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26/06/2007 | FRANCE | N°278

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0007, 26 juin 2007, 278


FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur Alfred X... et son épouse, Madame Raymonde Y..., sont propriétaires d'une maison avec cour et jardin, le tout cadastré commune de Hirel, lieu-dit "la Quesmière", section E nº 132 et 150.La parcelle 150 provient de la division d'un immeuble plus grand anciennement cadastré section E nº 127.

Monsieur Gérard Z... est propriétaire du fonds voisin cadastré section E nº 128, 129 et 131.

Madame Louise A... épouse Z... est propriétaire de la parcelle E nº 151 provenant de la division du fonds anciennement cadastré E nº 127.

Les p

arties ont un auteur commun puisque leurs fonds appartenaient aux époux B.../C... et ont...

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur Alfred X... et son épouse, Madame Raymonde Y..., sont propriétaires d'une maison avec cour et jardin, le tout cadastré commune de Hirel, lieu-dit "la Quesmière", section E nº 132 et 150.La parcelle 150 provient de la division d'un immeuble plus grand anciennement cadastré section E nº 127.

Monsieur Gérard Z... est propriétaire du fonds voisin cadastré section E nº 128, 129 et 131.

Madame Louise A... épouse Z... est propriétaire de la parcelle E nº 151 provenant de la division du fonds anciennement cadastré E nº 127.

Les parties ont un auteur commun puisque leurs fonds appartenaient aux époux B.../C... et ont fait l'objet d'une donation-partage le 29 août 1966.

Il étaitprévu à l'acte de donation-partage: "Les biens cadastrés n '128,129 et 131 de la section E auront droit de passage par les cours Nord et Sud du Seme lot cadastré n º127. Les biens cadastrés n º127-132 section E du Seme lot auront droit de passage par la cour Nord du 4ème lot cadastré n 'l 28 section E''.

Exposant qu'à la fin de l'année 2003 Monsieur Z... et sa mère, Madame Louise A... épouse Z..., avaient mis en place dans leurs cours respectivement cadastrées section E nº 128 et E 151 une chaîne fixe et des poteaux métalliques qui faisaient obstacle à leur droit de passage, par acte du 22 novembre 2004 les époux X... engagèrent une action possessoire à l'effet de voir condamner leurs voisins à ôter ces ouvrages dans un délai de huitaine, sous peine d'astreinte.

Par jugement du 5 juillet 20051e Tribunal d'instance de Saint Malo :

donna acte aux consorts Z... de ce qu'ils s'engageaient à reculer la chaîne et les poteaux métalliques de façon à permettre qu'en tous points du passage celui-ci ait une largeur de 3 mètres,

débouta les époux X... de toutes leurs demandes,

débouta les consorts Z... de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

condamna les époux X... aux dépens et au paiement d'une somme de 500 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Les époux X... formèrent appel de ce jugement.

POSITION DES PARTIES

* LES ÉPOUX X...

Dans leurs dernières conclusions en date du 14 mai 2007 les époux X... demandent à la Cour:

de réformer le jugement,

de dire et juger que les époux X... bénéficient pour le desservice de leur propriété d'une servitude de passage grevant les parcelles cadastrées section E nº 128 et 151 appartenant aux consorts Z...,

de dire et juger qu'en raison de la situation des lieux l'assiette de la servitude a une largeur de 6 mètres sur toute la longueur de son circuit,

subsidiairement, de dire et juger que l'assiette de cette servitude est de 3 mètres de large et de 6 mètres de large dans les détours,

en tout état de cause de faire injonction aux consorts Z... de procéder à l'enlèvement des chaînes et poteaux implantés dans la cour Nord de leurs propriétés respectives cadastrées section E nº 128 et 151 qui entravent l'usage normal de la servitude, et ce, sous astreinte de 400 € par jour de retard pendant trois mois,

de débouter les consorts Z... de toutes leurs demandes,

de les condamner in solidum aux dépens et au paiement d'une somme de 2000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

* LES CONSORTS Z...

Dans leurs dernières écritures en date du 27 avril 2007 les consorts Z... demandent à la Cour:

de débouter les époux X... de toutes leurs demandes et confirmer le jugement,

y additant, de condamner les époux X... à participer pour moitié à l'entretien de la cour sur laquelle s'exerce la servitude de passage et, en conséquence, de les condamner à leur rembourser la somme de 75,28 € correspondant à la moitié d'une facture Gedimat en date du 16 janvier 2004 relative à des travaux de remise en état de la cour,

à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une expertise,

de condamner les époux X... aux dépens de première instance et d'appel et au paiement d'une somme de 2000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

* SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE

Aux termes de l'article 1265 du nouveau code de procédure civile la protection possessoire et le fond du droit ne sont jamais cumulés. Le juge peut toutefois examiner les titres à l'effet de vérifier si les conditions de la protection possessoire sont réunies.

En application de ce texte emportant interdiction au juge du possessoire de se prononcer sur le fond les consorts Z... seront déclarés irrecevables en leur demande tendant à voir fixer à une largeur de 6 mètres, et à défaut à une largeur de 3 mètres l'assiette de leur servitude de passage. En effet, dès lors qu'en vertu des titres la servitude s'exerce sur les cours Nord, sans autre précision, la demande tendant à voir fixer précisément l'assiette de cette servitude relève de la seule compétence du juge du pétitoire.

En revanche les servitudes discontinues ou non apparentes bénéficient d'une protection possessoire dès lors que la possession est corroborée par un titre.

Or le titre commun aux parties, à savoir la donation-partage consentie le 29 août 1966 par les époux C.../B... à leurs enfants et emportant division de leur fonds instituait une servitude de passage au profit de la parcelle 132 et 127, devenue 150 et 151, sur la cour Nord du fonds cadastrée 128.

Le titre des époux X... et celui de Monsieur Z... rappellent l'existence de cette servitude.

En outre le fonds des époux X... est enclavé. De ce fait l'état d'enclave constitue un titre légal leur permettant d'exercer une action possessoire tant contre Monsieur Z... que contre Madame A... épouse Z....

En conséquence, en l'état à la fois de la servitude conventionnelle et de l'état d'enclave, les conditions de la protection possessoire sont réunies et les époux X... seront déclarés recevables en leur action possessoire.

* SUR LE BIEN FONDÉ DE L'ACTION POSSESSOIRE

Aux termes de l'article 1264 du nouveau code de procédure civile les actions possessoires sont ouvertes dans l'année du trouble à ceux qui, paisiblement, possèdent ou détiennent depuis au moins un an.

L'article 2282 du code civil dispose : la possession est protégée, sans avoir égard au fond du droit, contre le trouble qui l'affecte ou la menace.

- sur les délais

Il est acquis aux débats et il n'est pas contesté que les époux X... exerçaient un droit de passage sur la cour située au Nord de la propriété de leurs voisins depuis l'acquisition de leurs fonds intervenue le 5 août 1980, soit depuis plus d'une année avant l'introduction de l'instance.

Il n'est pas davantage discuté que le trouble allégué date du mois de décembre 2003 et que l'action fut introduite par un acte du 22 novembre 2004, soit dans l'année du trouble allégué.

- sur le trouble

Constitue un trouble ouvrant droit à la protection possessoire tout acte volontaire impliquant une prétention contraire à la possession ou la détention dont se prévalent les demandeurs au possessoire. La dépossession peut être totale ou partielle.En matière de droit de passage, la protection est accordée dès lors que le propriétaire du fonds grevé d'une servitude, sans empêcher le passage, le rend plus difficile ou plus incommode.

Dans le cas présent il résulte des photographies produites au débats et il n'est pas contesté que les consorts Z... ont mis en place des poteaux et une chaîne le long de la façade Nord de leurs maisons d'habitation, soit sur l'emprise de la cour grevée d'une servitude de passage, pour matérialiser l'emplacement où ils stationnent leurs voitures.

Si ces ouvrages n'empêchent pas les véhicules d'accéder au fonds X... et s'ils laissent libre un passage suffisant dans les lignes droites, ils rendent l'accès plus incommode et constituent une gêne à raison des nombreuses manoeuvres qui doivent désormais être effectuées, dans les virages, pour contourner l'angle des bâtiments.

En conséquence l'implantation de poteaux et d'une chaîne occasionnant un trouble, mais exclusivement dans les détours et virages, la décision du premier juge sera infirmée et les consorts Z... seront condamnés à enlever les ouvrages implantés dans les angles et détours de telle manière que le passage y ait, à ces endroits, une largeur de 6 mètres, conformément au plan dressé par Monsieur D..., et ce, dans le mois de la signification du présent arrêt, sous peine d'une astreinte de 100 € par jour de retard pendant deux mois, passé lequel délai il pourra à nouveau être statué.

* SUR LES FRAIS D'ENTRETIEN

Aux termes des articles 697 et 698 du code civil celui auquel est dû une servitude a droit de faire tous les usages nécessaires pour en user et pour la conserver mais ces ouvrages sont à ses frais et non à ceux du propriétaire du fonds assujetti.

En application de ce texte le propriétaire du fonds dominant est responsable du manque d'entretien ou d'un usage abusif de la servitude et doit assumer les frais de travaux rendus nécessaires par sa faute.

Dans le cas présent les consorts Z... réclament paiement aux époux X... de la somme de 75,28 € correspondant à la moitié d'une facture "Gedimat" en date du 16 janvier 2004 afférente à des travaux de remise en état de la cour sur laquelle s'exerce la servitude de passage.

Il ressort des photographies produites aux débats qu'à l'occasion de travaux réalisés sur leur propriété par les époux X..., le revêtement de la

cour fut endommagé. Dans un courrier daté du 19 décembre 2003 l'assureur protection juridique des époux X... indiquait que ces derniers acceptaient de participer aux frais d'entretien sous réserve d'avoir communication du devis de remise en état.

Le fait des époux X... ayant rendu nécessaire la réalisation des travaux litigieux, il sera fait droit à la demande des consorts Z... et les époux X... seront condamnés à leur payer la somme de 75,28 €.

* SUR LES DÉPENS

Chacune des parties succombant partiellement en cause d'appel, chacune d'elles conservera la charge de ses propres frais et dépens.

Les parties seront déboutés de leur demande formée en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement en date du 5 juillet 2005 rendu par le Tribunal d'instance de Saint Malo.

Statuant à nouveau,

Déclare Monsieur Alfred X... et Madame Raymonde Y... épouse X... recevables et bien fondés en leur action possessoire.

Condamne Monsieur Gérard Z... et Madame Louise A... épouse Z... à enlever, dans le mois de la signification du présent arrêt, les poteaux et la chaîne qu'ils ont implantés dans les angles et détours de la cour situés au Nord de leurs propriétés situées commune de Hirel, lieu-dit "La Quesmière" cadastrées section E nº 128 et 151, afin de laisser un passage de 3 mètres de large dans les lignes droites et de 6 mètres de large dans les virages et détours, conformément au plan dressé le 12 octobre 2005 par Monsieur D..., et ce, sous peine d'une astreinte de cent euros (100,00 €) par jour de retard pendant deux mois, passé lequel délai il pourra à nouveau être statué.

Déclare les époux X... irrecevables en leur demande tendant à voir fixer l'assiette de leur servitude de passage.

Condamne les époux X... à payer aux consorts E... la somme de soixante quinze euros et vingt-huit centimes (75,28 €) au titre des

r

frais d'entretien de la servitude de passage.

Déboute chacune des parties de sa demande formée en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres frais et dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0007
Numéro d'arrêt : 278
Date de la décision : 26/06/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Saint-Malo, 05 juillet 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2007-06-26;278 ?
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