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26/06/2024 | FRANCE | N°23/00952

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 26 juin 2024, 23/00952


Arrêt n°

du 26/06/2024





N° RG 23/00952





MLB/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024





APPELANT :

d'un jugement rendu le 30 mai 2023 par le Conseil de Prud'hommes de TROYES, section Commerce (n° F 22/00096)



Monsieur [U] [E]

[Adresse 4]

[Localité 1]



Représenté par Me Morgane SOZZA, avocat au barreau de l'AUBE



INTIMÉE :



Madame [H] [J] [C]

gérante de l'HOTEL BAR RESTAURANT [5]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS et par la SELAS FIDAL DIRECTI...

Arrêt n°

du 26/06/2024

N° RG 23/00952

MLB/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024

APPELANT :

d'un jugement rendu le 30 mai 2023 par le Conseil de Prud'hommes de TROYES, section Commerce (n° F 22/00096)

Monsieur [U] [E]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Morgane SOZZA, avocat au barreau de l'AUBE

INTIMÉE :

Madame [H] [J] [C]

gérante de l'HOTEL BAR RESTAURANT [5]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par la SCP DELVINCOURT - CAULIER-RICHARD - CASTELLO AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS et par la SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, avocats au barreau de l'AUBE

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 26 juin 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame Isabelle FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Monsieur [U] [E] - prétendant avoir travaillé pour le compte de Madame [H] [J] [C], exerçant sous l'enseigne Hôtel Bar Restaurant [5], dans le cadre d'une relation salariée du 16 octobre 2020 au 18 décembre 2020 ayant pris fin en dehors de toute procédure de licenciement- a saisi le 11 avril 2022, le conseil de prud'hommes de Troyes d'une demande de requalification de la relation contractuelle en un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein et de demandes en paiement à caractère indemnitaire et salarial.

Madame [H] [J] [C] lui opposait alors notamment l'incompétence du conseil de prud'hommes au profit du tribunal de commerce.

Par jugement en date du 30 mai 2023, le conseil de prud'hommes :

- s'est déclaré matériellement compétent pour connaître du litige,

- a déclaré Monsieur [U] [E] recevable et partiellement fondé en ses demandes,

- a requalifié la relation contractuelle entre les parties en un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à hauteur de 24 heures par semaine, à compter du 19 octobre 2020,

- a fixé le salaire de référence de Monsieur [U] [E] à la somme de 1058,72 euros bruts,

- a condamné Madame [H] [J] [C] à payer à Monsieur [U] [E] les sommes de :

. 2117,44 euros bruts à titre de rappel de salaire d'octobre à décembre 2020 auquel il y a lieu de déduire la somme de 1000 euros nets versée le 2 décembre 2020,

. 211,74 euros bruts à titre de congés payés afférents,

. 1058,72 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée,

. 211,74 euros bruts à titre d'indemnité de précarité,

. 100 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 244,32 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 24,43 euros bruts à titre de congés payés afférents,

. 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à Madame [H] [J] [C] de remettre à Monsieur [U] [E] les bulletins de paie rectifiés d'octobre 2020 à décembre 2020, le certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi, sous astreinte, qu'il s'est réservé le droit de liquider,

- débouté Monsieur [U] [E] du surplus de ses demandes,

- débouté Madame [H] [J] [C] de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles et au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné Madame [H] [J] [C] aux dépens comprenant les éventuels frais d'exécution forcée par voie d'huissier de justice.

Le 12 juin 2023, Monsieur [U] [E] a formé une déclaration d'appel.

Dans ses écritures en date du 12 avril 2024, il demande à la cour :

- de juger que la cour a compétence matérielle pour connaître du litige,

- de confirmer le jugement en ce qu'il a requalifié la relation contractuelle en un contrat de travail à durée indéterminée,

- d'infirmer le jugement pour le surplus,

- de statuer à nouveau,

- de requalifier la relation contractuelle en un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein à compter du 16 octobre 2020,

- de fixer le salaire de référence à la somme de 1544 euros bruts,

- de condamner Madame [H] [J] [C] aux sommes suivantes :

. 3088 euros à titre de rappel de salaire d'octobre à décembre 2020 et à tout le moins 2117,44 euros,

. 308 euros à titre de congés payés afférents et à tout le moins 211,74 euros,

. 1544 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée,

. 308 euros à titre d'indemnité de précarité,

. 9264 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

. 1544 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 570,08 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 57 euros à titre de congés payés afférents,

. 2500 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail,

. 2500 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral,

. 7000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- d'ordonner la remise de l'attestation Pôle Emploi, du certificat de travail et des bulletins de salaire d'octobre à décembre 2020, sous astreinte,

- de condamner Madame [H] [J] [C] aux dépens,

- de débouter Madame [H] [J] [C] de sa demande reconventionnelle.

Dans ses écritures en date du 16 février 2024, Madame [H] [J] [C] demande à la cour :

- in limine litis, de se déclarer incompétente en ce qui concerne la relation contractuelle qui a couru entre le 19 octobre et le 23 décembre 2020 et de dire et juger que seul le tribunal de commerce de Troyes est compétent sur cette question,

en conséquence,

- de débouter Monsieur [U] [E] de ses demandes relatives à la période courant à compter du 19 octobre 2020,

- de juger que sur le fondement du principe selon lequel la fraude corrompt tout, la demande de requalification de la relation contractuelle et toutes les demandes subséquentes devront être rejetées par la cour,

en tout état de cause et statuant à nouveau, de :

- déclarer Monsieur [U] [E] mal fondé en son appel,

- réformer le jugement en ce qu'il :

. a requalifié la relation contractuelle entre les parties en un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à hauteur de 24 heures par semaine, à compter du 19 octobre 2020,

. a fixé le salaire de référence de Monsieur [U] [E] à la somme de 1058,72 euros bruts,

. l'a condamnée à payer à Monsieur [U] [E] les sommes de :

. 2117,44 euros bruts à titre de rappel de salaire d'octobre à décembre 2020 auquel il y a lieu de déduire la somme de 1000 euros nets versée le 2 décembre 2020,

. 211,74 euros bruts à titre de congés payés afférents,

. 1058,72 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée,

. 211,74 euros bruts à titre d'indemnité de précarité,

. 100 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 244,32 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

. 24,43 euros bruts à titre de congés payés afférents,

. 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

. lui a ordonné de remettre à Monsieur [U] [E] les bulletins de paie rectifiés d'octobre 2020 à décembre 2020, le certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi, sous astreinte,

. l'a condamnée aux dépens,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- débouter Monsieur [U] [E] de ses demandes,

- condamner Monsieur [U] [E] à lui payer la somme de 24183,08 euros nets à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale de son contrat de travail et en raison de la mauvaise foi mise en 'uvre dans le cadre de la rupture de son contrat de travail et d'une violation des dispositions des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail dont il s'est rendu coupable,

- condamner Monsieur [U] [E] à lui payer la somme de 4500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [U] [E] aux dépens.

Motifs :

A titre liminaire, il convient de relever que la disposition du jugement aux termes de laquelle les premiers juges ont débouté Madame [H] [J] [C] de sa demande en paiement d'une somme de 24183,08 euros est définitive, en ce qu'elle n'est frappée ni d'un appel principal, ni d'un appel incident. En effet, le dispositif des conclusions de Madame [H] [J] [C] de ce chef ne contient aucune demande d'infirmation à ce titre.

- Sur la requalification du contrat d'intérim en contrat de travail à durée indéterminée :

En première instance, Monsieur [U] [E] demandait la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à temps plein à compter du 16 octobre 2020 et les premiers juges ont procédé à la requalification en contrat de travail à temps partiel de 24 heures à compter du 19 octobre 2020, rejetant l'exception d'incompétence soulevée par Madame [H] [J] [C].

Madame [H] [J] [C] produisant désormais à hauteur d'appel un contrat de travail intérimaire entre Arcis Intérim Aube et Monsieur [U] [E] pour une mise à disposition à son profit d'une durée de 2 heures le 16 octobre 2020 toutefois non signé, Monsieur [U] [E] demande dans ces conditions que le contrat soit requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, dès lors que Madame [H] [J] [C] ne démontre pas la réalité de l'accroissement temporaire, ni la légitimité du recours et dès lors que l'essai de peinture invoqué ne caractérise pas une tâche occasionnelle. Il ajoute que l'absence de signature du 'contrat de travail à durée déterminée' est un autre motif de requalification, alors que Madame [H] [J] [C] soutient sans l'établir qu'il aurait refusé de le signer. Il soutient que la relation s'est poursuivie au-delà du 16 octobre 2020 et demande dans ces conditions la requalification à compter de cette date.

A titre subsidiaire, si la cour considérait qu'il n'existait pas de contrat de travail à durée indéterminée le liant à Madame [H] [J] [C], il soutient que les conditions du CESU, dont Madame [H] [J] [C] entend se prévaloir entre le 19 octobre et le 23 décembre 2020 ne sont pas réunies et que dès lors le contrat est réputé conclu pour une durée indéterminée.

Madame [H] [J] [C] demande à la cour de distinguer deux périodes contractuelles.

La première qui s'est inscrite dans le cadre d'un contrat d'intérim, le 16 octobre 2020, dans le respect des dispositions légales, étant précisé que le contrat n'a jamais été retourné par Monsieur [U] [E]. Elle demande donc à la cour de débouter Monsieur [U] [E] du chef de sa demande de requalification de ce contrat de travail.

Elle prétend que la deuxième relation contractuelle qui a débuté à compter du 19 octobre 2020 ne s'est pas inscrite dans un lien de subordination, Monsieur [U] [E] se comportant comme un peintre établi à son compte, comme précédemment, avant qu'il ne dépose le bilan de sa société. Elle soutient donc que le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour connaître de cette relation contractuelle entre le 19 octobre 2020 et le 23 décembre 2020 mais le tribunal de commerce.

A titre subsidiaire, elle soutient que dans les jours qui ont suivi la fin du contrat d'intérim, alors que les parties devaient arrêter les modalités de la relation contractuelle, Monsieur [U] [E] qui avait commencé à travailler, lui a fait comprendre qu'il préférait ne pas être inscrit dans une relation contractuelle officielle mais à force de persévérance, elle a fini par obtenir de pouvoir inscrire Monsieur [U] [E] dans le régime du CESU, parfaitement possible du fait qu'elle est propriétaire à titre personnel du [Adresse 3]. Elle ajoute avoir fait le nécessaire dès le 9 novembre 2020, mais que l'enregistrement n'a pu être finalisé avant l'établissement de la première déclaration d'heures, que les documents de rupture ont été réédités le 28 juillet 2022 puisque les originaux établis à l'époque avaient été envoyés en temps et heure à Monsieur [U] [E].

Elle en conclut que chronologiquement et de manière incontestable, la relation salariale, initialement réalisée dans le cadre de l'intérim, a été interrompue avant de s'exercer dans le cadre du CESU, qu'en tout état de cause, il est manifeste que c'est de manière frauduleuse que Monsieur [U] [E] n'a signé aucun contrat et, sur le fondement du principe selon lequel la fraude corrompt tout, la demande de requalification de la relation contractuelle devra être rejetée et le jugement infirmé.

L'intimée produit à hauteur d'appel un contrat de mission temporaire en date du 16 octobre 2020 entre Aube Intérim Arcis et Monsieur [U] [E] pour un travail en qualité d'ouvrier d'exécution le 16 octobre 2020 de 10 à 12 heures pour la cliente Madame [H] [J] [C] -Hôtel [5]- en raison d'un accroissement temporaire d'activité lié à une variation cyclique d'activité, la facture d'Aube Intérim Arcis, le justificatif de son règlement, le bulletin de paie avec une qualification d'agent de rénovation et l'encaissement du chèque de réglement le 22 décembre 2020 par Monsieur [U] [E].

Monsieur [U] [E] invoque à juste titre plusieurs motifs de requalification du contrat d'intérim :

- le contrat d'intérim n'est pas signé et Madame [H] [J] [C] n'établit pas que Monsieur [U] [E] aurait refusé de le signer de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse.

- Madame [H] [J] [C] ne justifie pas du motif du cas de recours au travail intérimaire tel que repris au contrat : l'essai de peinture au sein du restaurant invoqué par Madame [H] [J] [C] dans ses écritures, ne constitue pas un accroissement temporaire d'activité lié à une variation cyclique d'activité, tel que repris au contrat d'intérim.

- l'activité salariée n'a pas cessé le 16 octobre 2020 mais s'est poursuivie dès le 19 octobre 2020. Madame [H] [J] [C] ne rapporte pas en effet la preuve d'un autre type de contrat à compter de cette date puisqu'elle ne peut invoquer sans se contredire que Monsieur [E] serait alors intervenu dans un cadre non subordonné mais qu'elle aurait aussi fait des démarches pour l'embaucher dans le cadre d'un CESU.

Dans ces conditions, et en l'absence de toute fraude établie de la part de Monsieur [U] [E], contrairement à ce que soutient Madame [H] [J] [C], le contrat d'intérim doit être requalifié en contrat de travail à durée indéterminée et ce à compter du 16 octobre 2020.

C'est vainement dans ces conditions que Madame [H] [J] [C] soulève l'incompétence du conseil de prud'hommes pour la relation contractuelle ayant couru entre le 19 octobre et le 23 décembre 2020. Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il s'est déclaré matériellement compétent pour connaître du litige.

- Sur le temps complet :

Monsieur [U] [E] demande en outre la requalification de la relation contractuelle en contrat de travail à temps complet, ce que les premiers juges n'ont pas retenu, alors que selon lui le contrat de travail ne répond pas aux exigences de l'article L.3123-6 du code du travail et que Madame [H] [J] [C] ne renverse pas la présomption de travail à temps complet.

Madame [H] [J] [C] réplique qu'elle satisfait à la preuve qui lui incombe puisque la durée du travail de Monsieur [U] [E] variait constamment de son fait, puisqu'il a imposé la durée qu'il a souhaitée, que cette durée réalisée doit donc être considérée comme ayant bien été convenue avec le salarié et qu'il ne se tenait nullement à sa disposition.

Dès lors qu'il n'est pas justifié d'un contrat de travail de Monsieur [U] [E] à temps partiel conforme à l'article L.3123-6 du code du travail, le contrat de travail est présumé à temps complet.

Il incombe à Madame [H] [J] [C] qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur.

Or, Madame [H] [J] [C] est défaillante à établir la durée du travail convenue, alors qu'elle soutient tout au plus à ce titre que les horaires de travail étaient imposés par Monsieur [U] [E].

Dans ces conditions, le contrat de travail doit être requalifié en contrat de travail à temps complet et le jugement doit être infirmé en ce sens.

- Sur le salaire de référence :

Les premiers juges ont fixé le salaire de référence à la somme de 1058,72 euros pour 24 heures par semaine.

Monsieur [U] [E] demande à la cour de le fixer sur la base d'un salaire de 1544 euros, correspondant à 151,67 heures au taux de 10,18 euros, sur la base des fonctions d'agent technique, employé, niveau II, échelon 1 de la convention collective des hôtels, cafés et restaurants.

Madame [H] [J] [C] conteste à tort l'application d'une telle convention au profit de celle du particulier employeur, alors qu'il vient d'être procédé à la requalification du contrat de travail de Monsieur [U] [E] au titre d'une activité de peinture, pour le compte de Madame [H] [J] [C] qui avait une activité d'hôtels, cafés et restaurants et que celle-ci ne peut de surcroît revendiquer l'existence d'un emploi familial pour le travail réalisé par Monsieur [U] [E] qui n'était pas un service à la personne, comme celui-ci le fait valoir à juste titre.

Par ailleurs, Madame [H] [J] [C] ne conteste pas que les fonctions confiées à Monsieur [U] [E] relevaient de la classification revendiquée mais qu'il n'était ni autonome ni responsable, une telle discussion relevant tout au plus de ses compétences.

Dans ces conditions et sur la base d'un salaire horaire de 10,18 euros, le salaire de référence doit être fixé à la somme de 1544 euros.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

- Sur le rappel de salaire au titre de la requalification à temps plein :

Monsieur [U] [E] demande à la cour de condamner Madame [H] [J] [C] à lui payer la somme de 3088 euros, outre les congés payés, correspondant aux deux mois de salaire à temps complet impayés.

Madame [H] [J] [C] s'oppose à une telle demande au motif que Monsieur [U] [E] a été rempli de ses droits puisqu'il a perçu une somme de 1000 euros par chèque.

Or, les seuls éléments qu'elle produit à ce titre -son relevé de compte et un sms du 26 novembre 2020- sont insuffisants à établir que le chèque de 1000 euros débité le 2 décembre 2020 a été encaissé par Monsieur [U] [E], alors que celui-ci le conteste.

Il est tout au plus établi qu'il a perçu une somme de 18,22 euros au titre des deux heures travaillées le 16 octobre 2020, dans le cadre du contrat de mission, soit la somme de 24,56 euros bruts, qu'il convient donc de déduire de la somme réclamée.

Dans ces conditions, Monsieur [U] [E] est bien fondé en sa demande en paiement à hauteur de la somme de 3063,44 euros (3088 euros - 24,56 euros), outre les congés payés y afférents et le jugement doit donc être infirmé en ce sens.

- Sur l'indemnité de requalification :

Monsieur [U] [E] est bien fondé en sa demande en paiement d'une indemnité de requalification à l'encontre de Madame [H] [J] [C] en application de l'article L.1251-41 du code du travail.

Madame [H] [J] [C] doit donc être condamnée à lui payer la somme de 1544 euros correspondant à un mois de salaire.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

- Sur l'indemnité de précarité :

Monsieur [U] [E] réclame la condamnation de Madame [H] [J] [C] à lui verser une indemnité de précarité d'un montant de 308 euros, tandis que Madame [H] [J] [C] s'oppose à une telle demande.

Dès lors qu'il ressort de l'examen de la fiche de paie de Monsieur [U] [E] en date du 16 octobre 2020 qu'une indemnité de fin de mission a été calculée à hauteur de 10 % de son salaire et qu'elle est incluse dans le règlement de la somme de 18,22 euros encaissée au mois de décembre 2020, Monsieur [U] [E] n'est pas fondé en sa demande en paiement au titre d'une telle indemnité de précarité.

Il doit donc être débouté de sa demande et le jugement doit être infirmé en ce sens.

- Sur la rupture du contrat de travail :

Monsieur [U] [E] demande la condamnation de Madame [H] [J] [C] à lui payer une indemnité de préavis et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, dès lors que son contrat a été rompu en dehors de toute procédure de licenciement.

Madame [H] [J] [C] s'oppose à une telle demande aux motifs que le contrat de travail a trouvé son terme à la date convenue dans le cadre du CESU et que c'est de son seul chef que Monsieur [U] [E] ne s'est plus présenté à compter du 17 décembre 2020.

La rupture est abusive dès lors qu'elle a cessé en dehors de toute procédure de licenciement, alors que Monsieur [U] [E] était du fait de la requalification intervenue, en contrat de travail à durée indéterminée. Madame [H] [J] [C] soutient à tort que Monsieur [U] [E] ne se serait plus présenté à compter du 17 décembre 2020, alors même qu'il ressort des pièces qu'elle a établies, qu'elle indique que la relation salariée a duré jusqu'au 23 décembre 2020 et qu'en toute hypothèse, l'absence du salarié ne l'aurait pas dispensée d'une procédure de licenciement.

Compte tenu d'une ancienneté inférieure à 6 mois, et en application de la convention collective, Madame [H] [J] [C] sera condamnée à payer à Monsieur [U] [E] la somme de 398,45 euros au titre de l'indemnité de préavis correspondant à 8 jours de préavis, outre les congés payés y afférents.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

Au regard d'une ancienneté inférieure à 1 an et de ce que Madame [H] [J] [C] emploie habituellement moins de onze salariés, Monsieur [U] [E] peut prétendre à des dommages-intérêts d'un montant maximal de 1 mois de salaire.

Monsieur [U] [E] ne justifie pas de sa situation postérieure à son licenciement et les premiers juges ont donc entièrement réparé le préjudice subi par Monsieur [U] [E] du fait de la perte injustifiée de son emploi, en lui octroyant une somme de 100 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement doit être confirmé de ce chef.

- Sur l'indemnité de travail dissimulé :

Monsieur [U] [E] reproche aux premiers juges d'avoir retenu que l'existence d'un élément intentionnel n'était pas caractérisée, alors que celle-ci est établie dès lors que Madame [H] [J] [C] n'a pas procédé à sa déclaration d'embauche, qu'aucun bulletin de salaire pour sa période d'emploi n'a été établi sauf pour le 16 octobre 2020, qu'elle n'a ni déclaré ni payé les cotisations sociales auprès des services compétents, qu'à supposer que le contrat CESU existe, il visait un emploi familial qui ne correspondait pas à ses fonctions.

Madame [H] [J] [C] réplique que Monsieur [U] [E] a d'abord été déclaré dans le cadre d'un contrat d'intérim puis dans le cadre du CESU, qu'elle n'avait donc aucune volonté de s'affranchir des dispositions légales et que c'est Monsieur [U] [E] qui avait la volonté de dissimuler son emploi aux organismes sociaux pour échapper à ses créanciers.

Le caractère intentionnel de la dissimulation d'emploi salarié est établi.

En effet, c'est sciemment que Madame [H] [J] [C] n'a pas délivré à Monsieur [U] [E] de bulletin de salaire au-delà du 16 octobre et en novembre 2020, alors même qu'elle reconnaît dans ses écritures que Monsieur [U] [E] a effectué des heures de travail au titre des mois en cause et qu'elle ne justifie que de l'établissement d'un bulletin de salaire pour le mois de décembre 2020, plusieurs mois après la fin de la relation salariée, à la date du 25 juin 2021, dans le cadre d'une activité au titre d'un emploi familial, alors même qu'en exécutant des travaux de peinture au sein du restaurant de Madame [H] [J] [C], Monsieur [U] [E] ne se livrait pas à une activité d'assistance à la personne.

Dans ces conditions, et en application des articles L.8221-5 et L.8223-1 du code du travail, Monsieur [U] [E] est bien-fondé en sa demande d'indemnité de travail dissimulé d'un montant de 9264 euros, correspondant à 6 mois de salaire.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

- Sur les dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail :

Monsieur [U] [E] demande à la cour d'infirmer le jugement du chef du rejet de sa demande de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail d'un montant de 2500 euros.

Or, pas plus qu'en première instance, Monsieur [U] [E] ne caractérise de préjudice consécutif au comportement de Madame [H] [J] [C] le temps de la relation salariée, non déjà réparé au titre des sommes précédemment allouées.

Le jugement doit donc être confirmé du chef du rejet de la demande de dommages-intérêts.

- Sur les dommages-intérêts pour préjudice moral :

Monsieur [U] [E] demande à la cour d'infirmer le jugement du chef du rejet de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi à la suite des propos avilissants, dégradants, de menaces, d'invectives et d'insultes tenus à son encontre par Madame [H] [J] [C], dans un courrier, à l'oral et lors d'une altercation verbale.

Madame [H] [J] [C] s'oppose à raison à une telle demande.

En effet, Monsieur [U] [E] produit tout au plus un courrier rédigé par Madame [H] [J] [C] plus de six mois après la cessation de la relation contractuelle et il ne justifie la tenue orale d'aucun des propos imputés à cette dernière.

Le jugement doit donc être confirmé du chef du rejet de cette demande.

- Sur la remise des documents de fin de contrat :

Il y lieu d'enjoindre à Madame [H] [J] [C] de remettre à Monsieur [U] [E] l'attestation France Travail, le certificat de travail et les bulletins de salaire d'octobre à décembre 2020 conformes à la présente décision.

Il n'est pas nécessaire d'ordonner une astreinte.

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Le jugement doit être confirmé du chef des dépens.

Partie succombante à hauteur d'appel, Madame [H] [J] [C] doit être condamnée aux dépens d'appel en ce compris les dépens au titre de l'incident du 15 novembre 2023 et du déféré en date du 10 avril 2024, déboutée de sa demande d'indemnité de procédure et condamnée en équité à payer à Monsieur [U] [E] la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, en sus de l'indemnité de procédure allouée en première instance.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, dans les limites de l'appel, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement en ce qu'il s'est déclaré matériellement compétent pour connaître du litige, a déclaré Monsieur [U] [E] recevable et partiellement fondé en ses demandes, a condamné Madame [H] [J] [C] à payer à Monsieur [U] [E] la somme de 100 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, a débouté Monsieur [U] [E] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution fautive et déloyale du contrat de travail et pour préjudice moral, a condamné Madame [H] [J] [C] à payer à Monsieur [U] [E] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et a condamné Madame [H] [J] [C] aux dépens ;

L'infirme pour le surplus ;

Requalifie le contrat de mission en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet à compter du 16 octobre 2020 ;

Fixe le salaire de référence à la somme de 1544 euros ;

Condamne Madame [H] [J] [C] à payer à Monsieur [U] [E] les sommes de :

. 3063,44 euros à titre de rappel de salaire d'octobre à décembre 2020 ;

. 306,33 euros à titre de congés payés afférents ;

. 1544 euros à titre d'indemnité de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée ;

. 9264 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

. 398,45 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

. 39,84 euros au titre des congés payés y afférents ;

. 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute Monsieur [U] [E] de sa demande en paiement au titre de l'indemnité de précarité ;

Enjoint à Madame [H] [J] [C] de remettre à Monsieur [U] [E] l'attestation France Travail, le certificat de travail et les bulletins de salaire d'octobre à décembre 2020 conformes à la présente décision ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Déboute Madame [H] [J] [C] de sa demande d'indemnité de procédure ;

Condamne Madame [H] [J] [C] aux dépens d'appel en ce compris les dépens au titre de l'incident du 15 novembre 2023 et du déféré du 10 avril 2024.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00952
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;23.00952 ?
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