COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 15 JANVIER 2013 6ème Chambre B
ARRÊT No 30
R. G : 11/ 01909
M. Aslan X...
C/
Mme Catherine Y...
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée le :
à :
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Madame Christine LEMAIRE, Conseiller faisant fonction de Président Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Françoise ROQUES, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Sandrine KERVAREC, lors des débats, et Madame Huguette NEVEU, lors du prononcé,
DÉBATS :
En chambre du Conseil du 30 Octobre 2012 devant Monsieur Pierre FONTAINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe hors la présence du public le 15 Janvier 2013, comme indiqué à l'issue des débats
APPELANT :
Monsieur Aslan X... né le 01 Août 1979 à YOMRA (TURQUIE) ... 35000 RENNES Rep/ assistant : La SCP CASTRES COLLEU, PEROT LE COULS-BOUVET Postulant (avocat au barreau de RENNES) Rep/ assistant : Me LESUEUR substituant Me GOUBIN, Plaidant (avocat au barreau de RENNES)
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2011/ 2885 du 27/ 01/ 2012 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)
INTIMÉE :
Madame Catherine Y... née le 29 Juin 1969 à NANTES (44000)... 44480 DONGES Rep/ assistant : la SELARL AVOCAT LUC BOURGES, Postulant (avocats au barreau de RENNES) Rep/ assistant : LA SCP LAYNAUD Plaidant (avocat au barreau de RENNES)
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/ 3321 du 26/ 04/ 2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de RENNES)
EXPOSE DU LITIGE ET OBJET DU RECOURS.
De l'union libre de M. X... et Mme Y... est née Elif le 30 mai 2006 ;
Les parents se sont séparés ;
Une décision du 29 mars 2010 a constaté l'exercice en commun de l'autorité parentale, a ordonné une enquête sociale et, dans l'attente a fixé la résidence habituelle d'Elif chez sa mère, a accordé au père un droit de visite puis d'accueil, avec remise de l'enfant au point de rencontre de l'Association Le Goéland, et interdiction de sortie de territoire français sans l'accord des deux parents, enfin a mis à la charge de M. X... une contribution mensuelle indexée de 150 € pour l'entretien et l'éducation de sa fille ;
Après dépôt du rapport d'enquête sociale, le Juge aux Affaires Familiales de Saint-Malo a, par décision du 8 novembre 2010 :
- maintenu les dispositions du précédent jugement sur la résidence habituelle de l'enfant et la pension alimentaire ;
- dit que le père verra et hébergera Elif :
* en période scolaire : toutes les fins de semaine à l'exception de la deuxième réservée à la mère, du vendredi à 16 H au dimanche à 18 H,
* hors période scolaire : pendant la moitié de toutes les vacances scolaires, première moitié les années paires, seconde moitié les années impaires ;
- dit n'y avoir lieu à remise de l'enfant par le Point Accueil Parents Enfants (P. A. P. E.) de l'Association Le Goéland,
- dit n'y avoir lieu au prononcé de l'interdiction de sortie du territoire du père avec l'enfant,
- dit toutefois que M. X... devra informer Mme Y... des dates du séjour, du lieu de résidence de l'enfant et fournir un numéro de téléphone, auquel celle-ci pourra être jointe,
- dit que chacune des parties assumera ses dépens à l'exception des frais d'enquête sociale qui resteront à la charge de l'Etat ;
M. X... a relevé appel de ce jugement ;
Par conclusions du 27 avril 2012, il a demandé :
- d'infirmer ladite décision sur la résidence de l'enfant et toutes autres dispositions en découlant,
- de dire qu'Elif résidera habituellement chez lui,
- de réserver le droit de visite et d'hébergement de la mère,
- de lui donner acte de ce qu'il entend maintenir les liens entre Mme Y... et sa fille en fonction de ce qui a été préconisé par le service d'assistance éducative en charge de la mission confiée par le juge des enfants de Saint-Malo dans sa décision du 13 janvier 2012,
- de dispenser Mme Y... d'une contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant sur le constat de son impécuniosité ;
Par conclusions du 27 juin 2012, l'intimée à demandé :
- de confirmer le jugement déféré,
- de dire en outre que la charge des trajets entre les domiciles respectifs des parents sera partagée par moitié ;
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est référé aux dernières écritures des parties susvisées ;
Le clôture de l'instruction a été prononcée le 23 octobre 2012 ;
Sur ce,
Les mesures déférées ont été ordonnées sur la base du rapport d'enquête sociale daté du 8 juillet 2010 montrant les capacités éducatives de la mère, et les qualités du père, le risque que celui-ci enlève sa fille et la retienne en Turquie, son pays d'origine, n'étant pas avéré ;
Une aide éducative en milieu ouvert a été instituée par une décision du juge des enfants de Saint-Malo du 15 septembre 2008 dans le but de soutenir Mme Y... dans l'exercice de sa fonction parentale à l'égard d'Elif, au même titre que pour ses autres enfants nés d'unions différentes, et de garantir une ambiance sereine autour de la fillette, prise dans un conflit d'adultes comme certains de ses frères et soeurs ;
S'appuyant sur les renseignements donnés par l'Association Pour l'Action Sociale et Educative (APASE) le même magistrat a retenu dans une décision du 5 janvier 2011 confirmée par un arrêt du 9 septembre 2011 que Mme Y... débordée concernant la prise en charge de ses enfants était dans le déni de ses difficultés, notamment en ce qui concerne l'hygiène, qu'Elif avait besoin d'évoluer dans un cadre sain et d'être stimulée par des activités extérieures adaptées à son âge ;
Selon cette décision M. X... s'est vu confier sa fille à laquelle il est à même d'offrir avec son épouse et leur enfant des conditions de vie lui convenant moyennant une assistance éducative en milieu ouvert pour une durée d'un an et l'octroi à la mère d'un droit de visite et d'hébergement les première, troisième et le cas échéant cinquième fins de semaine en période scolaire ainsi que pendant la moitié des vacances scolaires suivant des horaires et des modalités à organiser en accord avec M. X... et le service éducatif ;
Ces mesures ont été maintenues, dont l'aide éducative renouvelée jusqu'au 13 janvier 2013, par une décision du juge des enfants de Saint-Malo du 13 janvier 2012 ayant délégué sa compétence à son homologue de Saint-Nazaire pour désigner le service chargé de l'assistance éducative, Mme Y... s'étant installée près de cette localité de Loire-Atlantique ;
Cette dernière soutient en vain qu'elle a été victime de ses mauvaises relations avec l'APASE qui aurait manqué d'objectivité, sous le prétexte que la personne, Mme Z..., recevant son enfant Valentin en période de vacances scolaires souffrirait de la carence du même service, ou encore qu'elle a réglé des problèmes d'hygiène notées par une enseignante (lettre d'une directrice d'une école maternelle du 6 février 2011) ;
Au demeurant, la décision du juge des enfants du 13 janvier 2012 est fondée sur les informations du service éducatif ayant succédé à l'APASE d'où il ressort que la situation de Mme Y... reste précaire et fragile, même si son nouveau logement est propre et aménagé pour un accueil satisfaisant d'Elif, que le placement de l'enfant chez son père répond aux besoins de la fillette au plan affectif et au plan éducatif ;
Mme Y... affirme, sans en rapporter la preuve, que M. X... aurait fait manquer l'école à sa fille à la suite d'un voyage en Turquie lors de vacances de Noël 2011 ou qu'il déléguerait à sa compagne la prise en charge d'Elif ou qu'il aurait fait obstacle au droit d'accueil, en ne donnant pas sa nouvelle adresse après un déménagement ;
Si, comme le père, la mère est attachée à sa fille et réciproquement et si elle s'efforce de mieux s'occuper de celle-ci (cf des attestations rédigées en sa faveur en 2012) il apparaît que le premier est plus apte que la seconde d'offrir à l'enfant un cadre de vie conforme à son bien-être et à son bon développement, le service éducatif n'ayant pas remarqué par ailleurs qu'elle souffrait d'être séparée de Mme Y... (cf la décision du juge des enfants du 13 janvier 2012) ;
En outre, il n'est pas démontré que M. X... pourrait mettre en péril la continuité et l'affectivité des liens d'Elif avec sa mère ;
En conséquence, il convient dans l'intérêt de l'enfant d'infirmer pour partie le jugement déféré et de fixer la résidence habituelle de celle-ci chez son père moyennant l'octroi à la mère d'un droit de visite et d'hébergement, comme précisé au dispositif ci-après, sans contribution alimentaire de sa part, sur le constat de son impécuniosité, n'ayant pour ressources que des prestations familiales pour trois enfants à charge (cf une attestation de paiement de la Caisse dont elle dépend) ;
Vu les conclusions de l'appelant aux fins de réformation de toutes dispositions découlant de la fixation de la résidence de l'enfant, la contribution paternelle doit nécessairement être supprimée à compter du moment où Elif a été confiée à M. X... c'est à dire de la deuxième semaine des vacances scolaires d'hiver de 2011 ;
Le reste des mesures relatif à l'absence d'interdiction de sortie de territoire du père avec sa fille et aux informations qu'il devra fournir à la mère sera maintenue, à défaut d'une remise en cause ;
La demande visant à un partage par moitié des trajets afférents à l'exercice du droit d'accueil organisé au profit de M. X... est injustifiée et sera donc rejetée ;
Etant donné le caractère familial de l'affaire les dépens de première instance garderont le sort qui en a été décidé, tandis qu'en appel, chacune des parties supportera ceux qu'elle a exposés, sous réserve de l'aide juridictionnelle ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après rapport à l'audience,
INFIRME en partie le jugement du 8 novembre 2010 ;
STATUANT à nouveau,
FIXE la résidence habituelle de l'enfant Elif chez son père ;
DIT que le droit de visite et d'hébergement de la mère sera organisé ainsi :
* en période scolaire : les première, troisième et le cas échéant cinquième fins de semaine de chaque mois,
* pendant la moitié des vacances scolaires en alternance ;
Le tout selon des horaires et des modalités à fixer en accord avec M. X... et le service éducatif désigné par le juge des enfants ;
SUPPRIME à compter de la deuxième semaine des vacances scolaires d'hiver de 2011, la contribution mise à la charge du père pour l'entretien et l'éducation de l'enfant ;
DISPENSE Mme Y... d'une contribution à l'entretien et l'éducation de sa fille sur le constat de son impécuniosité ;
CONFIRME pour le surplus ;
DIT que chacune des parties supportera ses propres dépens d'appel sous réserve de l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT.