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17/04/2013 | FRANCE | N°12/00006

France | France, Cour d'appel de Rennes, Juridiction du premier prÉsident, 17 avril 2013, 12/00006


COUR D'APPEL DE RENNES

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

No de minute : 1
No de dossier : 12/ 00006

O R D O N N A N C E

Décision en premier ressort rendue par mise à disposition au greffe le 17 Avril 2013 par Monsieur Philippe JEANNIN, Premier Président près la cour d'appel de RENNES, assisté lors des débats en date du 20 Février 2013 par Madame Pascale JEGOU, Greffière en chef,

REQUERANT :

Monsieur Patrick Y...
né le 10 Janvier 1961 à POULLAOUEN (29246)
de nationalité Française
...
22340 TREFFIN
comparant, assi

sté par Me Marie Claude BLANC, avocat au barreau de QUIMPER

EN PRESENCE DE :

Madame l'Agent Judiciaire du Trés...

COUR D'APPEL DE RENNES

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

No de minute : 1
No de dossier : 12/ 00006

O R D O N N A N C E

Décision en premier ressort rendue par mise à disposition au greffe le 17 Avril 2013 par Monsieur Philippe JEANNIN, Premier Président près la cour d'appel de RENNES, assisté lors des débats en date du 20 Février 2013 par Madame Pascale JEGOU, Greffière en chef,

REQUERANT :

Monsieur Patrick Y...
né le 10 Janvier 1961 à POULLAOUEN (29246)
de nationalité Française
...
22340 TREFFIN
comparant, assisté par Me Marie Claude BLANC, avocat au barreau de QUIMPER

EN PRESENCE DE :

Madame l'Agent Judiciaire du Trésor
Sous-direction du droit privé
6 rue Louise Weiss
75073 PARIS CEDEX 13
Représentée par Me BILLAUD, Avocat à la Cour

ET :

le ministère public, représenté en la personne du procureur général,

Monsieur Patrick Y..., représenté par son conseil, a présenté requête le 14 mars 2012 sur le fondement des articles 149 et suivants du code de procédure pénale aux fins d'indemnisation au titre de la détention provisoire qu'il a subie du 25 mars 2010 au 8 juillet 2011, ayant bénéficié le 18 novembre 2011 d'une décision de non lieu par arrêt de la chambre d'instruction de la cour d'appel de RENNES rendu dans le cadre de la procédure où il avait été mis en examen du chef d'homicide volontaire.

Il sollicite en réparation du préjudice subi à raison de la détention provisoire :

- au titre du préjudice matériel, d'une part, les sommes de 667, 99 €, 1052, 74 €, et 3. 000 € au titre du remplacement ou de la disparition d'objets survenue durant son incarcération, son appartement ayant été en son absence saccagé et du matériel lui ayant été dérobé, d'autre part, une somme de 4. 848, 56 € compensant la perte d'allocations alors qu'il était titulaire du revenu de solidarité au moment de son placement en détention provisoire.,

- au titre du préjudice moral, 70. 500 €, en raison de l'importance du choc carcéral subi, aggravé par l'inconfort et la promiscuité de sa détention, la rupture familiale ainsi que l'atteinte à sa réputation ou encore l'angoisse née du rejet systématique de ses demandes réitérées de mise en liberté,

- au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre de la présente procédure, 1. 500 €.

Madame l'agent judiciaire de l'Etat qui sollicite la production du bulletin no1 de casier judiciaire et de la fiche pénale actualisée de Monsieur Y..., soutient, pour l'essentiel qu'aucun des éléments invoqués par le requérant ne constitue en réalité de circonstances aggravant les conséquences préjudiciables propres à toute détention, la demande formée à ce titre devant être réduite à hauteur de 25. 000 €.

Elle conclut au rejet de la demande formée au titre du préjudice matériel observant que Monsieur Y...ne produit aucune pièce justifiant la perte du bénéfice du revenu de solidarité et qu'il ne démontre aucun lien entre le saccage de son appartement et la détention provisoire et la détention provisoire par lui subie.

Elle n'oppose pas de moyen à la demande présentée au titre des frais irrépétibles.
Monsieur le procureur général, indique que si la détention de monsieur Y...a duré quinze mois et demi, celui-ci avait été auparavant détenu à plusieurs reprises et propose en conséquence de limiter l'indemnisation du préjudice moral à hauteur de 30. 000 €. Reprenant l'argumentation de l'agent judiciaire de l'Etat, il conclut au rejet des demandes présentées au titre des conséquences des dégradations et vols commis dans l'appartement du requérant pendant sa détention provisoire. Il ajoute que monsieur Y...ne peut prétendre à aucune indemnisation au titre de la perte de l'interruption du versement du revenu de solidarité cette allocation n'étant plus due à compter du premier jour suivant le troisième mois de l'incarcération en application des dispositions de l'article R 262-45 du code de la Famille et de l'Aide sociale.

CECI ETANT EXPOSE : Nous, premier président,

Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que la requête de Patrick Y..., en date du 14 mars 2012 a été déposée dans le délai de 6 mois suivant la décision définitive de non lieu dont il fait l'objet le 18 novembre 2011 ;

Qu'il ne peut lui être opposé aucune des fins de non recevoir énoncées à l'article 149 du code de procédure pénale ;

Qu'elle est donc recevable ;

Au fond :

- Sur le préjudice matériel :

- En ce qui concerne la demande au titre des vols et dégradations d'objets suite à des intrusions dans l'appartement de M. Y..., pendant la durée de la détention ;

Considérant que M. Patrick Y...était locataire d'un appartement à Planevez du Faou ; qu'il ressort d'une attestation produite par le propriétaire des lieux que ce logement a fait l'objet de plusieurs effractions et cambriolages durant la période durant laquelle M. Y...a été incarcéré sous le régime de la détention provisoire ;

Que malgré la constatation des gendarmes la plainte déposée, a été classée sans suite, les auteurs demeurant inconnus ;

Considérant que le requérant sollicite le remboursement de matériels remplacés dont il justifie en produisant des factures respectivement de 667, 99 € et 1052, 74 €, outre la somme de 3. 000 € au titre de l'ensemble des objets détériorés et effets personnels dont la valeur ne peut être individualisée ;

Mais considérant que, le fait que des intrusions se soient produites durant l'incarcération de M. Y...n'induit aucun lien de causalité directe avec la détention provisoire lequel ne peut être recherché que dans l'action de malfaiteurs non identifiés, l'indemnisation du préjudice résultant de ce vol procédant de l'assurance que M.. Y...avait du souscrire conformément aux dispositions du bail ;

Que sa demande à ce titre, doit donc être rejetée ;

- En ce qui concerne la perte du RSA ;

Considérant que les pièces produites par M. Y...démontrent qu'il bénéficiait à la date de son incarcération, du Revenu de Solidarité Active (RSA), soit 404, 88 € mensuels ;

Que conformément aux dispositions des dispositions de l'article R 262-45 du code de la famille, le requérant a perdu le bénéfice de cette prestation le premier jour suivant le troisième mois de détention ;

Qu'il en a donc été privé à compter du jour susdit et ce, jusqu'à la date à laquelle il a retrouvé la liberté, soit pendant 12 mois et 13 jours ;

Considérant qu'il ne peut être soutenue que cette allocation ayant cessé d'être due en raison de l'incarcération, M. Y...n'aurait droit à aucune indemnisation alors que cette perte de revenu trouve justement sa cause immédiate dans une détention provisoire injustifiée dont la totalité des effets doivent être réparés ;

Qu'il convient donc d'allouer à M. Y...pour compenser cette perte de revenus le montant des allocations qui lui aurait été normalement versé s'il n'avait été détenu pendant 12 mois et 13 jours soit, et dans la limite de sa demande, 4848, 46 € ;

- sur le préjudice moral :

Considérant que Patrick Y...était âgé de 49 ans au moment des faits ;

Qu'il a subi une longue période de détention de 15 mois et 13 jours ; ;

Considérant qu'affirmant avoir subi un préjudice exceptionnel lié à la séparation de sa famille, et notamment de son fils Jessy, M. Y...invoque la dureté de ses conditions de détention et produit un certificat médical faisant état de conséquence psychologiques ;

Que si ces paramètres doivent être pris en compte au regard de la durée de la détention provisoire, ils n'en constituent pas moins les éléments ordinaires de la privation de liberté, dans la mesure où aucune circonstance aggravante, au-delà des choix personnels de M. Y...ou de sa famille ne peut être invoqués comme ayant aggravé la séparation alors qu'aucune restriction ne lui a été imposée quant aux visites dont il pouvait bénéficier en détention ;

Considérant, en outre, que si l'affirmation selon laquelle M. Y...menait une vie tranquille peut être justifiée par le fait qu'il vivait seul et modestement dans la difficulté quant à l'exercice d'un emploi depuis environ quatre années avant son incarcération, l'appétence pour l'alcool dont témoigne suffisamment le contexte des faits dans lesquels il s'est trouvé malencontreusement impliqué peut également être pris en compte au regard des troubles psychologiques dont il est fait état, même si cet élément comme celui de l'existence d'incarcération antérieures représentant des expériences très anciennes qui n'ont donc pas considérablement réduit le choc carcéral doivent être pondérés en regard de la durée assez importante de privation de liberté.

Considérant en conséquence que l'indemnisation du préjudice moral supporté par M. Y...doit être fixée à hauteur de 46. 000 € ;

- Sur les frais irrépétibles :

Et considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Patrick Y...la charge des frais irrépétibles engagés par lui dans le cadre de la présente procédure ;

Qu'il lui sera alloué la somme de 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

Statuant par décision contradictoire mise à disposition au greffe de la Cour,

Vu les articles 149, 149-1 à 149-4, 150, R 26 et suivants du code de procédure pénale,

- En la forme, déclarons recevable la requête en indemnisation formée par Monsieur Patrick Y...,

- Au fond, condamnons le Trésor Public à verser à Patrick Y...:

- au titre de son préjudice matériel, la somme de 4. 848, 46 € (QUATRE MILLE HUIT CENT QUARANTE HUIT EUROS ET QUARANTE SIX CENTIMES),

- au titre de son préjudice moral, la somme de 46. 000 € (QUARANTE SIX MILLE EUROS)

- ainsi que la somme de 1. 500 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Rejetons toutes autres demandes,

- Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Le Greffier en ChefLe Premier Président

Pascale JEGOU Philippe JEANNIN

;


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Juridiction du premier prÉsident
Numéro d'arrêt : 12/00006
Date de la décision : 17/04/2013
Sens de l'arrêt : Fait droit à une partie des demandes du ou des demandeurs sans accorder de délais d'exécution au défendeur

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2013-04-17;12.00006 ?
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