1ère Chambre
ARRÊT N°275
R.G : 12/01893
M. [Z] [N]
Mme [T] [N]
C/
ADMINISTRATION DES FINANCES PUBLIQUES représentée par le DIRECTEUR DEPARTEMENTAL DES FINANCES PUBLIQUES DU MORBIHAN
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 17 SEPTEMBRE 2013
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Xavier BEUZIT, Président,
Madame Anne TEZE, Conseiller,
Madame Catherine DENOUAL, Conseiller, entendue en son rapport
GREFFIER :
Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 09 Avril 2013
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 17 Septembre 2013, après prolongation de la date indiquée à l'issue des débats.
****
APPELANTS :
Monsieur [Z] [N]
né le [Date naissance 1] 1937 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représenté par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN -DEMIDOFF, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représenté par Me COLLET, Plaidant, avocat au barreau de RENNES
Madame [T] [N]
née le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 3]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représentée par Me Eric DEMIDOFF de la SCP GAUVAIN -DEMIDOFF, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me COLLET, Plaidant, avocat au barreau de RENNES
INTIMÉE :
ADMINISTRATION DES FINANCES PUBLIQUES représentée par le DIRECTEUR DEPARTEMENTAL DES FINANCES PUBLIQUES DU MORBIHAN
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL AVOCAT LUC BOURGES, avocat au barreau de RENNES
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Les époux [N] sont éligibles à l'impôt de solidarité sur la fortune.
Au titre de l'ISF 2008 et 2009, ils ont bénéficié de réductions d'impôt pour investissements dans les PME.
Au titre de l'ISF 2008, ils ont bénéficié d'une réduction globale de 38 375 € pour les investissements suivants :
-investissements directs dans la SARL ELBBUB lors de son augmentation de capital décidée le 13 février 2008,
-investissements indirects par la société interposée l'EURL BAGINVEST dans la société SNC LES CAPUCINS les Capucins, lors de son augmentation de capital décidée le 14 mai 2008.
Au titre de l'ISF 2009, ils ont bénéficié d'une réduction globale de 36 875 € pour les investissements suivants :
-investissements directs dans la SARL ELBBUB lors de son augmentation de capital décidée le 13 février 2008,
-investissements indirects par la société interposée l'EURL BAGINVEST dans la société SNC LES CAPUCINS les Capucins, lors de son augmentation de capital décidée le 14 mai 2008.
L'EURL BAGINVEST a été constituée par M. [N] le 25 janvier 2008. Elle a pour objet : « des fonds de placement et entités financières similaires ».
La SNC LES CAPUCINS a pour objet la création, l'acquisition et l'exploitation de tout fonds de commerce d'hôtellerie et de restauration notamment sous les enseignes du groupe « Louvre Hôtels ».
En 2010, la brigade de contrôle des revenus et du patrimoine des Finances Publiques du Morbihan a procédé à une remise en cause des réductions d'ISF effectuées par les époux [N] liées à leurs investissements directs dans la SNC LES CAPUCINS par l'intermédiaire de l'EURL BAGINVEST au motif que cette société ne remplissait pas les conditions requises pour donner droit à la réduction ISF pour investissement indirect dans les PME. L'administration fiscale a notamment entendu rappeler que le bénéfice de cette réduction nécessitait l'exercice d'une activité de nature civile exclusivement limitée à la détention des parts ou actions de filiales et au contrôle de leurs assemblées générales. En considération des éléments du dossier, elle a considéré que l'EURL BAGINVEST n'était ni une Holding passive ni une Holding active non animatrice et que la SCI les Capucins n'était pas sa filiale .
En conséquence, l'administration fiscale a rectifié les réductions ISF opérées par les époux [N] et a procédé aux rappels, soit pour l'année 2008 à hauteur de 13 524 €, pour l'année du 2009, à concurrence de 10 524 €.
Suite au rejet de leurs réclamations, les époux [N] ont fait assigner l'administration fiscale devant le tribunal de grande instance de Lorient, par acte du 19 janvier 2011, aux fins d'obtenir le dégrèvement partiel des suppléments d'imposition ISF mis à leur charge à savoir :
ISF de 2008 : 3750 € en principal et 315 € d'intérêts de retard,
ISF de 2009 : 10 254 € en principal et 369 € d'intérêts de retard.
Vu l'appel par les époux [N] du jugement rendu le 8 février 2012 par le Tribunal de Grande Instance de Lorient visant à voir déclarer non fondée la décision de rejet de leur réclamation prise par M. le Directeur des Services Fiscaux le 16 novembre 2010 considérant qu'il n'avait pas été fait la démonstration de ce que « l'EURL BAGINVEST remplissait les conditions pour pouvoir être qualifiée de holding et qu'elle n'était pas en mesure de contrôler ni d'influencer la SNC LES CAPUCINS qui ne pouvait donc pas être considérée comme sa filiale au sens du droit fiscal et du droit commercial » ;
Vu les dernières conclusions des parties notifiées le 9 avril 2013 par l'Administration des Finances Publiques, le 12 décembre 2012 par les époux [N], conclusions auxquelles la Cour renvoie expressément pour le rappel détaillé des moyens et prétentions des parties ;
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 20 mars 2013 ;
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Considérant que les dispositions de l'article 885 O -V bis du code général des impôts permettent aux contribuables de bénéficier d'une réduction d'ISF pouvant aller jusqu'à 75 % de la souscription dans la limite de 50 000 € dès lors que cette somme est consacrée à un investissement dans des « PME communautaires » en direct ou par l'intermédiaire d'une société ;
Considérant que les époux [N] prétendent que le texte de l'instruction fiscale BOI 7 S- 3- 08 n° 41 § 68 du 11 avril 2008 ajouterait à la loi au motif qu'il prévoit que « ne sont éligibles au dispositif que les souscriptions au capital de société holding pures (holdings passives) dont l'activité, de nature civile, est exclusivement limitée à la détention des parts ou actions de leurs filiales et au contrôle de leurs assemblées générales » ; que les époux [N] font valoir que la loi n'instaure qu'une seule condition tenant à l'objet de la société holding alors que l'instruction administrative ajouterait une double condition relative, d'une part, à la qualité de «filiale» de la société PME bénéficiaire de l'investissement et, d'autre part, au contrôle de ses assemblées par la société holding ;
Considérant qu'il doit être rappelé que les époux [N] ont bénéficié au titre de l'ISF 2008 d'une réduction de 18 875 € pour avoir investi indirectement, par société interposée, dans la SNC LES CAPUCINS lors de son augmentation de capital réalisée le 25 mai 2008 ; que le versement de la somme de 25 000 € a été effectué par la société ; que la même opération a été renouvelée en l'an 2009 et a donné lieu à une réduction d'impôt de 18 875 € pour l'investissement indirect de 25 000 € ;
Considérant qu'il doit être rappelé que les conditions d'éligibilité au dispositif de réduction ISF PME instituée par l'article 16 de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (loi TEPA) du 21 août 2007, codifiée à l'article 885 précité, prévoient que « l'avantage fiscal prévu au 1 s'applique également aux souscriptions en numéraire au capital d'une société satisfaisant aux conditions suivantes :' La société a pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant une des activités mentionnées au b du 1 » ;
Considérant que les époux [N] admettent aux termes de leurs propres écritures que le bénéfice de la réduction ISF est ouvert aux souscriptions effectuées par l'intermédiaire d'une société holding dans la mesure où cette société est une PME qui a pour objet exclusif la détention de participations dans des sociétés exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ; qu'en considération de cette définition, il est clair que l'éligibilité au dispositif de réduction prévue par l'article 885 suppose que les époux [N] démontrent que l'EURL BAGINVEST réponde aux critères d'une société mère contrôlant sa filiale au sens des dispositions du code de commerce ;
Considérant à cet égard que selon l'article L233-1 du code de commerce, doit être considérée comme « filiale » toute société dont plus de la moitié du capital appartient à une autre ; qu'il y a participation lorsqu'une société détient dans une autre, une fraction du capital comprise entre 10 % et 50 % ;
Considérant que les époux [N] font valoir qu'en détenant 5 % de son capital, l'EURL BAGINVEST exerce un véritable pouvoir de contrôle de la SNC LES CAPUCINS en raison notamment des dispositions qui régissent le fonctionnement de ce type de société ; que par ailleurs, ils soutiennent que l'instruction administrative BOI 7-3 08 § 68 du 11 avril 2008 à laquelle se réfère l'administration fiscale pour commenter l'article 885 O-V bis précité n'a pas fixé de pourcentage minimum de détention du capital social d'une société filiale pour l'octroi de la réduction ISF ;
Considérant qu'il est constant que l'EURL BAGINVEST ne détient que 5 % du capital social de la SNC LES CAPUCINS laquelle ne peut ainsi être considérée comme sa filiale, au sens des dispositions de l'article L 233-1 et L233- 2 du code de commerce ; qu'il ne peut davantage être considéré qu'il y a participation de l' EURL, cette dernière ne détenant que 5 % du capital social de la SNC LES CAPUCINS ; qu'en effet, il n'est pas démontré en quoi la détention de seulement 5 % des parts sociales lui permettrait d'exercer une quelconque influence sur la SNC LES CAPUCINS émettrice des titres ; qu'à défaut de disposer d'une participation suffisante pour exercer une influence au sein de la direction de la SNC LES CAPUCINS, l'EURL BAGINVEST ne peut davantage sérieusement soutenir qu'elle aurait la possibilité d'influer sur les décisions les plus importantes de sa filiale par sa capacité de blocage, la détention d'une minorité de blocage concernant certaines décisions résiduelles ne pouvant être assimilée à un contrôle ;
Considérant qu'il est manifeste que l'EURL BAGINVEST ne répond pas à la définition de la société telle qu'elle résulte de l'article 885 O -V bis du code général des impôts ; que par voie de conséquence, la décision entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions ; que les époux [N] seront condamnés aux dépens ;
DÉCISION :
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Lorient le 8 février 2012 ;
Condamne les époux [N] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER.-.LE PRESIDENT.-.