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25/09/2012 | FRANCE | N°10/09120

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 25 septembre 2012, 10/09120


1ère Chambre





ARRÊT N°294



R.G : 10/09120













M. [W] [L]

Mme [G] [O] épouse [L]



C/



M. [S] [M]

Etablissement CAILLAREC SAS





























Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2012

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COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Madame Anne TEZE, Conseiller, entendue en son rapport

Madame Catherine DENOUAL, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 24 Avril 2012

...

1ère Chambre

ARRÊT N°294

R.G : 10/09120

M. [W] [L]

Mme [G] [O] épouse [L]

C/

M. [S] [M]

Etablissement CAILLAREC SAS

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 25 SEPTEMBRE 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Madame Anne TEZE, Conseiller, entendue en son rapport

Madame Catherine DENOUAL, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 24 Avril 2012

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 25 Septembre 2012, après prolongation de la date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTS :

Monsieur [W] [L]

né le [Date naissance 5] 1963 à [Localité 15]

[Adresse 9]

[Localité 4]

Rep/assistant : la SCP BREBION CHAUDET, avocat postulant

Rep/assistant : Me Bertrand LEROUX, avocat plaidant

Madame [G] [O] épouse [L]

née le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 15]

[Adresse 9]

[Localité 4]

Rep/assistant : la SCP BREBION CHAUDET, avocat postulant

Rep/assistant : Me Bertrand LEROUX, avocat plaidant

INTIMÉS :

Monsieur [S] [M]

né le [Date naissance 3] 1966 à [Localité 13]

[Adresse 1]

[Localité 13]

Rep/assistant : Me Régine DE MONCUIT-SAINT HILAIRE, avocat postulant

Rep/assistant : Me MORVAN, avocat plaidant

Etablissement CAILLAREC SAS

[Adresse 7]

[Localité 6]

Rep/assistant : la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avocat postulant

Rep/assistant : la SELARL COROLLER-BEQUET, avocat plaidant

ORIGINE DU LITIGE :

Par acte authentique du 18 mars 2006, au rapport de Me [X], notaire à [Localité 18], Mme [I] [H] a vendu aux époux [L] une propriété immobilière située à [Adresse 11], voisine d'une boulangerie exploitée par M. [M].

Arguant de l'existence de troubles anormaux de voisinage (bourdonnements, trépidations, vibrations, bruits) en provenance de la boulangerie, les époux [L] ont obtenu la désignation d'un expert judiciaire, suivant ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Morlaix du 7 août 2007.

Par ordonnance du 25 septembre suivant, le juge des référés a étendu les opérations d'expertise à la société CAILLAREC, installateur en 1997 du surgélateur avec conservateur dans le laboratoire de la boulangerie.

L'expert [P] a déposé son rapport le 15 février 2008 et a conclu en ces termes :

« L'Expert :

-a pris connaissance des griefs articulés par les époux [L] relativement à des troubles sonores et à des vibrations dans leur maison d'habitation,

-a constaté et soutient que ces griefs sont justifiés, en à expliciter l'origine et les moyens d'y remédier pour un coût estimé à 2748,76 € TTC,

-rappel que la continuité solidienne de la structure des immeubles n'est pas en tant que telle en cause mais aurait nécessité une désolidarisation efficace des deux compresseurs examinés ainsi que leurs liaisons frigo respectives,

-soutient que le préjudice incontestablement subi par les requérants tient à l'impossibilité de jouir normalement et pleinement de leur habitation depuis l'installation des de compresseur en cause.'

Sur saisine des époux [L], le tribunal de grande instance de Morlaix a par jugement du 22 septembre 2010 :

-déclaré recevables et fondées les demandes formées par les époux [L] à l'encontre de M. [M] et les en a déboutées,

-déclaré recevable l'action en intervention forcée de M. [M] à l'encontre de la société CAILLAREC,

-déclaré sans objet l'action en garantie du fait du débouté des époux [L],

-condamné les époux [L] à verser à M. [M] une indemnité de 1600 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

-dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans le rapport [S] [M]/société CAILLAREC-CLIMFROID EQUIPEMENT,

-condamné les époux [L] sur le fondement de l'article 696 du code de procédure civile aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

EXPOSE DU LITIGE EN CAUSE D'APPEL :

Par déclaration du 22 décembre 2010, les époux [L] ont interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de leurs dernières écritures déposées le 29 mars 2012, les époux [L] demandent à la Cour de :

-débouter M. [M] et la société CAILLAREC de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre des époux [L],

-condamner M. [M] à leur payer la somme de 2500 €en raison des troubles de jouissance subis,

-au besoin et avant-dire-droit, entendre l'expert judiciaire pour avoir toutes informations complétant utilement le rapport d'expertise sur les conditions et le déroulement des opérations d'expertise et les propos tenus par chacune des parties quant aux relevés acoustiques et aux nuisances constatées,

-condamner M. [M] à leur verser la somme de 7500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par conclusions notifiées et remises au greffe le 15 mars 2012, M. [M] demande à la cour de :

-confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et débouter les époux [L] de toutes leurs demandes,

-à titre subsidiaire, condamner la société CAILLAREC à le garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre,

-condamner les époux [L] à lui verser la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions signifiées et déposées le 19 mars 2012, la société CAILLAREC demande à la Cour de :

-confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Morlaix du 22 septembre 2010 en ce qu'il a débouté les époux [L] de leur demande au titre du trouble anormal de voisinage,

-en conséquence, dire et juger que l'action en garantie de M. [M] à son encontre est sans objet,

-à titre subsidiaire, dire et juger que la société CAILLAREC ne saurait être tenue de prendre en charge le préjudice financier et de jouissance des époux [L],

-débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes à son encontre et le condamner à lui verser la somme de 1000 €au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 avril 2012.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le trouble anormal de voisinage :

Considérant que par application des dispositions des articles 1382 et 544 du Code civil, si la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, ce droit trouve cependant des limites qui peuvent être fixées par les lois ou par les règlements, ou qui proviennent du droit du propriétaire voisin de ne pas être dérangé par l'usage que l'on fait de la chose, nul ne pouvant causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

Que les juges du fond apprécient souverainement l'existence d'un tel trouble tant au regard de son importance que de la situation des lieux ;

Considérant que l'expert a mis en évidence :

un bruit relativement faible mais régulier survenant la nuit et le jour,

un bruit plus intense de survenance plus aléatoire,

la mise en vibration sensible du radiateur de la chambre du rez-de-chaussée, son alimentation, et à degré moindre du plancher bois;

Considérant que l'expert ajoute : « sur place, il a été constaté par l'expert et l'ensemble des parties et avocats une manifestation sensible de ces bruits ainsi qu'une mise en vibration aussi sensible du radiateur de la chambre du rez-de-chaussée, son alimentation et degré moindre du plancher bois ... Ont été détectés les deux compresseurs situés dans un local donnant sur une petite cour intérieure comme origine vibratoire ... Les deux compresseurs ainsi que leurs liaisons organiques avec les appareils réfrigérants sont insuffisamment désolidarisées des murs et des consoles métalliques pour sur lesquels il repose... Cette insuffisance apparaît techniquement imputable à l'installateur appelé à la cause, la société CAILLAREC » ;

Considérant qu'il ressort de ces énonciations que dans le cadre des opérations d'expertise, M. [M] n'a pas contesté la réalité des nuisances sonores et des vibrations mais les a au contraire constatées, comme l'ensemble des parties et l'expert, sans jamais réclamer à l'expert la réalisation de relevés acoustiques alors que les parties doivent apporter leur concours aux mesures d'instruction, conformément aux dispositions de l'article 160 du code de procédure civile ;

Que dans ces conditions, il ne peut sans une certaine mauvaise foi, remettre en cause la réalité de ces nuisances et critiquer le fait que l'expert n'ait pas réalisé de tels relevés ;

Considérant que le caractère excessif des nuisances ressort clairement des conclusions du rapport d'expertise dans la mesure où les époux [L] subissent à la fois une mise en vibration considérée comme sensible du radiateur de la chambre du rez-de-chaussée mais également des émergences sonores permanentes, intervenant de nuit comme de jour et enfin des bruits plus intenses, de manière complètement aléatoire ;

Que l'exploitation d'un fonds de commerce de boulangerie dans un quartier résidentiel ne doit pas avoir pour effet d'occasionner la vibration des éléments d'équipement des maisons d'habitation ni un bruit continu, ces éléments étant sources de gêne anormale pour le voisinage ;

Que par voie de conséquence, ces nuisances sont constitutives d'un trouble anormal de voisinage dont M. [M] doit réparation, le moyen tiré de ce que les époux [L] n'occuperaient pas en permanence cette résidence secondaire étant parfaitement inopérant ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'en cause d'appel, les époux [L] ont renoncé à solliciter l'indemnisation d'un préjudice financier de même que suite à la cessation d'activité de M. [M], est devenue sans objet la demande formulée initialement tendant à le voir condamner à réaliser des travaux de nature à mettre fin au trouble ;

Considérant que les époux [L] sollicitent de la Cour la condamnation de M. [M] à leur verser la somme de 2500 €au titre des troubles de jouissance subis ;

Considérant qu'il résulte des pièces produites aux débats et des explications fournies par les parties que si les époux [L] ont occupé personnellement le bien, ils en ont été privés d'une jouissance normale en ne l'occupant pas autant qu'ils l'auraient souhaité, précisément à raison des troubles existants ; que subi depuis leur acquisition en mars 2006 jusqu'au 30 juin 2009, date de la fin de la période d'exploitation par M. [M], ce préjudice sera justement indemnisé par l'allocation de la somme de 2500 € ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que succombant en ses prétentions, M. [M] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au versement de la somme de 3219,77 €, incluant les frais de procès verbal de maître [R] qui ne peuvent être pris en compte dans les dépens, en vertu des dispositions des articles 695 et 700 du code de procédure civile ;

Sur l'appel en garantie :

Considérant que l'expert a identifié sans difficulté la cause des troubles; que celle-ci réside dans le fait que les deux compresseurs sont insuffisamment désolidarisés des murs et des consoles métalliques sur lesquels ils reposent ;

Considérant que les pièces produites aux débats et les conclusions du rapport d'expertise établissent que non seulement la société CAILLAREC a procédé à l'installation des deux compresseurs mais qu'elle a également été chargée d'une prestation d'entretien ; que dès lors, la société CAILLAREC voit sa responsabilité contractuelle engagée sans pouvoir valablement opposer les conditions générales de vente afin de décliner sa garantie puisqu'il n'est nullement démontré que lesdites conditions aient été portées à la connaissance de son client ;

Considérant que la société CAILLAREC sera condamnée à garantir M. [M] de toutes les condamnations prononcées à son encontre dans le cadre de cette instance ;

DECISION:

La Cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a retenu la responsabilité de M. [M] envers les époux [L] pour trouble anormal de voisinage ;

Le réformant pour le surplus,

Condamne M. [M] à verser aux époux [L] la somme de 2500€ en indemnisation de leur trouble de jouissance ;

Condamne M. [M] à verser aux époux [L] la somme de 3219,77€ par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [M] aux dépens de première instance et d'appel qui comprendront les frais des procédures de référé et le coût de l'expertise judiciaire;

Condamne la société CAILLAREC à garantir M. [M] de toutes les condamnations prononcées à son encontre dans le cadre de la présente instance.

LE GREFFIER.-.LE PRESIDENT.-.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10/09120
Date de la décision : 25/09/2012

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°10/09120 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-09-25;10.09120 ?
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