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26/05/2015 | FRANCE | N°13/08872

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 26 mai 2015, 13/08872


COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 26 MAI 2015

6ème Chambre B
ARRÊT No. 315
R. G : 13/ 08872
Mme Monique X... divorcée Y...
C/
M. Hervé Louis André Y... M. Patrick Paul Gaston Joseph Y...

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,

GREFFIER :
Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience pub

lique du 24 Mars 2015 devant Mme Françoise ROQUES, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des...

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 26 MAI 2015

6ème Chambre B
ARRÊT No. 315
R. G : 13/ 08872
Mme Monique X... divorcée Y...
C/
M. Hervé Louis André Y... M. Patrick Paul Gaston Joseph Y...

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,

GREFFIER :
Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 24 Mars 2015 devant Mme Françoise ROQUES, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 26 Mai 2015 par mise à disposition au greffe, comme indiqué à l'issue des débats après prorogation,
****
APPELANTE :
Madame Monique X... divorcée Y... née le 20 Janvier 1945 à QUIMPER (29000)... 29000 QUIMPER

Représentée par Me Nathalie TROMEUR de la SCP LARMIER-TROMEUR, avocat au barreau de QUIMPER
INTIMÉS :
Monsieur Hervé Louis André Y... né le 02 Février 1965 à NANTES (44000) (44000)... 69450 SAINT CYR AUX MONT D'OR

Monsieur Patrick Paul Gaston Joseph Y... né le 13 Août 1970 à QUIMPER (29000) (29000)... 14610 THAON

Représentés par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP COLLEU/ LE COULS-BOUVET, avocat postulant au barreau de RENNES et par Me LE SAOS substituant Me LE GUILLOU RODRIGUES avocat plaidant au barreau de QUIMPER

Selon jugement en date du 19 janvier 2007, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Quimper a prononcé le divorce d'entre les époux X.../ Y... pour altération définitive du lien conjugal (le jugement de divorce du 8 juin 1982 ayant été infirmé par la présente cour) et a, entre autres dispositions, ordonné la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux, commis le président de la chambre des notaires du Finistère pour y procéder et fixé au 30 avril 1980, la date des effets du divorce entre les époux s'agissant de leurs biens.
Il dépendait de la société d'acquêts des époux X.../ Y... un fonds de commerce d'officine de pharmacie pour lequel Mme X... a obtenu l'autorisation, selon jugement en date du 3 mars 1981, de transférer le fonds de pharmacie et ce en dépit de l'opposition de son époux (crainte que le transfert soit un obstacle à la vente du fonds de l'officine dans les cinq années).
M. Yves Y... est décédé le 31 décembre 2009 laissant pour lui succéder, Messieurs Hervé et Patrick Y..., issus de son union avec Mme X....
Par ordonnance du 9 octobre 2007, le juge commissaire a autorisé la cession de gré à gré du fonds de commerce d'officine de pharmacie exploitée par Madame moyennant une somme de 1 220 000 ¿, en conditionnant cette autorisation au séquestre du prix de vente dans l'attente du règlement des intérêts patrimoniaux des époux. La cession de l'officine a été régularisée suivant acte reçu par Maître Z..., notaire à Concarneau, le 3 janvier 2008. Suivant ordonnance rendue en référé par le tribunal de grande instance de Quimper le 22 octobre 2008, une avance en capital a été accordée à chacun des ex-époux, d'un montant de 406 657 ¿ pour Madame et d'un montant de 100 000 ¿ pour M. Y....
Par jugement du 6 décembre 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de QUIMPER a principalement :- fixé au 3 janvier 2008, la date de la jouissance divise du fonds de commerce dépendant de la liquidation du régime matrimonial des époux,- fixé la valeur du fonds de commerce à la somme de 1 220 000 ¿,- débouté Mme X... de toutes ses autres demandes,- l'a condamné au paiement d'une indemnité de 2 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- l'a condamné aux dépens.

Mme X... a relevé appel de ce jugement.
Dans ses dernières écritures en date du 25 février 2015, elle demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et de :- fixer la valeur du fonds de commerce à la somme de 329 100 ¿,- débouter Messieurs Hervé et Patrick Y... de toutes leurs demandes,- les condamner au paiement d'une indemnité de 2 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- les condamner aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la SCP Larmier-Tromeur.

Subsidiairement, Mme X... sollicite de voir fixer sa rémunération à la somme de 891 000 ¿ au titre de sa gestion pour la période du 30 avril 1980 au 27 novembre 2007 sur le fondement des dispositions de l'article 815-12 du code civil.
Plus subsidiairement, elle sollicite de voir fixer l'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 815-13 du code civil à la somme de 891 000 ¿. Dans leurs dernières écritures en date du 12 mars 2015, Messieurs Hervé et Patrick Y... demandent à la cour de :- confirmer le jugement entrepris,- débouter Mme X... de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,- la condamner au paiement d'une indemnité de 3 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- la condamner aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé, pour plus ample exposé des faits de la cause, prétentions et moyens des parties, à leurs dernières écritures.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 17 mars 2015.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la demande principale formée par Mme X... :
Les parties s'accordent à considérer que la valeur du bien indivis doit être fixée au jour le plus proche du partage.
Cependant, Mme X... fait reproche au premier juge de faire figurer la valeur du fonds de commerce à sa valeur de revente de 2007, sans tenir compte de la consistance du dit fonds au jour de la dissolution du régime matrimonial, soit le 30 avril 1980. Elle expose que le notaire, Maître Z..., a inscrit logiquement l'immeuble indivis pour une valeur de 329100 ¿ en appliquant les dispositions de l'article 860 du code civil, lesquelles précisent que le bien doit être évalué d'après son état à l'époque de la donation. Elle se prévaut d'une estimation de la valeur de l'officine en 1980 à hauteur de 150 000 ¿ et propose d'appliquer le coefficient d'érosion monétaire de 2, 194 (date de la vente du fonds) selon le calcul suivant : 150000 ¿ x 2, 194 = 329 100 ¿.
Elle fait valoir que la règle d'évaluation de l'article 870 du code civil repose sur un fondement économique, mais également moral, car il serait particulièrement inique de faire profiter les intimés des plus-values dues à ses seules initiatives et à son activité acharnée, dont ils ont au demeurant déjà largement bénéficié et dont ils seront les héritiers. Elle ajoute que le transfert de l'officine de pharmacie a été un véritable challenge puisqu'elle a du faire face au règlement d'un loyer mensuel de 4500 F à l'époque ainsi qu'aux coûts des agencements nécessaires, soit une somme de 150 000 F.
Les consorts Y... soutiennent que le transfert du fonds de commerce dans un centre commercial situé à 250 mètres de son emplacement initial constitue un acte de gestion normale et non pas juridiquement un changement de consistance du fonds de commerce. Ils font valoir que la plus-value de l'officine ne provient pas de la seule industrie de leur mère, laquelle par ailleurs n'a jamais partagé le résultat net de l'exploitation qui lui a seul profité. Ils prétendent que l'activité du co-indivisaire gérant un bien indivis ne peut être assimilée à une dépense d'amélioration du bien, de sorte que la plus-value constatée au jour du partage accroît l'indivision en application de l'article 815-10 du code civil. Ils ajoutent que la requérante n'a pas apporté de fonds personnels pour effectuer ce déménagement et qu'à l'inverse elle a bénéficié pendant 31 ans de la totalité des revenus d'exploitation du fonds de commerce dont elle ne détenait que 50 %.
Le premier juge retient qu'en vertu des dispositions de l'article 829 du Code civil la valeur des biens composant la masse partageable doit être fixée au jour le plus proche du partage et que ce même article inclut l'ensemble des modifications apportées à l'état du bien sans en distinguer la cause. Il considère qu'il n'y a pas lieu de fixer la jouissance divise en 1980, soit 28 ans avant le partage, dès lors que cette date plus ancienne n'apparaît pas plus favorable à la réalisation de l'égalité entre les partageants, en ce que Mme X... a bénéficié, pendant la durée de l'indivision, des fruits de l'exploitation de l'officine et de revenus confortables et qu'elle a fait le choix de se maintenir dans l'indivision durant toutes ces années, ce qui lui a permis de faire fructifier le capital.
En considération de l'ensemble de ces éléments, le premier juge a fixé la date de la jouissance divise à la date de la vente du fonds de commerce, soit le 3 janvier 2007 et a fixé la valeur du bien à la somme de 1 220 000 ¿ correspondant à son prix de vente.
La cour constate que la date des effets patrimoniaux du divorce des époux X.../ Y... ayant été fixée le 30 avril 1980, il s'ensuit que les règles de l'indivision se sont substituées à celles du régime matrimonial, étant observé qu'aucun texte n'impose aux indivisaires de mettre fin à l'indivision et qu'à l'inverse le législateur s'est employé à organiser l'indivision en la dotant d'un régime juridique sans cesse amélioré.
Ainsi, aux termes des dispositions de l'article 815-10 du code civil : " sont de plein droit indivis, par l'effet d'une subrogation réelle, les créances et indemnités qui remplacent des biens indivis, ainsi que les biens acquis, avec le consentement de l'ensemble des indivisaires, en emploi ou remploi des biens indivis. Les fruits et les revenus des biens indivis accroissent à l'indivision, à défaut de partage provisionnel ou de tout autre accord établissant la jouissance divise. Aucune recherche relative aux fruits et revenus ne sera, toutefois, recevable plus de cinq ans après la date à laquelle ils ont été perçus ou auraient pu l'être. Chaque indivisaire a droit aux bénéfices provenant des biens indivis et supporte les pertes proportionnellement à ses droits dans l'indivision ".
En l'espèce, le fonds de commerce de pharmacie issu de la société d'acquêts constituée entre les époux a été géré par Mme X... seule. A cet égard il est manifeste que Mme X... a géré l'indivision de façon particulièrement dynamique, voire audacieuse, puisqu'elle a dû agir en justice contre son époux co-indivisaire pour obtenir d'être autorisée à opérer le transfert du dit fonds de commerce. Elle a ensuite fait fructifier l'officine de pharmacie, provoquant une importante plus value par son travail.
Cette industrie personnelle, non pas seulement ordinaire mais exceptionnelle, ne saurait pour autant engendrer l'exclusivité du produit de son industrie, fruits et plus-value confondus. Et le raisonnement par analogie tenu par l'appelante au visa des article 860 et suivant en matière de rapport de donation est contraire à l'esprit des indivisions, peu importe qu'en l'espèce la consistance du fonds ait été modifié.
Il s'ensuit que les comparaisons chiffrées opérées dans les écritures des parties entre l'activité et les locaux de l'officine de pharmacie exploitée rue ... à Quimper et l'officine de pharmacie exploitée au sein du centre commercial du Braden à Quimper sont vaines.
En effet, outre les dispositions de l'article 815-10 du code civil, il est de jurisprudence constante, depuis 1994, que l'indivisaire entreprenant ne saurait être indemnisé en fraction de la valeur du capital.
La plus-value profite à l'indivision et l'indivisaire gérant reçoit la rétribution de son travail en application de l'article 815-12 du Code civil, étant rappelé que pour la fixation de la rémunération de l'indivisaire gérant, il n'est pas interdit de tenir compte de l'intensité et de la qualité du travail fourni.
Il s'en déduit qu'il y a lieu de confirmer le jugement qui a fixé la date de la jouissance divise à la date de la vente du fonds de commerce, soit le 3janvier 2007, et a fixé la valeur du bien à la somme de 1 220 000 ¿ correspondant à son prix de vente.
Sur les demandes subsidiaires formées par Mme X... :
Aux termes des dispositions de l'article 815-12 du Code civil, l'indivisaire qui gère un ou plusieurs biens indivis est redevable des produits nets de sa gestion. Il a droit à la rémunération de son activité, dans les conditions fixées à l'amiable, ou à défaut, par décision de justice.
Il s'impose de relever que cet article contient une double règle, à savoir que si l'activité de gestion d'un co-indivisaires ouvre bien droit à une rémunération, dans tous les cas, l'indivisaire doit faire profiter l'indivision des produits nets de sa gestion.
En l'espèce Mme X... revendique en cause d'appel cette rémunération sans donner la moindre information sur les produits nets de sa gestion, étant rappelé que le gérant peut déduire du bénéfice brut tous les frais qui ont été nécessaires pour l'obtenir et ajouter à cette déduction sa propre rémunération.
Il s'ensuit que Mme X... sera déboutée de sa demande sur ce fondement.
S'agissant de la demande plus subsidiaire formée par Mme X... au visa de l'article 815-13 du code civil, elle ne peut prétendre à une indemnité pour les améliorations apportées au fonds dès lors qu'elle n'allègue ni, a fortiori, ne justifie de travaux d'amélioration effectués et financés par elle seule sur l'immeuble indivis. Elle sera pareillement déboutée de sa demande sur ce fondement.
Sur les frais et dépens :
Mme X... qui succombe au principal supportera la charge des dépens. Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, après rapport fait à l'audience ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Rejette toute autre demande ;
Condamne Mme X... aux dépens d'appel.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 13/08872
Date de la décision : 26/05/2015
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2015-05-26;13.08872 ?
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