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19/02/2013 | FRANCE | N°11/07042

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 19 février 2013, 11/07042


1ère Chambre





ARRÊT N°67



R.G : 11/07042













Me [L] [X]

Société [Y] SCP



C/



SA FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETA































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 19 FEVRIER 2013>




COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Bruno CREPIN, Conseiller,

Madame Catherine DENOUAL, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 09 Octobre 2012

devant Monsieur Xavier BE...

1ère Chambre

ARRÊT N°67

R.G : 11/07042

Me [L] [X]

Société [Y] SCP

C/

SA FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETA

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 19 FEVRIER 2013

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Monsieur Bruno CREPIN, Conseiller,

Madame Catherine DENOUAL, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 09 Octobre 2012

devant Monsieur Xavier BEUZIT et Madame Catherine DENOUAL, magistrats rapporteurs, tenant l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Madame Catherine DENOUAL, ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 19 Février 2013, après prolongation de la date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTS :

Maître [L] [X]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Rep/assistant : Me Régine DE MONCUIT-SAINT HILAIRE, (SELARL AB LITIS - DE MONCUIT SAINT HILAIRE - PELOIS - VICQUELIN) Postulant

Rep/assistant : Me RONZEAU, Plaidant

SCP [Y] NOTAIRES ASSOCIÉS agissant par son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Adresse 11]

[Localité 3]

Rep/assistant : Me Régine DE MONCUIT-SAINT HILAIRE (SELARL AB LITIS - DE MONCUIT SAINT HILAIRE - PELOIS - VICQUELIN), Postulant

Rep/assistant : la SELARL EFFICIA, Plaidant

INTIMÉE :

SA FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETA

[Adresse 9]

[Adresse 10]

[Localité 2]

Rep/assistant : Me Patrice CONTANT, avocat au barreau de SAINT-MALO

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Suivant acte notarié du 15 décembre 1986, les époux [F] ont vendu aux époux [S] une maison à usage d'habitation située à [Localité 16], cadastrée section numéros [Cadastre 5],[Cadastre 6],[Cadastre 7] et [Cadastre 8], moyennant le prix de 500 000 frs. payable comptant à hauteur de 200 000 fr., le solde étant converti en une rente annuelle et viagère de 30 000 frs. au profit des vendeurs, sans réduction au décès du prémourant.

Par acte notarié du 17 octobre 1997, les époux [S] ont vendu ce bien à M.[I] moyennant le prix de 510 000 frs. sur lequel la somme de 210 000 fr. a été payée comptant, l'acquéreur s'engageant à régler le solde par versement à M.[F] de la rente viagère mise à la charge des époux [S], M.[F], intervenu à l'acte, ayant accepté la substitution de débiteur tout en conservant ses droits et actions contre les époux [S].

Aux termes du même acte, la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE a consenti à M. [I] un prêt destiné au financement pour partie de l'acquisition d'un montant de 231 000 frs. remboursable en 120 mensualités de 2831,93 francs au taux de 6,90 %. En garantie du remboursement de ce prêt, une inscription de privilège de prêteur de deniers à hauteur de 210 000 frs. en principal et d'hypothèque conventionnelle pour 21 000 frs. en principal, a été publiée le 14 novembre 1997 au profit de la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE.

M. [I] ayant cessé de verser la rente à M.[F], celui-ci a fait délivrer un commandement aux fins de saisie vente aux époux [S] lesquels ont à leur tour, fait délivrer un commandement à celui-là, avant de l'assigner en résolution de la vente.

Par jugement du 2 octobre 2001, le tribunal de grande instance de Dinan a constaté la résolution de plein droit de la vente du 17 octobre 1997 conclue entre les époux [S] et M. [I].

Par arrêt du 22 mai 2003, la Cour d'Appel de Rennes a confirmé cette décision.

Suivant acte authentique du 1er juillet 2005, au rapport de Me LUSTEAU, notaire à [Localité 13], avec la participation de Me [X], notaire à [Localité 12], les époux [S] ont vendu l'immeuble en cause à M.[E], moyennant le prix de 198 000 €, les vendeurs conservant à leur charge le paiement de la rente viagère. Le prix de vente était remis aux époux [S].

Exposant que les notaires auraient commis une faute en libérant les fonds entre les mains des vendeurs alors qu'ils avaient connaissance des sûretés inscrites et de la nécessité de la désintéresser au préalable, la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE a fait assigner Me [X] et la SCP [Y], devant le tribunal de grande instance de Dinan afin d'obtenir la réparation de son préjudice constitué par le défaut de paiement de la créance garantie, soit la somme de 40 000,57 € outre les intérêts légaux à compter du 1er juin 2005, jour de la libération des fonds sous réserve de déductions à opérer des éventuelles sommes perçues au titre de la saisie des rémunération de M. [I].

Vu l'appel interjeté par la SCP [Y] du jugement rendu le 26 août 2011 par le tribunal de grande instance de Saint-Malo ayant :

-condamné in solidum Me [X] et la SCP [Y] à payer à la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE la somme de 40 000,57 € avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2005 , sous réserve de la déduction à opérer des éventuelles sommes perçues au titre de la saisie des rémunérations de M. [I],

-rejeté la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par Me [X],

-condamné in solidum Me [X] et la SCP [Y] à payer à la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu les dernières écritures déposées par Me [X] le 9 janvier 2012 auxquelles il est fait référence pour l'exposé de ses moyens et prétentions à l'effet de voir constater :

-qu'elle n'aurait commis aucune faute susceptible d'engager sa responsabilité civile professionnelle sur le fondement de l'article 1382 du Code civil au motif que l'annulation de la vente intervenue entre les époux [S] et M. [I] avait entraîné la résolution du prêt en raison de l'effet rétroactif de la nullité avec pour conséquence la disparition de l'ensemble des droits réels grevant l'immeuble et notamment l'extinction de la sûreté consentie sur ce bien,

-subsidiairement, l'absence de lien de causalité entre une hypothétique faute de l'étude notariale et le préjudice dont le caractère certain ne serait pas rapporté, le préjudice subi par la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE étant directement lié à l'annulation de la vente, nullement imputable à Me [X] puisque résultant du non-respect de ses obligations contractuelles par M. [I], d'une part, la démonstration n'étant pas faite de l'insolvabilité de M. [I], d'autre part,

et réclamant l'allocation de la somme de 6000 € à titre de dommages et intérêts outre celle de 4000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions déposées le 15 novembre 2011 par la SCP [Y] affirmant que la résolution de la vente présenterait un effet rétroactif soit la remise des choses et des parties dans leur état antérieur et, partant, la disparition de tous les droits constitués sur la chose qui en était l'objet et soutenant qu'aux termes de son arrêt du 5 novembre 2008 invoqué par la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE, la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation n'aurait raisonné que sur les conséquences de l'annulation du prêt et non sur les conséquences de l'annulation de la vente portant sur le bien grevé d'hypothèque ;

Vu les conclusions de la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE déposées le 16 janvier 2012 auxquelles il est renvoyé expressément pour le rappel de ses moyens et prétentions et aux termes desquelles celle -ci soutient au contraire que la résolution de la vente constatée judiciairement n'aurait eu aucune incidence sur l'hypothèque qu'elle détenait et ne pourrait ainsi faire obstacle à l'exercice de son droit de suite sur l'immeuble litigieux du fait de l'existence de la sûreté attachée non pas au contrat de vente mais au contrat de prêt et, en entendant rappeler une jurisprudence constante rappelée notamment par un arrêt rendu le 5 novembre 2008 par la 3ème Chambre Civile de la Cour de Cassation selon laquelle « tant que les parties n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion de leur convention annulée, l'obligation de restituer, inhérente au contrat de prêt demeure valable, dès lors la garantie en considération de laquelle le prêt a été consenti subsiste tant que cette obligation n'est pas éteinte » ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 5 septembre 2012 ;

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la demande principale :

Considérant que par application des dispositions de l'article L312-12 du code de la consommation relatives à l'interdépendance entre le contrat de prêt et le contrat de vente pour lequel il a été consenti et de celles de l'article 1184 du Code civil, la résolution de la vente entraîne, du fait de sa disparition rétroactive, la résolution de plein droit du prêt ; que la circonstance selon laquelle la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE n'ait pas été appelée à la cause et que la résolution du prêt n'ait pas été sollicitée est insuffisante pour caractériser la renonciation tacite de l'emprunteur à se prévaloir de l'interdépendance des contrats et pour faire obstacle à la résolution de plein droit du prêt ; qu'à cet égard, il ne peut être fait grief à la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE de ne pas avoir formé tierce opposition, celle-ci ne pouvant, à la suite d'une situation dommageable occasionnée par la faute d'un notaire se voir imposer l'exercice d'une voie de droit qui n'avait pas été prévue initialement;

Considérant par ailleurs qu'il doit être rappelé qu'aux termes des dispositions de l'article 2393 du Code civil, « l'hypothèque est un droit réel sur les immeubles affectés à l'acquittement d'une obligation ' et subsiste en entier sur tous les immeubles affectés 'elle les suit dans quelque main qu'ils passent » ; que la sûreté hypothécaire est ainsi attachée au contrat de prêt et non au contrat de vente de sorte que la résolution de la vente de l'immeuble est sans incidence sur le sort de la garantie attachée au remboursement du prêt ; que les causes d'extinction des privilèges et hypothèques, au rang desquelles figure l'extinction de l'obligation principale, sont limitativement énumérées par le Législateur ;

Considérant qu'est sans portée en l'espèce l'adage « resoluto jure dantis resolvitur jus accipientis » qui consiste seulement à rappeler que l'annulation d'une vente entraîne celle des droits du cédant tout autant que ceux du cessionnaire, en ce qu'ils sont inhérents à la vente ;

Considérant que c'est à bon droit que la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE invoque la conservation de la sûreté en considération de laquelle le prêt a été consenti, nonobstant la résolution de la vente et l'annulation du contrat de prêt, dès lors que l'obligation de restituer, inhérente au contrat de prêt, n'est pas éteinte, qu'elle demeure au contraire tant que les parties n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion de leur convention annulée ; qu'il n'est pas sans intérêt de souligner qu'en première instance, la SCP [Y] avait admis que : « la jurisprudence considère que lorsqu'un contrat de prêt est annulé, l'obligation de restituer le capital emprunté par l'emprunteur reste garantie par l'hypothèque consentie pour garantir le prêt » ;

Considérant en outre que préalablement à la vente de l'immeuble par les époux [S] à M. [E], la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE avait rappelé à Me [X] l'existence d'un état hypothécaire en sa faveur et avait sollicité le versement des fonds correspondant au montant de sa créance (lettres des 31 mai et 1er juin 2005) mais qu'en dépit de cette réclamation, les notaires rédacteurs de l'acte n'y ont pas satisfait ;

Considérant qu'est caractérisée leur faute commune ayant consisté à verser l'intégralité des fonds au vendeur alors qu'il ne pouvait évidemment pas méconnaître l'existence des sûretés inscrites au profit du prêteur, existence qui leur avait même été rappelée préalablement à la vente ;

Considérant qu'il ne saurait être sérieusement soutenu que le préjudice subi par la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE résulte de l'inexécution par M. [I] de ses obligations contractuelles alors qu'il a également pour cause la décision des notaires de se dessaisir des fonds provenant de la vente sans tenir compte du privilège du prêteur de deniers et de l'hypothèque conventionnelle que la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE avait pris le soin d'inscrire et dont elle avait conservé le bénéfice ;

Considérant que constitué par le défaut de remise des fonds à hauteur du solde restant dû, le préjudice subi par la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE est actuel et certain ; que sa réalité n'est pas subordonnée à l'exercice préalable d'autres voies de recours par ses soins, soit à l'encontre du débiteur, soit à l'encontre du tiers acquéreur, par application du droit de suite ; que ce préjudice a bien été généré par la faute commune des notaires;

Considérant que bien fondée, il sera fait droit à la demande de la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE ; que Me [X] et la SCP [Y] seront condamnés in solidum au paiement de la somme de 40 000,57 € majorée des intérêts légaux à compter du 1er juillet 2005, la créance ayant été arrêtée au 30 juin 2005, sauf à déduire les sommes perçues en vertu de la saisie-arrêt des rémunérations de M. [I] ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur la demande reconventionnelle :

Considérant que l'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages et intérêts qu'en cas de mauvaise foi, d'intention de nuire ou d' erreur grossière équipollente au dol ;

Considérant que les développements qui précèdent démontrent que c'est à bon droit que la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE a agi en justice pour faire valoir ses prétentions en sorte que Me [X] ne peut prétendre qu'une telle action présente un caractère abusif justifiant l'allocation de dommages et intérêts en sa faveur ; que Me [X] sera déboutée de sa demande reconventionnelle ; que le jugement sera confirmé de ce chef ;

Sur les demandes accessoires :

Considérant que succombant en leurs prétentions, Me [X] et la SCP [Y] seront condamnées in solidum aux dépens ainsi qu'au versement de la somme de 2000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

DÉCISION :

La Cour ,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 26 août 2011 par le tribunal de grande instance de Saint-Malo ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum Me [X] et la SCP [Y] à verser à la SOCIETE FINANCIERE REGIONALE DE CREDIT IMMOBILIER DE BRETAGNE la somme de 2000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne in solidum Me [X] et la SCP [Y] aux dépens d'appel lesquels seront les conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER.-.P/ LE PRESIDENT EMPÊCHÉ.-.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11/07042
Date de la décision : 19/02/2013

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°11/07042 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2013-02-19;11.07042 ?
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