorce d'entre les époux Y.../ Z..., a principalement : * dit que l'autorité parentale sur l'enfant est exercée exclusivement par la mère ; * fixé la résidence habituelle de Marine au domicile de la mère ; * dit que le père bénéficiera d'un droit de visite et d'hébergement limité en fonction de l'accord de la mère ;
Par arrêt du 5 juillet 2011, la cour de céans, sur appel de Monsieur Pascal Y..., a : + confirmé le jugement déféré, sauf en ses dispositions accordant à Monsieur Pascal Y... un droit de visite et d'hébergement limité en fonction de l'accord de Madame Isabelle Z... ; + infirmé de ce chef et suspendu, en l'état, le droit d'accueil de Monsieur Pascal Y....
Parallèlement, par requête du 12 avril 2010, Monsieur Jean-Paul Y... et Madame Andrée X... épouse Y..., parents de Monsieur Pascal Y..., saisissaient le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Saint-Malo en la forme des référés, aux fins de se voir reconnaître un droit d'accueil sur leur petite-fille Marine.
Par ordonnance du 26 octobre 2011, le magistrat précité, statuant en qualité de juge de la mise en état, prescrivait l'audition de Marine et désignait le Docteur A..., pédopsychiatre, pour y procéder ; chargeait l'expert de préciser la volonté de l'enfant sur la demande de droit de visite et d'hébergement de ses grands-parents, de rechercher si l'enfant a pu exprimer une volonté libre et de déterminer, dans le cadre des débats, les intérêts propres de l'enfant ; prescrivait la consignation par les consort Y... d'une somme de 300 ¿ à la régie du Tribunal de grande instance de Saint-Malo dans le délai de un mois, à peine de caducité ; dit que l'expert déposera son rapport dans le délai de trois mois suivant sa saisine.
Le Docteur A... ayant déposé son rapport le 10 décembre 2012, le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Saint-Malo a, par jugement du 27 janvier 2014 : o débouté Madame Andrée X... épouse Y... et Monsieur Jean-Paul Y... de l'ensemble de leurs demandes ; o condamné les mêmes à payer à Madame Isabelle Z... la somme de 1. 500 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; o condamné les époux Y... aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise, et avec application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle.
Par déclaration du 3 mars 2014, enregistrée au greffe de la cour le 4 mars 2014, Monsieur Jean-Paul Y... et Madame Andrée X... épouse Y... ont interjeté appel de cette décision.
Par leurs dernières conclusions du 2 juin 2014, les appelants demandent à la cour d'infirmer le jugement déféré et de : * dire que Monsieur et Madame Y... disposeront progressivement d'un droit de visite et d'hébergement s'exerçant une fin de semaine par mois et trois semaines de vacances scolaires dans l'année ; * condamner Isabelle Z... à leur payer la somme de 1. 500 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; * condamner Isabelle Z... aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître NTSAKALA conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
Par ses dernières écritures du 25 juillet 2014, Madame Isabelle Z... demande à la cour de : + débouter les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions ; + confirmer le jugement déféré ; + condamner solidairement les époux Y... à verser à madame Isabelle Z... une somme de 3. 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, laquelle sera recouvrée directement par Maître SOURDIN dans les conditions prévues par l'article 37 de la loi 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ; + de condamner les appelants aux entiers dépens.
Le ministère public a émis un avis de confirmation de la décision querellée, compte tenu du contexte familial difficile, de l'avis librement exprimé par l'enfant et du rapport d'expertise versé aux débats.
Il sera renvoyé pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties à leurs écritures.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 septembre 2015.
Pour statuer comme il l'a fait, le premier juge s'est fondé sur : * la constatation de l'existence d'un conflit complexe et douloureux entre les parents de l'enfant, Monsieur Pascal Y... et Madame Isabelle Z... d'une part et, d'autre part, les grands-parents paternels de Marine, Monsieur Jean-Paul Y... et Madame Andrée X... épouse Y... ; * le fait que Marine ne voyait plus son père depuis plusieurs années, le droit d'accueil de ce dernier ayant été suspendu par arrêt de la cour de céans rendu le 5 juillet 2011 ; * le rapport d'expertise établi par le Docteur A..., préconisant, dans l'intérêt de l'enfant et la préservation de son équilibre psychologique, de respecter le souhait de Marine de rester préservée d'une relation avec ses grands-parents paternels qui a été profondément insécurisante pour elle, estimant qu'en raison de ces éléments, l'intérêt de l'enfant faisait manifestement obstacle à l'instauration d'un quelconque droit de visite au profit des grands-parents paternels.
Au soutien de leur demande d ¿ octroi d'un droit de visite et d'hébergement concernant leur petite-fille Marine, les appelants font valoir qu'ils ont entretenu avec cette enfant, dès son plus jeune âge, des relations d'une très grande proximité, constituant pour elle des figures éducatives et d'attachement et nouant avec Marine un lien affectif indélébile ; que sa mère a brutalement coupé tout contact avec eux postérieurement à la révélation par l'enfant, courant mai 2006, de faits de nature sexuelle imputés par elle à son oncle maternel, Guillaume Z..., frère de Madame Isabelle Z..., laquelle prenait fait et cause pour ce dernier, tandis que Madame Andrée X... épouse Y... soutenait sa petite-fille.
En définitive, la procédure diligentée contre Guillaume Z... sera classée sans suite, tandis que la plainte avec constitution de partie civile déposée par ce dernier contre Madame Andrée X... épouse Y... du chef de dénonciation calomnieuse se terminera par un jugement de relaxe prononcé le 15 novembre 2012 par le Tribunal correctionnel de Saint-Malo.
Les époux Y... prétendent qu'à l'heure actuelle, Madame Isabelle Z... tentait d'instrumentaliser ces procédures pour faire croire au caractère toxique des grands-parents paternels et s'opposer à leur demande de reprise des liens avec Marine.
Ils s'interrogent sur la nature du discours tenu à cet enfant par sa mère les concernant et la valeur des souvenirs prétendus de Marine, lesquels sont probablement le fruit d'une reconstruction a posteriori induite par les récits de sa mère.
Pour solliciter la confirmation du jugement déféré, Madame Isabelle Z... invoque les manipulations graves dont Marine a été victime de la part des grands-parents paternels dans le cadre des faits d'abus sexuels imputés à Guillaume Z..., Madame Andrée X... épouse Y... et Monsieur Jean-Paul Y..., de même que Monsieur Pascal Y..., père de Marina, ayant cherché à l'inscrire dans leur délire paranoïaque.
Elle se fonde également sur le refus explicite de Marine de revoir tant son père que ses grands-parents paternels, ainsi que sur les conclusions de l'expert ayant recueilli la parole de l'enfant, préconisant de préserver Marine, dans son intérêt et celui de son équilibre psychique, d'une relation perturbatrice avec ses grands-parents paternels.

SUR CE :
L'article 371-4 du Code civil dispose que l'enfant a le droit d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants et que seul l'intérêt de l'enfant pouvait faire obstacle à l'exercice de ce droit.
Dans le rapport d'enquête sociale prescrit par le juge aux affaires familiales dans le cadre de la procédure de divorce, déposé le 25 octobre 2007, le rédacteur de ce document indique que Marine se trouve immergée au coeur d'un imbroglio familial particulièrement destructeur et pathogène, dont elle est à la fois l'objet, le vecteur et l'enjeu ; qu'il s'agit d'une situation inextricable risquant de s'avérer, à terme, particulièrement préjudiciable pour l'équilibre et le développement psychoaffectif de l'enfant ; qu'il paraît impératif et urgent de mettre un terme aux débordements de Pascal Y..., père de l'enfant, en protégeant Marine du délire paranoïaque dans lequel son père et la grand-mère paternelle cherchent à l'impliquer.
L'enquêteur social décrivait Madame Isabelle Z... comme une mère attentive, à l'écoute de sa fille, vigilante par rapport à ses besoins, disposée à prendre en considération les conseils d'autrui, sans adopter une volonté délibérée d'écarter la figure paternelle.
À l'inverse, le père était dépeint comme présentant une altération du jugement, caractérisée par des constructions délirantes de ses raisonnements ; une totale incapacité à remettre en cause ses convictions ; des comportements inadaptés par rapport à sa fille, allant jusqu'à la filmer dans des positions indécentes et impudiques afin de se constituer une preuve des agissements imputés par la suite à Guillaume Z...
S'agissant de Marine, si elle affirmait bien aimer son père, elle déclarait toutefois ne plus vouloir aller chez lui, parce qu'elle y rencontrait sa grand-mère paternelle avec laquelle elle souhaitait ne plus avoir aucun contact.
Dans son rapport d'expertise relatif à l'examen de Marine Y..., pratiqué le 25 janvier 2012, le Docteur Bernard A..., médecin pédopsychiatre, mentionne :
" Marine Y... est une enfant de neuf ans qui possède un niveau intellectuel normal, de bonnes capacités d'expression verbale, dont les modes de pensée sont cohérents et structurés. Elle mène une vie familiale, scolaire, de loisirs dans laquelle elle trouve équilibre et sécurité psychiques.
Marine a cependant été fragilisée dans la relation qu'elle a connue antérieurement avec son père et ses grands-parents paternels. Ceci provoque encore chez elle périodiquement des troubles du sommeil à type de cauchemars angoissants, qui mettent en scène des formes de violence paternelle. Vis à vis de ses grands-parents paternels, Marine fait part de manière précise d'avoir été victime de manipulations graves de leur part, tendant à la faire adhérer à de fausses allégations d'abus sexuels, ce qui a mené à son audition dans le cadre d'une procédure judiciaire. Elle se plaint également d'avoir subi la dévalorisation et les insultes proférées par ses grands-parents paternels vis à vis de sa mère. "
L'expert indique que Marine est capable de discernement ; qu'elle parle en son nom ; qu'à aucun moment, elle n'est apparue comme étant sous l'influence de sa mère.
Il conclut en préconisant que dans l'intérêt de cet enfant et la préservation de son équilibre psychique, son souhait de rester préservée d'une relation avec ses grands-parents paternels, qui a été profondément insécurisante pour elle, soit respecté.
Si, de manière générale, l'existence d'un conflit entre l'un des parents de l'enfant et ses grands-parents ne suffit pas, en soi, à faire obstacle à leurs relations, il en va différemment lorsque, comme en l'espèce, ce conflit peut rejaillir sur l'enfant concerné et présenter un risque quelconque pour lui, notamment en terme d'équilibre psychique et de développement psychoaffectif harmonieux.
Il résulte suffisamment des pièces de la procédure soumises à l'appréciation de la cour qu'un tel risque existe pour Marine, d'autant que son père, Pascal Y..., a toujours des relations suivies avec ses parents, qui le reçoivent régulièrement chez eux, si bien que leur octroyer un droit de visite et d'hébergement serait de nature à rendre possible le contournement par le père de la décision judiciaire ayant suspendu tout droit de visite sur sa fille à son égard.
Par ailleurs, devant la volonté farouchement exprimée par Marine Y..., pré-adolescente de 13 ans, de ne plus vouloir entretenir aucune relation avec ses grands-parents paternels, il est illusoire de penser que la solution de cette difficulté résiderait dans une décision judiciaire qui s'imposerait à elle, compte tenu de la lourdeur du passif existant. En conséquence, la décision du premier juge sera confirmée.
L'équité justifie que les appelants, qui succombent à l'instance, supportent les frais irrépétibles exposés par la partie adverse. Une somme de 1. 500 ¿ sera allouée à l'intimée à ce titre. Ils seront également condamnés aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS/
La cour,
Déclare les appels réguliers en la forme et recevables quant aux délais ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne Monsieur Jean-Paul Y... et Madame Andrée X... épouse Y... à payer à Madame Isabelle Z... la somme de 1. 500 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et 37 de la loi 91-647 relative à l'aide juridictionnelle ;
Condamne Monsieur Jean-Paul Y... et Madame Andrée X... épouse Y... aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 14/01690
Date de la décision : 27/10/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2015-10-27;14.01690 ?
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