Chambre del'Expropriation
ARRÊT N° 14
R.G : 13/07427
Mme [T] [M] [D] épouse [J]
C/
SOCIETE D'EQUIPEMENT DE LA LOIRE ATLANTIQUE SELA SA
Déclare la demande ou le recours irrecevable
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 28 MARS 2014
Arrêt prononcé publiquement le 28 Mars 2014 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
par Madame GROS, Président nommé pour trois ans par Ordonnance de Monsieur Le Premier Président
En présence de Madame FOUVILLE, faisant fonction de Greffier
La cause ayant été débattue à l'audience publique du 24 Janvier 2014
En présence de :
- Monsieur le Commissaire du Gouvernement de Loire-Atlantique
- Madame LE BAIL, faisant fonction de Greffier
MINISTERE PUBLIC : Monsieur BONHOMME, substitut général auquel le dossier a été régulièrement communiqué le 20 janvier 2014
DEVANT :
- Madame GROS, Président
- Monsieur GARET, Juge de l'Expropriation du Département d'Ille et Vilaine
- Monsieur SEITE, Juge de l'Expropriation du Département du Finistère
ces deux derniers désignés conformément aux dispositions des articles R 13-1 et suivants du Code de l'Expropriation.
QUI EN ONT DÉLIBÉRÉ
****
LA COUR statuant dans la cause entre :
DEMANDERESSE AU RECOURS EN REVISON
Madame [T] [M] [D] épouse [J]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP BREBION CHAUDET, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me LASSERRE, plaidant, avocat au barreau de [Localité 3] ;
ET :
DEFENDEUR AU RECOURS EN REVISON
SOCIETE D'EQUIPEMENT DE LA LOIRE ATLANTIQUE SELA SA
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me LE MIGNANT, avocat de la SELARL CARADEUX CONSULTANTS, avocat au barreau de NANTES
Par arrêté préfectoral du 29 juillet 2005, le projet de création de la [Adresse 6], sur le territoire de la commune de [Localité 4] sur LOIRE, a été déclaré d'utilité publique.
L'aménagement de cette ZAC a été confié à la SELA par la communauté urbaine NANTES METROPOLE dans le cadre d'une concession publique reçue en préfecture le 15 février 1999.
Dans le cadre de cet aménagement, l'arrêté préfectoral du 5 mars 2009 a décidé de la cessibilité de la parcelle bâtie cadastrée AS [Cadastre 1] de 1 076 m² sise route [Localité 3] et qui appartenait à Madame [D].
Une ordonnance d'expropriation a été rendue le 28 septembre 2009.
Par jugement du 29 mai 2012, le, juge de l'expropriation du département de la Loire Atlantique a :
-fixé les indemnités de dépossession revenant à Madame [D] épouse [J] à la somme totale de 28 000 € composée d'une indemnité principale de 18 000 € et une indemnité de remploi de 2 800 €.
Madame [D] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 19 avril 2012.
Par arrêt du 27 septembre 2013 la cour a :
-déclaré l'appel recevable ;
-déclaré irrecevable la demande d'expertise présentée par Madame [D] ;
-déclaré irrecevable la pièce n°37 de Madame [D] ;
-déclaré irrecevable le mémoire du 30 juillet 2012 du commissaire du gouvernement et le mémoire du 22 mai 2013 de Madame [D] ;
-confirmé le jugement du 29 mars 2013 en toutes ses dispositions ;
-condamné Madame [D] aux dépens en cause d'appel .
Dans les motifs de son arrêt la cour a retenu que le terrain ne possédait pas d'accès direct à la voie publique à laquelle l'accès se fait par un chemin gravillonné ; que de plus, le sens de la circulation ne permettait pas l'accès d'un véhicule jusqu'au terrain de Madame [D] par la [Adresse 5].
Par assignation du 14 octobre 2013 délivrée à la SELA et au commissaire du gouvernement, Madame [D] a saisi la cour d'un recours en révision de l'arrêt du 27 septembre 2013.
Vu le mémoire déposé le 22 octobre 2013 et notifié le 24 octobre 2013 et le mémoire déposé le 16 janvier 2014 et notifié le 17 janvier 2014 de Madame [D] qui demande à la cour :
-de déclarer recevable le recours en révision dirigé contre l'arrêt du 27 septembre 2013 ;
-de rétracter l'arrêt rendu le 27 septembre 2013 ;
De statuer à nouveau :
-de constater la qualification de terrain à bâtir de la parcelle AS [Cadastre 1] située [Adresse 2] figurant dans l'acte authentique reçu par Me [P], notaire, le 21 décembre 2012 et le prix de vente de 51 475,84 €.
-de fixer a minima l'indemnité totale d'expropriation à la somme de 57 622 €
dont l'indemnité principale de 51 475,84 €
et l'indemnité de remploi de 6 147 €;
-de fixer l'indemnité de reconstruction de l'immeuble qui s'y trouvait édifié à la somme de 345 000 € ;
-de condamner la SELA au paiement d'une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-de condamner la SELA aux dépens.
Madame [D] soutient que la SELA a dissimulé à la cour l'acte de vente du 21 décembre 2012 de la parcelle litigieuse au prix de 51 475,84 € et en qualité de terrain à bâtir.
Elle expose que la SELA n'a pas répondu aux demandes de précisions sur les conditions de revente de la parcelle qu'elle avait formée dans son mémoire n°3 devant la cour et que la SELA a soutenu que le terrain n'avait pas la qualification de terrain à bâtir alors qu'elle revendait concomitamment ce terrain avec cette qualification ; qu'il y a là une volonté délibérée de tromper la juridiction qui rend recevable le recours en révision.
Elle affirme en suite que cette pièce est déterminante et aurait orienté différemment la décision de la cour quant à la qualification de terrain à bâtir de la parcelle, si elle avait été informée des conditions de cette revente.
Vu le mémoire déposé le 10 janvier 2014 et notifié le 10 janvier 2014 de la SELA qui demande à la cour :
-de constater qu'elle n'a commis aucune fraude, aucune dissimulation de pièce décisive au sens de l'article 595 du code de procédure civile ;
-de déclarer irrecevable le recours en révision exercé par Madame [D] ;
Subsidiairement ;
-de prononcer la déchéance de l'appel de Madame [J] eu égard à la communication tardive de la pièce n°37, à défaut de déchéance, l'écarter des débats ;
-de confirmer le jugement du 29 mars 2012 en toutes ses dispositions ;
-de rejeter la demande d'expertise présentée par Madame [D] comme étant présentée pour la première fois en cause d'appel ;
-de condamner Madame [D] au paiement d'une indemnité de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
-de condamner Madame [D] aux dépens.
La SELA expose qu'elle n'a commis aucune fraude ; que le mémoire n°3 de Madame [D], dans lequel elle sollicitait des explications sur la revente de la parcelle litigieuse a été déclaré irrecevable par la cour pour avoir été déposé l'avant-veille de l'audience de plaidoiries ; qu'il ne peut en conséquence lui être fait le reproche de n'avoir pas répondu ; que la vente sur laquelle Madame [D] prétend fonder son recours, a été réalisée plus de six mois après le délai imparti à l'appelante pour déposer les pièces au soutien de son appel .
Elle soutient ensuite qu'elle ne s'est livrée à aucune dissimulation d'une pièce décisive, la vente du 21 décembre 2012 ayant été publiée au service de Publicité Foncière de [Localité 2] dès le 14 janvier 2013 ; et qu'en tout état de cause, cette vente est postérieure au jugement du 29 mars 2012 qui arrête la date à laquelle les biens sont estimés.
Elle soutient enfin que le caractère enclavé de la parcelle litigieuse a été apprécié d'après la consistance du bien à la date de l'ordonnance d'expropriation du 28 septembre 2009 ; que la vente du 21 décembre 2012 a été réalisée au profit du propriétaire de la parcelle voisine qui bénéficiait d'un double accès, sur la route de [Localité 3] et la [Adresse 4] ; que c'est ainsi que l'état d'enclave à disparu, postérieurement au jugement déféré à la cour.
Le 23 janvier 2014, veille de l'audience, la SELA a communiqué un nouveau mémoire qui n'a pu être notifié en temps utile à Madame [D] et au commissaire du gouvernement.
Vu les conclusions déposées le 25 novembre 2013 et notifiées le 25 novembre 2013 du commissaire du gouvernement qui demande à la cour :
-de déclarer recevable le recours en révision interjeté par la partie expropriée ;
-de débouter Madame [D] de ses demandes ;
-de confirmer le jugement du 29 mars 2012 en toutes ses dispositions.
Le commissaire du gouvernement soutient que la SELA aurait dû indiquer à la cour que la parcelle expropriée avait été cédée par acte du 21 décembre 2012, que néanmoins l'indemnité de 20 800 € qui a été accordée par le premier juge est cohérente au regard du prix de cette vente en ce que l'indemnité principale intégrait le coût de démolition du bâtiment et que la vente au prix de 43040€ HT intègre le coût de démolition du bâti qui a été pris en charge par le vendeur.
Vu les réquisitions du 20 janvier 2014 du ministère public qui s'en remet à l'appréciation de la cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère expressément à la décision critiquée et aux dernières écritures des parties.
MOTIFS DE LA DECISION :
Au préalable, le mémoire déposé par la SELA le 23 janvier 2014, n'a pas été déposé dans des conditions permettant le respect du contradictoire, il sera en conséquence déclaré irrecevable.
Sur la recevabilité du recours en révision :
Aux termes de l'article 595 du code de procédure civile : « Le recours en révision n'est ouvert que pour l'une des causes suivantes :
1.S'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ;
2.Si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives qui avaient été retenues par le fait d'une autre partie (') »
Il résulte des dispositions de l'article L13-15 du code de l'expropriation que les biens sont estimés à la date de décision de première instance et que la qualification de terrain à bâtir au sens de ce code est réservée aux terrains qui, un an avant l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L.11 ou dans le cas visé à l'article L.3 un an avant la déclaration d'utilité publique sont tout à la fois effectivement desservis par une voie d'accès, des réseaux suffisants et situés dans un secteur désigné comme constructible.
En premier lieu, la vente du 21 décembre 2012 est postérieure au jugement de première instance et ne constituait pas en conséquence un terme de référence pertinent devant la cour.
En second lieu, l'arrêt du 27 septembre 2013 a qualifié le bien à la date de référence du 10 décembre 2010, avant d'écarter la qualification de terrain à bâtir en raison de l'absence de desserte par une voie d'accès .
Il apparaît des photos des lieux que le propriétaire de la parcelle voisine, acquéreur à la vente du 21 décembre 2012 possède des accès à la voie publique . Dès lors, la qualification de la parcelle litigieuse à l'occasion de cette vente qui peut, le cas échéant , faire l'objet d'une discussion, n'est pas déterminante quant à la qualification de ce bien à la date retenue par l'arrêt du 27 septembre 2013.
Par voie de conséquence, la SELA qui n'a pas fait état de cette vente devant la cour, n'a pas dissimulé de pièce décisive ni surpris par fraude la décision rendue. Le recours de Madame [D], doit être déclaré irrecevable.
Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile:
Il n'apparaît pas équitable de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
La cour, statuant par arrêt contradictoire;
Déclare irrecevable le mémoire déposé le 23 janvier 2014 par la SELA;
Déclare irrecevable le recours en révision de l'arrêt du 27 septembre 2013 exercé par Madame [D] épouse [J];
Déboute la SELA de sa demande au titre des frais irrépétibles;
Condamne Madame [D] aux dépens.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,