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26/06/2024 | FRANCE | N°24/00183

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 26 juin 2024, 24/00183


Arrêt n° 415

du 26/06/2024





N° RG 24/00183





IF/ACH









Formule exécutoire le :



26 juin 2024



à :



- LAQUILLE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024





APPELANT :

d'un jugement rendu le 2 février 2024 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Industrie (n° 23/00264)



Monsieur [M] [W]

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représenté par la SELARL LAQUILLE

ASSOCIÉS, avocats au barreau de REIMS



INTIMÉE :



S.A.S.U. SLM



[Adresse 1]

[Localité 3]



Défaillante

DÉBATS :



En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a ...

Arrêt n° 415

du 26/06/2024

N° RG 24/00183

IF/ACH

Formule exécutoire le :

26 juin 2024

à :

- LAQUILLE

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024

APPELANT :

d'un jugement rendu le 2 février 2024 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Industrie (n° 23/00264)

Monsieur [M] [W]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par la SELARL LAQUILLE ASSOCIÉS, avocats au barreau de REIMS

INTIMÉE :

S.A.S.U. SLM

[Adresse 1]

[Localité 3]

Défaillante

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle FALEUR, conseillère, chargée du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 26 juin 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président de chambre

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseillère

Madame Isabelle FALEUR, conseillère

GREFFIER lors des débats :

Madame Maureen LANGLET, greffière placée

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Allison CORNU-HARROIS, greffière placée, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCEDURE

Se prévalant d'un contrat de travail avec la société SLM , Monsieur [M] [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Reims par requête reçue au greffe le 11 mai 2023, aux fins de voir ordonner la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et d'obtenir sa condamnation à lui payer diverses sommes à titre de rappel de salaires, de dommages et intérêts et d'indemnités.

A l'audience du bureau de jugement du 21 novembre 2023, en l'absence de la société SLM, Monsieur [M] [W] a demandé au conseil de prud'hommes :

- de constater les graves manquements de la société SLM à ses obligations ;

- d'ordonner la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société SLM à compter de la décision à intervenir ;

- de juger que la rupture s'analysait en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- de condamner la société SLM à lui payer les sommes suivantes :

. 16'360 euros à titre de rappel de salaire à parfaire à la date de la décision à intervenir outre 1 636 euros de congés payés afférents,

. 818 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 81,80 euros de congés payés afférents,

. 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts liés à l'absence de règlement des salaires ;

. 9 816 euros à titre d'indemnité liée à l'existence d'un travail dissimulé ;

. 1 500 euros au titre des frais irrépétibles ;

- d'ordonner la remise des bulletins de salaire, du certificat de travail de l'attestation Pôle Emploi, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document, à compter de la décision, le conseil se réservant la faculté de liquider l'astreinte ;

- d'ordonner l'exécution provisoire de l'intégralité de la décision en application de l'article 515 du code de procédure civile ;

- de condamner la société SLM aux dépens comprenant les éventuels frais d'exécution forcée de la décision ;

Par jugement du 2 février 2024, le conseil de prud'hommes de Reims s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Reims, a renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Reims et dit que le dossier lui serait transmis à l'expiration de la voie de recours. Il a réservé les dépens.

Le 12 février 2024, Monsieur [M] [W] a interjeté appel du jugement de première instance, en toutes ses dispositions.

Saisi d'une requête de Monsieur [M] [W] en date du 12 février 2024, le premier président de la cour d'appel de Reims l'a autorisé, par ordonnance du 14 février 2024, à faire délivrer une assignation à jour fixe sur son appel de la décision rendue le 2 février 2024 par le conseil des prud'hommes de Reims. Il a fixé l'examen de l'appel à l'audience de la chambre sociale du 15 mai 2024 à neuf heures.

Par acte d'huissier de justice en date du 15 avril 2024, signifié selon les modalités de l'article 659 du code de procédure civile, Monsieur [M] [W] a assigné la société SLM à jour fixe devant la chambre sociale de la cour d'appel de Reims et lui a notifié le jugement du conseil de prud'hommes de Reims du 2 février 2024, la déclaration d'appel, l'ordonnance du premier président de la cour d'appel de Reims du 14 février 2024, ses conclusions d'appel dans leur version du 12 avril 2024 et ses pièces numérotées un à neuf.

La société SLM n'a pas constitué avocat.

A l'audience du 15 mai 2024, l'affaire a été mise en délibéré au 26 juin 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions, notifiées par RPVA le 12 avril 2024, auxquelles en application de l'article 455 il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Monsieur [M] [W] demande à la cour :

D'INFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de Reims du 2 février 2024 en ce qu'il :

- s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Reims,

- a renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce de Reims et dit que le dossier serait transmis à cette juridiction à l'expiration de la voie de recours,

- a réservé les dépens,

Statuant à nouveau,

DE JUGER qu'il est bénéficiaire d'un contrat à durée indéterminé à temps complet ;

DE JUGER le conseil de prud'hommes matériellement compétent ;

DE CONSTATER les graves manquements de la société SLM à ses obligations;

D'ORDONNER la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la société SLM à compter de la décision à intervenir ;

DE JUGER que la rupture s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

DE CONDAMNER la société SLM à lui payer les sommes suivantes :

. 27'812 euros à titre de rappel de salaire outre 2 781,20 euros de congés payés afférents,

. 1 636 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 163,60 euros de congés payés afférents,

. 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 613,50 euros à titre d'indemnité de licenciement,

. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts liés à l'absence de règlement des salaires,

. 9 816 euros à titre d'indemnité liée à l'existence d'un travail dissimulé,

. 3500 euros au titre des frais irrépétibles,

D'ORDONNER la remise des bulletins de salaire, du certificat de travail et de l'attestation pôle emploi ;

DE CONDAMNER la société SLM aux dépens comprenant les éventuels frais d'exécution forcée de la décision.

Monsieur [M] [W] fait valoir qu'il a été embauché par la société SLM, société de plâtrerie, en qualité de man'uvre à compter du 23 janvier 2023, qu'il a travaillé sur le chantier [Adresse 4] à [Localité 5] jusqu'au 31 janvier 2023, date à partir de laquelle l'employeur ne lui a plus fourni de travail alors qu'il se tenait à sa disposition et en dépit d'une mise en demeure adressée à la société SLM le 7 avril 2023.

Monsieur [M] [W] affirme qu'il se trouvait dans un lien de subordination vis-à-vis de la société SLM ainsi que l'établissent les pièces qu'il produit aux débats.

Monsieur [M] [W] expose que l'employeur a gravement manqué à ses obligations dans le cadre de l'exécution du contrat de travail en s'abstenant de fournir le travail convenu, de payer le salaire et de lui remettre un contrat de travail écrit et une fiche de paie, ce qui justifie la résiliation du contrat de travail à ses torts.

Il sollicite un rappel de salaire, des indemnités et dommages et intérêts sur la base du salaire minimum d'un ouvrier prévu par la convention collective du bâtiment soit la somme de 1 636 euros bruts mensuels.

MOTIFS

Sur la compétence de la juridiction prud'homale.

Dans son jugement du 2 février 2024, le conseil de prud'hommes de Reims s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Reims après avoir indiqué dans sa motivation qu'en l'absence de contrat de travail et en l'absence de preuve d'un lien de subordination, la relation de travail entre Monsieur [M] [W] et la société SLM n'était pas établie de sorte que le contrat de travail était inexistant et ne pouvait être résilié.

Monsieur [M] [W] affirme que le conseil de prud'hommes a soulevé d'office son incompétence matérielle sans l'inviter à faire part de ses remarques, violant ainsi le principe du contradictoire, mais il ne prétend pas à l'annulation du jugement de première instance.

L'article L 1411-1 du code du travail dispose que le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient. Il juge les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti.

Le conseil de prud'hommes est compétent pour statuer sur la demande tendant à voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail entre les parties.

En l'absence de définition légale du contrat de travail, la jurisprudence considère qu'il y a contrat de travail quand une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre, qu'il s'agisse d'une personne morale ou d'une personne physique, moyennant rémunération.

Cette définition jurisprudentielle du contrat de travail fait apparaître trois éléments :

- la prestation de travail, qui peut avoir pour objet les tâches les plus diverses, travaux manuels, intellectuels, artistiques, dans tous les secteurs professionnels;

- la rémunération, contrepartie de la prestation de travail, peu importe qu'elle soit versée en argent ou en nature et calculée au temps, aux pièces ou à la commission;

- la subordination juridique du salarié ;

Le lien de subordination, critère spécifique du contrat de travail, est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

La dépendance économique, ou les liens économiques, ne caractérisent pas à eux seuls l'existence d'un contrat de travail, la subordination économique ne pouvant être assimilée à la subordination juridique.

Le pouvoir de direction, de contrôle et de sanction de l'employeur, qui marque l'existence d'un lien de subordination, peut apparaître à travers différentes contraintes ou obligations imposées par l'employeur concernant le lieu de travail, les horaires, la fourniture du matériel, la mise à disposition du personnel, l'intégration à un service organisé, éléments qui constituent des indices en la matière.

L'existence d'une relation de travail salariale ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.

C'est en principe à celui qui se prévaut d'un contrat de travail d'en établir l'existence. Toutefois, en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve.

Monsieur [M] [W] soutient avoir été embauché le 23 janvier 2023 par la société SLM en contrat à durée indéterminée, en qualité de manoeuvre.

Il verse à l'appui de ses prétentions :

- une attestation provisoire valant carte d'identification professionnelle du BTP sur laquelle figurent son numéro d'identification, sa photographie, son identité, la mention d'une date de délivrance le 23 janvier 2023 sur demande du même jour de la société SLM,

- un email adressé le 5 avril 2024 par le CIBTP à son conseil indiquant que la carte d'identification professionnelle du BTP a été commandée par la société SLM,

- un chèque d'un montant de 351,02 euros établi le 10 février 2023 par la société SLM sans ordre mais encaissé sur le compte bancaire de son épouse le 15 février 2023 ainsi que cela résulte de l'extrait compte bancaire CCP banque postale produit aux débats,

- un virement de 401,02 euros sur le compte bancaire CCP banque postale de son épouse en date du 13 mars 2023 émanant de la société SLM,

- une mise en demeure de son conseil adressée à la société SLM, en la personne de Monsieur [L] [V], de lui adresser le contrat de travail, les fiches de paie, le justificatif de visite médicale, le justificatif de déclaration auprès des services de l'URSSAF,

- des échanges d'email avec un interlocuteur dont l'identité n'est pas précisée, dans lesquels il lui est demandé d'envoyer sa photographie et une copie de sa carte d'identité,

Il est établi que c'est la société SLM qui a commandé le 23 janvier 2023 la carte d'identification professionnelle BTP de Monsieur [M] [W], dont la détention est nécessaire pour tout travail sur un chantier de BTP que ce soit en qualité de salarié ou d'artisan.

Il est par ailleurs établi que la société SLM a viré la somme de 401,02 euros sur le compte bancaire de l'épouse de Monsieur [M] [W], le chèque encaissé sur ce même compte ne mentionnant aucun ordre.

L'attestation provisoire valant carte d'identification professionnelle du BTP établie le 23 janvier 2023 est insuffisante pour établir que Monsieur [M] [W] a travaillé sous la subordination de la société SLM et le virement bancaire sur le compte de l'épouse de l'appelant est insuffisant pour établir qu'il l'a été en contrepartie d'un travail.

Monsieur [M] [W] ne produit aucun élément démontrant qu'il a effectivement travaillé sous l'autorité de la société SLM dont il aurait reçu des ordres et des directives quant au travail à effectuer.

Il ne produit aucune attestation, aucun élément quant aux horaires de travail qui lui auraient été imposés, aux chantiers sur lesquels il devait intervenir.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, Monsieur [M] [W] ne rapporte pas la preuve qu'il se trouvait dans un lien de subordination à l'égard de la société SLM.

En conséquence, en l'absence de contrat de travail il doit être débouté de toutes ses demandes.

Le jugement de première instance sera infirmé en toutes ses dispositions.

Partie succombante, Monsieur [M] [W] est débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamné aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par défaut, publiquement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement de première instance en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DEBOUTE Monsieur [M] [W] de toutes ses demandes ;

DEBOUTE Monsieur [M] [W] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE Monsieur [M] [W] aux dépens de première instance et d'appel ;

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 24/00183
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;24.00183 ?
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