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10/01/2012 | FRANCE | N°10/07901

France | France, Cour d'appel de Rennes, 6ème chambre b, 10 janvier 2012, 10/07901


6ème Chambre B

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 10 JANVIER 2012

ARRÊT No 70

R. G : 10/ 07901

Mme Chantal Elisabeth Marie X... épouse Y...

C/
M. Jean-Yves Y...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Daniel LE BRAZ, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Christine LEMAIRE, Conseiller,

GREFFIER :
Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

En chambre du Conse

il du 08 Novembre 2011 devant Monsieur Pierre FONTAINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants...

6ème Chambre B

COUR D'APPEL DE RENNES ARRÊT DU 10 JANVIER 2012

ARRÊT No 70

R. G : 10/ 07901

Mme Chantal Elisabeth Marie X... épouse Y...

C/
M. Jean-Yves Y...

Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Daniel LE BRAZ, Président, Monsieur Pierre FONTAINE, Conseiller, Mme Christine LEMAIRE, Conseiller,

GREFFIER :
Huguette NEVEU, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

En chambre du Conseil du 08 Novembre 2011 devant Monsieur Pierre FONTAINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :
Contradictoire, prononcé hors la présence du public le 10 Janvier 2012 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats.

****

APPELANTE :
Madame Chantal Elisabeth Marie X... épouse Y... née le 18 Novembre 1949 à CHANTEPIE ...92600 ASNIERES SUR SEINE

représentée par la SCP GAUTIER LHERMITTE, avoués assistée de la SCP GARNIER et Associés, avocats

INTIMÉ :
Monsieur Jean-Yves Y... né le 17 Mars 1950 à RENNES (35) ...44600 SAINT NAZAIRE

représenté par la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avoués assisté de la SELARLVILLATTE, MORVANT VILLATTE et DOUCET, avocats

EXPOSE DU LITIGE ET OBJET DU RECOURS.

Monsieur Y... et Mme X... se sont mariés le 29 juillet 1972 sans contrat préalable ;
Deux enfants devenus majeurs et indépendants financièrement sont issus de leur union,
Sur la requête en divorce de Mme X..., une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 27 octobre 2005 ;
Le 20 juillet 2007, M. Y... a assigné son épouse en divorce sur le fondement des articles 237 et 238 du Code Civil ;
Par conclusions ultérieures chacun des époux a sollicité le prononcé du divorce aux torts exclusifs de l'autre ;
Par décision du 21 octobre 2010, le Juge aux Affaires Familiales de Rennes a :
- prononcé le divorce aux torts exclusifs du mari,
- ordonné les formalités de publication à l'Etat-Civil conformément à la loi,
- ordonné le partage et la liquidation des intérêts respectifs des époux conformément à leur régime matrimonial,
- commis pour y procéder les notaires Maître B... en faveur du mari et Maître C... en faveur de l'épouse,
- condamné M. Y... à payer à Mme X... une somme de 10000 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil,
- débouté le mari de sa demande de dommages et intérêts,
- condamné M. Y... à payer à Mme X... un capital de 70000 € à titre de prestation compensatoire,
- rejeté sa réclamation au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamné le même à payer à Mme X... une indemnité de 3000 € sur le même fondement,
- débouté les parties du surplus de leurs prétentions,
- condamné M. Y... aux entiers dépens.
Mme X... a interjeté appel de ce jugement ;
Par conclusions du 27 septembre 2011, elle a demandé :
- à titre principal : de surseoir à statuer sur l'appel dans l'attente de la rédaction du projet d'état liquidatif par les notaires,
- de désigner Maître C... à ses côtés,
- à titre subsidiaire : d'infirmer la décision déférée sur la prestation compensatoire,
- de condamner M. Y... à lui payer un capital de 400000 € à ce titre,
- de confirmer pour le surplus,
- de condamner son mari à lui payer une indemnité de 5000 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Par conclusions du 12 octobre 2011, M. Y... a demandé :
- de constater l'irrecevabilité de la demande de sursis à statuer présentée par son épouse,
- de la rejeter,
- de rejeter toutes les réclamations de Mme X... au fond,
- d'infirmer la décision déférée,
- de prononcer le divorce aux torts exclusifs de son épouse,
- de la condamner au paiement de 50000 € de dommages et intérêts,
- d'ordonner la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des conjoints,
- de condamner Mme X... à lui payer une indemnité de 5000 € par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est référé aux dernières écritures des parties susvisées ;
La clôture de l'instruction a été prononcée le 27 octobre 2011 ;
SUR CE, I-Sur la procédure.

Il convient de constater le retrait des débats d'une part par Mme X... de ses conclusions d'incident du 27 octobre 2011, d'autre part par M. Y... des pièces No179 et 180 communiquées par lui le 27 octobre 2011, conformément aux conclusions de procédure de l'appelante du 3 novembre 2011, devenues ainsi sans objet ;
II-Sur le divorce.
Aux termes des dernières conclusions de l'appelante la demande de sursis à statuer est formée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir ; elle est donc recevable au sens de l'article 74 du Code de Procédure Civile ;
En revanche, elle est présentée pour la première fois en cause d'appel, sous le prétexte que les droits de chacun des époux dans le cadre de la liquidation partage du régime matrimonial ne peuvent être déterminés à l'heure actuelle avec certitude, alors qu'il en était de même en première instance, au regard du projet d'état liquidatif établi seulement par le notaire de Mme X..., susceptible de discussion ultérieure sur des récompenses dues par M. Y... ;
Par suite, la demande de sursis à statuer doit être déclarée irrecevable comme nouvelle, en application de l'article 564 du Code de Procédure Civile ;
L'épouse reproche à son mari d'avoir exercé à son égard des violences graves et réitérées durant la vie commune ;
Elle produit de nombreux certificats médicaux (une douzaine entre 1998 et 2005) faisant état, sur l'ensemble des constats effectués, de lésions corporelles multiples et variées : ecchymoses, hématomes parfois volumineux, contusions, tentative de strangulation, traumatisme par écrasement d'un pouce ;
M. Y... ne fournit sur l'origine de ces lésions aucune explication plausible autre que des violences de sa part, d'ailleurs en partie reconnues par lui (cf le certificat médical du 7 Octobre 2001 mentionnant ses déclarations au praticien) ;
Il tente en vain de justifier ses sévices par des provocations de la victime ou un besoin de se protéger lui-même ;
De son côté, il fait grief à Mme X... d'avoir été agressive envers lui, de l'avoir isolé de sa famille, et d'avoir eu des exigences financières inacceptables et exorbitantes ;
Les témoignages de M. A..., de M. D..., de M. E..., de M. F...ne permettent pas, à défaut de certificats médicaux, d'imputer à l'épouse les coups dont des traces ont été notées, sur le visage de l'intéressé, la relation de causalité entre les prétendues violences et des troubles anxio-dépressifs n'étant pas en outre établie ;
Il n'est pas démontré par ailleurs que Mme X... aurait coupé son mari de sa famille (l'attestation de Mme G...étant sur ce point trop vague) ou qu'elle aurait commis un faute contraire aux devoirs du mariage en défendant âprement ses intérêts (attestations de Mme H..., de M. I..., de M. J..., projet d'acte et courrier au notaire rédigés par l'épouse) ;
En revanche il résulte de la combinaison des témoignages de Mme G..., de M. I...et de Mme K...que l'épouse était agressive verbalement à l'égard de son époux, le premier de ces témoins indiquant qu'elle l'injuriait fréquemment, " le traitant de tous les noms " ;
Chacun des conjoints rapporte la preuve de faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage de nature à rendre intolérable le maintien de la vie commune ;
Par suite, il convient de prononcer le divorce, non pas aux torts exclusifs de l'époux mais aux torts partagés ;
Sur les conséquences, les dispositions déférées qui ne sont pas remises en cause seront confirmées ;
Concernant les dommages et intérêts, les nombreuses atteintes à son intégrité physique subies par l'épouse du fait de son conjoint, ont occasionné à celle-ci un important préjudice moral (attestation circonstanciée d'une psychologue en date du 9 mars 2010, bulletin d'hospitalisation) justifiant la condamnation de M. Y... à une indemnité de 10000 € en quoi le jugement sera confirmé ;
Le mari ne démontre pas qu'il a souffert d'un préjudice particulier causé par l'agressivité verbale de Mme X..., sa prétendue tyrannie, ou perversité, ou encore la mauvaise foi dont elle aurait fait montre dans la procédure de divorce (situation floue, obtention de la pension alimentaire par paiement direct injustifié) ;
Le jugement sera confirmé sur le rejet de sa demande de dommages et intérêts ;
Il résulte des articles 270 et suivants du Code Civil que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; que cette prestation, qui prend en principe la forme d'un capital, est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible, d'après les critères énumérés à l'article 271 ;
Les parties ont régulièrement produit une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie, en application des articles 272 du Code Civil et 1075-1 du Code de Procédure Civile ;
Il est établi que Mme X... âgée de 62 ans, a travaillé durant la vie commune quelque temps dans une crêperie, et comme employée de maison, qu'elle a repris temporairement une activité de ce type après la séparation du couple, que la restriction de sa carrière au profit de l'éducation des enfants et de son foyer est censée procéder d'un choix partagé par les conjoints ;
Son état de santé n'est pas compatible avec la poursuite d'une activité professionnelle (cf un certificat médical du 1er septembre 2007) son âge y constituant du reste un obstacle ;
Selon une évaluation, le montant brut mensuel de sa retraite sera très faible (143 € le 1er août 2010, 255 € le 1er décembre 2014) ;
Elle habite dans un appartement loué par une SCP moyennant 500 € par mois (cf un contrat de location et un courrier de la gérante) ;
Il est prétendu qu'elle pourrait avoir des intérêts dans cette SCI, ce qui en l'état, n'est pas avéré ;
M. Y..., âgé de 60 ans, bénéficie d'une retraite d'un montant mensuel net imposable de 3170 € et en dehors des charges habituelles de la vie courante, auxquelles son épouse est aussi confrontée, il supporte un loyer de 399 € et le remboursement d'un prêt à hauteur de 445 € par mois (cf les justificatifs produits) ;
Il connaît des problèmes de santé sans répercussion financière caractérisée ;
Au plan patrimonial, les époux sont propriétaires de plusieurs studios situés à Rennes et d'une maison à Montfort sur Meu, vendue en 2005 pour le prix de 247000 €, mis sous séquestre, compte tenu du désaccord des conjoints ;
Il ressort des pièces versées aux débats que concernant ses biens propres le mari a vendu en 2004 une partie de ceux-ci pour 190500 €, et en 2008 un terrain pour 32637 € ainsi qu'une maison à Vezin le Coquet (ex-domicile familial) pour 277000 € ; que d'après une aperçu d'état liquidatif de Maître C..., l'actif net à partager s'élève à 835669 € dont 271163 € revenant à M. Y..., déduction faite de récompenses, sachant que la masse active inclut un excédent de recettes de 24863 €, au titre de la gestion par Mme X... des studios donnés en location ;
Le mariage a duré trente neuf ans ; le couple a élevé deux enfants devenus indépendants financièrement ;
Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la rupture de l'union crée au détriment de la femme une disparité dans les conditions de vie respectives devant être compensée par une prestation sous la forme d'un capital dont le montant doit être fixé à 100000 € et non pas à 70000 € ;
Le jugement sera infirmé sur ce point ;
Sur les dépens de première instance, chacune des parties supportera ceux qu'elle a exposés au lieu d'une condamnation du mari à leur totalité, étant donné la nature de l'affaire ;
Il en sera de même pour les dépens d'appel ;
Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du Code de Procédure Civile à quelque stade du procès que ce soit ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après rapport à l'audience ;
CONSTATE le retrait des débats d'une part par Mme X... de ses conclusions d'incident du 27 octobre 2011, et, d'autre part, par M. Y... des pièces No 179 et 180 communiquées par lui le 27 octobre 2011 ;
DIT que les conclusions de procédure de l'appelante du 3 novembre 2011 sont devenues ainsi sans objet ;
DIT irrecevable la demande de sursis à statuer formée par Mme X... pour la première fois en cause d'appel ;
CONFIRME le jugement du 21 octobre 2010, sauf en ce qui concerne l'attribution des torts, le montant de la prestation compensatoire, les dépens et les frais irrépétibles ;
INFIRME de ces chefs ;
STATUANT à nouveau ;
DIT que les torts des époux, comme cause du divorce, sont partagés ;
FIXE à 100000 € le montant du capital dû par le mari à son épouse à titre de prestation compensatoire ;
DIT que chacune des parties supportera ses propres dépens de première instance, plus ceux d'appel, sans application de l'article 700 du Code de Procédure Civile au profit de l'une d'elles à quelque stade du procès que ce soit.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 6ème chambre b
Numéro d'arrêt : 10/07901
Date de la décision : 10/01/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2012-01-10;10.07901 ?
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