La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/11/2013 | FRANCE | N°12/04400

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 19 novembre 2013, 12/04400


1ère Chambre





ARRÊT N°408



R.G : 12/04400













M. [M] [R]

M. [H] [Y] [F]

Société SCM MAUROIS



C/



M. [Z] [N]





























Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 19 NOVEMBRE 2013





CO

MPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller, entendue en son rapport



GREFFIER :



Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 08 Octobre 2013



ARRÊT ...

1ère Chambre

ARRÊT N°408

R.G : 12/04400

M. [M] [R]

M. [H] [Y] [F]

Société SCM MAUROIS

C/

M. [Z] [N]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 19 NOVEMBRE 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Marc JANIN, Conseiller,

Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseiller, entendue en son rapport

GREFFIER :

Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Octobre 2013

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 19 Novembre 2013, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTS :

Monsieur [M] [R]

né le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 3]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Jacqueline BREBION de la SCP BREBION CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assisté de Me Bertrand NAUX, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Monsieur [H] [Y] [F]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Jacqueline BREBION de la SCP BREBION CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assisté de Me Bertrand NAUX, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Société SCM MAUROIS

sis [Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Jacqueline BREBION de la SCP BREBION CHAUDET, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assistée de Me Bertrand NAUX, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉ :

Monsieur [Z] [N]

né le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Bertrand GAUVAIN de la SCP SCP GAUVAIN -DEMIDOFF, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Assisté de Me Christine JULIENNE, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Le docteur [N] et le docteur [R], chirurgiens dentistes se sont associés au sein de la SCM Maurois, exerçant à [Localité 1], le 1er Juillet 1988. En décembre 2007, le docteur [F], qui exerçait en qualité de collaborateur du Docteur [N] est devenu associé de la SCM Maurois. Le docteur [N] a fait valoir ses droits à la retraite le 22 Janvier 2010.

Selon acte du 08 Juillet 2010, le docteur [N] a assigné le docteur [R], le docteur [F] et la SCM Maurois afin de voir constater que les docteurs [R] et [F] se sont engagés le 30 Octobre 2009 à acquérir les éléments transmissibles de son cabinet dentaire, d'obtenir leur condamnation au paiement de la somme de 155.000 euros correspondant au prix de cession du droit de présentation de clientèle validé par l'Ordre et à tout le moins celle de 125.000 euros, outre 40.000 euros de dommages et intérêts, intérêts et frais irrépétibles.

Par jugement du 12 Avril 2012, le Tribunal de Grande Instance de NANTES a:

- constaté le retrait du docteur [N] de la SCM Maurois le 22 Janvier 2010,

- condamné le docteur [R] et le docteur [F] à lui payer la somme de 1.524 euros correspondant à la valeur de ses parts sociales de la SCM Maurois à la date de son retrait,

- dit que les docteurs [R] et [F] sont tenus au paiement de la valeur au 31 Décembre 2009 du droit de présentation de clientèle du docteur [N] et en conséquence, les a condamnés à lui payer la somme de 85.000 euros, outre capitalisation des intérêts par année entière,

- condamné les docteurs [R] et [F] aux dépens,

- condamné les docteurs [R] et [F] à payer au docteur [N] la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- ordonné l'exécution provisoire pour la moitié des condamnations prononcées y compris les frais irrépétibles.

Appelants de ce jugement, Messieurs [R] et [F] ainsi que la SCM Maurois, par conclusions du 13 Septembre 2013, ont sollicité que la Cour:

- constate que la SCM Maurois est dissoute à effet du 31 Décembre 2011 et qu'en conséquence la cession sollicitée n'a plus lieu d'être,

- constate que le docteur [N] n'a pas respecté la procédure de retrait fixée aux statuts et le déboute de ses demandes,

- confirme le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,

- subsidiairement, désigne un expert afin d'évaluer les éléments de patientèle qui leur ont été effectivement transmis, et ce, aux frais avancés de l'intimé,

- condamne le docteur [N] à leur payer à chacun la somme de 5.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- le déboute de l'ensemble de ses demandes,

- le condamne au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- le condamne au paiement des dépens de première instance et d'appel avec droit de distraction pour ceux dont il a été fait l'avance.

Par conclusions du 14 Mars 2013, Monsieur [N] a demandé que la Cour:

- confirme le jugement déféré en ce que:

- il a dit que sa date de retrait était au 11 Janvier 2011,

- il a dit que les docteurs [R] et [F] sont tenus au paiement de la valeur au 31 Décembre 2009 de son droit de présentation à clientèle,

- infirme le jugement déféré en ce qu'il a fixé à la somme de 85.000 euros le droit de présentation de clientèle du docteur [N] et en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts,

- fixe la valeur de droit de présentation à 155.000 euros et condamne les docteurs [R] et [F] à lui payer au surplus la somme de 40.000 euros de dommages et intérêts, avec intérêts légaux et capitalisation à compter du jugement,

- subsidiairement ordonne une expertise aux frais avancés des appelants,

- les condamne à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- les condamne au paiement des dépens de première instance et d'appel avec droit de distraction pour ceux dont il a été fait l'avance.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 18 Septembre 2013.

Pour un plus ample exposé des faits et des prétentions des parties il est expressément renvoyé aux conclusions susvisées.

Selon conclusions de procédure datées du 26 Septembre 2013, Monsieur [N] a sollicité le rejet des écritures et pièces adverses en date du 13 Septembre 2013, celles-ci apparaissant tardives au regard de la clôture de l'instruction de l'affaire.

Par conclusions de procédure du 1er Octobre 2013, Messieurs [R] et [F] ainsi que la SCM Maurois se sont opposés à cette demande.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la procédure :

La clôture de l'instruction du dossier, conformément à ce qui avait été annoncé aux parties, a été prononcée le 18 Septembre 2013.

Les conclusions du 13 Septembre ne contiennent aucune demande nouvelle et les pièces produites sont des pièces dont Monsieur [N] avait nécessairement connaissance (sa convocation à une assemblée générale de la SCM Maurois, un procès-verbal d'assemblée générale de la SCM Maurois et un courrier rédigé par lui-même), outre deux articles de presse.

Dès lors, le délai séparant leur signification de la date de prononcé de la clôture était suffisant pour que Monsieur [N] puisse utilement en prendre connaissance et le cas échéant, les commenter.

Par conséquent, la demande visant au rejet de ces conclusions et de ces pièces n'est pas fondée.

Sur la cession des parts sociales de la SCM Maurois :

Selon les dispositions de l'article 12 des statuts de la SCM Maurois, l'associé qui manifeste l'intention de se retirer doit en faire la déclaration au moins six mois à l'avance, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au gérant de la société et aux autres associés, en donnant toutes les précisions sur les modalités de son retrait. Le gérant de la société doit lui faire connaître dans le mois de la réception de cette lettre, après consultation des autres associés, si son remplacement est envisagé au sein de la société ou si les associés décident de demeurer seuls associés ; dans le premier cas, les statuts envisagent les modalités selon lesquels l'associé partant peut présenter un successeur à leur agrément, dans le second cas, les associés ou la société devront racheter ou rembourser les partants au prix et dans les conditions déterminées à l'article 10 alinéa 10-3 du statut.

En l'espèce, il est incontestable que Monsieur [N] n'a pas notifié à ses associés son intention de se retirer à une date précise et si compte tenu de son âge, un arrêt d'activité proche apparaissait certain, aucune échéance n'avait été déterminée.

Monsieur [N] prétend que lors d'une réunion de conciliation devant le Conseil Départemental de l'Ordre des Chirurgiens-Dentistes, il avait été décidé, en accord avec Messieurs [R] et [F], de fixer la date de son départ au 21 Janvier 2010, en considérant que le courrier que ces derniers lui avaient adressé le 21 Juillet 2009 devait s'entendre comme fixant le point de départ du délai de préavis de l'article 10 susvisé.

Si l'existence de cette réunion est incontestable puisque reconnue par Messieurs [F] et [R] dans un courrier du 30 Octobre 2009, la teneur précise en reste inconnue, aucun procès-verbal de conciliation n'ayant été versé aux débats et le courrier précité ne faisant aucune mention d'une échéance précise au départ de Monsieur [N] ; ce courrier rappelle au contraire l'absence de demande écrite officielle de Monsieur [N] et les conséquences qui pourraient éventuellement y être attachées.

S'agissant du courrier du 21 Juillet 2009, il ne peut être dit qu'il constitue la reconnaissance de la notification d'un retrait à la date du 21 Janvier 2010. Il y est en effet indiqué « A ce jour, et depuis début Janvier 2009, le Docteur [V] est votre collaborateur, ceci apparemment dans la perspective de votre succession pour cause de départ en retraite. En effet, d'après l'article 12 des statuts de la SCM Maurois, nous aurions dû en tant qu'associés recevoir une lettre recommandée avec accusé de réception au moins six mois à l'avance précisant les modalités de votre départ en retraite. Au 21 Juillet 2009 rien n'a été fait dans ce sens ('). Regrettant de mettre un frein à votre projet de départ en retraite, nous vous prions de croire ' ».

Ainsi, dans ce courrier, le départ à la retraite de Monsieur [N] est envisagé à une date proche et incertaine, avec le rappel que pour le moment, elle n'a pas été précisée.

Les courriers échangés ensuite, durant les derniers mois de l'année 2009, font état de pourparlers sur la valeur des parts de la société et de la patientèle du Docteur [N] mais ne contiennent toujours aucune date certaine de départ.

Il en résulte que le point du départ du délai de préavis est le 20 Janvier 2010, date à laquelle le conseil du Docteur [N] a officiellement notifié à Messieurs [R] et [F] la volonté de son client de ne plus être associé.

Pour autant six mois plus tard, à la date du 21 Juillet 2010, Monsieur [N] était toujours associé, la valeur de ses droits sociaux ne lui ayant pas été remboursée.

A réception du courrier du 20 Janvier 2010, il appartenait à Messieurs [R] et [F], au regard des dispositions de l'article 12 des statuts de la société, de signifier à Monsieur [N] s'ils entendaient agréer un successeur ou lui racheter ses parts ; compte tenu toutefois des courriers antérieurement échangés, contenant le refus d'agréer un successeur potentiel et l'ouverture de pourparlers visant au rachat de ses parts, il doit être considéré qu'ils avaient pris position antérieurement pour un rachat des parts.

En vertu du même article , le rachat des parts devait être effectué soit par les associés soit par la société et il en résulte que la dissolution ultérieure de la société est sans incidence sur l'obligation personnelle qu'ont Messieurs [R] et [F] de procéder aux rachats de ces parts.

Selon l'article 10 des statuts, la valeur des parts sociales est fixée chaque année au cours de l'assemblée des associés, en fonction de la situation active et passive de la société, et à défaut d'accord, le prix sera déterminé par deux experts nommés par chacune des parties.

En l'espèce, à la date du 13 Décembre 2007, le capital social était divisé en 300 parts, d'une valeur totale de 4.572 euros, dont chaque associé détenait un tiers.

La SCM Maurois était une société de moyens, qui n'avait comme objet que la mise en commun entre les trois dentistes de certains moyens nécessaires à l'exercice de leur profession, et dont nul ne prétend qu'elle a réalisé des bénéfices ou subi des pertes.

Il s'ensuit que la valeur des parts sociales de Monsieur [N] n'a pas varié entre Décembre 2007 et Juillet 2010 et qu'il convient de condamner Messieurs [R] et [N] à lui payer leur valeur soit la somme de 1.524 euros, confirmant de ce chef le jugement déféré.

Sur le rachat des droits à clientèle de Monsieur [N] :

Monsieur [N], suivi dans cette analyse par le premier juge, considère que les Docteurs [R] et [F] s'étaient engagés devant le Conseil de l'Ordre des chirurgiens-dentistes à lui racheter ses droits à patientèle.

La Cour rappelle qu'aucun procès-verbal de conciliation rappelant un tel accord n'est versé aux débats.

S'agissant des termes du courrier adressé le 30 Octobre 2009 à Monsieur [N] par Messieurs [F] et [R], celui-ci contient les termes suivants « Toutefois, il a été convenu d'un commun accord, entre nous, les Dr [F] et [R], et vous-même, et ceci en présence du Président de l'Ordre Départemental des chirurgiens-dentistes, que nous trouverions ensemble une solution amiable pour le rachat de votre clientèle et la cession de vos parts au sein de la SCM Maurois. A ce jour, et après réflexion, nous souhaitons nous porter acquéreur de votre clientèle et de vos parts de la SCM Maurois. A cela, nous pourrions également envisager l'acquisition du capital de la SCI, propriétaire des murs, si l'idée vous sied. Aussi pour 'uvrer dans ce but, nous avons besoin de documents comptables fiables et de propositions claires de votre part. Nous ne pouvons effectivement nous engager plus avant sans éléments à analyser nous-mêmes et un expert comptable (') ».

Il ne contient aucune reconnaissance d'une quelconque obligation d'achat par Messieurs [F] et [R] et fait uniquement mention de leur accord, conformément aux engagements pris devant le conseil de l'ordre, pour engager des pourparlers afin d'aboutir à une cession amiable des parts.

Il ne peut donc être imposé à Messieurs [F] et [R] d'acquérir les droits à clientèle de Monsieur [N] sur la base de ce courrier.

L'article 10 du règlement intérieur de la société contient pour sa part une disposition selon laquelle « l'associé qui veut céder l'ensemble des parts sociales qu'il détient dans la société civile de moyens, conformément aux statuts, a droit en cas de refus d'un successeur, à une indemnité représentative d'une part, du montant de ses parts, d'autre part, de l'ensemble des éléments transmissibles (dont les droits immobiliers incorporels) qui sont attachés à son cabinet dentaire et objet de la cession envisagée. » (souligné par la Cour).

Il précise ensuite que lorsque les associés refusent de consentir à la cession projetée (nb entre l'associé partant et son successeur potentiel), ils doivent, dans les six mois de la notification de leur refus « notifier un projet d'acquisition, par eux-mêmes ou par un tiers, de l'ensemble des éléments transmissibles, constituant engagement irrévocable d'acquisition ».

En d'autres termes, l'associé qui se voit refuser l'agrément d'un successeur se voit indemniser par les autres associés non seulement de la valeur de ses parts sociales mais de celle des éléments de son patrimoine dont la cession était envisagée audit successeur.

A l'examen du courrier adressé le 26 Novembre 2009 par Messieurs [F] et [R] au Docteur [N], ses rédacteurs ont toujours envisagé que ces dispositions les obligeaient à acquérir les droits à patientèle du destinataire: le courrier rappelle en effet que les statuts et le règlement intérieur réglementent les conditions de retrait d'un associé, et il vise spécifiquement les dispositions de l'article 10 du règlement intérieur pour rappeler que « au cas particulier, les titres de la SCM ont, dans l'absolu, une valeur faible à laquelle vient s'adjoindre la valeur des éléments corporels et incorporels liés à votre clientèle » ; il est ensuite écrit par les docteurs [R] et [F] « dans ces conditions et en vertu de cet article, nous vous faisons part, par la présente, d'une proposition ferme, non subordonnée à aucune condition suspensive et notamment à la mise en place d'un financement, pour les parts de la SCM pour la somme de 1.524 euros, pour votre clientèle, éléments incorporels majorés des éléments corporels, pour la somme de 50.000 euros ».

Ainsi, Messieurs [R] et [F], qui en Juillet 2009 ont refusé d'agréer le successeur potentiel de Monsieur [N], s'estiment à l'évidence tenus de faire application des dispositions de l'article 10 du règlement intérieur qu'ils comprennent comme les obligeant à racheter les droits à patientèle qui, sinon, auraient été cédés au successeur de Monsieur [N].

Ils soutiennent désormais que cet article serait nul comme contraire à l'objet social de la société civile de moyens, qui a pour objet exclusif de « faciliter l'exercice de la profession de ses membres, sans pouvoir elle-même exercer leur profession et tout en respectant leur indépendance morale et technique ».

Une disposition du règlement intérieur d'une société de moyen n'est pas illicite au seul motif qu'elle fait référence aux modalités d'exercice de la profession des associés, et ainsi, a pu être jugée licite une clause du règlement intérieur interdisant aux associés d'exercer leur profession en dehors de la société de moyens.

Pour être illicite, elle doit contrevenir aux dispositions des statuts.

En l'espèce, l'obligation qui est faite aux associés refusant d'agréer un successeur potentiel de racheter les droits transmissibles qui auraient fait l'objet de la cession n'a pas pour effet d'empêcher ces associés de poursuivre leur activité professionnelle ou d'en restreindre les conditions d'exercice et dès lors, ne contredit pas l'objet social de la société de moyens, qui est de faciliter l'exercice de la profession des associés.

Il en résulte que le moyen tiré de sa nullité est inopérant et que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a dit que Messieurs [R] et [F] étaient tenus de racheter les droits de présentation de clientèle de Monsieur [N].

En revanche, il est certain qu'un litige s'est élevé sur la valeur des droits à patientèle et que telle est la raison pour laquelle les pourparlers n'ont pas abouti.

Le règlement intérieur prévoyait dans un tel cas de figure que si l'associé partant refusait le prix qui lui était offert, il lui appartenait de le faire fixer par un expert désigné par le Président du Tribunal de Grande Instance statuant en référé, et cette disposition a été rappelée à Monsieur [N] par Messieurs [R] et [F].

Monsieur [N], par l'intermédiaire de son conseil, a proposé par courrier recommandé de « faire désigner deux confrères du conseil de l'ordre spécialisés dans ce domaine afin de qu'il soit procédé à l'évaluation de son cabinet », en indiquant qu'à défaut, il solliciterait du juge des référés la désignation d'un expert, et se prévaut d'un document daté du 08 Avril 2010, à en-tête du Conseil Départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes, estimant son cabinet dentaire (sic) à une valeur comprise entre 80.000 et 120.000 euros.

La Cour ne peut que constater qu'aucune pièce ne démontre que Messieurs [R] et [F] aient consenti à se soumettre à une telle procédure plutôt qu'à celle prévue par le règlement intérieur et dès lors, cette évaluation ne leur est pas opposable.

Courant 2007, Monsieur [N] avait déjà cédé à Monsieur [F] une partie de ses droits à patientèle, pour un montant de 63.000 euros, et l'examen du document établi par le Conseil de l'Ordre démontre que l'évaluation à laquelle il a procédé s'appuie sur des résultats antérieurs à la cession, sans tenir compte de ses conséquences.

L'offre d'achat que Messieurs [R] et [F] ont formulée, irrévocable en vertu des dispositions précitées du réglement intérieur, était d'un montant de 50.000 euros qui, ajouté à la somme de 63.000 euros que Monsieur [N] a déjà perçu en 2007, conduira à un total de droits cédés de 113.000 euros, inclus dans la fourchette déterminée par le Conseil de l'Ordre.

Dès lors, cette offre doit être considérée comme satisfactoire sans qu'il soit besoin d'une expertise et Messieurs [R] et [F] sont condamnés à payer à Monsieur [N] la somme de 50.000 euros en contrepartie de la cession de son droit à patientèle, outre intérêts légaux à compter de l'assignation et capitalisation par année entière.

Le jugement déféré est infirmé de ce chef.

Sur les demandes de dommages et intérêts :

Le préjudice invoqué apparaissant sans lien de causalité avec des manquements imputables à Messieurs [R] et [F], et Monsieur [N] ayant lui-même contribué à la naissance du litige en ne notifiant pas sa date de cessation d'activité et en ne demandant pas la désignation d'un expert judiciaire, la demande de Monsieur [N] rejetée.

Inversement, Messieurs [R] et [F], qui succombent partiellement, ne justifient pas du caractère abusif de la procédure intentée par Monsieur [N].

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Chacune des parties succombant partiellement devant la Cour, il apparaît équitable de dire que chacune supportera ses propres dépens et frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS:

La Cour, après rapport à l'audience:

Infirme partiellement le jugement déféré, en ce qu'il a fixé à la date du 22 Janvier 2010 le retrait du Docteur [N] de la SCM Maurois et en ce qu'il a condamné Messieurs [R] et [F] à lui payer la somme de 85.000 euros outre intérêts au titre de la cession de son droit de présentation de clientèle.

Statuant à nouveau:

Constate que Monsieur [N] pouvait valablement exercer son droit de retrait de la SCM Maurois, sous réserve de remboursement de ses parts sociales, à compter du 21 Juillet 2010.

Condamne Monsieur [R] et Monsieur [F] à payer à Monsieur [N] la somme de 50.000 euros avec intérêts légaux à compter du 08 Juillet 2010 et capitalisation par année entière, au titre du prix d'achat de ses droits de présentation de clientèle.

Confirme pour le solde le jugement déféré.

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions.

Dit que chacune des parties gardera à sa charge ses propres dépens d'appel et frais irrépétibles d'appel.

LE GREFFIER.-.LE PRESIDENT.-.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 12/04400
Date de la décision : 19/11/2013

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°12/04400 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-11-19;12.04400 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award