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07/04/2008 | FRANCE | N°493

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0011, 07 avril 2008, 493


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Monsieur Gérard X... et Madame Martine Y... se sont mariés le 3 décembre 1996 après signature d'un contrat de mariage emportant régime de séparation de biens.
Aucun enfant n'est issu de cette union.
Sur assignation délivrée le 2 août 2004 par le mari et par jugement du 25 janvier 2007, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de Lorient a :
- prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'épouse sur le fondement de l'article 242 du Code Civil,
- débouté celle-ci de sa demande reconventionnelle,
- rejeté les demandes de dommages et intér

êts présentées par Monsieur X... sur le double fondement des articles 266 et 138...

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Monsieur Gérard X... et Madame Martine Y... se sont mariés le 3 décembre 1996 après signature d'un contrat de mariage emportant régime de séparation de biens.
Aucun enfant n'est issu de cette union.
Sur assignation délivrée le 2 août 2004 par le mari et par jugement du 25 janvier 2007, le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de Lorient a :
- prononcé le divorce aux torts exclusifs de l'épouse sur le fondement de l'article 242 du Code Civil,
- débouté celle-ci de sa demande reconventionnelle,
- rejeté les demandes de dommages et intérêts présentées par Monsieur X... sur le double fondement des articles 266 et 1382 du Code Civil,
débouté Madame X... de sa demande de prestation compensatoire par application de l'article 280-1 du Code Civil,
condamné Madame X... à payer à son époux une indemnité de 1. 200 € en vertu de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Madame X... a interjeté appel de ce jugement le 2 mars 2007.
Selon calendrier de procédure établi par le Conseiller de la Mise en Etat le 5 juillet 2007, les parties avaient été avisées à cette date de la date de l'ordonnance de clôture (13 décembre 2007) et de la date d'audience (31 janvier 2008), injonction de conclure était par ailleurs donnée à l'intimé pour le 25 octobre 2007, l'appelante ayant elle-même conclu le 3 juillet 2007.
Monsieur X... n'a conclu que le 13 novembre 2007 après avoir obtenu un report de délai et son épouse a répliqué par conclusions du 11 décembre 2007 tout en délivrant à son adversaire une sommation de communiquer.
L'ordonnance de clôture a fait le 12 décembre 2007 l'objet d'un report au 10 puis au 24 janvier 2008, date à laquelle Monsieur X... a répondu aux écritures de son épouse.
Partie des pièces visées dans la sommation du 12 décembre 2007 n'a été communiquée que le 24 janvier 2008, soit le jour de l'ordonnance de clôture.
Après avoir sollicité du Conseiller de la Mise en Etat un report de l'ordonnance de clôture qui lui a été refusé, Madame X... a déposé des conclusions de procédure le 31 janvier 2008 pour demander le rejet des conclusions déposées et des pièces communiquées le jour de l'ordonnance de clôture.
Monsieur X... s'y est opposé.
Madame X... a encore déposé le 31 janvier 2008 de nouvelles écritures par lesquelles elle reprend sa demande de rejet et sollicite en tant que de besoin le rabat de l'ordonnance de clôture et l'établissement d'un nouveau calendrier de procédure.
L'incident a été joint au fond.
Madame X... conclut à l'infirmation de la décision et demande le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son époux et le rejet de la demande présentée contre elle.
Elle sollicite l'allocation d'une somme de 10. 000 € à titre de dommages et intérêts et celle de 50. 000 € à titre de prestation compensatoire.
Madame X... demande enfin le bénéfice de l'article 700 du Code de Procédure Civile (3. 000 €) et la condamnation de son conjoint aux entiers dépens.
Monsieur X... conclut à la confirmation du jugement en ce que le divorce a été prononcé aux torts de son épouse avec toutes conséquences de droit, notamment au regard de la prestation compensatoire.
Il reprend devant la Cour ses demandes de dommages et intérêts et sollicite 10. 000 € sur le fondement de l'article 266 et la même somme sur celui de l'article 1382 du Code Civil.
Monsieur X... demande le bénéfice de l'article 700 du Code de Procédure Civile et sollicite l'allocation d'une somme de 3. 000 € ; il demande enfin la condamnation de son conjoint aux entiers dépens.
MOTIFS DE LA DECISION :
La présente procédure obéit aux articles 242 et suivants du Code Civil dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 mai 2004, l'assignation en divorce ayant été délivrée le 2 août 2004.

1o)- Sur l'incident de procédure :
Madame X... a communiqué le 3 juillet 2007 les 57 pièces estimées utiles au soutien de sa demande et son époux a lui-même communiqué le 6 septembre 2007 141 pièces.
Après délivrance d'une sommation le 7 août 2007 et injonction faite par le Conseiller de la Mise en Etat le 18 septembre 2007, Madame X... devait communiquer avant le 9 octobre 2007 :
- les déclarations des revenus du couple depuis le mariage,
- les souches des carnets de chèque professionnels,
- l'attestation d'assurance pour un véhicule Peugeot et tous documents justifiant du sort de ce véhicule.
La communication de ces pièces, si elle a été faite, n'a pas donné lieu à l'établissement d'un bordereau.
Monsieur X... a obtenu du Conseiller de la Mise en Etat un délai expirant au 12 novembre 2007 pour conclure au motif qu'il n'avait pas obtenu de son épouse la restitution de ses pièces communiquées en original et il a produit le 9 novembre 2007 107 pièces complémentaires qui ne lui ont été restituées que le 8 janvier 2008.
Sommation a été délivrée par l'épouse le 12 décembre 2007 portant sur d'autres pièces et il y a partiellement été répondu par Monsieur X... mais seulement le 24 janvier 2008, soit le lendemain de l'ordonnance de clôture : ont été communiquées ce jour 32 nouvelles pièces.
Cette sommation portait pour partie sur des pièces nécessairement connues de l'épouse, puisqu'il en avait été fait état en première instance.
Il appartient sans doute aux parties de se faire connaître mutuellement en temps utile (...) les éléments de preuve qu'elles produisent (...) afin que chacune soit à même d'organiser sa défense mais force est de constater que la procédure a été engagée en août 2004 et que Madame X..., qui réclame depuis l'origine le règlement d'une prestation compensatoire, avait au cas de réticence de son conjoint toute possibilité de demander en temps et heure les pièces, comptables ou autres, qu'elle jugeait utiles.
En l'état des pièces de la procédure, il apparaît que Monsieur X... a systématiquement tenté de respecter les diverses demandes et injonctions qui lui ont été délivrées et la tardiveté des réclam4tions de l'épouse est la seule cause des retards apportés aux réponses.

Ceci étant les pièces communiquées par Monsieur X... le lendemain de la clôture de la procédure, même si elles répondent à une sommation tardive, seront écartées des débats en application de l'article 783 du Code de Procédure Civile ; par contre ses conclusions déposés le 23 janvier 2008 seront déclarées recevables et admises aux débats.
2o)- Sur le divorce :
En première instance, Madame X... reprochait à son époux son attitude injurieuse tant durant la vie commune que durant la procédure, elle invoquait également son abandon du domicile conjugal avant d'y avoir été judiciairement autorisé.
Elle ne reprend pas ces griefs devant la Cour, invoquant d'autres faits :
le remboursement par son conjoint et à partir de leur compte joint de dettes antérieures au mariage dont elle dit avoir ignoré l'existence,
la gestion de deux commerces sans lui en référer en faisant même interdiction au comptable de lui fournir le moindre renseignement,
l'ignorance dans laquelle il l'a laissée des suites de la vente d'un des fonds,
- l'absence de partage des bénéfices commerciaux.
Elle lui reproche aussi :
de l'avoir fait travailler d'abord sans être déclarée puis ensuite de ne l'avoir fait que pour un nombre d'heures très limité,
de ne pas lui avoir réglé les salaires des mois de novembre et décembre 2003, alors même que des bulletins de salaire avaient été établis,
- d'avoir ouvert un autre compte bancaire sur lequel il transférait des fonds,
de lui avoir fait résilier une mutuelle pour qu'elle figure sur une autre avant de l'en exclure très rapidement,
d'avoir vendu un véhicule de l'entreprise et d'avoir encaissé le prix sur un compte personnel, le solde encore dû étant réglé par les fonds provenant de la vente d'un des fonds de commerce.
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Elle n'a dans ses écritures formulé aucune critique contre le jugement en ce qu'il avait fait droit à la demande de Monsieur X... lequel n'a pas davantage repris devant la Cour les griefs qu'il invoquait contre son conjoint, s'opposant seulement à l'argumentation développée contre lui.
En l'absence de critique contre les motifs retenus par le premier Juge pour faire droit à la demande principale de Monsieur X..., le jugement ne peut qu'être confirmé de ce chef.
Il y a lieu seulement de rappeler qu'a été retenu contre Madame X... le fait qu'elle n'avait pas fait preuve, tant dans sa vie professionnelle que dans la vie privée du couple, d'un souci de gestion saine des finances ; que les dépenses engagées par elle, sans être somptuaires, ne pouvaient qu'obérer la situation pécuniaire du couple, alors même que son époux réglait les crédits, les factures et le loyer, le crédit de sa voiture, le coût des assurances et assurait enfin un versement de 1. 220 € pour les dépenses du ménage.
Seul donc doit être apprécié le bien fondé de la demande reconventionnelle. Histoire du couple selon Monsieur X... :
Marié avec une dame D. et ayant deux enfants, il rencontre Madame Y... avec laquelle il a eu une liaison à partir de 1992 : ils travaillaient l'un et l'autre au sein du groupe LE DUFF, lui ayant la qualité de directeur du « fournil de Pierre ».
Antérieurement, il était salarié d'une SARL dite SARL AUX DELICES pour laquelle il s'était porté caution (avec sa première épouse) d'un prêt souscrit auprès du CIC et d'un montant de 72. 955, 59 €.
Après la mise en liquidation de cette société il est recherché en sa qualité de caution et pour se libérer de sa dette il souscrit (toujours avec sa première épouse) un emprunt dont le terme était fixé en 2011, les échéances étant prélevées sur le compte joint ouvert à son nom et à celui de Madame Y... devenue épouse X....
Il est licencié de sa fonction de directeur général du « fournil de Pierre » le 30 septembre 1995 et recherche alors un fonds en province, puisque antérieurement dans la région parisienne.
Son épouse actuelle démissionne elle-même de son emploi et ce n'est qu'en mars 1996 que le couple fait l'acquisition à Nantes, mais sous son seul nom à lui, d'une boulangerie comportant deux boutiques, son épouse percevant un salaire de 5. 000 francs pour la gestion de la comptabilité et une somme complémentaire de 8. 000 francs pour faire face aux dépenses du ménage.

Après licenciement de la salariée du second magasin, Madame X... y est employée comme vendeuse.
En 1999, le fonds est vendu au motif qu'elle ne se faisait pas à la vie nantaise et un autre fonds est acheté à Lorient : « Miss Tartine ».
Les dépenses de son épouse sont pourtant inconsidérées et ruinent le ménage : le fonds est vendu en février 2004 : le prix en était encore séquestré à la date du jugement entrepris.
Histoire du couple selon Madame X... :
Elle rencontre Monsieur X... en 1992 alors qu'il est directeur du « fournil de Pierre », elle-même-divorcée et mère d'un enfant vivant avec son père-étant directrice d'un autre établissement du même style.
Il s'installe chez elle le 3 décembre 2004 « avec une valise » et sans en connaître les motifs, elle prend note de son licenciement intervenu en septembre 2005.
Elle démissionne à la même date « sous le coup de la colère de ce licenciement » et pour aider son conjoint dans sa prospection d'un fonds de commerce en province : ils acquièrent en indivision le 20 mars 1996 une boulangerie comportant deux magasins, seul son époux apparaissant cependant comme exploitant.
Ils se marient en décembre 1996.
Ils partagent la dureté du labeur mais elle n'est pas payée et n'est pas associée aux bénéfices, elle n'a jamais connaissance des bilans et n'a jamais signé les déclarations de revenus.
Elle obtient un contrat de travail en avril 1997 mais si des bulletins de salaire sont établis, elle ne perçoit aucune rémunération.
Le fonds est vendu parce que son mari ne se plaît pas à Nantes et un nouveau fonds est acquis à Lorient en septembre 1999, l'ouverture en sera retardée pour cause de travaux jusqu'en décembre 1999 ce qui n'empêche pas son conjoint de régler durant cette période les salaires de la vendeuse qu'il avait recrutée.
Elle-même n'a de nouveau été déclarée qu'à compter du mois de septembre 2000 mais pour des horaires largement inférieurs à ceux effectivement faits.
Elle n'a pas davantage été associée à la gestion de ce fonds.

Elle n'aurait appris la durée de l'engagement de son époux en qualité de caution qu'au tout début de l'année 2003, par un coup de téléphone de leur banque l'avisant d'une insuffisance de provision, alors même qu'il lui avait assuré qu'il en serait quitte au début de cette même année 2003.
Les conséquences en ont été une dépression nerveuse l'ayant obligée à s'arrêter : elle n'a alors pas été informée de la mise en vente (fui 2003) du fonds, vente réalisée en février 2004, et sa signature auprès d'un organisme bancaire aurait été imitée.
Il est établi par l'ensemble des attestations qu'elle a versé aux débats que Madame X... était présente dans l'une puis l'autre boulangerie durant la journée et qu'elle participait ainsi à l'exploitation de ces deux fonds de commerce ; il est tout aussi établi que son contrat de travail ne correspondait pas exactement aux horaires journaliers qu'elle assurait mais rien ne permet d'affirmer que cette situation ne découlait pas d'un choix commun du couple.
Il est également sans doute vraisemblable, quoique non formellement établi en dehors de l'année 1999, que les salaires de Madame X... ne lui pas tous été réglés mais encore une fois, s'agissant d'un fonds de commerce commun et d'une exploitation commune, il n'est pas prouvé que l'absence de rémunération n'ait pas également répondu à un choix du couple.
Les autres griefs, qui touchent davantage aux conditions de la liquidation du patrimoine commercial commun, ne sont pas prouvés.
En conséquence de ce qui précède et au vu des seules pièces communiquées par Madame X..., force est de relever qu'elle ne fait pas preuve à l'encontre de son conjoint de faits qui constitueraient une violation grave et / ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage.
Dès lors le jugement doit être confirmé en ce que Madame X... a été déboutée de sa demande reconventionnelle.
3o)- Sur les conséquences du divorce : a)- Sur les dommages et intérêts :
Monsieur X... n'établit pas la réalité d'un préjudice moral ou matériel directement lié au prononcé du divorce et sa demande de dommages et intérêts entant qu'elle est fondée sur l'article 266 du Code Civil sera rejetée.
Les manquements de Madame X... durant la vie commune sont par contre pour lui source d'un préjudice incontestable qu'il convient de réparer par l'allocation de la somme de 2. 500 € : en effet la situation financière désastreuse du couple est liée pour une très grande part à l'inconséquence de la femme
b)- Sur la prestation compensatoire :
Perdant sur sa demande reconventionnelle, Madame X... doit, en application de l'article 280-1 du Code Civil, être déboutée de sa demande de prestation compensatoire.
40)- Sur les autres demandes :
Le caractère familial du présent litige conduit à écarter l'application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Perdant sur l'ensemble de ses prétentions, Madame Y... sera condamnée aux entiers dépens de la procédure lesquels seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
DECISION :
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant après rapport à l'audience,
Ecarte des débats les pièces communiquées par Monsieur X... le jour de l'ordonnance de clôture,
Déclare recevables les conclusions déposées par Monsieur X... le même jour,
Condamne, sur le fondement de l'article 1382 du Code Civil, Madame Y... à payer à Monsieur X... 2. 500 € à titre de dommages et intérêts,
Réforme dans cette seule limite le jugement rendu le 25 janvier 2007 par le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de Lorient,
Confirme ledit jugement en toutes ses autres dispositions,
Dit cependant n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
Condamne Madame Y... aux entiers dépens,
Dit qu'ils seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0011
Numéro d'arrêt : 493
Date de la décision : 07/04/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Lorient, 27 janvier 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2008-04-07;493 ?
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