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17/01/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007628000

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0003, 17 janvier 2006, JURITEXT000007628000


EXPOSÉ DU LITIGE ET OBJET DU RECOURS:Le 9 septembre 2003, Madame Anab E... X... et ses deux fils, Abdourahman E... Y... et Hassan E... Y..., ont chacun, souscrit auprès du juge d'instance de Vannes une déclaration d'acquisition de la nationalité française sur le fondement de l'article 21-13 du Code Civil.Le même jour, un refus d'enregistrement a été notifié à chaque déclarant pour un motif identique tiré de l'absence d'une possession d'état de français constituée de bonne foi.Par acte du 30 décembre 2003, les consorts E... Y... ont saisi le Tribunal de Grande Instance de LORIEN

T aux fins de voir annuler ces refus d'enregistrement et déclar...

EXPOSÉ DU LITIGE ET OBJET DU RECOURS:Le 9 septembre 2003, Madame Anab E... X... et ses deux fils, Abdourahman E... Y... et Hassan E... Y..., ont chacun, souscrit auprès du juge d'instance de Vannes une déclaration d'acquisition de la nationalité française sur le fondement de l'article 21-13 du Code Civil.Le même jour, un refus d'enregistrement a été notifié à chaque déclarant pour un motif identique tiré de l'absence d'une possession d'état de français constituée de bonne foi.Par acte du 30 décembre 2003, les consorts E... Y... ont saisi le Tribunal de Grande Instance de LORIENT aux fins de voir annuler ces refus d'enregistrement et déclarer qu'ils sont français.Le ministère public s'était opposé à la demande, en raison du caractère équivoque de la possession d'état de français des demandeurs et du caractère tardif de la souscription de la déclaration par Madame Anab E... Z... jugement du 2 décembre 2004, le Tribunal de Grande Instance de LORIENT a déclaré bien fondés les consorts E... Y... en leur demande d'acquisition de la nationalité française par déclaration souscrite en application de l'article 21-13 du Code Civil, au motif que le ministère public, en exigeant une possession d'état non équivoque et un délai raisonnable de souscription de la déclaration, rajoutait des conditions ne figurant pas dans la rédaction de cet article.Le 29 décembre 2004, le jugement a été signifié au Procureur de la République de LORIENTLe 19 janvier 2005, le Procureur de la Républiqueinterjetait appel de ce jugement.Moyens et prétentions des parties devant la Cour Le ministère public demande à la Cour de:constater que le récépissé prévu par l'article 1043 du Nouveau Code de Procédure Civile a été délivré;infirmer le jugement rendu le 2 décembre 2004 par le Tribunal de grande instance de Lorient qui a réformé la décision du juge d'instance de Vannes du 9 septembre 2003;annuler l'enregistrement de la déclaration souscrite et

constater l'extranéité de Madame Anab X..., de Monsieur Abdourahman E... Y... et de Monsieur Hassan E... A... la mention prévue par l'article 28 du code civil;Les intimés concluent à la confirmation du juge entrepris et au débouté du ministère publicEn conséquence, ils demandent à la Cour d'accorder à chacun d'eux la nationalité française et d'ordonner la mention de cette acquisition de nationalité sur les registres de l'état civil.Ils demandent la condamnation du trésor public aux dépens.MOTIFS DE LA DECISION :I - Sur la situation de Anab E... KALILEAttendu qu'il est constant que Madame Anab E... X... est née le 10 janvier 1956 à DJIBOUTI; que dépourvue de certificat de nationalité française, elle en avait fait la demande auprès du Tribunal d'instance de LORIENT en juin 1993, quiavait rejeté sa demande par décision du 7 décembre 1993 au motif qu'elle a perdu la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance du territoire des AFARS et ISSAS, le 27 juin 1977, faute d'avoir souscrit la déclaration de reconnaissance de la nationalité française prévue par la loi du 20 juin 1977.Qu'à l'époque elle avait été invitée à solliciter une réintégration dans la nationalité française par voie de décret;Qu'elle n'a formé ni recours gracieux à l'encontre de ce refus, ni action déclaratoire de nationalité et n'a pas davantage sollicité sa réintégration.Que suite à une nouvelle requête de Madame E... X..., le Tribunal d'instance de VANNES, après consultation de la chancellerie, lui opposait un nouveau refus pour les mêmes raisons le 7 septembre 1999;Qu'avec bienveillance, et malgré le délai écoulé depuis le précédent refus, la voie de la déclaration prévue à l'article 21-13 du Code Civil lui était proposée;Que toutefois, de la même façon que lors du premier refus qui lui avait été opposé, la demanderesse n'a pas donné suite à la nouvelle confirmation de son extranéité;Attendu qu'elle entend se prévaloir, à présent, de la possession d'état de

française au vu des éléments suivants :une carte nationale d'identité délivrée le 15 juin 1978 par la sous-préfecture de Brest, moins d'un an après l'indépendance du territoire des AFARS et des ISSAS une carte de nationalité d'identité délivrée le 23 juillet 1991 par la sous-préfecture de LORIENT, au seul vu la carte précédente un passeport français délivré le 5 août 1991,son inscription sur les listes électorales à partir de 1995,un passeport français délivré le 9 mars 1998 probablement par la sous-préfecture de LORIENT.Attendu qu'en application des dispositions de l'article 21-13 du Code Civil:

" peuvent réclamer la nationalité française par déclaration, souscrite conformément aux articles 26 et suivants du Code Civil, les personnes qui ont joui, d'une façon constante, de la possession d'état de Français, pendant les dix années précédant leur déclaration."Que la jurisprudence de la cour de cassation exige que cette possession d'état de Français soit non seulement constante, mais non équivoque et de bonne foi;Que la notion de "constance" implique qu'au cours des dix années écoulées, l'intéressé ait été considéré par les services publics français comme étant un ressortissant de ces pays;Que la possession d'état doit être par ailleurs "non équivoque" pour l'ensemble des services de l'administration sans qu'il y ait eu des divergences d'appréciation entre eux;Qu'une telle divergence pourrait, selon la jurisprudence, résulter du fait qu'une préfecture délivre à l'intéressé une carte d'identité alors que le garde des sceaux refuse la qualité de Français à la même personne;Qu'enfin est supposée la "bonne foi" du requérant, c'est à dire notamment que l'intéressé n'ait pas continué à se prévaloir de la nationalité française après que son extranéité lui a été notifiée officiellement;Que pour se prévaloir de sa bonne foi, l'intéressé doit pouvoir justifier avoir régularisé sa situation, lorsqu'il a eu connaissance de son extranéité, dans un

délai raisonnable que la jurisprudencefixe à environ une année;Attendu qu'il résulte des éléments versés aux débats que Madame E... X... a été informée à deux reprises de son extranéité par la seule autorité habilitée à le faire;Qu'elle a fait preuve de négligence en ne donnant pas suite aux voies de recours qui lui étaient offertes, ni aux possibilités de régularisation de sa situation dans les délais normalement admis par la jurisprudence;Qu'elle a attendu presque 10 ans pour agir après la notification qui lui a été faite de son extranéité par le Tribunal d'instance de LORIENT le 7 décembre 1993;Que c'est dès lors à juste titre que le juge d'instance de VANNES a refusé, le 9 septembre 2003, d'enregistrer la déclaration de nationalité française de Madame Anab E... B... le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.2. Sur la situation de Abdourahman et de HassanE... ROBLEHAttendu que les intéressés sont respectivement nés les 24 janvier 1982, et 24 mars 1984 à DJIBOUTI et sont les fils de Madame Anab E... C... entendent se prévaloir d'une possession d'état de français au vu des documents suivants :Pour Abdourhaman E... ROBLEHune carte nationale d'identité délivrée le 24 mars 1992 par la sous-préfecture de LORIENTun certificat individuel de participation à l'appel de préparation à la défense du 19 mai 1999un passeport français délivré le 29 avril 1999 par lasous-préfecture de LORIENT.Pour Hassan E... ROBLEHune carte nationale d'identité délivrée le 24 mars 1992 par la sous-préfecture de LORIENTun certificat individuel de participation à l'appel de préparation à la défense du 15 septembre 2001un passeport français délivré le 16 avril 1999 par la sous-préfecture de LORIENTAttendu que si le ministère public admet que leur possession d'état est effectivement continue depuis mars 1992, il considère qu'elle n'en est pas moins entachée d'équivoque, puisque du temps de leur minorité, leur mère savait

qu'elle n'était pas française depuis le 7 décembre 1993 et que, nés à l'étranger, ils ne pouvaient tenir leur nationalité française que d'une filiation établie à l'égard d'un parent français;Attendu toutefois qu'ainsi que l'ont retenu les premiers juges, le ministère public ne peut soutenir que les deux fils E... Y... ne pourraient tirer leur nationalité française que de leurs parents, puisque précisément, cette nationalité peut être acquise par une possession d'état de Français depuis 10 ans;Qu'en ce qui les concerne, ils justifient suffisamment qu'ils se sont comportés comme des Français depuis au moins 10 ans et qu'ils ont été perçus comme tels par les autorités administratives et militaires de notre pays, sans qu'on puisse leur opposer, comme à leur mère, une équivoque, et a fortiori une mauvaise foi dans cette possession d'état;Qu'il convient donc, en ce qui les concerne, d'accueillir leur requête.PAR CES MOTIFS:La Cour Constate que le récépissé prévu à l'article 1043 du Nouveau Code de Procédure Civile a été délivréInfirme le jugement du Tribunal de grande Instance de LORIENT du 2 décembre 2004 en ce qu'il a accueilli la demande de Madame Anab E... X... tendant à se voir reconnaître la qualité de française par déclaration, et en ce qu'il a réformé la décision du juge d'instance de VANNES du 9 septembre 2003 la concernant. Et statuant à nouveau de ce chef, annule l'enregistrement de la déclaration souscrite et constate l' extranéité Madame Anab E... D... confirme pour le surplus et constate que Monsieur Abdourahman E... Y... né le 24 janvier 1982 à DJIBOUTI et Monsieur Hassan E... Y..., né le 24 mars 1984 à DJIBOUTI justifient avoir joui de la possession d'état de Français pendant au moins 10 ans précédant la déclaration de nationalité française qu'ils ont souscrite devant le Tribunal d'instance de VANNES le 9 septembre 2003.Dit en conséquence qu'ils sont, tous deux, fondés dans leur demande tendant à se voir

reconnaître la qualité de Français par déclaration.Dit que l'acquisition de leur nationalité française par déclaration devra être enregistrée conformément à la loi et que mention devra en être portée sur les registres de l'état civil, conformément à l'article 28 du Code Civil, et au service central de l'état civil à NANTES.Condamne Madame Anab E... X... aux dépens qu'elle a exposés.Condamne le Trésor Public aux dépens relatifs à la procédure diligentée par Abdourahman et par Hassan E... ROBLEH.LE GREFFIER,

LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0003
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007628000
Date de la décision : 17/01/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2006-01-17;juritext000007628000 ?
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