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17/11/2005 | FRANCE | N°05/00513

France | France, Cour d'appel de Rennes, Troisième chambre, 17 novembre 2005, 05/00513


DOSSIER N 05 / 00513 Arrêt N du 17 Novembre 2005
COUR D'APPEL DE RENNES 3ème Chambre, ARRÊT Prononcé publiquement le 17 Novembre 2005 par la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
X... Dominique né le 29 Septembre 1956 à BOULOGNE BILLANCOURT, HAUTS-DE-SEINE (092) Fils de X... André et de Y... Françoise De nationalité française, marié, directeur de mission Demeurant... 29910 TREGUNC Prévenu, appelant, libre, comparant en personne, assisté de Maître GAONAC'H Arnaud, avocat au barreau de QUIMPER
ET : LE MINISTÈRE PUBLIC Appelant,>COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré : Président Madame PI...

DOSSIER N 05 / 00513 Arrêt N du 17 Novembre 2005
COUR D'APPEL DE RENNES 3ème Chambre, ARRÊT Prononcé publiquement le 17 Novembre 2005 par la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
X... Dominique né le 29 Septembre 1956 à BOULOGNE BILLANCOURT, HAUTS-DE-SEINE (092) Fils de X... André et de Y... Françoise De nationalité française, marié, directeur de mission Demeurant... 29910 TREGUNC Prévenu, appelant, libre, comparant en personne, assisté de Maître GAONAC'H Arnaud, avocat au barreau de QUIMPER
ET : LE MINISTÈRE PUBLIC Appelant,
COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré : Président Madame PIGEAU, Madame LESVIGNES, Prononcé à l'audience du 17 Novembre 2005 par Monsieur THIERRY, conformément aux dispositions de l'article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale. MINISTÈRE PUBLIC : représenté aux débats par Mme FIASELLA-LE BRAZ, Avocat Général et lors du prononcé de l'arrêt par Mr AVIGNON, Avocat Général. GREFFIER : en présence de M. GENDROT lors des débats et de Mme DELAUNAY lors duprononcé de l'arrêt
DÉROULEMENT DES DÉBATS :
A l'audience publique du 27 Octobre 2005, le président a constaté l'identité du prévenu comparant en personne, assisté de Me GAONAC'H, la Cour déclarant le présent arrêt contradictoire.
A cet instant, le conseil du prévenu a déposé des conclusions. Ont été entendus : Sur les exceptions de nullité soulevées in limine litis : Maître GAONAC'H, sur les exceptions de nullités, Madame l'avocat général, en ses observations, Maître GAONAC'H, qui a eu la parole en dernier, La Cour après en avoir délibéré sur le siège, joint l'incident au fond, Au fond : Monsieur THIERRY, en son rapport, X... Dominique, en son interrogatoire et ayant exposé sommairement les motifs de son appel, Madame l'avocat général, en ses réquisitions, Maître GAONAC'H, en sa plaidoirie, X... Dominique, qui a eu la parole en dernier, puis, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour son arrêt être rendu à l'audience publique du 17 Novembre 2005.
Conformément aux prescriptions de l'article 462 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale, le Président a avisé les parties présentes de la date de l'audience à laquelle l'arrêt serait rendu.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE :
LE JUGEMENT : Le Tribunal Correctionnel de QUIMPER par jugement Contradictoire en date du 01 DÉCEMBRE 2004, pour EXÉCUTION SANS AUTORISATION DE TRAVAUX NUISIBLES AU DÉBIT DES EAUX OU AU MILIEU AQUATIQUE, NATINF 013167 a condamné X... Dominique à la peine d'amende de 1. 000 euros.
LES APPELS :
Appel a été interjeté par : Monsieur X... Dominique, le 02 Décembre 2004 M. le Procureur de la République, le 02 Décembre 2004 contre Monsieur X... Dominique
LA PRÉVENTION :
Considérant qu'il est fait grief à Dominique X... :
- d'avoir à TREGUNC, le 20 mars 2003, exécuté des travaux dans le lit d'un cours d'eau sans autorisation administrative alors qu'ils sont de nature à porter atteinte à la qualité ou à la diversité du milieu aquatique, en l'espèce création d'une digue d'une hauteur de 1m10 sur 50 m de longueur ; infraction prévue par les articles L. 216-8 I, L. 214-1, L. 214-3 du Code de l'Environnement, 1, 2 du Décret 93-743 du 29 / 03 / 1993 et réprimée par les articles L. 216-8 I, III, L. 216-11 du Code de l'Environnement ;
Motifs :
Les appels sont réguliers et recevables en la forme.
Les faits retenus comme fondement des poursuites sont ainsi relatés dans les actes de la procédure :
Le 20 mars 2003, deux Agents Techniques de l'Environnement en service au Conseil Supérieur de la Pêche et en résidence administrative à Ploùrmel (56), accompagnés d'un technicien et d'un agent de l'Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage, ont constaté que sur un cours d'eau côtier prenant sa source sur la commune de Trégunc, au niveau du lieu-dit... et se jetant dans le plan d'eau littoral de Loc'h Ven, M. Dominique X..., demeurant au lieudit..., commune de Trégunc (29), avait édifié une digue d'une hauteur d'environ 1 m 10 et d'une longueur d'environ 50 m, ces dimensions ayant été estimées au topofil de même que la surface de mise en eau de la parcelle située en amont, soit plus de 1 000 m. Il est précisé au procès-verbal, clôturé le 5 mai 2003, que cette parcelle fait partie d'un ensemble de prairies humides et permanentes.
Les fonctionnaires verbalisateurs mentionnent que ce type de travaux a des conséquences importantes sur le milieu aquatique :
réchauffement de la température moyenne du cours d'eau, évaporation et obstacle à la migration des anguillettes.
Entendu le 10 janvier 2004, Dominique X... a déclaré qu'il avait réalisé cet ouvrage dans le but d'évaluer le débit d'eau dans un programme de plantations de conifères accepté par la DDA et de créer un étang pouvant servir de réserve d'eau pour la lutte contre l'incendie.
Il a contesté le procès-verbal sur la forme et sur le fond en déclarant qu'il était totalement inintelligible.
Dans ses conclusions déposées devant la Cour, le prévenu soulève une exception de nullité du procès-verbal au motif que, contrairement aux dispositions de l'article L. 216-5, alinéa 2, du Code de l'environnement, la copie de ce document n'avait pas été remise au propriétaire de la parcelle, qui est la SCI KERGUERN, mais à M. Dominique X... qui n'en est que le cogérant avec son épouse, Mme Hélène X..., à laquelle aucune copie n'a été remise.
Il prétend également que la localisation des faits est erronée.
Il fait valoir en outre que, contrairement aux prescriptions de l'article L. 216-4 du Code de l'environnement, les agents verbalisateurs se sont rendus sur les lieux sans en avoir préalablement informé le Procureur de la République et qu'ils se sont rendus au domicile de M. et Mme X... malgré la prohibition portée par ce même texte.
Il convient, en application des dispositions de l'article 459, troisième alinéa, du Code de procédure pénale, de joindre au fond l'exception de nullité sur laquelle il va être statué par le présent arrêt.
Il est indiqué au procès-verbal du 5 mai 2003, feuillet 2, que les constatations des agents verbalisateurs sont opérées sur un terrain situé en bordure d'un petit ruisseau côtier au lieu-dit "... ". Il n'y a donc aucune discordance, quant à la localisation, avec ce qu'indique le prévenu en page 3 de ses conclusions.
Ce même procès-verbal mentionne, dans la rubrique CLÈTURE (feuillet 3), qu'une copie a été remise à M. X... Dominique, ce qui est conforme aux dispositions de l'article L. 216-5, second alinéa, du Code de l'environnement qui prévoit qu'une copie en est également remise dans le même délai (cinq jours), à l'intéressé.
Il n'est pas spécifié par ce texte que le destinataire de la copie doive être nécessairement le propriétaire de la parcelle sur laquelle les travaux ont été réalisés. En l'occurrence, l'auteur des travaux est M. Dominique X... qui l'a lui-même déclaré aux agents verbalisateurs le jour des constatations puis aux gendarmes de la Brigade de PONT-AVEN lors de son audition du 10 janvier 2004. C'est donc bien lui " l'intéressé " destinataire de la copie du procès-verbal au sens de l'article L. 216-5 précité.
Il est indiqué au procès-verbal que, le jeudi 20 mars 2003, les agents verbalisateurs informent par courrier le Procureur de la République de QUIMPER en vertu de l'article L. 216-4 du Code de l'environnement.
Ce texte dispose, en son second alinéa, que le procureur de la République est préalablement informé des opérations envisagées en vue de la recherche des infractions et qu'il peut s'opposer à ces opérations. Or, la mention figure après la relation des constatations.
Mais, d'une part, il n'est invoqué aucune disposition précisant que l'information préalable du procureur de la République doive être faite à peine de nullité ; d'autre part, il n'est fait état par le prévenu appelant d'aucune atteinte qui aurait été portée aux intérêts de la partie concernée par le fait que l'information donnée au procureur de la République aurait été postérieure aux constatations et une telle atteinte ne résulte pas des éléments su dossier, de telle sorte qu'au regard des dispositions de l'article 802 du Code de procédure pénale, ce moyen de nullité doit être écarté.
Il résulte du procès-verbal qu'après avoir procédé aux constatations le 20 mars 2003, les agents techniques de l'environnement en service au Conseil Supérieur de la Pêche ont, le 27 mars 2003, rencontré Mme Hélène X... à son domicile où ils ont été ensuite rejoints par M. Dominique X...
Une telle prise de contact avec les personnes concernées par les constatations effectuées sept jours auparavant ne relève en rien de l'exclusion portée à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 216-4 du Code de l'environnement qui n'interdit nullement aux agents assermentés et commissionnés de rencontrer les intéressés à leur domicile dès lors qu'il ne s'agit pas d'y rechercher et d'y constater les infractions, ce qui, dans le cas présent, était déjà fait depuis plusieurs jours.
Aucun des moyens soulevés à cette fin n'étant admis, l'exception de nullité est rejetée.
Sur le fond, ainsi qu'il est mentionné dans l'exposé qui précède, il a été constaté par les agents verbalisateurs que la création de la digue avait eu pour conséquence une mise en eau de la parcelle en amont sur une surface de plus de 1 000 m, cette parcelle faisant partie d'un ensemble de prairies humides et permanentes, ce qui constitue bien une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux au sens de l'article L. 214-1 du Code de l'environnement, modification générée par des ouvrages et travaux susceptibles de nuire au libre écoulement des eaux par rétention d'une nappe superficielle inexistante avant les travaux, de réduire la ressource en eau du fait de l'évaporation et de porter atteinte gravement à la qualité et à la diversité du milieu aquatique du fait de l'obstacle ainsi opposé à la migration des juvéniles d'anguilles qui colonisent le bassin versant à partir de la mer.
Sont donc applicables les dispositions du premier alinéa de l'article L. 214-3 du Code de l'environnement qui soumettent de tels ouvrages et travaux à autorisation de l'autorité administrative.
Le prévenu soutient que ce qui est qualifié par les agents verbalisateurs de cours d'eau n'en est pas un et qu'il s'agit " d'un ru n'ayant aucune existence la plupart du temps et ayant un faible débit en cas de pluies abondantes, ne relevant pas ainsi des dispositions du Code de l'environnement. "
Mais l'examen des procès-verbaux de constat d'huissier en date des 11 août 2003 et 12 octobre 2005 produits par M. X..., et qu'il a fait établir de sa propre initiative, ne permet pas d'en déduire que les lieux qui y sont décrits correspondent bien au site du cheminement et des abords du ruisseau mentionné par les agents techniques du C. S. P. dans leur procès-verbal.
Quant au procès-verbal de constat du 12 mai 2003, il fait mention d'un " ru " qui " est donc à sec dans sa totalité " et indique qu'" un deuxième ru est apparent et rejoint l'emplacement de la réserve " et que " compte tenu des pluies, quelques flaques d'eau sont apparentes mais aucun débit n'est apparent ". Ce constat mentionne également qu'" à l'emplacement où Monsieur X... a effectué la réserve d'eau, il n'y a pas d'eau... "
Or, le 20 mars 2003, les agents techniques ont constaté que la digue créée sur le cours d'eau avait entraîné une mise en eau de la parcelle amont sur une surface de plus de 1 000 m, ce qui est illustré de façon incontestable par les photographies nos 1, 2 et 3 annexées à leur procès-verbal, tandis que la photo no 4 atteste de l'existence d'un cours d'eau en amont de la retenue créée par l'obstacle.
En conséquence, les éléments de fait invoqués par le prévenu ne rapportent pas la preuve contraire aux énonciations de ce procès-verbal.
Ce qui est reproché au prévenu n'étant pas un prélèvement d'eau visé au second alinéa de l'article L. 214-2 du Code de l'environnement, mais des ouvrages et travaux visés à l'article L. 214-3 du même Code, la référence à l'usage domestique défini à l'article 3 du décret no 93-743 du 29 mars 1993 est inopérante dès lors que les règles et critères de l'usage domestique ne s'appliquent qu'à des prélèvements et rejets.
Au demeurant, pour que les ouvrages et travaux définis par les articles L. 214-1 et L. 214-3 du Code de l'environnement soient soumis à autorisation administrative, il n'est pas nécessaire que les écoulements auxquels il est porté atteinte soient permanents, condition non prévue par ces textes.
Sur la carte IGN au 1 / 25000 de la région de QUIMPERLÉ-PONT-AVEN, ce ruisseau, qui apparaît comme prenant sa source au lieudit..., comme l'ont constaté les agents techniques, est effectivement représenté en pointillés selon la graphie utilisée pour les cours d'eau temporaires, situation qui n'a pas pour effet de le soustraire au régime des textes visés à la prévention dès lors qu'il est considéré par les cartographes comme un cours d'eau dont le tracé est matérialisé de façon permanente, ce qui est confirmé par les constatations du procès-verbal qui établissent en outre qu'il est pourvu d'un débit et que la vie aquatique s'y développe.
C'est donc par l'exacte appréciation des éléments de fait qui lui étaient soumis et par la juste application des règles de droit que le premier Juge a déclaré Dominique X... coupable des faits visés à la prévention.
Le jugement sera par conséquent confirmé sur la déclaration de culpabilité.
Compte tenu de la nature de l'affaire et de la situation de fait protégée
Compte tenu de la nature de l'affaire et de la situation de fait protégée par les textes applicables, il convient, en application des dispositions des articles 132-58, 132-66 et suivants du Code pénal, L. 216-8 IV et L. 216-9 du Code de l'environnement, d'ajourner le prononcé de la peine en enjoignant au prévenu de rétablir le libre écoulement des eaux tel qu'il existait avant l'exécution des travaux, un délai lui étant imparti pour ce faire jusqu'au 6 avril 2006, date à laquelle il lui appartiendra d'en justifier.
Dispositif : LA COUR,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de X... Dominique,
Reçoit les appels,
Joint l'incident au fond ;
Rejette l'exception de nullité ;
Confirme le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité ;
Vu les articles 132-58, 132-66 et suivants du Code pénal, L. 216-8 IV et L. 219-9 du Code de l'environnement,
Ajourne le prononcé de la peine et renvoie l'affaire à l'audience du jeudi 6 avril 2006 à 14 heures ;
Enjoint à Dominique X... d'avoir, dans ce délai, à rétablir le libre écoulement des eaux tel qu'il existait avant l'exécution des travaux d'élévation d'une digue situés au lieu-dit " ... commune de TREGUNC et ayant fait l'objet du procès-verbal no 03 03 20 BMI 01 du Conseil Supérieur de la Pêche, Brigade Mobile d'Intervention de Bretagne.
LE GREFFIER,
LE PRÉSIDENT, F. DELAUNAY
J. THIERRY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 05/00513
Date de la décision : 17/11/2005

Analyses

PROTECTION DE LA NATURE ET DE L'ENVIRONNEMENT - Eau et milieux aquatiques - Infractions - Constatation - Officiers et agents de police judiciaire - Procès-verbal - Remise d'une copie au contrevenant

L'exception de nullité relative au procès verbal doit être rejetée, dans la mesure où une copie du procès-verbal a été remise à l'auteur des travaux nuisibles au débit des eaux ou au milieu aquatique sans autorisation conformément aux dispositions de l'article L.216-5, second alinéa, du Code de l'environnement. Or, si cet article prévoit que les procès-verbaux doivent, sous peine de nullité, être adressés dans les cinq jours qui suivent leur clôture au procureur de la République et qu'une copie est également, remise dans le même délai, à l'intéressé, il ne précise pas que le destinataire de la copie doit être nécessairement le propriétaire de la parcelle sur laquelle les travaux ont été réalisés


Références :

Code de l'environnement, article L.216-5 alinéa 2

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2005-11-17;05.00513 ?
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