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24/03/2015 | FRANCE | N°14/01620

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 24 mars 2015, 14/01620


1ère Chambre





ARRÊT N° 130



R.G : 14/01620













M. [L] [G]



C/



Me [T] [F]

















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'AP

PEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 MARS 2015





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller, entendu en son rapport

Madame Marie-Pierre ROLLAND, Vice-Président Placé,





GREFFIER :



Madame Marlène ANGER, lors des débats et lors du prononcé





DÉ...

1ère Chambre

ARRÊT N° 130

R.G : 14/01620

M. [L] [G]

C/

Me [T] [F]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 MARS 2015

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller, entendu en son rapport

Madame Marie-Pierre ROLLAND, Vice-Président Placé,

GREFFIER :

Madame Marlène ANGER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 10 Février 2015, devant Monsieur Xavier BEUZIT et Monsieur Marc JANIN, tenant l'audience en double rapporteurs, sans opposition des représentants des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 24 Mars 2015, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANT :

Monsieur [L] [G]

né le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Dominique LE COULS-BOUVET de la SCP SCP COLLEU/LE COULS-BOUVET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assisté de Me Georges BENABES, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

INTIMÉ :

Maître Jean Marie ABALLAIN

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Jean-David CHAUDET de la SCP BREBION CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assisté de Me Benjamin ENGLISH de la SCP MARION-LEROUX-SIBILLOTTE- ENGLISH, Plaidant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [L] [G] avait conclu avec Monsieur [S] [M], le 30 juillet 1997, une convention dont l'objet était une promesse de constituer entre eux et avec le groupe France Epargne (GFE) une société de promotion immobilière, ainsi que d'organiser les relations commerciales entre eux, prévoyant entre autres, l'interdiction pour Monsieur [M] 'pendant une durée de trois ans de monter toutes opérations avec le Groupe France Epargne sans Monsieur [G]'.

Invoquant la violation de cette clause par Monsieur [M] du fait de la constitution par ce dernier de deux sociétés de promotion immobilière avec le GFE les 1er décembre 1999 et 16 mai 2000, Monsieur [G] a sollicité en justice la condamnation de Monsieur [M] à lui payer une somme de 490 755,17 € à titre de dommages-intérêts.

Cette demande a été rejetée par un jugement du tribunal de grande instance de Brest en date du 13 décembre 2006, confirmé par la cour d'appel de Rennes dans un arrêt du 3 juin 2008; le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté pour absence de moyens sérieux.

Monsieur [G] a alors recherché la responsabilité civile professionnelle de Monsieur [T] [F], avocat à [Localité 1], qui avait rédigé la convention du 30 juillet 1997, auquel il reproche un manquement à l'obligation de résultat à laquelle l'avocat est tenu quant à l'efficacité juridique des actes qu'il rédige, ainsi qu'à l'obligation précontractuelle d'information.

Par jugement du 11 décembre 2013, le tribunal de grande instance de Lorient :

- a débouté Monsieur [G] de ses demandes,

- l'a condamné à verser à Monsieur [F] une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- l'a condamné aux dépens.

Monsieur [G] a interjeté appel de ce jugement le 28 février 2014.

Par conclusions du 29 janvier 2015, auxquelles il sera renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments, il demande à la cour :

- de réformer le jugement déféré,

- à titre principal, de condamner Monsieur [F] à lui payer la somme de 407 765 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

- à titre subsidiaire, de condamner Monsieur [F] à lui payer la somme de 407 765 € au titre de la perte de chance de ne pas avoir contracté,

- à titre plus subsidiaire, d'ordonner une expertise aux fins d'évaluation de son préjudice,

- de débouter Monsieur [F] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner celui-ci à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de le condamner aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Par conclusions du 15 janvier 2015, auxquelles il sera renvoyé pour l'exposé des moyens et arguments, Monsieur [F] demande à la cour :

- à titre principal, d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu une faute à son encontre, et de le confirmer pour le surplus,

- de débouter en conséquence Monsieur [G] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées contre lui,

- à titre subsidiaire, au cas où une faute serait retenue contre lui, de dire que le préjudice ne pourrait résulter que d'une perte de chance minime, voire symbolique,

- en toute hypothèse, de condamner Monsieur [G] à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de le condamner aux entiers dépens de l'instance.

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 3 février 2015.

MOTIFS DE LA DÉCISION DE LA COUR

- Au fond:

Monsieur [G] sollicite la condamnation de Monsieur [F] à lui payer la somme de 407 765 € à titre de dommages-intérêts en se fondant sur la responsabilité civile contractuelle; le succès de sa prétention suppose établis l'inexécution par Monsieur [F] de ses obligations contractuelles et le préjudice que cette inexécution a directement et certainement causé.

- L'inexécution de l'obligation:

Un avocat rédacteur unique d'un acte est tenu, en vertu des dispositions de l'article 1147 du Code civil, de l'obligation de veiller à l'efficacité de celui-ci vis-à-vis de toutes les parties à l'acte.

En l'espèce, la convention de collaboration conclue le 30 juillet 2007 entre Monsieur [M] et Monsieur [G], rédigée par Monsieur [F] à la demande de ceux-ci, exposait en préambule que Monsieur [G] avait présenté le GFE à Monsieur [M], ce qui avait permis à ce dernier de relancer un programme de promotion immobilière à [Localité 1], et que les parties avaient convenu de poursuivre cette collaboration avec le GFE, Monsieur [M] et Monsieur [G] s'associant pour constituer des sociétés de promotion immobilière en vue de réaliser des programmes de résidences pour étudiants dans diverses villes de France, à commercialiser par le GFE.

La convention comprenait un titre I, par lequel Monsieur [M] et Monsieur [G] convenaient de constituer une Sarl de promotion immobilière dans laquelle le premier détiendrait 50% du capital, et Monsieur [G] et le GFE chacun 25%.

Il était stipulé au titre II de la convention 'que chaque partie pourra, en dehors de la présente société, engager à titre personnel toutes opérations immobilières ou de lotissement, Monsieur [M] s'interdisant toutefois pendant une durée de trois ans à dater des présentes de monter toutes opérations avec le GFE sans Monsieur [G]'.

Pour confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Brest en ce qu'il avait débouté Monsieur [G] de son action en responsabilité contre Monsieur [M], la cour d'appel de Rennes avait, dans son arrêt du 3 juin 2008, jugé que l'ambiguïté de la convention, qui n'était signée que par deux des trois personnes devant s'associer dans la société à constituer, rendait son interprétation nécessaire, que cette convention devait être considérée comme un simple projet d'association qui n'avait pas été au delà de la déclaration d'intention et était devenu caduc faute d'avoir été suivi d'effet.

Estimant que le projet constituait un tout indivisible, puisque l'organisation des relations entre les parties à la convention 'en dehors de la présente société' prévue à son titre II supposait que cette société fût créée, la cour a tiré comme conséquence de la caducité du projet d'association que la clause de non-concurrence contenue au titre II était elle-même frappée de caducité.

La cour a par ailleurs retenu, pour ordonner la réparation du préjudice moral dont Monsieur [M] se plaignait à titre reconventionnel, que Monsieur [G] avait, à la suite d'un différent ayant opposé ceux-ci, initié diverses procédures civiles et pénales, sans fondement et dans un pur esprit de vengeance, à l'encontre de Monsieur [M], son ancien associé qui l'avait fait révoquer de ses fonctions de gérant par suite des malversations dont il s'était rendu coupable.

Monsieur [G] soutient comme en première instance que, compte tenu de ces décisions qui avaient ainsi invalidé la convention du 30 juillet 2007, Monsieur [F] avait manqué à son obligation de rédiger un acte efficace, d'une part en ne s'assurant pas de l'accord de GFE pour constituer la société envisagée avec Monsieur [M], d'autre part en ne dissociant pas clairement la clause de non-concurrence du projet de constitution de la société.

Sur le premier grief, la cour considère comme le tribunal que Monsieur [G], dirigeant de société de promotion immobilière, ne pouvait se méprendre sur la portée de la convention, dont les termes étaient clairs et précis, qu'il a signée avec Monsieur [M] seul et dont il ne pouvait ignorer qu'elle n'engageait pas le GFE, qui n'y était pas partie, de sorte que les effets de cette convention quant à la constitution de la société, à laquelle il était prévu que le GFE apporte 25% du capital, étaient nécessairement subordonnés à l'accord à venir de celui-ci.

Sur le deuxième grief, il est constant en revanche que, dans un courrier adressé le 29 mars 2007 à Monsieur [G] qui lui demandait son avis sur le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Brest, Monsieur [F] écrivait que l'interdiction contenue à la convention lui paraissait devoir s'appliquer en fonction du texte lui-même de cette convention et de la commune intention des parties.

Monsieur [F] indiquait ainsi que l'ensemble de la convention était rédigé au futur, sauf précisément l'engagement d'interdiction de concurrence dont il était convenu qu'il devait s'appliquer immédiatement et pour une durée de trois ans, et d'autre part qu'il était ressorti clairement des entretiens entre les cocontractants que Monsieur [M], qui reconnaissait le service que lui avait apporté Monsieur [G] en le mettant en relation avec le GFE pour clôturer le programme de [Localité 1], ne se lancerait pas dans des programmes de résidence étudiants avec le GFE sans Monsieur [G].

Il est ainsi établi que Monsieur [F] connaissait l'intention commune des parties à l'acte qu'elles l'avaient chargé de rédiger, d'interdire à Monsieur [M] durant trois années à compter de sa signature et indépendamment de la constitution de la société, de faire des affaires avec le GFE en dehors de Monsieur [G].

Or il est constant que cet acte a été jugé par l'arrêt du 3 juin 2008, devenu irrévocable, comme étant ambigu, ce qui rendait nécessaire l'interprétation à laquelle la cour d'appel s'est livrée, dans un sens défavorable à Monsieur [G].

Le manquement de Monsieur [F] à son obligation de veiller à l'efficacité de l'acte est caractérisé.

- Le préjudice:

Monsieur [G] fait valoir qu'il a été privé, par la faute de Monsieur [F], des dividendes qu'il aurait pu percevoir et des rémunérations qui ont été versées aux associés, dans les projets réalisés par Monsieur [M] et le GFE 'Les Roches bleues' et 'Cap Affaires la Part Dieu', ce qui constitue le préjudice qu'il a subi, qu'il évalue à 407 765 €.

Le préjudice dont il fait ainsi état ne pourrait être issu que de la perte pour lui de la chance de participer aux gains de toute nature produits par ces opérations auxquels il aurait pu prétendre s'il y avait été associé, ou encore celui de pouvoir faire lui-même par ailleurs les opérations que Monsieur [M] et le GFE n'auraient pas du pouvoir faire sans lui si la clause de non concurrence avait été efficace.

Mais ainsi que l'a justement dit le tribunal, si cette clause avait été reconnue valide nonobstant la caducité de la promesse de constitution de la société, son effet eût été d'interdire à Monsieur [M] de faire des affaires avec le GFE indépendamment de Monsieur [G], mais non d'assurer une participation de ce dernier aux opérations conduites avec le GFE.

Or, dans son jugement du 13 décembre 2006, le tribunal de grande instance de Brest avait relevé qu'il était 'constant que Monsieur [E], gérant du GFE, avait catégoriquement refusé de s'associer dans une société dont Monsieur [G] ferait partie'; Monsieur [E] a en effet déclaré par attestation, le 20 mars 2003, qu'il avait 'refusé de prendre part dans quelques sociétés que ce soit si Monsieur [G] était partie prenante ou associé'.

Et rien ne permet d'autre part de considérer que Monsieur [G] pouvait mener, indépendamment de Monsieur [M] et du GFE, les projets que ceux-ci ont réalisés.

Monsieur [G] ne fait, dans ces conditions, pas la preuve d'un préjudice certain et direct résultant d'une perte de chance raisonnable de contracter avec Monsieur [M] et le GFE dans les deux projets immobiliers réalisés par ceux-ci, ou de réaliser lui-même par ailleurs les affaires que ceux-ci ont pu faire en dehors de lui.

D'autre part, la cour ne voit pas quelle est la chance que Monsieur [G] a perdue de ne pas avoir contracté, qu'il invoque à titre subsidiaire.

*

* *

L'appel, selon les articles 542 et 561 du Code de procédure civile, tend à faire réformer ou annuler le jugement, et remet la chose jugée en question devant la cour d'appel; la chose jugée est, conformément aux dispositions des articles 455 et 480 du même code, énoncée au dispositif du jugement.

Le jugement déféré a, dans son dispositif, débouté Monsieur [G] de ses demandes.

Il sera confirmé, sans qu'il y ait lieu de procéder à l'infirmation partielle réclamée par Monsieur [F] en ce qu'il aurait retenu une faute à l'encontre de celui-ci, et Monsieur [G] sera débouté de l'ensemble de ses demandes au fond.

- Frais et dépens:

Monsieur [G] sera condamné à payer à Monsieur [F] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour l'instance d'appel.

Il sera également condamné aux dépens de celle-ci.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Après rapport fait à l'audience ;

Confirme le jugement déféré ;

Condamne Monsieur [L] [G] à payer à Monsieur [T] [F] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne Monsieur [L] [G] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14/01620
Date de la décision : 24/03/2015

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°14/01620 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-03-24;14.01620 ?
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