Chambre Sécurité Sociale
ARRET N°
R.G : 08/07745
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES
C/
Société NETASQ
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 02 JUIN 2010
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Dominique MATHIEU, Conseiller,
Madame Marie-Hélène MOY, Conseiller,
Monsieur Patrice LABEY, Conseiller,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats, et Madame Danielle WACK, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l'audience publique du 07 Avril 2010
devant Monsieur Dominique MATHIEU, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 02 Juin 2010 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats, signé par Monsieur Dominique MATHIEU , Conseiller;
DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:
Date de la décision attaquée : 10 Octobre 2008
Décision attaquée : Jugement
Juridiction : Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de RENNES
****
APPELANTE :
UNION POUR LE RECOUVREMENT DES COTISATIONS DE SECURITE SOCIALE ET D'ALLOCATIONS FAMILIALES D'ILLE ET VILAINE, représentée par Monsieur [R] [K], Directeur,
D'ILLE ET VILAINE
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Mme [L] [C] (Représentant légal) en vertu d'un pouvoir spécial
INTIMÉE :
Société NETASQ, venant aux droits et obligations de la Société INTRANODE,
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Camille BUANNIC, avocat au barreau de RENNES
FAITS ET PROCEDURE DE PREMIERE INTANCE
Le 28 novembre 2004 la société INTRANODE, aux droits de laquelle vient la société NESTACQ, déposait auprès des services fiscaux une demande aux fins de se voir accorder le statut de jeune entreprise innovante au sens de l'article 44 sexies 0A du code général des impôts.
Par courrier daté du 31 mai 2005 les services fiscaux faisaient savoir à la société INTRANODE le refus du bénéfice de ce statut.
Le 9 juin 2005 l'URSSAF d'Ille et Vilaine adressait à la société INTRANODE un courrier l'invitant, suite à la réponse négative des services fiscaux, à acquitter un solde débiteur de 160 909 € et l'invitant à formuler par écrit ses observations le cas échéant.
Le 16 décembre 2005 l'URSSAF d'Ille et Vilaine notifiait à la société INTRANODE une mise en demeure pour un montant total en principal de cotisations et majorations de retard de
111 484 € relatives à l'année 2004 et aux mois de janvier à avril 2005.
Par courrier en date du 12 janvier 2006 l'URSSAF d'Ille et Vilaine adressait à la société INTRANODE un dernier avis avant assignation en redressement judiciaire d'avoir à acquitter la somme de 126 712 €.
Le 10 octobre 2008 le tribunal des affaires de sécurité sociale d'ILLE ET VILAINE, saisi par la société NESTACQ, venant aux droits de la société INTRANODE, d'un recours contre la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF d'Ille et Vilaine du 20 juin 2006 ayant maintenu le redressement du chef des cotisations dues suite au rejet du statut d'entreprise innovante, statuait ainsi qu'il suit:
"annule la mise en demeure du 16 décembre 2005 et la procédure subséquente".
PROCEDURE D'APPEL
Le 31 octobre 2008, dans le délai d'appel, l'URSSAF d'Ille et Vilaine, par lettre recommandée avec avis de réception adressée au greffe de la cour d'appel, déclarait relever appel de la décision susvisée.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
L'URSSAF d'Ille et Vilaine demande à la cour de réformer le jugement dont appel, de confirmer la validité de la mise en demeure et la décision prise par la commission de recours amiable de l'URSSAF d'Ille et Vilaine du 20 juin 2006 et de condamner la société NESTACQ au paiement de la somme de 111 184 € sans préjudice des majorations de retard complémentaires et de la débouter de toutes ses demandes fins et prétentions.
Au soutient de son appel l'URSSAF d'Ille et Vilaine fait valoir les moyens suivants:
- l'article R 243-43-3 du code de la sécurité sociale dissocie légalement la procédure de vérification des déclarations de celle du contrôle par les inspecteurs du recouvrement et l'article R 243-59 renvoie expressément à l'article L 243-7 lequel vise les contrôles effectués par les inspecteurs de recouvrement; il en résulte que les dispositions de l'article R 243-59 doivent être écartées dans tous les cas où l'URSSAF est conduit à vérifier la fiabilité des données figurant sur les documents fournis par un cotisant ou par une autre administration, en exécution de ses obligations déclaratives;- la cour de cassation a jugé que lorsqu'un redressement procédait de l'examen par l'URSSAF des seules déclarations qui lui avaient été adressées par l'employeur il n'y avait pas lieu à application des dispositions de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale;
- en l'espèce la société INTRANODE ayant appliqué à titre provisionnel l'exonération totale des cotisations au titre du statut de jeune entreprise innovante, elle avait l'obligation de reverser les cotisations indûment exonérées suite à l'avis défavorable rendu par l'administration fiscale; le courrier du 9 juin 2005 informait l'employeur de la régularisation à intervenir et l'invitait à faire valoir ses observations, la mise en demeure ayant été délivrée en l'absence de versement et d'observations;
- la prise en considération des renseignements communiqués par l'administration fiscale ne constituait pas un contrôle relevant des dispositions de article R 243-59 mais une simple vérification par rapprochement d'informations et de plus la procédure contradictoire a été respectée par l'envoi du courrier du 9 juin 2005;
- la société NESTACQ ne saurait demander l'application rétroactive de la loi de finance rectificative de 2005 qui validé le fait que la détention continue de 50% du capital social pouvait être le fait d'une société qualifiée elle-même de jeune entreprise innovante ce qui était le cas à l'époque de la société INTRANODE dont 72,58 % du capital était détenu par la société NESTACQ elle-même bénéficiaire du statut de jeune entreprise innovante.
La société NESTACQ demande à la cour de confirmer la décision dont appel et à titre subsidiaire d'annuler sur le fond le redressement dans la mesure où la société pouvait revendiquer le statut de jeune entreprise innovante.
Au soutient de ses demandes la société NESTACQ fait valoir les moyens suivants:
- selon une jurisprudence constante , la prise en compte de renseignements communiqués par une autre administration en vue d'un redressement constitue un contrôle au sens des articles L243-7 et R 243-59 du code de la sécurité sociale et ce quelque soit la situation;
- il ne s'est pas agi pour l'URSSAF de procéder à un contrôle de vérification des déclarations de l'employeur mais d'un redressement qui est intervenu suite à la communication de renseignements par l'administration fiscale à l'insu de la société;
- l'URSSAF aurait donc dû respecter les dispositions relatives au contrôle telles que prévues à l'article R 243-59 ce qui n'a pas été le cas en l'espèce notamment en ce que la société n'a pas été informée qu'elle disposait d'un délai d'un mois pour répondre à la lettre du 9 juin 2005;
- la position adoptée par les services fiscaux d'Ille et Vilaine à savoir le refus de faire bénéficier la société INTRANODE du bénéfice du statut de jeune entreprise innovante au motif que son capital n'était pas détenu pour au moins 50% par des personnes physiques était trop littérale et ne correspondait pas à l'objectif de l'article 44 sexties 0A du code général des impôts ce qu'a confirmé l'article 107 de la loi de finances rectificative pour 2005 qui est venu préciser que les 50% pouvaient être détenus aussi par une société qualifiée elle-même de jeune entreprise innovante ce qui était le cas de la société NESTACQ; la position des services fiscaux contraire à l'esprit du texte, se trouve donc condamnée et par conséquent le redressement URSSAF s'en trouve à posteriori non fondé.
Pour un exposé plus complet de la procédure, des moyens et prétentions de parties, la Cour se réfère au jugement déféré et aux conclusions régulièrement communiquées à l'adversaire qui ont été déposées puis développées à l'audience des plaidoiries du 7 avril 2010 et versées dans les pièces de la procédure à l'issue des débats.
MOTIFS DE LA DECISION
La prise en considération de renseignements communiqués par une autre administration en vue d'un redressement constitue un contrôle au sens des articles L 243-7 et R 243-59 du code de la sécurité sociale.
En application des dispositions de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable à l'espèce, les fonctionnaires et agents de l'URSSAF doivent communiquer, le cas échéant, leurs observations à l'employeur en l'invitant à y répondre dans un délai de trente jours, à l'expiration duquel ils transmettent leur rapport accompagné de la réponse éventuelle de l'employeur, cette communication étant destinée à assurer le caractère contradictoire du contrôle ainsi que la sauvegarde des droits de la défense et constitue une formalité substantielle dont dépend la validité de la procédure subséquente.
En l'espèce il n'est pas contesté que l'URSSAF d'Ille et Vilaine a adressé à la société INTRANODE, aux droits de laquelle vient la société NESTACQ , suite à la communication à elle faite par les services fiscaux de ce que cette société ne pouvait prétendre au statut de jeune entreprise innovante au sens de l'article 44 sexies 0A du code général des impôts, un courrier en date du 9 juin 2005 lui notifiant un solde débiteur de cotisations d'un montant de 160 909 €.
Cet avis constituait un redressement suite à contrôle et non un simple redressement consécutif à un examen des seuls documents adressés par l'employeur dans la mesure où c'est à la suite de la communication des services fiscaux sur le refus du bénéfice du statut de jeune entreprise innovante que l'URSSAF d'Ille et Vilaine a fait connaître à la société INTRANODE le montant des cotisations qu'elle devait acquitter puisque le refus de ce statut ne l'autorisait pas à pratiquer l'exonération de cotisation auquel elle avait procédé.
Le courrier du 9 juin 2005 qui ne mentionne pas expressément le détail de la demande en paiement de la somme de 160 909 €, n'explicite pas clairement le contenu de la notification des services fiscaux et le motif du redressement et ne mentionne pas que l'entreprise a un délai de trente jours pour y répondre et faire part de ses observations ne répond pas aux exigences de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale.
Il en résulte que la procédure subséquente et notamment la mise en demeure du 16 décembre 2005 est nulle.
l'URSSAF d'Ille et Vilaine ne saurait invoquer utilement les dispositions de l'article R 243-43-3 du code de la sécurité sociale puisque celles-ci résultent du décret du 11 avril 2007 inapplicable à l'espèce.
Le jugement déféré sera donc confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, contradictoirement:
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 octobre 2008 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'ILLE ET VILAINE;
LE GREFFIER LE PRESIDENT