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05/06/2012 | FRANCE | N°11/00840

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 05 juin 2012, 11/00840


1ère Chambre





ARRÊT N°217



R.G : 11/00840













M. [Y] [U]

Mme [J] [P] épouse [U]



C/



M. [A] [E]

Mme [N] [R] épouse [E]

Mme [W] [E] épouse [S]

Me [D] [T]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL D

E RENNES

ARRÊT DU 05 JUIN 2012





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Madame Anne TEZE, Conseiller,

Madame Catherine DENOUAL, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 02 Avril 2012

devant Mad...

1ère Chambre

ARRÊT N°217

R.G : 11/00840

M. [Y] [U]

Mme [J] [P] épouse [U]

C/

M. [A] [E]

Mme [N] [R] épouse [E]

Mme [W] [E] épouse [S]

Me [D] [T]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 05 JUIN 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Madame Anne TEZE, Conseiller,

Madame Catherine DENOUAL, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 02 Avril 2012

devant Madame Anne TEZE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 05 Juin 2012, après prolongation de la date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTS :

Monsieur [Y] [U]

né le [Date naissance 4] 1928 à [Localité 11]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Rep/assistant : SCP BREBION CHAUDET, avocat postulant

Rep/assistant : Me Danaé PAUBLAN, avocat plaidant

Madame [J] [P] épouse [U]

née le [Date naissance 2] 1927 à [Localité 17]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Rep/assistant : SCP BREBION CHAUDET, avocat postulant

Rep/assistant : Me Danaé PAUBLAN, avocat plaidant

INTIMÉS :

Monsieur [A] [E]

né le [Date naissance 1] 1928 à [Localité 19]

[Adresse 7]

[Localité 24]

Rep/assistant : SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avocat postulant

Rep/assistant : SCP KERMARREC-MOALIC, avocat plaidant

Madame [N] [R] épouse [E]

née le [Date naissance 5] 1932 à [Localité 22]

[Adresse 7]

[Localité 24]

Rep/assistant : SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avocat postulant

Rep/assistant : SCP KERMARREC-MOALIC, avocat plaidant

Madame [W] [E] épouse [S]

née le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 18]

[Adresse 10]

[Localité 8]

Rep/assistant : SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avocat postulant

Rep/assistant : SCP KERMARREC-MOALIC, avocat plaidant

Maître [D] [T]

[Adresse 20]

[Localité 24]

Rep/assistant : Me Régine DE MONCUIT-SAINT HILAIRE, avocat postulant (SELARL AB LITIS - DE MONCUIT SAINT HILAIRE - PELOIS - VICQUELIN)

Rep/assistant : Me Thierry CABOT, avocat plaidant

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique reçu le 14 août 2002 par Me [T], notaire à [Localité 24], les époux [U] ont vendu aux époux [E] pour le prix de 182 938,82 € une maison d'habitation et un jardin constituant le lot n° 3 d'un lotissement dont ils ont fait donation de la nue propriété à leur fille Madame [W] [E] épouse [S], par acte du 2 octobre suivant.

Se plaignant d'anomalies structurelles affectant les murs de la maison, d'une humidité persistante et d'un décollement du carrelage du rez de chaussée, les consorts [E] ont assigné les époux [U] aux fins d'expertise à laquelle le juge des référés a fait droit suivant ordonnance du 7 avril 2008.

Postérieurement au dépôt du rapport d'expertise établi le 14 septembre 2004 par Monsieur [O], expert désigné, les consorts [E] ont assigné par acte du 6 mai 2008 les époux [U] en réparation du préjudice subi.

Les consorts [E] s'étant plaints ultérieurement de la dissimulation d'une servitude d'écoulement des eaux usées et eaux pluviales des terrains du lotissement, les époux [U] ont, par acte du 7 décembre 2009, assigné en garantie Me [T].

Saisi de l'ensemble du litige, le Tribunal de Grande Instance de Quimper a par jugement du 18 janvier 2011 :

- condamné les époux [U] à payer aux consorts [E] la somme de 7 666,37 € correspondant au coût de réfection du carrelage de l'immeuble vendu par les premiers aux seconds, réévaluée suivant les variations de l'indice INSEE du coût de la construction entre le 6 mai 2008 et la date de jugement,

- condamné les époux [U] à payer aux consorts [E] la somme de 2 000,00 € et les consorts [E] à payer à Me [T] la somme de 2 000,00 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes,

- condamné les époux [U] aux dépens de l'instance qui comprendront les frais de référé et le coût de l'expertise de Monsieur [O].

Par déclaration du 7 février 2011, les époux [U] ont interjeté appel de cette décision.

Aux termes de leurs dernières conclusions déposées le 9 mai 2011 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, les appelants demandent à la Cour de :

- réformer le jugement entrepris,

- débouter les consorts [E] de toutes leurs demandes,

- condamner 'conjointement et solidairement et ou in solidum' Monsieur et Madame [A] [E] et Madame [W] [E] épouse [S] au paiement d'une somme de 5 000,00 € en réparation du préjudice moral subi,

- le cas échéant, condamner Me [D] [T] à garantir les concluants de toutes condamnations pouvant être prononcées à leur encontre au titre des demandes formulées par Monsieur et Madame [E] du chef des servitudes de canalisations alléguées,

- 'en tant que de besoin', condamner les époux [E] de la même manière aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 3 000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- condamner 'en tant que de besoin', Me [T] aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Aux termes de conclusions récapitulatives déposées le 11 juillet 2011 auxquelles il est pareillement renvoyé pour l'exposé des moyens, les consorts [E], intimés, demandent au contraire de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur et Madame [U] au paiement d'une somme de 7 666,37 € correspondant au coût de reprise des désordres,

- recevoir les concluants en leur appel incident,

- constater que Monsieur et Madame [U] ont commis une rétention dolosive en ne précisant pas que la maison n'était pas construite de façon traditionnelle parpaings - ciment, mais selon un principe et au moyen de matériaux peu utilisés ainsi qu'en leur cachant l'existence de la servitude qui grevait leur propriété,

- constater que Me [T] a lui-même commis une faute en ne les informant pas lui-même de cette servitude,

- les condamner in solidum au paiement d'une indemnité de 40 000,00 € à titre de dommages-intérêts en réparation de la perte de valeur de l'immeuble,

- les condamner sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile au paiement d'une indemnité de 4 000,00 € au titre des frais de première instance et d'une indemnité de 4 000,00 € en cause d'appel, ainsi qu'aux dépens.

Aux termes de conclusions récapitulatives déposées le 7 septembre 2011 auxquelles il est également renvoyé pour l'exposé des moyens, Me [D] [T] demande de :

- confirmer le jugement,

- débouter les consorts [E] de leurs demandes formées au titre des servitudes de canalisations,

- constater dès lors que la demande en garantie des époux [U] contre le concluant est sans objet,

- débouter les époux [U] des demandes formées à son encontre,

- condamner les consorts [E] aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3 000,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

DISCUSSION

Sur les vices et non conformités

Sur la structure de l'immeuble

Considérant que les consorts [E] soutiennent que la maison vendue a été construite en blocs de polystyrène, que ce système constructif original déroge aux constructions traditionnelles réalisées en parpaing et/ou pierre de taille et ciment et constitue une non conformité affectant l'une des qualités substantielles de l'immeuble de sorte que les époux [U] ont manqué à leur obligation de délivrance ; que la non révélation par les vendeurs de ce système constructif caractérise de surcroît une réticence dolosive;

Considérant selon les constatations de l'expert judiciaire que l'immeuble comporte un sous-bassement en maçonnerie réalisé en agglomérés béton ainsi qu'un rez de chaussée et un étage dont les murs sont constitués de blocs de polystyrène de 25 cm d'épaisseur dans lesquels du béton a été coulé ; que ces blocs sont revêtus à l'intérieur d'un doublage plâtre et à l'extérieur d'un revêtement plastique ;

Mais considérant qu'il résulte des conclusions non contredites de ce même expert que le système constructif de type ISORAST mis en oeuvre est éprouvé et agréé de sorte qu'il ne peut constituer un vice de construction ;

Considérant, par ailleurs, que l'acte de vente ne comporte aucune spécification quant au système constructif, objet de la vente, et que la preuve de ce que les vendeurs avaient connaissance de ce que les acquéreurs recherchaient une maison réalisée dans des matériaux traditionnels tels que parpaings ou pierres de taille, n'est pas démontrée ; qu'il en est de même du projet d'extension dont les consorts [E] soutenaient qu'il était incompatible avec la structure de l'immeuble ;

Considérant, par ailleurs, que selon les conclusions de l'expert, le projet d'extension invoqué sur toute la longueur du pignon était utopique que l'immeuble soit réalisé en maçonnerie d'agglomérés béton ou à l'aide des matériaux mis en oeuvre et que la structure incriminée permet l'ouverture d'une porte ;

Considérant que demeuré hors du champ contractuel, le système constructif de la maison vendue ne peut constituer une non conformité de nature à engager la responsabilité des vendeurs pour manquement à l'obligation de délivrance ;

Sur le carrelage

Considérant que s'appuyant sur les constatations du rapport de l'expert judiciaire, le premier juge a justement rappelé que le carrelage couvrant la quasi totalité du rez de chaussée de la maison 'sonne creux' et craque sous le poids d'une personne ; que ces phénomènes sont dus à une compression du revêtement ayant pour origine une absence ou insuffisance des joints de dilatation périphériques et de fractionnement ; qu'il ne peut y être remédié que par un remplacement du carrelage ;

Considérant que l'expert estime qu'il est 'inimaginable' qu'un tel dommage qui affecte un immeuble de plus de vingt ans soit soudainement survenu après la vente et que 'les décollements, impossibles à dater, ne se sont pas amorcés récemment.' ;

Mais considérant que ce même expert intervenu vingt mois après la vente précise que ces dommages 'ne sont ... pas très spectaculaires à ce jour', qu'il n'a pas relevé de dégradations particulières en surface et qu'il lui est impossible d'affirmer qu'un 'non professionnel ait nécessairement pris la mesure des dommages';

Considérant par ailleurs que ce n'est que le 26 novembre 2003, soit plus de quinze mois après la vente, que les consorts [E] ont fait constater par huissier les dégradations en litige ;

Considérant que la preuve n'est pas démontrée au vu de ce qui précède que les époux [U] avaient conscience de la gravité du vice, les intéressés pouvant croire de bonne foi à un simple et normal phénomène d'usure ;

Considérant, par suite, que les époux [U] sont bien fondés à se prévaloir de la clause de non garantie des vices cachés stipulée au contrat de vente ;

Considérant, par suite, que le jugement sera infirmé sur ce point et que les consorts [E] seront déboutés de la demande en indemnisation des vices affectant le carrelage ;

Sur la servitude de canalisations

Considérant que l'immeuble formant le lot n° 3 du lotissement '[Adresse 16]' approuvé par l'arrêté préfectoral du 29 avril 1982 est grevé de canalisations d'évacuation des eaux pluviales et usées en provenance d'autres lots du lotissement ;

Considérant que le passage de ces canalisations constitue une servitude occulte dès lors que ces installations sont enterrées et que les ouvrages que constituent les regards et plaques d'égout, fussent-il apparents, ne sont pas révélateurs de l'évacuation des eaux pluviales et usées des terrains voisins à travers le fonds vendu ;

Considérant qu'il est mentionné dans l'acte de vente du 14 août 2002 au paragraphe intitulé conditions particulières du lotissement :

'La vente a lieu sous les charges et conditions résultant de l'arrêté de lotissement ... et le cas échéant de ses arrêtés modificatifs et complémentaires.

L'acquéreur déclare avoir pris connaissance de ces documents.

Une copie du cahier des charges et de l'arrêté ont été remises à l'acquéreur, qui le reconnaît' ;

Mais considérant que les servitudes en litige sont prévues exclusivement dans le programme de travaux, annexé à l'arrêté du 29 avril 1982 et que rien n'établit que ce programme qui ne constitue qu'une annexe de l'arrêté ait été remis aux acquéreurs ;

Considérant que si l'acte de vente comporte un paragraphe intitulé servitudes stipulant :

' (L'acquéreur) supportera les servitudes passives, apparentes ou occultes, continues ou non ... le vendeur déclare à ce sujet qu'il n'a créé, ni laissé créer aucune servitude sur les biens vendus, à l'exception de celles pouvant résulter de la situation des lieux, de la loi ou des règles d'urbanisme en vigueur à ce jour ...', cette clause de style n'est pas révélatrice par sa généralité de l'existence de la servitude spécifique que constitue le passage des canalisations d'évacuation en cause ;

Considérant que les vendeurs ont manqué à leur obligation d'information en ne portant pas à la connaissance des acquéreurs l'existence de cette servitude constitutive d'une charge occulte et non pas d'un vice caché ;

Considérant, cela étant, que les consorts [E] ne rapportent pas le moindre commencement de preuve de ce que le prix d'acquisition de l'immeuble était supérieur à sa valeur vénale au regard de la charge pesant sur le fonds ; qu'ils n'établissent pas que mieux informés, ils auraient pu acquérir à meilleur prix ;

Considérant qu'à défaut de préjudice démontré, le jugement, qui n'est pas autrement discuté sera confirmé en ce qu'il a débouté les consorts [E] de leur demande d'indemnisation ;

Sur le recours formé contre Me [D] [T], notaire

Considérant que les consorts [E] étant déboutés des demandes formées à l'encontre des époux [U], le recours en garantie formé par ces derniers à l'encontre de Me [T], notaire rédacteur de l'acte de vente, sera déclaré sans objet;

Sur les dépens et article 700 du Code de Procédure Civile

Considérant qu'au regard de la nature de l'affaire, chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance incluant les frais de référé et d'appel, les frais d'expertise étant partagés par moitié entre les consorts [E] et les époux [U] ;

Considérant que les demandes des parties fondées sur l'article 700 du Code de Procédure Civile seront rejetées ;

DECISION

LA COUR,

INFIRME le jugement en ce qu'il a condamné les époux [U] à payer aux consorts [E] la somme de 7 666,37 € correspondant au coût de réfection du carrelage de l'immeuble vendu, réévalué en fonction de la variation de l'indice INSEE du coût de la construction, ainsi qu'en ses dispositions relatives aux dépens et article 700 du Code de Procédure Civile,

STATUANT à nouveau et ajoutant,

DEBOUTE les consorts [E] de leur demande en indemnisation du coût de remplacement du carrelage de l'immeuble vendu,

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses dépens de première instance, incluant les frais de référé et d'appel, les frais d'expertise judiciaire étant partagés par moitié entre les consorts [E] et les époux [U],

DEBOUTE les parties de leurs demandes d'indemnité fondée sur l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONFIRME pour le surplus.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11/00840
Date de la décision : 05/06/2012

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°11/00840 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-06-05;11.00840 ?
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