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15/05/2007 | FRANCE | N°215

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0007, 15 mai 2007, 215


FAITS ET PROCÉDURE

"Military véhicule conservation groupe Bretagne", ci-après dénommé MVCGB, est une association régie par la loi du le` juillet 1901. Elle regroupe une quarantaine d'adhérents intéressés à la conservation de véhicules militaires anciens.

Monsieur Louis X... en a été le trésorier de 1989 à 1999 et, à ce titre, membre du conseil d'administration.

Le 25 mai 2001 une assemblée générale extraordinaire procéda à l'élection d'un nouveau conseil d'administration et, à la suite cette élection, le Président proposa une modification des statu

ts. Le 5 novembre 2001 ce nouveau conseil d'administration prononça l'exclusion de Monsieu...

FAITS ET PROCÉDURE

"Military véhicule conservation groupe Bretagne", ci-après dénommé MVCGB, est une association régie par la loi du le` juillet 1901. Elle regroupe une quarantaine d'adhérents intéressés à la conservation de véhicules militaires anciens.

Monsieur Louis X... en a été le trésorier de 1989 à 1999 et, à ce titre, membre du conseil d'administration.

Le 25 mai 2001 une assemblée générale extraordinaire procéda à l'élection d'un nouveau conseil d'administration et, à la suite cette élection, le Président proposa une modification des statuts. Le 5 novembre 2001 ce nouveau conseil d'administration prononça l'exclusion de Monsieur X... de l'association.

Par jugement du 24 juin 2003 le Tribunal de grande instance de Saint Brieuc, constatant que le projet de modification des statuts soumis au vote n'avait pas été joint aux convocations, prononça l'annulation des assemblées générales extraordinaires des 25 mai 2001 et 27 janvier 2002, des délibérations prises lors de ces assemblées et de la décision du 5 novembre 2001 excluant Monsieur X... de l'association.

Le le` décembre 2002 se déroula une nouvelle assemblée générale ordinaire suivie d'une assemblée générale extraordinaire au cours de laquelle le projet de modification des statuts, qui avait été joint aux convocations, fut approuvé.

Le 16 décembre 2002 le conseil d'administration procéda à l'élection du nouveau bureau. Le 14 février 2003 la déclaration de modification des statuts décidée lors de l'assemblée générale du le` décembre 2002 fut déposée en préfecture.

Le 20 octobre 2003 le conseil d'administration prononça l'exclusion de Monsieur X.... Cette décision fut portée à la connaissance de l'intéressé par une lettre recommandée avec accusé de réception du 23 décembre 2003 lui rappelant qu'il pouvait en faire appel devant l'assemblée générale du 18 janvier 2004. A cette date Monsieur X... ne se présenta pas et l'assemblée générale approuva la décision d'exclusion.

Par acte du 20 avril 2004 délivré en vertu d'une autorisation présidentielle, Monsieur X... assigna à jour fixe Monsieur Bertrand Y..., pris en sa qualité de Président de l'association MVCGB aux fins de voir prononcer l'annulation de la décision l'excluant de cette association.

Par jugement du 14 juin 2005 le Tribunal de grande instance de Saint Brieuc :

constata que Monsieur X... avait un intérêt à agir,

le débouta de toutes ses demandes,

débouta l'association MVCGB de sa demande de dommages et intérêts,

condamna Monsieur X... aux dépens et au paiement d'une somme de 3000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Monsieur X... forma appel de ce jugement.

POSITION DES PARTIES

* MONSIEUR X...

Dans ses dernières conclusions en date du 22 janvier 2007 Monsieur X... demande à la Cour:

de le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté qu'il avait un intérêt à agir,

de réformer le jugement pour le surplus,

de prononcer l'annulation de la décision du conseil d'administration du 20 octobre 2003 prononçant son exclusion,

de dire et juger qu'il sera réintégré dans ses droits d'adhérent,

de condamner l'association MVCGB à lui payer une somme de 8000 € à titre de dommages et intérêts,

de condamner l'association MVCGB aux entiers dépens et au paiement d'une somme de 2000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

* L'ASSOCIATION MVCGB

Dans ses dernières écritures en date du 21 février 2007 l'association MVCGB demande à la Cour:

de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur X... de sa demande en annulation de la délibération du conseil d'administration du 20 octobre 2003 ainsi que de sa demande en dommages et intérêts,

de le réformer en ce qu'il a débouté l'association MVCGB de sa demande de dommages et intérêts et condamner Monsieur X... à lui payer la somme de 5000 € à ce titre,

de confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux frais et dépens et condamner Monsieur X... aux dépens d'appel et au paiement d'une somme complémentaire de 3000 € en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

* SUR L'INTÉRÊT À AGIR DE MONSIEUR X...

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté que Monsieur X... avait un intérêt à agir dès lors que cette disposition ne fait l'objet d'aucune critique.

* SUR L'IRRÉGULARITÉ DE FORME

Monsieur X... conclut à l'irrégularité de la décision d'exclusion prise le 20 octobre 2003 par le conseil d'administration et de celle prise par l'assemblée générale du 18 janvier 2004 approuvant cette exclusion en exposant qu'en l'état de l'annulation des assemblées générales des 25 mai 2001 et 27 janvier 20021e conseil d'administration désigné par ces assemblées n'était pas valablement désigné et ne pouvait donc décider de son exclusion ; que le conseil d'administration antérieur à ces annulations était dépourvu de pouvoir par application de l'article 8 des statuts qui limite la durée du mandat de ses membres à trois années ; qu'en fait l'association était alors dépourvue d'organe de direction et aurait dû faire nommer un administrateur provisoire à l'effet de régulariser les futures assemblées générales.

- sur la désignation du nouveau conseil d'administration

L'annulation d'une assemblée générale anéantit toutes les décisions qui ont été prises par cette assemblée et tous les conseils d'administration postérieurs dès lors que la composition de ce conseil d'administration est issue de l'assemblée annulée.

C'est en vertu de ce principe que, dans son jugement du 24 juin 2003, le Tribunal de grande instance de Saint Brieuc annula la décision d'exclusion prise le 5 novembre 2001 par un conseil d'administration qui avait été désigné par l'assemblée générale du 25 mai 2001, elle-même annulée.

Avant même la reddition du jugement du 24 juin 2003, une assemblée générale ordinaire et extraordinaire de MVCGB se déroula le 1" décembre 2002 au cours de laquelle il fut procédé à l'élection du nouveau conseil d'administration. Le 16 décembre 2002 ce nouveau conseil d'administration désigna les membres du bureau.

C'est le nouveau conseil d'administration, issu de l'assemblée générale s'étant tenue le 1 er décembre 2002, qui décida de l'exclusion de Monsieur X... le 23 octobre 2003.

Le conseil d'administration ayant décidé, le 23 octobre 2003, de l'exclusion de Monsieur X... n'était donc pas celui issu de l'assemblée générale de l'année 2001 annulée par le Tribunal mais le nouveau conseil désigné à l'occasion de l'assemblée générale de l'année 2001/2002.

Monsieur X... n'est donc pas fondé à soutenir que la décision d'exclusion aurait été prononcée par un organe désigné par une assemblée annulée.

- sur la composition du nouveau conseil d'administration

L'article 8 des statuts dispose que l'association est administrée par un conseil d'administration. La durée de fonction de ses membres est fixée à trois ans. Ce conseil est renouvelé par tiers chaque année, une année s'entendant de l'intervalle séparant deux assemblées générales ordinaires annuelles.

Le mandat des organes de l'association, lorsqu'il vient à expiration en fonction de la durée prévue par les statuts, doit être considéré comme prorogé tant qu'il n'a pas été procédé à de nouvelles élections, ceci afin de garantir une solution de continuité dans la gestion de l'association.

Dans le cas présent, lors de l'assemblée générale de l'année 2001/2002 s'étant tenue le le' décembre 2002 il fut procédé à l'élection d'un tiers sortant conformément à l'article 8 des statuts.

Il est exact qu'un tiers des membres du conseil d'administration n'avait pas été renouvelé en 2001 et a donc poursuivi ses fonctions au-delà du délai de trois ans prévu par les statuts.

Cependant cet état de fait ne saurait entacher d'irrégularité la composition du conseil désigné le ler décembre 2002.

En effet d'une part cette prorogation de mandat d'un tiers des membres du conseil n'est que la conséquence de la décision de justice annulant l'assemblée générale de l'année 2001, d'autre part l'expiration du mandat de trois ans d'un tiers des membres du conseil ne privait pas ces derniers de leur pouvoir qui était prorogé, conformément aux statuts, jusqu'aux prochaines élections, enfin l'association ne pouvait pas renouveler deux tiers des membres du conseil d'administration lors de l'assemblée générale du ler décembre 2002 dès lors qu'une telle mesure aurait été contraire aux statuts qui ne prévoient qu'un renouvellement par tiers, et ce, afin d'assurer une certaine continuité de ses organes de gestion.

Monsieur X... ne saurait donc soutenir ni que l'association était privée de tout organe de direction et aurait dû demander la désignation d'un administrateur provisoire, ni que sa décision d'exclusion a été prononcée par un conseil d'administration irrégulièrement composé.

En outre l'assemblée générale du 18 janvier 2004 ratifia la décision du conseil d'administration en votant à 23 voix sur 28 l'exclusion de Monsieur X... de l'association.

Dès lors la validité de la décision d'exclusion prise par l'assemblée générale, dont le conseil d'administration n'est que l'émanation et qui apporte à l'intéressé une protection supplémentaire, ne saurait être discutée.

* SUR LES MOTIFS DE L'EXCLUSION

Il appartient au juge de vérifier si, conformément au pacte social librement accepté par les parties et qui leur tient lieu de loi, la sanction disciplinaire prise par une association contre un adhérent procède d'un motif légitimant la mesure prise. Le juge doit donc vérifier que les faits reprochés à l'adhérent sont matériellement établis, qu'ils répondent à la définition des motifs statutaires de sanction et qu'ils sont suffisamment graves pour légitimer la sanction prononcée.

En l'espèce l'article 6 des statuts de l'association MVCGB dispose : la qualité de membre se perd par la radiation prononcée pour non paiement de la cotisation ou pour motif grave.

Monsieur X... a été exclu de l'association au motif qu'il exerçait sur les membres de MVCGB un véritable harcèlement par voie de déclarations, contacts téléphoniques, lettres ouvertes et écrits divers.

Il est produit aux débats des lettres ouvertes adressées à l'ensemble des adhérents de MVCGB et de nombreux courriers destinés au Président et membres du conseil d'administration aux termes desquels Monsieur X... met en cause l'honnêteté et l'honorabilité des organes directeurs, en les accusant de s'être rendus coupables d'abus de biens sociaux, d'activités proscrites par le contrat d'association, de distributions abusives de fonds, de "magouilles" et de comportements anti-démocratiques en vue de verrouiller l'association. Dans ses écrits Monsieur X... menacent les présidents successifs de plaintes judiciaires pour des faits remontant à près de vingt ans.

L'envoi de lettres ouvertes à l'ensemble des membres de l'association et de courriers à divers sociétaires, de manière persistante et volontairement provocante, dans des conditions contraires à l'éthique du groupement et à son image en ce que ces écrits contiennent des menaces, des mesures d'intimidation et des propos mettant en cause l'honorabilité et l'honnêteté des organes directeurs, constitue un motif grave justifiant la mesure d'exclusion, et ce d'autant plus, que ces écrits ont déstabilisé l'association et provoqué la démission successive de plusieurs présidents.

La décision du premier juge sera en conséquence confirmée.

* SUR LES DEMANDES DE DOMMAGES ET INTÉRÊTS

Monsieur X... ne rapporte nullement la preuve que l'exclusion prononcée par MVCGB l'aurait privé de la possibilité de participer aux commémorations du débarquement en Normandie alors que ces manifestations étaient accessibles à tous les collectionneurs, faisant ou non partie d'une association, ainsi qu'en atteste le maire de Sainte-Mère-Eglise.

L'extrait d'une lettre adressée par Monsieur Z..., ancien président de l'association, à l'avocat de MVCGB, outre qu'elle constitue un document à caractère confidentiel, ne démontre pas que l'association aurait sali l'honneur de Monsieur X... en remettant en cause son passé de résistant ainsi que celui de sa famille.

La décision du premier juge sera donc confirmée en ce qu'elle l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Le comportement provoquant et agressif de Monsieur X... perturbe le fonctionnement de l'association depuis l'année 2001 et a provoqué des tensions entre ses adhérents et la démission successive de plusieurs présidents. De ce fait l'association a subi un préjudice moral méritant réparation.

La décision du premier juge sera donc réformée et Monsieur X... sera condamné à payer à MVCGB une somme de 150 € à titre de dommages et intérêts.

* SUR LES DÉPENS

Les dépens seront supportés par Monsieur X... qui succombe en son appel.

Monsieur X... sera débouté de sa demande formée en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et condamné à payer, à ce titre, à MVCGB une somme de 2000 €, somme qui s'ajoutera à celle déjà accordée par le premier juge sur le même fondement.

La Cour,

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en date du 14 juin 2005 rendu par le Tribunal de grande instance de Saint Brieuc en toutes ses dispositions sauf celle relative au dommages et intérêts réclamés par l'association MVCGB.

Statuant à nouveau,

Condamne Monsieur Louis X... à payer à l'association "Military Véhicule Conservation Groupe Bretagne" une somme de cent cinquante euros (150,00 €) à titre de dommages et intérêts.

Y ajoutant,

Déboute Monsieur Louis X... de sa demande formée en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Condamne Monsieur X... à payer à l'association "Military Véhicule Conservation Groupe Bretagne" une somme de deux mille euros ( 2000,00 €) en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, somme qui s'ajoutera à celle déjà accordée par le premier juge sur le même fondement.

Condamne Monsieur X... aux dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0007
Numéro d'arrêt : 215
Date de la décision : 15/05/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, 14 juin 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2007-05-15;215 ?
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