1ère Chambre
ARRÊT N°300
R.G : 11/03844
Mme [V] [X] épouse [G]
C/
Société [W] SCP
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2012
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Xavier BEUZIT, Président,
Madame Anne TEZE, Conseiller,
Madame Catherine DENOUAL, Conseiller, entendue en son rapport
GREFFIER :
Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 03 Avril 2012
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 25 Septembre 2012, après prolongation de la date indiquée à l'issue des débats.
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APPELANTE :
Madame [V] [X] épouse [G]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Rep/assistant : la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avocat postulant
Rep/assistant : Me Pierre NIZART, avocat plaidant
INTIMÉE :
Société [W] SCP
[Adresse 1]
[Localité 6]
Rep/assistant : Me Régine DE MONCUIT-SAINT HILAIRE (SELARL AB LITIS DE MONCUIT SAINT HILAIRE PELOIS VICQUELIN), avocat postulant
Rep/assistant : Me Thierry CABOT, avocat plaidant
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Le 20 novembre 2006, Me [Y] [W], notaire associé à [Localité 6], assisté de Me [L], notaire à [Localité 9], a dressé la convention de divorce de M. [I] [S] et de Mme [V] [X] épouse [S], sous la condition suspensive du prononcé du divorce. L'actif de communauté comprenait notamment 2500 actions d'une société dénommée SPAME, évaluées à la somme de 1 900 000 €. La convention prévoyait l'attribution à chacun des époux de la moitié des actions, soit 1250 actions pour une valeur de 950 000 €.
Par acte sous-seing privé du 20 novembre 2006, Mme [V] [X] épouse [S] s'est engagée à céder à M. [I] [S] les 1250 actions de la société SPAME qui lui étaient attribuées dans le cadre de cette convention, au prix de 950 000 €, et ce, dès l'homologation de la convention de divorce.
Par jugement du 14 décembre 2006, le juge aux affaires familiales de [Localité 8] a prononcé le divorce des époux [S], homologuant ainsi la convention de novembre 2006. Le 21 décembre suivant, Me [W] a dressé l'état liquidatif de la communauté et a établi la convention de cession des 2150 actions de la société SPAME, moyennant le prix de 950 000 €, par Mme [V] [X] épouse [S] au profit d'une société dénommée LA SOURCE ELIOT dont le gérant et l'unique associée était M. [I] [S].
Le 9 avril 2009, Mme [V] [X] épouse [S] a reçu de la part des services fiscaux une mise en demeure l'informant qu'elle n'avait pas déposé en 2007, au titre de l'année 2006, la déclaration n° 2074 relative aux plus-values réalisées à l'occasion de la cession des titres de la société SPAME. Le 16 juin suivant, elle était destinataire d'une proposition de rectification portant sur un montant total en principal, majorations et intérêts de retard de 375 646 €, les services fiscaux ayant par ailleurs rejeté sa prétention visant à bénéficier de l'exonération prévue par les dispositions de l'article 150 OA I-3 du Code Général des Impôts.
Par acte du 10 décembre 2009, Mme [V] [X] épouse [S] a fait assigner en responsabilité la SCP [W] devant le Tribunal de Grande Instance de Rennes, sur le fondement d'un manquement à son devoir de conseil lors de la cession des actions litigieuses, à l'effet de la voir condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, à lui verser la somme de 251 000 € au titre de la dette fiscale en principal et celle de 104 546 € en majoration et intérêts (sauf à parfaire) outre sa condamnation aux frais irrépétibles et aux dépens.
Par jugement du 23 mai 2011, le Tribunal de Grande Instance de Rennes a :
-déclaré irrecevables comme tardives les conclusions récapitulatives n°4 signifiées par Mme [V] [X] épouse [S] le 24 mars 2011,
-débouté Mme [V] [X] épouse [S] de l'intégralité de ses réclamations,
-condamné Madame [V] [X] épouse [S] à verser à la SCP [W] la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par déclaration soit au greffe le 3 juin 2011, Mme [V] [X] épouse [S] a interjeté appel de cette décision et a demandé son infirmation.
Par conclusions déposées le 26 octobre 2011, elle demande en outre à la Cour de :
-dire que la SCP [W] a engagé sa responsabilité professionnelle dans le cadre des opérations de liquidation de communauté [X]/[S], lors des cession des actions de la SA SPAME par Mme [V] [X] épouse [S] à M. [I] [S],
En conséquence,
-condamner la SCP [W] à verser à Mme [V] [X] épouse [S] la somme de 250 100 € (dette fiscale principale),
' condamner la SCP [W] à verser à Mme [V] [X] épouse [S] la somme de 104 546 € (majorations et intérêts de retard à parfaire),
-débouter la SCP [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires,
-condamner la SCP [W] à verser à Mme [V] [X] épouse [S] la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Par conclusions déposées le 22 septembre 2011, la SCP [W] demande à la Cour de :
-confirmer le jugement dont appel,
-débouter Madame [V] [X] épouse [S] de toutes ses demandes, fins et conclusions à son encontre,
-condamner Madame [V] [X] épouse [S] à lui verser une indemnité de 5000 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu'à supporter la charge des dépens.
La Cour se réfère à la décision entreprise et aux conclusions déposées par les avocats pour le plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 21 février 2012.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la responsabilité :
Considérant que par application des dispositions de l'article 1382 du Code civil, le notaire est tenu d'un devoir d'information et de conseil à l'égard des parties à l'acte pour lequel il prête son concours ; qu'il lui appartient de rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation ;
Considérant que Mme [V] [X] épouse [S] fait valoir qu'elle a cru légitimement que serait effectuée en franchise d'impôt sur les plus-values, la cession par ses soins à la société LA SOURCE ELIOT des 1250 actions de la société SPAME qui lui avaient été attribuées dans le cadre du partage de la communauté ; qu'il résulte pourtant de l'acte sous-seing privé du 20 novembre 2006 que le notaire rédacteur avait informé le cédant du régime des plus-values prévues par la loi ; que d'autre part, aux termes de l'échange de correspondances entre les deux notaires assistant les époux, la question de la charge des plus-values latentes résultant de la cession des actions de la société SAPME avait bien été envisagée par les parties, avant signature des actes litigieux, la commune intention des parties ayant été clairement exprimée de faire supporter la charge fiscale résultant de la cession de la moitié des actions détenues par Mme [V] [X] épouse [S] à cette dernière et qu'elle puisse obtenir un capital correspondant à la moitié de la valeur de l'ensemble des actions ;
Considérant qu'en cause d'appel, Mme [V] [X] épouse [S] reprend les trois solutions qui lui auraient permis selon elle de ne pas avoir à payer d'impôts ; que cet avis est contredit par la consultation réalisée par M.[C] qui après avoir examiné ces trois solutions a émis l'avis circonstancié selon lequel : « 'il n'existe pas d'autre solution véritablement applicable qui aurait permis à Mme [V] [X] épouse [S] d'être exonérée d'impôts sur la plus-value en 2006 » ; que les seules observations émises par Mme [V] [X] épouse [S] à l'encontre de cet avis ne sont pas susceptibles de remettre en cause la pertinence de cette consultation prenant notamment en considération que seul le montage qui avait été mis en place permettait de satisfaire au double objectif précédemment rappelé poursuivi par les époux ;
Considérant que par voie de conséquence, Mme [V] [X] épouse [S] ne peut arguer de l'existence d'un préjudice tenant au paiement d'un impôt dont elle était légalement tenue, faute par elle de démontrer que mieux conseillée, elle aurait pu bénéficier d'un régime fiscal plus avantageux ; qu'en l'absence de faute du notaire, elle sera déboutée de l'intégralité de ses demandes ;
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Considérant que succombant en ses prétentions, Mme [V] [X] épouse [S] sera condamnée aux dépens ainsi qu'au versement de la somme de 3000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉCISION :
La Cour,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 mai 2011 par le Tribunal de Grande Instance de Rennes ;
Condamne Mme [V] [X] épouse [S] à verser à la SCP [W] la somme de 3000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [V] [X] épouse [S] aux dépens lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER.-.LE PRESIDENT.-.