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29/10/2013 | FRANCE | N°12/07859

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 29 octobre 2013, 12/07859


COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 29 OCTOBRE 2013
6ème Chambre B
ARRÊT No 743 R. G : 12/ 07859

M. LE PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL D'ILLE ET VILAINE
C/
MISSION MINEURS ISOLES ETRANGERS M. Trésor X... Y...

Infirme la décision déférée
Copie exécutoire délivrée le : à :
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Maurice LACHAL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,
GREFFIER : Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
MINISTERE

PUBLIC : Monsieur Olivier BONHOMME, Substitut Général, lequel a pris des réquisitions
DÉBATS : En ch...

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 29 OCTOBRE 2013
6ème Chambre B
ARRÊT No 743 R. G : 12/ 07859

M. LE PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL D'ILLE ET VILAINE
C/
MISSION MINEURS ISOLES ETRANGERS M. Trésor X... Y...

Infirme la décision déférée
Copie exécutoire délivrée le : à :
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur Maurice LACHAL, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,
GREFFIER : Madame Catherine DEAN, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
MINISTERE PUBLIC : Monsieur Olivier BONHOMME, Substitut Général, lequel a pris des réquisitions
DÉBATS : En chambre du Conseil du 16 Septembre 2013,
ARRÊT : Contradictoire, prononcé hors la présence du public le 29 Octobre 2013 par mise au disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.

ENTRE :
APPELANTE :
M. LE PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL D'ILLE ET VILAINE 1 avenue de la Préfecture CS 24218 35042 RENNES CEDEX non comparant représenté par Me Yvonnick GAUTIER de la SCP GAUTIER/ LHERMITTE, avocat au barreau de RENNES
ET :
MISSION MINEURS ISOLES ETRANGERS... 35000 RENNES non comparante
Monsieur Trésor X... Y...... 35000 RENNES non comparant représenté par Me SALIN substituant Me LE VERGER, avocat

Sur la requête du 25 septembre 2012 de Monsieur Trésor X... Y... le juge aux affaires familiales de Rennes a, par ordonnance du 2 novembre 2012, ouvert une mesure de tutelle à son égard et l'a confiée au Conseil Général d'Ile et Vilaine après en avoir constaté la vacance.
Le conseil général d'Ille et vilaine a relevé appel de cette ordonnance par lettre recommandée avec avis de réception du 16 novembre 2012 reçue au greffe du tribunal de grande instance le 19 novembre suivant.
Le conseil général a demandé la réformation du jugement et la constatation de la majorité de Monsieur X... Y... en soutenant que c'est à tort qu'une tutelle d'Etat avait été ouverte puisque Monsieur X... Y... est majeur.
Ce dernier a sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et a fait valoir que l'appel est sans objet dans la mesure où il est désormais majeur.
Le Ministère Public a demandé à la Cour de constater que l'appel était sans objet et conclut subsidiairement à l'infirmation de l'ordonnance.
SUR CE,
- Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
Il convient d'accorder à Monsieur X... Y... le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire en application de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991.
- Sur la recevabilité de l'appel :
L'appelant soutient que même si Monsieur X... Y... a atteint sa majorité au moins au 1er décembre 2012, l'appel présente toujours un intérêt dans la mesure où le fait d'avoir été pris en charge par l'Aide sociale à l'enfance permet au jeune, une fois majeur, de bénéficier d'un ensemble d'avantages facilitant grandement les procédures devant la Préfecture.
Conformément aux dispositions des articles 31 et 546 du code de procédure civile, l'existence de l'intérêt requis pour interjeter appel s'apprécie au jour de l'appel dont la recevabilité ne peut dépendre de circonstances postérieures qui l'auraient rendu sans objet.
Au regard des effets et conséquences s'attachant à l'état de minorité, dont le placement à l'Aide sociale à l'enfance qui peut emporter le cas échéant des incidences se prolongent au delà de la majorité de l'intéressé, il existe un intérêt à statuer sur l'appel du conseil Général, celui ci n'étant alors ni irrecevable, ni devenu sans objet.
- Sur l'ouverture de la mesure de tutelle :
Pour faire droit à la requête le premier juge a retenu que l'état de minorité l'intéressé résultait de l'attestation de perte de ses pièces d'identité, et ce, en l'absence d'investigation auprès des autorités de la République Démocratique du CONGO, que le cursus scolaire du jeune corroborait ses déclarations et enfin, que la fiabilité de l'expertise osseuse réalisée dans des conditions non-conformes aux recommandations du Comité consultatif national d'éthique ne pouvait être retenue.
Au soutien de son appel, le Conseil Général d'Ille et Vilaine fait valoir l'absence d'acte d'état civil de Monsieur X... Y... et sa demande d'asile où il indique être âgé de 22 ans.
Le Conseil Général soutient également que l'expertise médicale réalisée après un examen global de l'intéressé conclut à la majorité de celui-ci tout comme les appréciations des éducateurs.
En l'occurrence, Monsieur X... Y... produit la photocopie d'une attestation de perte de pièce d'identité dont on ignore à quelle date elle a été établie puisqu'y figure uniquement le mois et le jour, l'année n'étant pas apparente. Il sera précisé que l'original a été confisqué par la Police aux frontières.
Cette pièce, qui n'est pas un document d'état civil, ne permet pas de rapporter la preuve de l'année de naissance du jeune. En outre, et ainsi que l'indique de manière fondée le Ministère Public, Monsieur X... Y... ne justifie d'aucune démarche auprès des autorités de son pays ou de son ambassade en vue d'obtenir un document d'identité.
L'attestation de perte de pièce d'identité est par conséquent insuffisante pour déterminer l'âge de l'intimé, et ne peut être considéré comme un des actes visé à l'article 47 du code civil.
Par ailleurs, les déclarations de l'intimé sont empreintes de contradiction, ce qui leur enlève toute crédibilité.
En effet, après avoir indiqué lors de son audition par la police aux frontières n'avoir ni frère ni soeur, il a précisé dans sa requête avoir trois frères.
Il a également affirmé aux services de police être arrivé initialement en France, alors que l'enquête a démontré qu'il s'était d'abord rendu en Grèce ou il avait régularisé une demande d'asile et précisé aux autorités de ce pays être né le 3 mars 1990.
Par ailleurs, il sera rappelé que l'examen osseux de Monsieur Monsieur X... Y... réalisé le 17 août 2012 par le Docteur Z... permet " de retenir un état de majorité ". Pour contester la fiabilité des tests effectués, l'intimé critique les compétences du médecin expert, fait valoir que son consentement à l'expertise n'a pas été préalablement recueilli et il conteste la pertinence de ces examens notamment sur un sujet non européen.
Il n'y a pas lieu de retenir les critiques émises à l'encontre des compétences ou de la déontologie de ce médecin, s'agissant d'un radiologue qualifié, expert assermenté inscrit sur la liste de la cour d'appel.
En l'espèce, il n'est pas établi que le jeune homme n'ait pas été traité avec le respect et la dignité dûs à sa personne. Il sera observé que l'expertise est réalisée dans l'intérêt du jeune en cas de doute sur son âge, de sorte qu'il ne justifie d'aucun grief.
Il ressort de ce document médical que le Docteur Z..., a procédé à un examen clinique avec interrogatoire visant à préciser les éventuels antécédents médicaux et à déterminer si possible les points de repère de croissance et le développement staturo-pondéral et à étudier le développement pubertaire. Un examen radiologique du poignet et de la main gauche a été réalisé.
L'examen osseux démontre " la soudure complète des cartilages de croissance au niveau des phalanges, des métacarpiens et de l'extrémité inférieure des deux os de l'avant bras. " Ce critère, dont il est acquis qu'il est celui de la majorité, n'est pas contredit par l'examen dentaire ni par celui de la stature pondérale, ni encore par celui des organes génitaux.
Ainsi que le fait valoir le département, l'Académie nationale de médecine dans un rapport du16 janvier 2007, postérieur à l'avis du comité consultatif national d'éthique, conclut que " la lecture de l'âge osseux à partir d'une radiographie du poignet et de la main gauche par comparaison avec l'Atlas de Greulich et Pyle, demeure la méthode la plus simple et la plus fiable. Elle est la plus universellement utilisée. En particulier, aucune différence raciale n'a été démontrée à ce jour ».
L'Académie considère que les résultats de la lecture de l'âge osseux peuvent être confirmés par " l'examen clinique du développement pubertaire. "
Il est en outre à noter que le Comité consultatif national d'éthique visé par l'appelant " ne récuse pas " a priori l'emploi de ces tests, mais suggère que ceux-ci soient " relativisés de façon telle que le statut du mineur ne puisse en dépendre exclusivement. "
S'il est constant que le médecin ne mentionne pas l'âge estimé, la conclusion du rapport précisant simplement que " les éléments cliniques et radiologiques sont donc concordants et permet de retenir un état de majorité vers l'état de majorité chez ce patient ", ces conclusions sont toutefois corroborées par les constatations des intervenants et des éducateurs de la mission mineurs isolés de l'Aide sociale à l'enfance ayant eu à connaître Monsieur X... Y....
Sa grande autonomie et l'absence de nécessité d'un suivi éducatif le concernant, sont mentionnées, l'éducateur indiquant que le jeune se gère seul et sollicite le service uniquement pour des demandes matérielles et non pas éducatives.
Les éducateurs mentionnent en outre qu'il " ressemble à une personne adulte et en aucun cas à un jeune homme de 17 ans comme d'autres adolescents âgés de 17 ans et originaire du même pays ".
Au regard des éléments soumis à son appréciation, la cour considère qu'en l'espèce, aucun élément n'empêche de retenir les conclusions du Docteur Z... et les constatations de l'éducateur de la mission Mineurs isolés étrangers qui concluent à la majorité de Monsieur Monsieur X... Y... à la date ou celui-ci a été placé sous tutelle, et ce, à défaut ce production par ce dernier d'actes d'état civil ou d'identité rapportant la preuve de sa minorité.
Il ne saurait y avoir en l'espèce de violation des dispositions de la Convention internationa1e des droits de l'enfant dans la mesure il est jugé que l'intimé n'est pas mineur.
La violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme n'est pas davantage démontrée, l'intimé ne justifiant pas en quoi il n'aurait pas bénéficié d'un procès équitable au sens de ce texte.
L'ordonnance sera en conséquence infirmée.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Accorde à Monsieur X... Y... le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire,
Déclare que l'appel du Conseil Général d'Ille et Vilaine est recevable et n'est pas devenu sans objet.
Infirme l'ordonnance déférée,
Constate que Monsieur X... Y... était majeur à la date de l'ordonnance déférée,
Dit n'y avoir lieu en conséquence à l'ouverture d'une tutelle,
Rejette toute autre demande,
Dit que les dépens resteront à la charge du Trésor Public.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 12/07859
Date de la décision : 29/10/2013
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2013-10-29;12.07859 ?
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