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04/11/2014 | FRANCE | N°13/06002

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 04 novembre 2014, 13/06002


1ère Chambre





ARRÊT N°440



R.G : 13/06002













M. [P] [B]

Mme [E] [T] épouse [B]



C/



M. [C] [K]

Mme [M] [Y] épouse [K]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2014
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COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller, entendu en son rapport

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 23 Septembre ...

1ère Chambre

ARRÊT N°440

R.G : 13/06002

M. [P] [B]

Mme [E] [T] épouse [B]

C/

M. [C] [K]

Mme [M] [Y] épouse [K]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2014

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller, entendu en son rapport

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 23 Septembre 2014

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 04 Novembre 2014, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTS :

Monsieur [P] [B]

né le [Date naissance 4] 1950 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Me Tiphaine LE BERRE-BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assisté de Me Jean-Gilles HALIMI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Madame [E] [T] épouse [B]

née le [Date naissance 3] 1949 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Me Tiphaine LE BERRE-BOIVIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assisté de Me Jean-Gilles HALIMI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS :

Monsieur [C] [K]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 4] (35)

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représenté par Me Gildas JANVIER, avocat au barreau de BREST

Madame [M] [Y] épouse [K]

née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 6] (29)

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Gildas JANVIER (SELARL SIAM CONSEIL), avocat au barreau de BREST

FAITS ET PROCÉDURE:

Monsieur [C] [K] et son épouse, Madame [M] [Y], créanciers de Monsieur [P] [B], ont saisi le tribunal de grande instance de Brest d'une action paulienne dirigée contre une donation-partage consentie le 26 juin 1996 par Monsieur [B] et son épouse, Madame [E] [T], de la nue-propriété de deux maisons leur appartenant à leurs deux enfants.

Le tribunal a, par jugement du 17 avril 2013:

- déclaré l'acte de donation-partage inopposable aux demandeurs,

- ordonné la publication du jugement au bureau des hypothèques de Brest,

- condamné les époux [B] à payer aux époux [K] la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,

- rejeté les autres demandes des parties,

- condamné les époux [B] aux dépens, comprenant les frais de coût d'inscriptions hypothécaires et de publication de l'assignation et du jugement au bureau des hypothèques de Brest.

Les époux [B] ont interjeté appel de ce jugement le 7 août 2013.

Par dernières conclusions du 11 août 2014 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, ils demandent à la cour:

- d'infirmer le jugement,

- de constater l'absence de fraude et d'organisation d'insolvabilité,

- de constater que la donation-partage du 26 juin 1996 est antérieure à la commande des époux [K] du 14 octobre 1996,

- de constater qu'elle est antérieure de près d'un an à la date de cessation des paiements définitive déterminée par les organes de la procédure collective,

- de débouter les époux [K] de l'ensemble de leurs demandes et leur déclarer opposable l'acte de donation-partage en date du 26 juin 1996,

- de condamner les époux [K] à leur payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de les condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Par dernières conclusions du 10 décembre 2013 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, les époux [K] demandent à la cour:

- de débouter les époux [B] de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- de condamner les époux [B] à leur payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- de les condamner aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 2 septembre 2014.

MOTIFS DE LA DÉCISION DE LA COUR:

L'action ouverte aux créanciers par l'article 1167 du Code civil tend à permettre à ceux-ci d'obtenir que les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits leur soit déclaré inopposables.

Monsieur [B], dirigeant d'une société LOCH 2000 Sa qui exploitait une activité de location, de gestion et de vente de bateaux de plaisance, a été déclaré coupable, par un jugement du tribunal correctionnel de Versailles du 23 mai 2005, confirmé sur l'action publique par arrêt de la cour d'appel de Versailles du 29 avril 2009, de faits de banqueroute et abus de confiance commis courant 1995 à 1997 au préjudice d'un grand nombre de victimes, dont les époux [K] qui, selon ces décisions, avaient, le 4 octobre 1996, passé commande d'un bateau d'une valeur de 795 960 F à construire par un chantier naval et versé un acompte, le solde faisant l'objet d'un emprunt de 310 000 F débloqués et versés à la société LOCH 2000 Sa sur signature par eux, à l'initiative du directeur commercial de la société, d'une attestation de livraison, mais qui n'avaient jamais reçu livraison du bateau, pas même commandé au constructeur.

Sur l'action civile exercée alors par Monsieur et Madame [K], Monsieur [B] a été définitivement condamné par l'arrêt de la cour d'appel, solidairement avec Monsieur [I] [X], directeur commercial, à payer à ceux-ci les sommes de 107 629,32 €à titre de dommages-intérêts et 1 500 € en application de l'article 475-1 Code de procédure pénale.

Les époux [K] sont ainsi créanciers de Monsieur [B].

Or celui-ci a, le 26 juin 1996, avec son épouse, fait donation à leurs deux enfants, alors âgés de vingt deux ans et seize ans, de la nue-propriété de deux maisons leur appartenant à [Localité 3] (Yvelines) et à [Localité 7] (Finistère).

Ce faisant, Monsieur [B] a appauvri son patrimoine.

Il est vrai, comme le font valoir les appelants, que la créance des époux [K] n'est née, à l'occasion de la commande passée par eux le 4 octobre 1996, que postérieurement à cet acte, mais la condition d'antériorité de la créance requise pour le succès de l'action paulienne n'est pas exigée s'il est démontré que la fraude a été organisée à l'avance en vue de porter préjudice à un créancier futur.

Pour condamner Monsieur [B] pour le délit de banqueroute commis par lui de 1995 à 1997, le tribunal correctionnel de Versailles a retenu comme établi que l'ensemble des sociétés du groupe LOCH 2000 dirigé par Monsieur [B] était déficitaire depuis 1995, que la taxe professionnelle était impayée en décembre 1995 et mars 1996, comme l'impôt sur les sociétés de 1995 et certaines redevances portuaires depuis le quatrième trimestre 1994, que des retards de paiement de salaires d'employés des sociétés et de fournisseurs étaient intervenus au cours de l'hiver 1995/1996, que le commissaire aux comptes de la société LOCH 2000 Sa avait émis des réserves pour l'exercice 1995 et averti Monsieur [B] de ce qu'il risquait de ne pouvoir représenter les sommes dues aux propriétaires des bateaux.

Le tribunal a tiré des éléments de preuve qui lui étaient soumis qu'en sa qualité de dirigeant assurant une présence constante dans la société et une gestion au quotidien, Monsieur [B] avait une vision complète de la situation et était conscient des retards de paiement des fournisseurs et salaires, la comptable de la société l'ayant tenu régulièrement informé des difficultés et des carences comptables, qu'il avait oeuvré en connaissance de cause pour obtenir des concours bancaires et associations commerciales afin de retarder le dépôt de bilan et l'ouverture d'une procédure collective, augmentant de façon significative l'importance du passif.

La cour d'appel de Versailles a confirmé sur l'action publique en relevant expressément que la société LOCH 2000 était en état de cessation de paiement au moins depuis 1995.

Monsieur [B] a ainsi été jugé coupable du délit de banqueroute par utilisation de moyens ruineux commis à compter de 1995, par une décision passée en force de chose jugée et il est suffisamment établi au vu du jugement et de l'arrêt précités qu'il avait pleinement conscience, le 26 juin 1996, de ce qu'il n'était pas en mesure de payer ce qu'il devait et était ainsi en état d'insolvabilité, élément constitutif de la fraude paulienne, peu important à cet égard que la date de cessation des paiements de la société ait été fixée au 22 mai 1997 dans le cadre de la procédure collective.

Dès lors, il ne peut qu'être considéré, comme l'a fait d'ailleurs le tribunal correctionnel de Versailles, que la donation-partage en cause n'avait d'autre objet que de protéger les biens des époux [B], et ce y compris contre de futurs créanciers ainsi privés d'éléments essentiels de leur gage général.

La prétention des époux [K] est fondée, celles des appelants ne le sont pas et seront rejetées, et le jugement déféré sera confirmé.

Les époux [B] seront condamnés à payer aux époux [K] une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour les frais d'appel non compris dans les dépens.

Ils seront condamnés aux dépens d'appel, avec faculté de recouvrement direct.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

Après rapport fait à l'audience;

Déboute Monsieur [P] [B] et Madame [E] [T], son épouse, de leurs demandes;

Confirme le jugement déféré;

Condamne Monsieur [P] [B] et Madame [E] [T], son épouse, à payer à Monsieur [C] [K] et Madame [M] [Y], son épouse, une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;

Condamne Monsieur [P] [B] et Madame [E] [T], son épouse, aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13/06002
Date de la décision : 04/11/2014

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°13/06002 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2014-11-04;13.06002 ?
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