Chambre del'Expropriation
ARRÊT N° 41
R.G : 12/02569
Mme [I] [T] épouse [R]
C/
SELA
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 27 SEPTEMBRE 2013
Arrêt prononcé publiquement le 27 Septembre 2013 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats
par Madame GROS, Président nommé pour trois ans par Ordonnance de Monsieur Le Premier Président
En présence de Madame LE BAIL, faisant fonction de Greffier
La cause ayant été débattue à l'audience publique du 24 Mai 2013
En présence de :
- Monsieur le Commissaire du Gouvernement du Loire-Atlantique représentant DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LOIRE-ATLANTIQUE- SERVICE FRANCE DOMAINE
- Madame FOUVILLE, faisant fonction de Greffier
DEVANT :
- Madame GROS, Président
- Monsieur [D], Juge de l'expropriation au TGI de Rennes
- Madame [E], Juge de l'expropriation au TGI de Lorient
ces deux derniers désignés conformément aux dispositions des articles R 13-1 et suivants du Code de l'Expropriation.
QUI EN ONT DÉLIBÉRÉ
****
LA COUR statuant dans la cause entre :
Madame [I] [T] épouse [R]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Jean-David CHAUDET de la SCP BREBION CHAUDET, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Philippe LASSERRE, avocat au barreau de PARIS
APPELANTE d'un jugement rendu le 29 MARS 2012 par le Juge de l'Expropriation du Département de Loire-Atlantique
ET :
SELA
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Isabelle GALLOT, avocat au barreau de NANTES
INTIMEE
Par arrêté préfectoral du 29 Juillet 2005, le projet de création de la [Adresse 5], sur le territoire de la commune de [Localité 3], a été déclaré d'utilité publique.
Auparavant les enquêtes publique et parcellaire avaient été prescrites par arrêtés préfectoraux du 16 février 2005 .
L'aménagement de cette ZAC a été confié à la SELA par la communauté urbaine de Nantes Métropole dans le cadre d'une concession publique reçue en préfecture le 15 février 1999.
La réalisation de ce projet suppose la maîtrise foncière d'une parcelle bâtie cadastrée AS[Cadastre 2] de [Cadastre 1] m² sise [Adresse 3] et appartenant à Madame [T] .
L'arrêté préfectoral de cessibilité a été délivré le 5 mars 2009 .
Une ordonnance d'expropriation a été rendue le 28 septembre 2009 .
L'autorité expropriante a saisi le juge de l'expropriation de Loire Atlantique aux fins de fixation des indemnités d'occupation.
Par jugement du 29 mars 2013 le juge de l'expropriation a :
- fixé les indemnités de dépossession revenant à Madame [T] à la somme totale de 20 800 € se décomposant comme suit :
*indemnité principale 18 000 €
*indemnité de remploi 2 800 €
- laissé les dépens à la charge de l'autorité expropriante.
Madame [T] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 19 avril 2012 .
Vu le mémoire déposé le 15 juin 2012 et notifié le 26 juin 2012 de Madame [T] qui demande à la cour :
- d'infirmer le jugement critiqué ;
- de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du tribunal administratif de Nantes sur la régularité des arrêtés de DUP et de cessibilité, et de la décision de la cour de cassation contre l'ordonnance du 28 septembre 2009 ;
Subsidiairement ;
- de désigner un expert aux fins de :
*vérifier les conditions de desserte de la parcelle AS[Cadastre 2] ;
*vérifier l'état du bâti sur cette parcelle ;
*d'évaluer le coût de reconstruction de ce bâti ;
Subsidiairement ;
- de fixer le montant de l'indemnité d'expropriation à la somme de 65 €/m², soit pour 1 076 m² la somme de 69 940 € outre l'indemnité de reconstruction de l'immeuble qui s'y trouve implanté d'un montant de 345 000 €.
- de condamner la SELA aux dépens et à une indemnité de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu le mémoire reçu le 23 février 2012 et notifié le 10 septembre 2012 de la SELA qui demande à la cour :
- de prononcer la déchéance de l'appel eu égard à la communication tardive de la pièce n° 37 ; à défaut de déchéance, l'écarter des débats ;
- de confirmer la décision critiquée ;
- de rejeter la demande d'expertise, nouvelle en cause d'appel.
Vu le mémoire déposé le 16 mai 2013 et notifié le 17 mai 2013 de Madame [T] qui demande à la cour de déclarer son appel recevable.
Vu le mémoire déposé le 30 juillet 2012 et notifié le 10 septembre 2012 du commissaire du gouvernement qui demande à la cour :
- de confirmer le jugement critiqué.
Vu le mémoire déposé le 22 mai 2013 , soit la veille de l'audience par Madame [T].
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère expressément à la décision critiquée et aux dernières écritures des parties.
MOTIFS :
Sur la déchéance de l'appel :
Vu l'article R13-49 du code de l'expropriation ;
Madame [T] à déposé son mémoire d'appelant dans les deux mois de sa déclaration d'appel, son appel est en conséquence recevable.
Sur l'irrecevabilité des pièces et mémoires :
En application des dispositions susvisées, les pièces de la partie appelante devaient être déposées avant le 19 juin 2012 à minuit.
Madame [T] a entendu joindre à son mémoire du 16 mai 2013 trois nouvelles pièces n° 37 a 39 . Cependant, elle n'a joint à son envoi que les pièces 38 et 39 et la pièce n° 37 n'était déposée que le 6 juillet 2012, soit après le délai de deux mois de sa déclaration d'appel. En conséquence, la pièce n° 37 de Madame [T], qui est un acte de vente du 21 janvier 2009 entre l'appelante et la SCI SANZILLON est irrecevable et sera écartée des débats.
A l'audience, la cour a appelé le commissaire du gouvernement à exposer toute explication utile sur l'irrecevabilité de son mémoire.
Le délai d'un mois imparti au commissaire du gouvernement pour déposer son mémoire courait à compter de la notification du premier mémoire de la partie appelante, soit le 26 juin 2012. Le mémoire déposé le 30 juillet 2012 par le commissaire du gouvernement, soit plus d'un mois après la notification de celui de la partie appelante est en conséquence irrecevable.
Enfin, il en est de même de celui de la partie appelante déposé le 22 mai 2013.
Sur la demande d'expertise :
Vu l'article 564 du code de procédure civile ;
Cette demande qui n'avait pas été présentée devant le premier juge est nouvelle en cause d'appel, sans être justifiée par un élément nouveau. Elle doit en conséquence être déclarée irrecevable.
Sur la demande de sursis à statuer :
Vu l'article L13-4 du code de l'expropriation ;
Il résulte de ces dispositions que le juge de l'expropriation n'est pas tenu, pour statuer sur les indemnités, d'attendre l'issue de procédures diligentées à l'encontre des arrêtés préfectoraux et de l'ordonnance d'expropriation.
En conséquence, il ne sera pas fait droit à cette demande.
DESCRIPTION DU BIEN :
Lors de son déplacement sur les lieux, le juge de l'expropriation a relevé que la parcelle est de 1 076m² ; que le terrain supporte une maison inoccupée depuis 2001 aux fenêtres obturées, suite à l'arrêté municipal de 2009 de péril non imminent.
Madame [T] soutient que son terrain n'est pas enclavé et qu'il est desservi par la [Adresse 4], anciennement [Adresse 3]. Elle verse aux débats un constat d'huissier du 3 avril 2013, dans lequel Me [P] déclare avoir accédé au bien par la [Adresse 4].
En premier lieu, la qualification du bien ne dépend pas de son état d'enclave mais de son accès à la voie publique.
En deuxième lieu, la [Adresse 4] n'est pas la dénomination nouvelle de la route de [Localité 2]. La route de [Localité 2] est en réalité l'appellation de la RD 723. Il ressort de la photo satellite des lieux que la [Adresse 4] est le prolongement d'une bretelle de sortie de la RD 723 qui n'est pas située au niveau de la parcelle AS [Cadastre 2] . Il ressort d'une autre photo des lieux, produite par Madame [T], que l'accès direct à la RD 723 est empêché par des bordures et que du fait du sens de circulation, la [Adresse 4] ne dessert pas directement le terrain. En application de l'article 3.2.2 du règlement du PLU, l'accès direct est interdit sur la RD 723.
En conséquence, il apparaît de la configuration des lieux qui ressort des plans et photos produites aux débats, que même s'il est possible de se rapprocher de la parcelle AS [Cadastre 2] par la [Adresse 4], il ne peut être retenu un accès direct à une voie publique et asphaltée.
DATE DE REFERENCE ET QUALIFICATION DU BIEN :
Vu l'article L13-15 du code de l'expropriation ;
La date du 10 décembre 2010, à laquelle est intervenue la dernière modification du plan d'occupation des sols, ne fait pas l'objet de discussion entre les parties.
Il n'est pas discuté davantage que la parcelle AS [Cadastre 2] se situe en zone UE du PLU de la ville de [Localité 3], soit dans une zone constructible et qu'elle est desservie par les réseaux.
Ainsi qu'il a été expliqué dans la description du bien, le terrain ne possède pas d'accès direct à la voie publique. Il ressort d'une photo des lieux, que l'accès se fait par un chemin gravillonné . De plus, le sens de circulation ne permet pas l'accès d'un véhicule jusqu'au terrain par la [Adresse 4].
En conséquence, la configuration des lieux ne permet pas une desserte suffisante pour que le bien reçoive la qualification de terrain à bâtir. La parcelle sera évaluée selon son usage effectif à la date du jugement critiqué.
EVALUATION DU BIEN :
Madame [T] conteste la méthode dite de la « récupération foncière » retenue par le premier juge et soutient que le bâti représente la valeur d'un immeuble parfaitement sain dans lequel elle a effectué des travaux d'entretien depuis l'année 2001.
Toutefois, cet immeuble a fait en 2009 l'objet d'un arrêté pour péril non imminent, qui a abouti à l'obturation des ouvertures. Les photos versées aux débats montrent des murs dégradés. En conséquence, la construction n'apporte pas de valeur au terrain qui n'a de valeur vénale qu'en fonction de la possibilité de récupération qu'il offre pour la construction. C'est pourquoi il convient, ainsi que l'a fait le premier juge, de retenir la méthode de la récupération foncière.
En ce qui concerne l'indemnité principale :
Vu l'article L13-16 du code de l'expropriation ;
Termes de comparaison de Madame [T] :
La pièce n° 37 étant irrecevable, la seule référence de Madame [T] est une étude de la société EGI qui en 2008 a considéré que son bien avait une valeur vénale de 60 à 65 €/m².
Cette évaluation qui ne constitue pas un accord amiable ne peut être retenue à elle seule comme un terme pertinent.
Termes de la SELA :
*Acte de vente du 25 janvier 2001 et actes de vente des 22 et 28 mars 2001 qui seront écartés en raison de leur ancienneté.
*Acquisition le 13 novembre 2007 par la SELA de la parcelle AS [Cadastre 3] sis [Adresse 4] au prix de 18€ /m² ;
*Echange du 8 juillet 2009 entre la SELA et [Localité 1] Métropole de parcelles sises [Adresse 4] au prix moyen de 7,6 € /m2.
Il ressort de ces termes de références pertinentes en ce qu'elles concernent des parcelles proches du bien en litige que l'offre de la SELA est satisfaisante et que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu une évaluation de 16,72 € /m² et une indemnité principale de
18 000 €.
En ce qui concerne l'indemnité de remploi :
En l'espèce cette indemnité doit être calculée comme suit :
Jusqu'à 5 000 € ; 20% 1000 €
Entre 5 000 et 15 000 € : 15% 1 500 €
Reliquat ( 18 000 -15 000) à 10% 300 €
Total : 2 800 €
L'indemnité totale de dépossession revenant à Madame [T] est de 20 800 €
Sur l'indemnité de reconstruction :
Par des motifs pertinents que la cour approuve, le premier juge a retenu que le mauvais état du bâti faisait obstacle à ce qu'il soit accordé une indemnité de reconstruction, comme il avait fait obstacle à ce que soit retenu la méthode du terrain intégré..
En conséquence, il convient de débouter Madame [T] de sa demande .
PAR CES MOTIFS :
La cour ;
Déclare l'appel recevable ;
Déclare irrecevable la demande d'expertise présentée par Madame [T] ;
Déclare irrecevable la pièce n° 37 de Madame [T] ;
Déclare irrecevable le mémoire du 30 juillet 2012 du commissaire du gouvernement et le mémoire du 22 mai 2013 de Madame [T] ;
Déboute Madame [T] de sa demande de sursis à statuer
Confirme le jugement du 29 mars 2013 en toutes ses dispositions ;
Condamne Madame [T] aux dépens en cause d'appel .