6ème Chambre B
ARRÊT No.
R. G : 13/ 04534
M. Patrice X...
C/
Mme Marylène Y...épouse X...
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée le :
à :
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2014
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Jean-Luc BUCKEL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé,
DÉBATS :
En chambre du Conseil du 16 Septembre 2014 devant Mme Françoise ROQUES, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 14 Octobre 2014 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
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APPELANT :
Monsieur Patrice X... né le 13 Juillet 1967 à FOUGERES (35300) ...35220 MARPIRE
Représenté par Me Béatrice HUBERT, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
Madame Marylène Y...épouse X... née le 08 Juin 1969 à FOUGERES (35300) ...35520 MONTREUIL LE GAST
Représentée par Me Catherine JUDEAUX, avocat au barreau de RENNES
M. Patrice X... et Mme Marylène Y...se sont mariés le 8 août 1992 à Saint Brice en Cogles. Deux enfants sont issus de cette union :- Anthony, né le 5 avril 1993 à Rennes,- Audrey, née le 5 janvier 1998 à Fougères.
Selon jugement en date du 25 avril 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Rennes a principalement :- prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de l'époux,- ordonné les mentions de publicité nécessaires aux actes et registres de l'état civil,- ordonné la liquidation des droits patrimoniaux des époux,- condamné M. X... à payer à Mme Y...la somme de 2 000 ¿ à titre de dommages et intérêts,- débouté Mme Y...de sa demande de prestation compensatoire,- fixé la résidence habituelle de l'enfant au domicile de sa mère et dit que le droit d'accueil du père s'exercera selon les modalités amiables,- fixé la contribution du père à l'entretien et l'éducation de ses enfants à la somme de150 ¿/ mois et par enfant, avec indexation habituelle,- condamné M. X... à payer à Mme Y...la somme de 1 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- débouté M. X... de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné M. X... aux dépens.
M. X... a interjeté appel de ce jugement.
Selon dernières conclusions en date du 30 juin 2014, il demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris et de :- prononcer le divorce aux torts exclusifs de l'épouse outre sa condamnation à la somme de 2 000 ¿ à titre de dommages et intérêts,- débouter Mme Y...de toutes ses demandes,- supprimer la contribution paternelle pour l'entretien d'Anthony,- condamner l'intimée à lui verser la somme de 1 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,- la condamner aux dépens dont distraction au profit de Maitre Hubert. Subsidiairement il sollicite le divorce aux torts partagés des époux.
Aux termes de ses conclusions en date du 8 juillet 2014, Mme Y...demande à la cour de confirmer le jugement entrepris sauf à fixer une prestation compensatoire à hauteur de la somme de 10 000 ¿ en capital et sauf à porter ses demandes financières ainsi qu'il suit :- la somme de 10 000 ¿ à titre de dommages et intérêts,- la contribution paternelle pour l'entretien des enfants à la somme de 200 ¿/ mois et par enfant,- la somme de 1 800 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais de procédure concernant la première instance et la somme de 3 000 ¿ sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile concernant l'instance d'appel,- condamner M. X... aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, moyens et prétentions des parties, il est référé aux dernières écritures de celles-ci.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 16 septembre 2014.
MOTIFS DE LA DECISION
Sont critiquées les dispositions du jugement relatives à l'imputabilité des torts, l'allocation de dommages et intérêts, le principe d'une prestation compensatoire, le montant des pensions alimentaires et les indemnités pour frais irrépétibles et la charge des dépens.
Les autres dispositions du jugement non critiquées seront confirmées.
Sur l'imputabilité des torts :
M. X... dénonce le caractère hystérique et coléreux de son épouse et conteste avoir été violent à son égard, estimant que cette dernière a manipulé les services sociaux et les médecins en se précipitant pour aller faire établir un certificat médical en novembre 2009 au prétexte d'une chute. Il admet son infidélité mais en minimise la portée, motif invoqué de la propre infidélité de son épouse laquelle a donné naissance à un enfant issu des relations avec une personne tierce.
Mme Y...conteste les assertions de M. X... et prétend que les violences et agressions qu'elle a subies durant la vie conjugale sont largement établies au point qu'elle a dû se réfugier dans un centre d'accueil pour des femmes battues. Elle fait valoir que la recomposition de son foyer avec son compagnon actuel est bien postérieure à la séparation du couple X... contrairement à l'appelant qui a eu un comportement adultère à l'occasion de son hospitalisation en psychiatrie.
Le premier juge a considéré que Mme Y...rapportait la preuve des fautes de son époux en particulier sa violence et son infidélité tandis que ce dernier ne justifiait pas des violences exercées par son épouse à son égard. Il a considéré que la violation par Mme Y...de l'obligation de fidélité était excusée par le comportement fautif de l'époux qui entretenait une relation extra-conjugale antérieure.
Aux termes de l'article 242 du Code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune.
Au vu des certificats du médecin traitant établis le 7 mai 2003 et le 14 novembre 2005 mentionnant la présence d'ecchymoses, de l'attestation de l'employeur indiquant que Mme Y...s'est présentée de nombreuses fois à son travail avec des ecchymoses au visage et des difficultés à se déplacer et à s'asseoir et de l'attestation de l'ASFAD mentionnant que Mme Y...a été accueillie à plusieurs reprises avec sa fille Audrey au CHRS dans le cadre de l'urgence violences (indépendamment de l'imputabilité des coups échangés lors de l'épisode de novembre 2009, lequel s'inscrit dans un contexte de jalousie suite à la révélation par M. X... d'une relation sentimentale récente), il y a bien lieu de considérer que la violence de M. X... envers son épouse est ancienne et caractérisée.
Cette violence constitue une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune. De même l'infidélité de M. X... est parfaitement établie, peu importe qu'elle soit contemporaine d'une mésentente conjugale profonde.
La relation sentimentale reconnue par Mme Y...en ce qu'elle a donné naissance à un enfant né le 24 août 2012, est largement postérieure à la séparation de fait du couple et ce aux dires concordants des parties. Elle n'est donc pas à l'origine de la rupture et ne saurait de ce fait constituer une faute au sens de l'article 242 du code civil.
S'agissant de l'hystérie et du caractère manipulateur de Mme Y..., les attestations laconiques versées au débat ne permettent pas de retenir ce grief comme établi à l'encontre de l'épouse.
En définitive les faits de violence et d'adultère de la part de M. X... constituent des violations graves et renouvelées des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune. Il s'ensuit qu'il y a lieu de confirmer la décision du premier juge et de dire que le divorce sera prononcé aux torts exclusifs de l'époux.
Sur les dommages et intérêts : Mme Y...considère que l'allocation obtenue sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du code civil n'est pas corrélation avec les nombreuses violences et les humiliations subies au cours de sa vie conjugale. M. X... dénonce les provocations de Mme Y...et ses manipulations.
Le premier juge a estimé que les violences subies par l'épouse justifiaient l'allocation d'une somme de 2 000 ¿ à titre de dommages et intérêts.
La cour relève que si des violences réitérées sont effectivement établies, elles n'ont pas donné lieu à des dépôts de plaintes de la part de la victime. En outre le juge des enfants de Rennes a motivé une mesure d'assistance éducative le 12 mars 2008 en raison du climat familial traumatisant mêlant violences, alcoolisme et tentatives de suicide des deux parents.
Dans ce contexte c'est par une juste appréciation des faits que le premier juge a arbitré l'allocation de dommages et intérêts à la somme de 2000 ¿ en faveur de l'épouse.
Le jugement de ce chef sera donc confirmé.
Sur la prestation compensatoire :
Aux termes des dispositions de l'article 270 du Code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser autant qu'il est possible la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux. L'article 271 ajoute que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. Ce même article énumère de manière non exhaustive les éléments à prendre en considération.
Il y a lieu de rappeler qu'autant le réel préjudice économique, lié à la répartition des rôles dans le couple, justifie pleinement une réparation financière, autant l'inégalité des situations des époux dûe à leur seule équation personnelle telle la constitution d'un autre foyer ne peut servir de fondement à un rééquilibrage des situations.
Le divorce met un terme à un mariage qui aura duré 22 ans dont 17 ans de vie commune.
Agée de 45 ans, Mme Y...travaille en qualité de standardiste au sein de la société Bretagne Matériaux et a perçu un salaire net de l'ordre de 1 600 ¿ en 2012. Elle partage les charges courantes avec son compagnon. Elle ne fournit aucun relevé de carrière et ne justifie pas, comme elle le prétend dans ses écritures, avoir assumé seule l'entretien et l'éducation des enfants communs.
M. X..., âgé de 47 ans, est ouvrier menuisier et justifie d'un salaire net imposable de l'ordre de 1 800 ¿/ mois en 2013 (bulletin de paie d'octobre 2013). Il partage les charges courantes avec une compagne avec qui il a eu un enfant né en janvier 2013.
Le couple X.../ SAUSSAIS a accumulé des dettes durant la vie commune et a bénéficié d'un premier plan de surendettement le 1er juin 2006. Mme Y...a déposé par la suite et seule deux autres plans de surendettement en 2010 et en 2013.
Mme Y..., même en cause d'appel, ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que le divorce fait apparaître une disparité dans les conditions de vie respectives des époux présentes et futures.
Le jugement de première instance qui a débouté Mme Y...de sa demande de prestation compensatoire sera donc confirmé de ce chef.
Sur la contribution à l'entretien et l'éducation des enfants : Selon l'article 371-2 du Code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et l'éducation des enfants à proportion de ses ressources et de celles de l'autre parent ainsi que des besoins de l'enfant.
La situation professionnelle et financière de chacun des époux vient d'être rappelée. Anthony, âgé de 21 ans, et Audrey, âgée prochainement de 17 ans sont accueillis chez leur mère. Il y a lieu de considérer que c'est par une juste appréciation des faits de la cause et des motifs, que le premier juge a fixé la contribution paternelle à l'entretien des enfants communs à la somme de 150 ¿/ mois et par enfant en dépit des missions ponctuelles que le jeune adulte a effectuées au cours de l'année 2013.
En revanche Mme Y...n'allège ni ne justifie des éventuels frais qu'elle engagés pour le jeune majeur depuis qu'Anthony travaille régulièrement en qualité d'électricien câbleur au sein de la SARL Armel. Il s'ensuit que la contribution paternelle à l'entretien d'Anthony sera supprimée à compter du 1er mai 2014.
Au regard des besoins croissants de l'adolescente Audrey, il y a lieu de fixer la contribution due par M. X... pour son entretien à la somme de 200 ¿/ mois à compter du 1er mai 2014.
Il s'ensuit que le jugement entrepris sera infirmé de ces chefs.
Sur les dépens et les frais : Eu égard à la nature de l'affaire et à l'issue du litige, chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens, ceux de première instance ainsi que l'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile restant arbitrés conformément à la décision entreprise. Les demandes respectives fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour, après rapport fait à l'audience,
Confirme le jugement entrepris à l'exclusion des dispositions sur le montant des contributions paternelles à l'entretien des enfants Anthony et Audrey, ce à compter du 1er mai 2014 ;
Statuant à nouveau de ce chef :
Supprime la contribution de M. X... à l'entretien et l'éducation de son fils Anthony à compter du 1er mai 2014 ;
Fixe la contribution de M. X... à l'entretien et l'éducation de sa fille Audrey à la somme de 200 ¿/ mois à compter du 1er mai 2014 ;
Rejette toute autre demande ;
Dit que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,