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26/06/2024 | FRANCE | N°23/01120

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 26 juin 2024, 23/01120


Arrêt n°

du 26/06/2024





N° RG 23/01120





AP/FM/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024





APPELANTE :

d'un jugement rendu le 27 février 2023 par le Conseil de Prud'hommes d'EPERNAY, section Commerce (n° F 22/00028)



Madame [V] [R] épouse [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]



(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numÃ

©ro 2023-003014 du 10/08/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de REIMS)



Représentée par Me Anne-Dominique BRENER, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE





INTIMÉE :



SAS AGENOR [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité...

Arrêt n°

du 26/06/2024

N° RG 23/01120

AP/FM/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 27 février 2023 par le Conseil de Prud'hommes d'EPERNAY, section Commerce (n° F 22/00028)

Madame [V] [R] épouse [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2023-003014 du 10/08/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de REIMS)

Représentée par Me Anne-Dominique BRENER, avocat au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE

INTIMÉE :

SAS AGENOR [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par la SELAS ERNST & YOUNG SOCIETE D'AVOCATS, avocats au barreau de LILLE

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 26 juin 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame Isabelle FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Exposé du litige :

Mme [V] [R] épouse [J] a été embauchée par la SAS Agenor [Localité 5] dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à temps partiel, à compter du 26 mai 2021 en qualité d'agent de service.

Le 1er juillet 2021, Mme [V] [R] épouse [J] a indiqué verbalement à sa supérieure hiérarchique qu'elle entendait démissionner de son poste.

Le même jour, elle a envoyé une lettre de démission à la SAS Agenor [Localité 5] qui lui est revenue avec la mention « destinataire inconnu à l'adresse ».

A compter de cette date, Mme [V] [R] épouse [J] n'a plus effectué de prestation de travail pour le compte de la SAS Agenor [Localité 5].

Par courrier du 8 octobre 2021, la SAS Agenor [Localité 5] a demandé à Mme [V] [R] épouse [J] de lui envoyer une lettre de démission.

Le 18 novembre 2021, une conciliatrice de justice a transmis à la SAS Agenor [Localité 5] la lettre de démission de Mme [V] [R] épouse [J] datée du 1er juillet 2021.

Le 20 avril 2022, Mme [V] [R] épouse [J] a saisi le conseil de prud'hommes d'Epernay d'une demande de requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de diverses demandes en paiement à caractère salarial et indemnitaire.

Par jugement du 27 février 2023, le conseil de prud'hommes a:

- dit que Mme [V] [R] épouse [J] a démissionné ;

- débouté Mme [V] [R] épouse [J] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné Mme [V] [R] épouse [J] à verser à la SAS Agenor [Localité 5] la somme de 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [V] [R] épouse [J] aux entiers dépens de l'instance.

Le 28 juin 2023, Mme [V] [R] épouse [J] a interjeté appel du jugement dans son intégralité.

Exposé des prétentions et moyens des parties :

Dans ses écritures remises au greffe le 21 mars 2024, Mme [V] [R] épouse [J] demande à la cour :

- de la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

- de débouter la SAS Agenor [Localité 5] de sa demande d'irrecevabilité de l'appel ;

- de débouter la SAS Agenor [Localité 5] de sa demande de caducité de la déclaration d'appel ;

- d'infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- de dire et juger qu'elle n'a pas démissionné à effet au 18 novembre 2021;

- de requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- de dire et juger qu'elle a été licenciée sans cause réelle et sérieuse et sans procédure de licenciement ;

- de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes ;

- de condamner la SAS Agenor [Localité 5] à lui payer les sommes de :

45,45 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

4,54 euros à titre de congés payés afférents,

206,11 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

206,11 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

205,92 euros à titre de salaire d'octobre 2021,

133,06 euros à titre de salaire du 1er au 18 novembre 2021,

33,90 euros à titre de congés payés afférents aux salaires d'octobre et novembre 2021 ;

- d'ordonner à la SAS Agenor [Localité 5] de lui remettre une attestation France Travail rectifiée, un bulletin de paie d'août 2021 et des bulletins de paie rectifiés d'octobre 2021 et novembre 2021, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document, la cour se déclarant compétente pour liquider l'astreinte ;

- de débouter la SAS Agenor [Localité 5] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis de 45,45 euros ;

- de débouter la SAS Agenor [Localité 5] de sa demande de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la SAS Agenor [Localité 5] aux dépens.

Dans ses écritures remises au greffe le 22 décembre 2023, la SAS Agenor [Localité 5] demande à la cour de:

A titre principal

- juger irrecevable la déclaration d'appel de Mme [V] [R] épouse [J],

le recours n'ayant pas été exercé devant la bonne juridiction,

l'appel étant forclos;

A défaut,

- juger l'appel caduc dans la mesure où l'appelante n'a pas signifié de conclusions à l'encontre de la partie intimée dans le délai de trois mois ;

A titre subsidiaire

- confirmer le jugement ayant jugé que Mme [V] [R] épouse [J] avait démissionné ;

- débouter Mme [V] [R] épouse [J] de l'ensemble de ses demandes ;

- confirmer la condamnation de Mme [V] [R] épouse [J] à 100 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens relativement à la première instance ;

En tout état de cause, y ajoutant,

- condamner Mme [V] [R] épouse [J] au paiement de la somme de 45,45 euros à titre de préavis de démission non effectué ;

- condamner Mme [V] [R] épouse [J] au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner Mme [V] [R] épouse [J] aux entiers frais et dépens de la présente instance.

Motifs :

Sur la demande d'irrecevabilité de la déclaration d'appel

La SAS Agenor [Localité 5] prétend à l'irrecevabilité de la déclaration d'appel en invoquant une erreur dans la voie de recours empruntée et la forclusion de l'appel.

sur la juridiction compétente

La SAS Agenor [Localité 5] soutient que la déclaration d'appel est irrecevable car le jugement précise avoir été rendu en dernier ressort et qu'ainsi seule la Cour de cassation était compétente.

Mme [V] [R] épouse [J] réplique que le jugement a été qualifié de jugement rendu en dernier ressort de façon inexacte et se prévaut d'une décision de la Cour de cassation qui a rejeté sa demande d'aide juridictionnelle au motif que sa demande de requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse présentée devant le conseil de prud'hommes était indéterminée et qu'en conséquence le jugement était susceptible d'appel.

Sur ce,

L'article 34 du code de procédure civile énonce que 'La compétence en raison du montant de la demande ainsi que le taux du ressort au-dessous duquel l'appel n'est pas ouvert sont déterminés par les règles propres à chaque juridiction et par les dispositions ci-après'.

Selon l'article D. 1462-3 du code du travail, le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes est de 5 000 euros.

Selon l'article 35 du code de procédure civile, lorsque des prétentions sont fondées sur des faits différents et non connexes, la compétence et le taux du ressort sont déterminés par la valeur de chaque prétention considérée isolément.

Selon l'article 36 du code de procédure civile, lorsque plusieurs prétentions sont émises en vertu d'un titre commun par plusieurs demandeurs ou défendeurs, la compétence et le taux du ressort sont déterminés pour l'ensemble des prétentions par la plus élevée d'entre elles.

L'article 40 du code de procédure civile énonce que 'Le jugement qui statue sur une demande indéterminée est, sauf disposition contraire, susceptible d'appel'.

En l'espèce,

A titre liminaire, la cour observe que même si le jugement mentionne qu'il a été rendu en dernier ressort, cette mention ne la dispense pas de rechercher s'il est éventuellement quand même susceptible d'appel et ce par application de l'article 536 du code de procédure civile."

Pour déterminer si l'appel de l'employeur est recevable ou non, la cour doit rechercher si le jugement a été rendu en premier ou dernier ressort au regard des règles applicables et des montants des demandes qui ont été formées.

Mme [V] [R] épouse [J] a formulé une demande tendant à voir juger que sa démission est équivoque et non libre et s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Une telle demande constitue une demande autonome et préalable à l'appréciation des demandes chiffrées et a un caractère indéterminé. Elle ne saurait être assimilée à un simple moyen de droit invoqué à l'appui de demandes pécuniaires déterminées en leur quantum et inférieures au taux de dernier ressort.

En conséquence, le jugement a été qualifié à tort de jugement rendu en dernier ressort.

Le moyen d'irrecevabilité doit donc être écarté.

sur le délai de recours

La SAS Agenor [Localité 5] prétend à l'irrecevabilité de l'appel en soutenant qu'il n'a pas été interjeté dans le délai d'un mois prévu à l'article 538 du code de procédure civile. Elle soutient que la décision du bureau d'aide juridictionnelle de la Cour de cassation n'est pas une décision d'irrecevabilité notifiée par le greffe au sens de l'article 536 du code de procédure civile et qu'en conséquence le délai d'appel n'a pas recommencé à compter de sa notification.

Mme [V] [R] épouse [J] soutient, sur le fondement de l'article 536 du code de procédure civile, que son appel a été interjeté dans le délai d'un mois puisqu'il date du 28 juin 2023 et que la notification de rejet de la Cour de cassation lui a été notifiée le 30 mai 2021.

Sur ce,

L'article 536 du code de procédure civile énonce que ' la qualification inexacte d'un jugement par les juges qui l'ont rendu est sans effet sur le droit d'exercer un recours.

Si le recours est déclaré irrecevable en raison d'une telle inexactitude, la décision d'irrecevabilité est notifiée par le greffe à toutes les parties à l'instance du jugement. Cette notification fait courir à nouveau le délai prévu pour l'exercice du recours approprié'.

Aux termes de l'article 680 alinéa 1 du code de procédure civile, 'l'acte de notification d'un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé'.

Sur le fondement de ces deux articles, la Cour de cassation a pu juger que le délai de recours ne court pas lorsque le jugement entrepris comporte une mention erronée sur sa qualification, à moins que l'acte de notification de ce jugement n'ait indiqué la voie de recours qui était effectivement ouverte. (Civ. 2e, 3 juin 1999, n° 97-15.511; Civ.2e , 16 mai 2002 n° 01-02.300 )

Elle a également jugé que l'acte de notification d'un jugement qui ne mentionne pas la voie de recours ouverte, son délai ou ses modalités d'exercice ou qui comporte des mentions erronées la concernant ne fait pas courir le délai de recours. (Civ. 1ère 28 janvier 2016, n° 15-11.391)

En l'espèce,

L'acte de notification du jugement porte la mention qu'un pourvoi en cassation pouvait être

formé dans le délai de deux mois.

Il résulte des précédents développements que le jugement a été qualifié à tort de jugement en dernier ressort et pouvait faire l'objet d'un appel.

Il s'ensuit que l'acte de notification du jugement mentionne une voie et un délai de recours erronés, de sorte qu'il n'a pas fait pas courir le délai de recours.

En conséquence, aucune forclusion n'est encourue.

L'appel est donc recevable.

Sur la demande de caducité de l'appel

La SAS Agenor [Localité 5] prétend à la caducité de l'appel en faisant valoir que Mme [V] [R] épouse [J] a pris des conclusions à l'encontre d'une société qui n'est pas visée par la déclaration d'appel et qui n'est donc pas l'intimée mise en cause.

Mme [V] [R] épouse [J] s'oppose à cette demande et soutient avoir régularisé sa déclaration d'appel contre la bonne personne morale, à savoir la SAS Agenor [Localité 5], le 28 juin 2023. Elle se prévaut également d'un arrêt de la Cour de cassation du 4 février 2021 (n°20-10.685) selon lequel l'erreur de dénomination d'une partie ne peut constituer qu'un vice de forme qui n'entraîne sa nullité que sur justification d'un grief.

Sur ce,

L'article 908 du code de procédure civile énonce qu' 'à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour remettre ses conclusions au greffe'.

En l'espèce,

Le jugement a été rendu pour la SAS Agenor [Localité 5] et la déclaration d'appel a été formée à l'encontre de celle-ci le 28 juin 2023.

Mme [V] [R] épouse [J] a déposé des écritures le 26 septembre 2023, soit dans le délai de trois prévu à l'article 908 du code de procédure civile, à l'encontre de la SAS Agenor Picardie Champagne.

La SAS Agenor [Localité 5] et la SAS Agenor Picardie Champagne sont deux personnes morales distinctes, la première s'est substituée à la seconde à la suite d'un apport partiel d'actifs intervenu en novembre 2021.

Toutefois, si les conclusions de Mme [V] [R] épouse [J] visent la SAS Agenor Picardie Champagne, l'adresse mentionnée est celle de la SAS Agenor [Localité 5]. Il s'agit donc manifestement d'une simple erreur de dénomination de la personne morale donc d'un vice de forme.

Aucune nullité n'est invoquée et la caducité ne peut être retenue dès lors que les conclusions ont été notifiées dans le délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

La SAS Agenor [Localité 5] doit être déboutée de sa demande.

Sur la rupture du contrat de travail

Mme [V] [R] épouse [J] prétend que sa démission, donnée en juillet 2021, est équivoque et n'a pas été donnée librement. Elle expose avoir demandé à reprendre son travail le 13 octobre 2021 et soutient que la conciliatrice de justice qu'elle a été consultée, n'avait aucun pouvoir pour la représenter et ne pouvait pas faire acter sa démission à sa place.

La SAS Agenor [Localité 5] conteste le caractère équivoque de la démission et fait valoir qu'après avoir informé oralement le 1er juillet 2021 sa responsable de sa démission, Mme [V] [R] épouse [J] a cessé de se présenter sur son lieu de son travail et a écrit un courrier de démission qui est clair et non équivoque.

Sur ce,

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre. Ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d'essai.

Une démission ne se présume pas, excepté en cas d'abandon de poste du salarié. Elle n'est soumise à aucun formalisme particulier. Elle peut être orale ou écrite et n'a pas à être motivée.

Elle doit être un acte libre et procéder d'une volonté claire et non équivoque du salarié. La volonté de démissionner du salarié ne doit donc pas avoir été altérée par l'exercice d'une violence morale (Cass. soc., 13 nov. 1986, no 84-41.013) ou la mise en 'uvre de man'uvres dolosives (Cass. soc., 22 mai 2002, no 00-41.708).

La rétractation est possible lorsque la volonté de démissionner n'a pas été clairement exprimée et que le salarié se ravise pour faire connaître sa véritable intention.

En l'espèce,

Mme [V] [R] épouse [J] a envoyé une lettre datée du 1er juillet 2021 à la SAS Agenor [Localité 5], rédigée dans les termes suivants : ' Bonjour, je voudrais démissionner car j'ai un autre travail. Merci. Cordialement'.

Elle indique que cette lettre lui est revenue avec la mention 'destinataire inconnu à l'adresse envoyé', le nom et l'adresse de la SAS Agenor [Localité 5] indiquées étant erronées.

Il est constant qu'à compter de cette date, Mme [V] [R] épouse [J] ne s'est plus présentée sur son lieu de travail.

Par courrier du 8 octobre 2021, la SAS Agenor [Localité 5] a demandé à Mme [V] [R] épouse [J] de bien vouloir confirmer par écrit sa volonté de démissionner qu'elle a exprimé auprès de sa responsable hiérarchique par téléphone le 1er juillet 2021 et qui lui avait alors demandé d'adresser par voie postale sa démission.

Aucune réponse n'a été adressée à la SAS Agenor [Localité 5].

Mme [V] [R] épouse [J] explique que n'ayant pas de travail elle s'est ravisée et a écrit à la SAS Agenor [Localité 5] pour demander à travailler à nouveau.

Elle verse aux débats un document daté du 13 octobre 2021 ainsi libellé, 'bonjour Madame [U] je suis Madame [J] [V] je voudrais que vous m'envoyer les clés pour que je puisse travailler de nouveau si c'est possible pour lundi '.

Ce document porte la mention 'snapchat' daté du 15/10/2021 à 19:02.

L'employeur conteste l'avoir reçu, en faisant valoir qu'il s'agit d'un message snapchat et qu'il n'utilise pas ce moyen de communication avec ses salariés.

Mme [V] [R] épouse [J] produit un accusé de réception en date du 18 octobre 2021 pour justifier l'envoi de ce message par la voie postale.

Cependant, l'indication du destinataire n'est pas lisible, de sorte que la preuve de l'envoi de ce document à la SAS Agenor [Localité 5] n'est pas rapportée.

Par mail du 18 novembre 2021, la conciliatrice de justice que Mme [V] [R] épouse [J] a consulté, a adressé à la SAS Agenor [Localité 5] le courrier de démission de Mme [V] [R] épouse [J], daté du 1er juillet 2021, qui n'avait pu être délivré à la SAS Agenor [Localité 5] par les services postaux et lui a demandé 'afin de clôturer son dossier, pourriez-vous prendre en compte l'antériorité de sa décision de démissionner et de lui adresser son attestation pôle emploi et solde de tout compte'.

La SAS Agenor [Localité 5] a fixé à la date du 18 novembre 2021 la rupture du contrat après avoir indiqué à la conciliatrice de justice qu'elle ne pouvait pas fixer la démission à compter du mois de juillet étant donné que Mme [V] [R] épouse [J] avait reçu des fiches de paie en août, septembre et octobre et qu'elle avait procédé à la DSN.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments, comme a pu le constater le conseil de prud'hommes, que Mme [V] [R] épouse [J] a bien montré sa volonté de démissionner dans sa lettre du 1er juillet 2021 et en a donné la raison, qu'elle n'a jamais réclamé ses salaires prouvant ainsi qu'elle ne pensait plus faire partie de l'entreprise et que la démarche auprès de la conciliatrice démontre également sa volonté de démissionner en lui apportant comme justificatif sa lettre de démission.

La volonté de démissionner a bien fait l'objet d'un acte clair et est non équivoque.

Aucun élément ne tend à démonter que cette démission n'a pas été libre.

En conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il débouté Mme [V] [R] épouse [J] de sa demande tendant à voir requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes (indemnité compensatrice de préavis, congés payés afférents, indemnité légale de licenciement, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, dommages-intérêts pour procédure irrégulière).

Sur la demande de rappel de salaires des mois d'octobre et novembre 2021

Mme [V] [R] épouse [J] sollicite un rappel de salaire à partir du 13 octobre 2021, date à laquelle elle aurait exprimé son souhait de retravailler, jusqu'au 18 novembre 20221, date de rupture du contrat de travail.

En l'absence de prestation de travail fournie de sa part pendant cette période et alors qu'il est retenu qu'elle avait exprimé sa volonté de démissionner dès le 1er juillet 2021, Mme [V] [R] épouse [J] ne peut prétendre à un paiement de salaire.

En conséquence, Mme [V] [R] épouse [J] doit être déboutée de sa demande.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur les documents de fin de contrat

Compte tenu des précédents développements, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise par l'employeur de documents de travail rectifiés.

Le jugement est confirmé de ce chef.

Sur la demande reconventionnelle de la SAS Agenor [Localité 5] au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

La SAS Agenor [Localité 5] sollicite pour la première fois la condamnation de Mme [V] [R] épouse [J] au paiement d'une indemnité compensatrice pour le préavis qu'elle n'a pas effectué.

Mme [V] [R] épouse [J] fait observer que cette demande est formulée pour la première fois en cause d'appel et conclut au débouté de la SAS Agenor [Localité 5] en soutenant que sa démission constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur ce,

L'article 70 alinéa 1 du code de procédure civile énonce que 'les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.'

S'agissant du préavis, en application de l'article L. 1237-1 du code de travail, lorsque le salarié qui démissionne ne respecte pas son délai de préavis, il est redevable envers son employeur d'une indemnité correspondant au préavis qu'il n'a pas exécuté.

En l'espèce,

La demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis est une conséquence de la démission et se rattache par un lien suffisant à la demande initiale tendant à faire reconnaître que la démission produit les effets d' un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à statuer sur les conséquences en résultant.

En fait, Mme [V] [R] épouse [J] a démissionné sans effectuer de préavis.

Son contrat de travail prévoyait qu'après la période d'essai, la rupture du contrat pouvait intervenir dans le respect du délai de préavis prévu par la convention collective des entreprises de propreté.

L'article 4.11 de la convention collective prévoit qu'en cas de rupture du contrat de travail par un agent de propreté qui justifie d'une ancienneté comprise entre un et six mois le préavis est de deux jours.

Par conséquent, la SAS Agenor [Localité 5] est fondée à solliciter le paiement de la somme de 45,45 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis dont le quantum n'est pas contesté.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Le jugement doit être confirmé du chef des dépens et des frais irrépétibles.

A hauteur d'appel, Mme [V] [R] épouse [J] est condamnée aux dépens et à payer la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Sa demande est quant à elle rejetée.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Juge l'appel recevable ;

Déboute la SAS Agenor [Localité 5] de sa demande de caducité de l'appel ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [V] [R] épouse [J] à payer à la SAS Agenor [Localité 5] la somme de 45,45 euros à titre d'indemnité pour préavis non effectué ;

Dit que les condamnations sont prononcées sous réserve d'y déduire le cas échéant, les charges sociales et salariales ;

Déboute Mme [V] [R] épouse [J] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [V] [R] épouse [J] à payer à la SAS Agenor [Localité 5] la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [V] [R] épouse [J] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/01120
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;23.01120 ?
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