La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/06/2024 | FRANCE | N°23/01760

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 26 juin 2024, 23/01760


Arrêt n°

du 26/06/2024





N° RG 23/01760





FM/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024





ENTRE :



Maître [R] [I]

en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [C] [W]

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Olivier PINCON, avocat au barreau de REIMS



DÉFEN

DERESSE devant le Conseil de Prud'hommes de VERDUN (jugement rendu le 19 octobre 2020, section agriculture n° F 20/00005)

INTIMÉE devant la Cour d'Appel de NANCY (arrêt du 28 octobre 2021 RG n° 20/02614)

DEMANDERESSE devant la Cour d'Appel de REIMS, c...

Arrêt n°

du 26/06/2024

N° RG 23/01760

FM/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024

ENTRE :

Maître [R] [I]

en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de Monsieur [C] [W]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Olivier PINCON, avocat au barreau de REIMS

DÉFENDERESSE devant le Conseil de Prud'hommes de VERDUN (jugement rendu le 19 octobre 2020, section agriculture n° F 20/00005)

INTIMÉE devant la Cour d'Appel de NANCY (arrêt du 28 octobre 2021 RG n° 20/02614)

DEMANDERESSE devant la Cour d'Appel de REIMS, cour de renvoi

ET :

Monsieur [L] [H]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par la SCP ACG & ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS

DEMANDEUR devant le Conseil de Prud'hommes de VERDUN (jugement rendu le 19 octobre 2020, section agriculture n° F 20/00005)

INTIMÉ devant la Cour d'Appel de NANCY (arrêt du 28 octobre 2021 RG n° 20/02614)

DÉFENDEUR devant la Cour d'Appel de REIMS, cour de renvoi

L'AGS CGEA D'[Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par la SCP X.COLOMES S.COLOMES MATHIEU ZANCHI THIBAULT, avocats au barreau de l'AUBE

DÉFENDERESSE devant le Conseil de Prud'hommes de VERDUN (jugement rendu le 19 octobre 2020, section agriculture n° F 20/00005)

APPELANTE devant la Cour d'Appel de NANCY (arrêt du 28 octobre 2021 RG n° 20/02614)

DÉFENDERESSE devant la Cour d'Appel de REIMS, cour de renvoi

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 26 juin 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame [R] FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

M. [L] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Verdun le 4 avril 2017, en soutenant avoir été embauché par M. [C] [W], exploitant une activité de bûcheron et tâcheron.

Par un jugement du 20 septembre 2018, une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte à l'égard de M. [W] et la société [I] - Raulet a été désignée en qualité de liquidateur.

Par un jugement du 19 octobre 2020, le conseil de prud'hommes de Verdun a :

- débouté le demandeur M. [L] [H] de sa demande de remboursement d'avances de trésorerie à l'employeur,

- dit qu'il y a lieu de déclarer incompétent le conseil sur la demande en avance de trésorerie au profit du tribunal judiciaire pour connaître de la partie du litige qui lui est soumis et dit qu'à défaut de recours, le dossier sera transmis à cette juridiction,

- dit que pour ce faire, le dossier sera disjoint en deux dossiers et seul le second dossier enregistré sous le numéro RG 20/00005 sera transmis au tribunal judiciaire,

- fixé la créance de M. [H] [L] à l'égard de l'entreprise de M. [W] [C], assigné conjointement avec Maître [R] [I], en qualité de mandataire liquidateur, aux sommes de :

. 17 345, 62 euros au titre des salaires,

. 3 004, 20 euros au titre des indemnités de congés payés,

. 1 388, 36 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

- déclaré commun et opposable le présent jugement au CGEA AGS de [Localité 7] dans la limite de sa garantie,

- ordonné l'exécution provisoire conformément aux articles R 1454-14 et 1454-28 du code du travail et dit que la moyenne des trois derniers mois de salaire s'élève à 1300 euros bruts,

- condamner la SCP [R] [I] ' Bruno Raulet : Maître [R] [I] [Adresse 3], ès qualités de mandataire liquidateur de M. [C] [W], aux entiers dépens et aux éventuels frais d'exécution.

L'Unedic AGS a formé appel devant la cour d'appel de Nancy.

Par un arrêt du 28 octobre 2021, la cour d'appel de Nancy a :

- infirmé le jugement en ce qu'il a fixé la créance de M. [L] [H] aux sommes de 17 345,62 euros au titre des salaires, de 3 004,20 euros au titre des indemnités de congés payés et de 1 388,36 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés,

Y ajoutant,

- débouté M. [L] [H] de toutes ses demandes,

- condamné M. [L] [H] aux entiers dépens de l'instance.

Le salarié a formé un pourvoi en cassation le 3 février 2022.

Par un arrêt du 27 septembre 2023, la Cour de cassation a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 octobre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy et a remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt.

La Cour de cassation a retenu que :

« (')

Vu l'article 4 du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

6. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'heures de travail et des congés payés afférents, l'arrêt relève que l'intéressé conteste la réalité des mentions figurant sur les bulletins de salaire pour réclamer le paiement d'heures complémentaires. Il retient que, cependant, il ne produit aucune pièce suffisamment précise détaillant les heures de travail qu'il prétend avoir accomplies et qui n'auraient pas été payées. Il constate, à cet égard, que la pièce n° 1 qu'il produit n'indique pas les horaires de travail selon lesquels il aurait travaillé pendant la période considérée.

7. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, le salarié, qui sollicitait la confirmation du jugement ayant fixé à son profit une créance de salaire au motif que son versement n'avait pas été effectué par l'employeur, soutenait que les bulletins de paie de janvier et février 2016 mentionnaient une base horaire sous-évaluée et que le bulletin de paie de mai 2016 mentionnait des heures d'absence pour arriver à la même sous-évaluation, et qu'il y avait lieu de réintégrer ces différentiels au rappel de salaire, et qu'il résultait de ses propres constatations que l'intéressé sollicitait la réintégration de différents montants constituant, selon lui, des retenues injustifiées sur salaire, au nombre desquelles des heures pour absence sans solde, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé ».

Maître [R] [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire, a établi une déclaration de saisine enregistrée sous les numéros 23/01740 et 23/01760.

Par des conclusions remises au greffe le 20 février 2024 dans le dossier 23/01760, Maître [R] [I], en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de M. [C] [W], demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondée Maître [R] [I], venant en lieu et place de la SCP [R] [I] ' Bruno Raulet, es-qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de [C] [W], en son appel,

- débouter M. [L] [H] de toutes ses demandes, fins et prétentions, plus amples ou contraires à celles de Maître [R] [I], es-qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de [C] [W],

- infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de M. [L] [H] à l'égard de M. [C] [W] aux sommes de 17.345.62 euros à titre de salaires, 3.004,20 euros à titre des indemnités de congés payés, 1.388.36 euros à titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, et condamné la SCP [R] [I] ' Bruno Raulet aux entiers dépens et aux éventuels frais d'exécution.

Statuant à nouveau,

- débouter M. [L] [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- laisser à sa charge les dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers, faculté de recouvrement au profit de Maître Olivier Pinçon, en application des articles 696 et 699 du code de procédure civile.

Par des conclusions remises au greffe le 8 décembre 2023, M. [L] [H] demande à la cour de :

Infirmer le jugement en ce qu'il a :

' fixé la créance de M. [L] [H] à l'égard de l'entreprise de M. [C] [W], assigné conjointement avec Me [R] [I] en qualité de mandataire liquidateur aux sommes de :

- 17 345,62 euros au titre des salaires

- 3 004,20 euros au titre des indemnités de congés payés

- 1 388,36 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés

' déclaré commun et opposable le présent jugement au CGEA-AGS de [Localité 7] dans la limite de leurs garanties

2) Statuant à nouveau et dans les limites de l'infirmation,

- fixer la créance de M. [L] [H] au passif de la liquidation judiciaire, représentée par Maître [R] [I], ès qualité de liquidateur judiciaire, à hauteur des sommes suivantes :

- 17 345,62 euros au titre de salaires impayés inscrits sur ses bulletins de paie, outre la somme de 1 734,56 euros au titre des congés payés afférents

- 628,15 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 62,81 euros au titre des congés payés afférents

- 1 256,30 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 125,63 euros au titre des congés payés afférents.

- Juger que la présente décision est opposable à l'UNEDIC ' CGEA d'[Localité 6]

3) Y ajoutant,

- débouter Maître [R] [I], es-qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de M. [C] [W] de l'ensemble de ses demandes,

- fixer la créance au passif de la liquidation judiciaire, représentée par Maître [R] [I], ès qualité de liquidateur judiciaire, à la somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Maître [R] [I], es-qualité de mandataire judiciaire à la procédure de liquidation judiciaire de M. [C] [W], aux entiers dépens de l'instance.

Par des conclusions remises au greffe le 18 décembre 2023, l'Unedic demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'il y a lieu de déclarer incompétent le Conseil de Prud'hommes sur la demande en avance de trésorerie au profit du Tribunal Judiciaire pour connaître de la partie du litige qui lui est soumis et dit qu'à défaut de recours, le dossier sera transmis à cette juridiction.

- infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de M. [L] [H] à l'égard de l'entreprise de M. [C] [W], assigné conjointement avec Maître [R] [I] en qualité de mandataire liquidateur aux sommes de 17 345.62 euros à titre de salaires, 3004,20 euros à titre des indemnités de congés payés, 1388,36 euros à titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, en ce qu'il a déclaré commun et opposable le présent jugement au CGEA - AGS d'[Localité 6] dans la limite légale de sa garantie, condamné la SCP [R] [I] ' Bruno Raulet : Maître [I] [Adresse 3], ès qualité de mandataire liquidateur de M. [C] [W] aux entiers dépens et aux éventuels frais d'exécution.

Statuant à nouveau,

À titre principal,

- constater l'absence de tout lien de subordination,

En conséquence,

- dire et juger que M. [L] [H] n'est pas lié à M. [W] par un contrat de travail,

- débouter M. [C] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

À titre subsidiaire,

- constater que M. [L] [H] a nové sa créance salariale en créance civile,

- dire et juger qu'en conséquence, la juridiction de céans n'est pas compétente,

- dire et juger que le CGEA ' AGS d'[Localité 6] n'a pas à garantir lesdites créances de nature civile,

A titre encore plus subsidiaire,

- débouter M. [L] [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ce dernier n'étant pas en mesure de justifier le quantum des sommes qu'il réclame,

À titre infiniment subsidiaire,

- prendre acte des limites de garantie du CGEA ' AGS d'[Localité 6].

Motifs :

Sur la jonction

Les dossiers 23/01740 et 23/01760 sont joint sous le numéro 23/01760.

Sur l'étendue de la saisine de la cour

L'arrêt de la Cour de cassation du 27 septembre 2023 a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 octobre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy et a remis l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt.

En application de l'article 638 du code de procédure civile qui dispose que l'affaire est à nouveau jugée en fait et en droit par la juridiction de renvoi à l'exclusion des chefs non atteints par la cassation, cette cour est donc saisie de l'entier litige dont le conseil de prud'hommes de Verdun a été saisi, étant précisé que devant celui-ci, M. [L] [H] a notamment formé des demandes relatives au remboursement d'avances de trésorerie et au versement de salaires.

Sur les avances de trésorerie alléguées

Devant cette cour, M. [L] [H] formule des demandes de paiement de salaires impayés et de rappel de salaire, sans former une demande de remboursement d'avances de trésorerie, comme il l'a fait devant le conseil. Par ailleurs, il demande l'infirmation du jugement uniquement en ce qu'il a :

- fixé sa créance à l'égard de l'entreprise de M. [C] [W], assigné conjointement avec Maître [R] [I] en qualité de mandataire liquidateur aux sommes de 17 345,62 euros au titre des salaires, 3 004,20 euros au titre des indemnités de congés payés et 1 388,36 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés ;

- déclaré commun et opposable le jugement au CGEA-AGS de [Localité 7] dans la limite de leurs garanties.

Il ne demande pas l'infirmation du jugement en ce qu'il :

- l'a débouté de sa demande de remboursement d'avances de trésorerie à l'employeur,

- a dit qu'il y a lieu de déclarer incompétent le conseil sur la demande en avance de trésorerie au profit du tribunal judiciaire pour connaître de la partie du litige qui lui est soumis et dit qu'à défaut de recours, le dossier sera transmis à cette juridiction,

- a dit que pour ce faire, le dossier sera disjoint en deux dossiers et seul le second dossier enregistré sous le numéro RG 20/00005 sera transmis au tribunal judiciaire,

L'Unedic demande quant à elle à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a dit qu'il y a lieu de déclarer incompétent le conseil de prud'hommes sur la demande en avance de trésorerie au profit du tribunal judiciaire pour connaître de la partie du litige qui lui est soumis et dit qu'à défaut de recours, le dossier sera transmis à cette juridiction.

Maître [R] [I] ne demande pas l'infirmation du jugement des chefs relatifs aux avances de trésorerie.

Dans ces conditions, la cour confirme le jugement en ce qu'il a :

- débouté le demandeur M. [L] [H] de sa demande de remboursement d'avances de trésorerie à l'employeur,

- dit qu'il y a lieu de déclarer incompétent le conseil sur la demande en avance de trésorerie au profit du tribunal judiciaire pour connaître de la partie du litige qui lui est soumis et dit qu'à défaut de recours, le dossier sera transmis à cette juridiction,

- dit que pour ce faire, le dossier sera disjoint en deux dossiers et seul le second dossier enregistré sous le numéro RG 20/00005 sera transmis au tribunal judiciaire.

Sur le contrat de travail

Moyens de parties

M. [L] [H] indique qu'il justifie de l'existence d'un contrat de travail apparent par la production de titres d'emploi simplifié agricole pour la période allant du 1er janvier au 31 octobre 2015 et de bulletins de paie pour le mois de décembre 2015 et pour la période allant de janvier 2016 à janvier 2017.

Maître [I] soutient que la relation contractuelle ne repose pas sur un contrat de travail, que M. [C] [W] a indiqué dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire qu'il travaillait avec ses quatre oncles et qu'ils avaient créé cette activité pour leur procurer un travail, que M. [L] [H] indique qu'il aurait prêté une somme de 14 716,16 euros au titre d'une avance de trésorerie à son employeur et qu'il aurait payé de nombreuses factures de fournisseurs, qu'en réalité la famille [W]-[H] avait constitué une société créée de fait familiale pour la réalisation de travaux communs mais sans lien de subordination entre les uns et les autres, et que M. [L] [H] exploitait à titre individuel et n'avait pas la qualité de salarié. Elle ajoute que si une relation de travail a pu exister au cours de l'année 2015, il est patent qu'elle a fait l'objet d'une novation à compter de l'année 2016, ce qui explique l'absence de demandes formées avant le prononcé la liquidation judiciaire. Elle soutient que M. [L] [H] s'est comporté en associé d'une société de fait est que la créance qu'il invoque n'a pas un caractère salarial, en l'absence de tout lien de subordination.

L'AGS précise quant à elle que M. [L] [H] prétend ne pas avoir été payé pendant plus d'un an de ses salaires alors qu'il n'a formulé aucune réclamation, ce qui est étonnant, qu'on se demande pour quelle raison M. [L] [H] aurait accepté de régulariser de nouveaux contrats suite à la conclusion de contrats à durée déterminée s'il n'avait pas été payé de ses précédents salaires, que M. [C] [W] a affirmé dans le cadre de la procédure collective qu'il employait ses quatre oncles et qu'il avait créé cette activité pour leur procurer un travail, que ces éléments ne peuvent que conduire à s'interroger sur la véritable qualité de M. [L] [H] et sur la nature salariale des créances alléguées, que M. [L] [H] a en réalité voulu nover sa créance issue de l'avance de trésorerie alléguée de 14 716, 16 euros, que l'AGS n'a donc pas à garantir la créance, et qu'en outre, M. [L] [H] n'était soumis à aucun lien de subordination.

Réponse de la cour

M. [L] [H] produit :

- des bulletins de salaire mentionnant M. [C] [W] comme employeur, pour la période allant du 15 novembre au 31 décembre 2015 ainsi que des titres emploi simplifié agricole pour la période allant du 19 janvier 2015 au 28 avril 2015 puis du 2 mai au 30 juin 2016 puis du 1er au 31 octobre 2015 ;

- des bulletins de salaire mentionnant M. [C] [W] comme employeur, pour les mois de janvier à juin 2016 ainsi que des bulletins de salaire établis par la Mutualité Sociale Agricole dans le cadre de titres emploi simplifié agricole pour les mois de juillet 2016 à janvier 2017 ;

- un certificat de travail établi par M. [C] [W] le 10 février 2017.

Il résulte de ces éléments que M. [L] [H] prouve l'existence d'un contrat de travail apparent.

Il appartient donc à Maître [R] [I] et à l'Unedic, qui contestent l'existence d'une relation salariale, de rapporter la preuve de son caractère fictif.

Or, si ces deux parties font état de différents éléments présentés ci-dessus, ils procèdent par de simples allégations générales, qui ne sont corroborées par aucune pièce pertinente. Ils n'établissent donc pas l'existence d'une société créée de fait ni d'une société de fait ni d'une novation, pas plus que l'absence d'un lien de subordination.

Le jugement a donc retenu à juste titre l'existence d'une relation salariale.

Il y a dès lors lieu d'examiner les demandes de M. [L] [H] tendant à ce que les sommes suivantes soient fixées au passif de la liquidation judiciaire :

- 17 345,62 euros au titre de salaires impayés inscrits sur ses bulletins de paie, outre la somme de 1 734,56 euros au titre des congés payés afférents : M. [L] [H] soutient que ces salaires ne lui ont pas été payés au titre des mois de janvier 2016 à janvier 2017 ;

- 628,15 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 62,81 euros au titre des congés payés afférents : M. [L] [H] indique que cette somme a été déduite de son salaire du mois de mai 2016 au titre de prétendues heures d'absence sans solde, alors qu'une telle retenue n'est pas justifiée ;

- 1 256,30 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 125,63 euros au titre des congés payés afférents : M. [L] [H] indique que les bulletins de paie des mois de janvier et février 2016 mentionnent une durée du travail de 114, 72 heures avec un salaire calculé en conséquence, alors que les autres bulletins de paie font état d'une base horaire de 151, 67 heures.

Il est fait droit à la première demande de fixation, dans la mesure où la preuve du paiement des salaires par l'employeur n'est pas rapportée à hauteur de ces sommes, ainsi qu'à la deuxième, dès lors que la preuve du paiement de l'intégralité du salaire du mois de mai 2016 par l'employeur n'est pas rapportée. Par ailleurs, Maître [I] et l'Unedic allèguent certes que M. [L] [H] a signé des soldes de tout compte mais ils ne les produisent pas. Ils indiquent également, dans les mêmes termes, que les sommes réclamées par M. [L] [H] « sont largement supérieures à 10 % de la rémunération qu'il affirme lui être due », sans toutefois expliciter cette affirmation.

Il est également fait droit à la troisième demande de fixation. Si Maître [I] allègue qu'on ne peut que constater que M. [L] [H] avait une activité à temps partiel, il y a lieu de rappeler que l'absence de contrat de travail à temps partiel, établi par écrit, fait présumer que ce dernier a été conclu à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve qu'il s'agit bien d'un contrat à temps partiel. Or, cette preuve n'est pas rapportée.

Le jugement est dès lors infirmé en ce qu'il a fixé la créance de M. [L] [H] à l'égard de l'entreprise de M. [C] [W], assigné conjointement avec Me [R] [I] en qualité de mandataire liquidateur aux sommes de :

- 17 345,62 euros au titre des salaires,

- 3 004,20 euros au titre des indemnités de congés payés,

- 1 388,36 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés.

Statuant à nouveau, la cour fixe la créance de M. [L] [H] au passif de la liquidation judiciaire à hauteur des sommes suivantes :

- 17 345,62 euros au titre de salaires impayés inscrits sur ses bulletins de paie, outre la somme de 1 734,56 euros au titre des congés payés afférents,

- 628,15 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 62,81 euros au titre des congés payés afférents

- 1 256,30 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 125,63 euros au titre des congés payés afférents.

L'AGS devra sa garantie dans les conditions prévues par la loi, sans qu'il y ait lieu de lui dire cet arrêt opposable puisqu'elle est partie à la procédure.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

Ainsi que le demande M. [L] [H], la somme de 2 000 euros est fixée au passif au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

Le jugement est infirmé en ce qu'il a condamné Maître [R] [I] aux dépens.

Les dépens de première instance et d'appel seront des frais privilégiés de la procédure collective.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement en ce qu'il :

- a débouté le demandeur M. [H] [L] de sa demande de remboursement d'avances de trésorerie à l'employeur,

- dit qu'il y a lieu de déclarer incompétent le conseil sur la demande en avance de trésorerie au profit du tribunal judiciaire pour connaître de la partie du litige qui lui est soumis et dit qu'à défaut de recours, le dossier sera transmis à cette juridiction,

- dit que pour ce faire, le dossier sera disjoint en deux dossiers et seul le second dossier enregistré sous le numéro RG 20/00005 sera transmis au tribunal judiciaire ;

Infirme le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

Fixe la créance de M. [L] [H] au passif de la liquidation judiciaire, représentée par Maître [R] [I], en sa qualité de liquidateur judiciaire, à hauteur des sommes suivantes :

- 17 345,62 euros au titre de salaires impayés inscrits sur ses bulletins de paie, outre la somme de 1 734,56 euros au titre des congés payés afférents,

- 628,15 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 62,81 euros au titre des congés payés afférents,

- 1 256,30 euros à titre de rappel de salaire, outre la somme de 125,63 euros au titre des congés payés afférents ;

- 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Juge que la garantie de l'AGS est due dans les conditions prévues par la loi ;

Dit que les dépens de la première instance et de l'appel sont des frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/01760
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;23.01760 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award