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26/06/2024 | FRANCE | N°23/00383

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 26 juin 2024, 23/00383


Arrêt n° 414

du 26/06/2024





N° RG 23/00383





IF/ML











Formule exécutoire le :



26 JUIN 2024



à :



- SEDOS

- IFAC

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024





APPELANTE :

d'un jugement rendu le 30 janvier 2023 par le Conseil de Prud'hommes de TROYES, section Industrie (n° F22/00048)



S.A.S. ACCURIDE WHEELS [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 2]

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Représentée par la SELAFA SEDOS CONSEIL, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE et par la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de LYON



INTIMÉE :



Madame [C] [P]

[Adresse 3]

[Localité 1]



Représentée par la SELARL IFAC, avoc...

Arrêt n° 414

du 26/06/2024

N° RG 23/00383

IF/ML

Formule exécutoire le :

26 JUIN 2024

à :

- SEDOS

- IFAC

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 26 juin 2024

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 30 janvier 2023 par le Conseil de Prud'hommes de TROYES, section Industrie (n° F22/00048)

S.A.S. ACCURIDE WHEELS [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par la SELAFA SEDOS CONSEIL, avocats au barreau de SAINT-ETIENNE et par la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

INTIMÉE :

Madame [C] [P]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par la SELARL IFAC, avocat au barreau de l'AUBE

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle FALEUR, conseillère, chargée du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 26 juin 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président de chambre

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseillère

Madame Isabelle FALEUR, conseillère

GREFFIER lors des débats :

Madame Maureen LANGLET, greffière placée

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Allison CORNU-HARROIS, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

FAITS ET PROCEDURE

Madame [C] [P] a été embauchée par la société MEFRO WHEELS FRANCE devenue la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6], suivant contrat à durée déterminée du 1er avril 2017 au 30 septembre 2017 avec une reprise d'ancienneté au 6 mars 2017, en qualité d'assistante comptable niveau 3 coefficient 230 de la convention collective nationale du caoutchouc du 6 mars 1953.

La société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] est spécialisée dans la fabrication d'équipements automobiles.

Suivant avenant du 25 août 2017, Madame [C] [P] a été embauchée en contrat à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2017.

Madame [C] [P] a été placée en arrêt maladie du 26 février 2021 jusqu'au 8 février 2022.

Le 11 juin 2021, la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] en la personne de Madame [I] [W], infirmière, a déclaré un accident du travail survenu le 26 février 2021 et dont elle a été avisée par Madame [C] [P] le 10 juin 2021.

Par courrier du 16 juin 2021, la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] a émis une contestation auprès de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Aube concernant l'accident du travail qui serait survenu le 26 février 2021.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 janvier 2022, Madame [C] [P] a été licenciée pour cause réelle et sérieuse, son absence entraînant une grave perturbation dans le fonctionnement de l'entreprise rendant nécessaire son remplacement définitif.

Suivant requête reçue au greffe le 28 février 2022, Madame [C] [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Troyes aux fins de contester son licenciement et d'obtenir la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes à titre indemnitaire et à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du licenciement nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, de son préjudice moral, du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Par jugement du 30 janvier 2023, le conseil de prud'hommes de Troyes a :

- déclaré Madame [C] [P] recevable et partiellement fondée en ses demandes ;

- dit que le licenciement de Madame [C] [P] était nul et condamné la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] au paiement des sommes suivantes :

. 28'000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

. 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

. 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité et de résultat,

. 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné la rectification des bulletins de salaire et de l'attestation Pôle emploi de Madame [C] [P] sous astreinte de 50 euros par jour à compter du 16e jour suivant le prononcé du jugement ;

- ordonné l'exécution provisoire de la condamnation à des dommages et intérêts pour licenciement nul en application de l'article R 1454-28 du code du travail ;

- dit que la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] serait tenue de rembourser à Madame [C] [P] les frais d'huissier en cas d'exécution forcée en application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12 décembre 1996 ;

- débouté la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] de sa demande reconventionnelle;

- ordonné le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées à la salariée licenciée, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités ;

- dit que les dépens seraient à la charge de la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] ;

La société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] a interjeté appel le 23 février 2023 concernant toutes les dispositions du jugement de première instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 avril 2024 et l'affaire a été fixée à l'audience du 15 mai 2024 pour être mise en délibéré au 26 juin 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions notifiées par RPVA le 20 octobre 2023 auxquelles en application de l'article 455 du code de procédure civile il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] demande à la cour :

D'INFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de Troyes du 30 janvier 2023 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

DE JUGER qu'elle n'a pas commis d'agissements répétés de harcèlement moral à l'égard de Madame [C] [P] ;

DE JUGER qu'elle n'a pas manqué à son obligation de sécurité ;

DE DEBOUTER Madame [C] [P] de l'ensemble de ses demandes;

DE CONDAMNER Madame [C] [P] à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DE CONDAMNER Madame [C] [P] aux dépens ;

DE DECLARER mal fondé l'appel de Madame [C] [P] ;

DE DEBOUTER Madame [C] [P] de sa demande formée dans le cadre de son appel incident ;

Aux termes de ses conclusions notifiées par RPVA le 20 juillet 2023 auxquelles en application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Madame [C] [P] demande à la cour :

DE CONFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de Troyes en date du 30 janvier 2023 en ce qu'il a :

- dit que son licenciement était nul,

- condamné la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] à lui payer les sommes suivantes :

. 28'000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

. 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

. 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné la rectification des bulletins de salaire et de l'attestation pôle emploi, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 16e jour suivant le prononcé du jugement ;

- ordonné l'exécution provisoire de la condamnation à dommages et intérêts pour licenciement nul en application de l'article R 1454-28 du code du travail ;

- dit que la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] serait tenue de lui rembourser les frais d'huissier en cas d'exécution forcée en application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12 décembre 1996 ;

- débouté la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] de sa demande reconventionnelle ;

- ordonné le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;

- dit que les dépens seraient la charge de la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6];

D'INFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de Troyes en date du 30 janvier 2023 en ce qu'il :

- l'a déclarée recevable et partiellement fondée en ses demandes ;

- a condamné la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité et de résultat ;

statuant à nouveau,

DE LA DECLARER recevable et fondée en toutes ses demandes ;

DE CONDAMNER la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] à lui payer les sommes suivantes :

. 4 651,72 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 465,17 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 10'000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de sécurité de résultat,

à titre subsidiaire,

DE JUGER que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

DE CONDAMNER la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] à lui payer les sommes suivantes :

. 4 651,72 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 465, 17 euros bruts au titre des congés payés afférents,

. 20'932,74 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

y ajoutant,

DE FIXER son salaire moyen à la somme de 2 325,86 euros ;

DE CONDAMNER la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DE JUGER que la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] devra lui rembourser les frais d'exécution en cas d'exécution forcée en application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12 décembre 1996 ;

DE CONDAMNER la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] aux dépens ;

MOTIFS

Sur la demande principale de Madame [C] [P] tendant à voir requalifier son licenciement en licenciement nul en raison de l'existence d'un harcèlement moral:

Madame [C] [P] fait valoir que la perturbation du fonctionnement de l'entreprise causée par l'absence du salarié ne peut pas être invoquée à l'appui d'un licenciement si la maladie de ce dernier trouve son origine dans le comportement fautif de l'employeur et notamment lorsqu'elle est la conséquence du harcèlement moral subi.

Elle expose que le licenciement prononcé à raison d'une telle absence est nul.

* sur le harcèlement moral:

Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l'article L 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-1088 du 8 août 2016, applicable en la cause, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L 1152-1 à L 1152-3 et L 1153-1 à L 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de laisser supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il appartient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Madame [C] [P] soutient que, dans un contexte économique difficile lié à l'acquisition de la société MEFRO WHEELS FRANCE par la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6], initiée en 2017 et finalisée en 2018, ainsi qu'à d'importantes pertes financières avec un projet de restructuration et des suppressions de postes, elle a été confrontée à une dégradation continue des ses conditions de travail, matérialisée par une absence d'autonomie et de pouvoir de décision, des critiques infondées et vexatoires et une pression accrue accompagnée d'une forte augmentation de sa charge de travail.

La société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] répond que Madame [C] [P] n'établit aucun fait objectif permettant de présumer de l'existence d'une situation de harcèlement moral. Elle affirme que la salariée n'a pas accepté les remarques qui ont été formulées par sa supérieure hiérarchique concernant son travail à l'occasion de l'entretien professionnel du 23 mars 2018, que son travail ne donnait pas satisfaction et qu'elle avait en outre des difficultés relationnelles avec ses collègues.

- sur l'absence d'autonomie et de pouvoir de décision:

Lors de son embauche Madame [C] [P] était rattachée au service 'contrôle de gestion' sous la responsabilité hiérarchique de Madame [Z] (N +1) et de Monsieur [D] (N+2), responsable du service.

A compter du mois d'avril 2020, la salariée a été rattachée au service comptabilité sous la responsabilité de Madame [M].

Madame [C] [P] affirme que Madame [Z] tenait à tout contrôler, à avoir une mainmise sur elle, ne lui laissait aucune autonomie ni pouvoir de décision. Toutefois elle n'invoque aucun fait ou élément précis et objectif à l'appui de son affirmation étant souligné que son poste n'impliquait aucun pouvoir de décision puisqu'elle était aide comptable et devait notamment effectuer les relances et suivis des clients, établir quotidiennement le rapport des clients échus, saisir les encaissements clients, effectuer le suivi des demandes d'avoirs, créer et enregistrer les factures clients et assurer l'envoi des factures.

Cet élément n'est pas établi.

- Critiques infondées et vexatoires:

Madame [C] [P] affirme qu'au cours de son entretien professionnel annuel du 23 mars 2018, Madame [Z] a soudainement critiqué la qualité de son travail, mis en avant des retards dans l'accomplissement des tâches, un manque de compréhension, un non-respect de certaines procédures et plus généralement sa capacité à occuper son poste d'assistante comptable.

Elle produit aux débats le compte rendu de l'entretien d'évaluation qui mentionne que les activités courantes (hormis la gestion des problèmes) sont atteintes mais que la salariée manque d'autonomie et de rigueur, que les imprévus génèrent toujours une situation de stress qui aboutit à un travail incertain qualitativement, que les procédures ne sont pas toujours bien suivies, qu'elle ne prend pas le temps de bien comprendre ce qui est demandé.

En conclusion du compte rendu d'entretien, il est indiqué : " les activités courantes du poste sont connues, il y a un réel manque d'autonomie, de rigueur et de maîtrise du travail qui crée une perte de temps et qui rend le travail incertain. [C] n'apprend pas de ses erreurs et a du mal à chercher des solutions et à améliorer ses connaissances. Pas de réelle évolution remarquée sur les six derniers mois. [C] doit se ressaisir impérativement afin de correspondre aux attentes du poste".

C'est à tort que Madame [C] [P] affirme que Madame [Z] a soudainement critiqué son travail, et ce de manière injustifiée. En effet, à l'occasion de l'entretien professionnel du 24 avril 2017, Madame [Z] avait déjà fait des observations concernant l'organisation et l'efficacité de la salariée en ces termes : "bonne implication et motivation, les objectifs principaux du poste sont atteints mais doit maintenant gagner en efficacité et en autonomie. Un travail sur l'organisation et la priorisation des tâches est indispensable pour atteindre les attentes du poste."

La cour relève, au vu des courriels échangés entre Madame [C] [P] et Monsieur [A], responsable du personnel, à la suite de l'entretien professionnel du 23 mars 2018, que la salariée a réagi de manière peu appropriée aux conclusions de l'entretien en adressant au responsable du personnel un courrier de contestation en des termes vindicatifs " (...) il n'est pas question que je me fasse rabaisser de la sorte et humilier. Je vous avertis que ce sera la dernière fois ! Encore une chose, si je suis si mauvaise, pourquoi je devrais faire du contrôle de gestion en plus de mon travail ' ».

Par ailleurs, Madame [C] [P] a donné une publicité certaine à son entretien d'évaluation, dont les conclusions n'étaient pas destinées à être diffusées, ainsi que cela ressort des mails qu'elle a échangés avec Monsieur [U] informaticien et avec Madame [E], employée du service comptable, en mettant en cause directement sa responsable hiérarchique Madame [Z].

Le compte rendu de l'entretien professionnel du 23 mars 2018 est rédigé en des termes qui ne révèlent ou n'impliquent aucune volonté de rabaisser la salariée. Ils s'inscrivent dans la continuité des observations qui avaient été faites lors de l'entretien professionnel de 2017.

Au vu de ces éléments la cour considère que Madame [C] [P] n'a pas été victime de critiques infondées et vexatoires de la part de Madame [Z].

- Sur la surcharge de travail et les pressions:

Madame [C] [P] affirme qu'elle a été submergée de travail à compter de la fin de l'année 2020 et que Madame [M] la poussait à venir travailler le samedi et à rester tard le soir. Elle affirme qu'à la suite du licenciement économique de Madame [E] au cours de l'été 2019 et d'une fin de contrat d'alternance, postes qui n'ont pas été remplacés, elle a dû gérer deux postes en plus de ses missions initiales.

Au soutien de ces affirmations, elle produit aux débats :

- un courriel du 27 novembre 2020 adressé à Monsieur [A], responsable du personnel en ces termes : « je demande un rendez-vous pour parler de ma charge de travail depuis mon déménagement et de tous les problèmes liés à la nouvelle presse. Je suis partagée depuis trois ans entre deux services. Je subis constamment une énorme pression et des désaccords en continu au niveau de ma hiérarchie qui me stressent énormément. J'essaie de satisfaire et de respecter ce qui m'est demandé mais finalement les problèmes me retombent toujours dessus. Je ne suis pas responsable de l'organisation du service, de la répartition des tâches de travail et des pertes de temps liées à des annulations de factures (prix, mauvaise information, paramétrage').

J'ai une grosse fatigue morale qui s'accumule depuis tout ce temps. Je vous remercie par avance de prendre le temps de me recevoir. »

- un courriel du 18 décembre 2020 adressé à Monsieur [A], en ces termes : «[S] ([M]) me fait des remarques et me lance des piques oralement pour me provoquer tous les jours. Elle m'oblige à rester le soir en me donnant du travail au moment de partir alors que ça peut très bien attendre le lendemain. Il suffit de me le demander gentiment, si je suis disponible pour rester, à la rigueur je ferai l'effort si c'est possible, mais c'est d'une manière imposée à chaque fois au dernier moment. Il y a un sérieux problème d'organisation. Je vous ai promis de ne pas faire d'histoire mais j'encaisse et je prends sur moi et ça commence sérieusement à me chauffer.

Vous êtes informé »

- un courriel que Madame [M] lui a adressé le samedi 2 janvier 2021 en ces termes : « je te souhaite ainsi qu'à ta famille et tes proches une très belle année 2021. Pour bien commencer l'année je t'envoie les derniers relevés bancaires (depuis notre départ en congé) et comme tu pourras le constater Iveco n'a pas réglé l'échéance du 31 décembre. Si ces règlements n'apparaissent pas sur les relevés lundi matin tu pourrais les relancer sauf si tu as reçu des avis de paiement. De mémoire tu m'avais communiqué ceux d'Astra veiccoli (...) »

- un échange de courriels avec Madame [M] et Monsieur [D] en date du 4 février 2021 :

. Madame [C] [P] à 8h47 : je demande l'autorisation de poser un JDR du mois de janvier, demain. Vu que lundi j'ai effectué une heure supplémentaire dans le cadre de la clôture, je demande l'autorisation de quitter à 16 heures pour récupérer.

. Madame [M] à 14h12 : je suis navrée mais je ne peux répondre favorablement à ta demande. La période de double clôture que nous traversons (clôture annuelle 2020 et clôture de janvier 2021), les travaux à préparer pour le commissaire aux comptes ainsi que la réalisation des tâches courantes nécessitent la mobilisation de toutes les ressources du service.

. Madame [C] [P] à 14h25 : donc si je comprends bien, tu autorises une personne à s'absenter pour des rendez-vous ou autre mais pas moi quand je le demande ! Alors que ce n'est pas la première fois que je loupe des rendez-vous le soir à 17h30 parce que tu me demandes de faire des tâches au moment de partir et que je le fais quand même sous ton insistance. Comment dois-je prendre cette situation '

. [H] [D] responsable du service comptabilité à 14h50 : [T] me corrigera si besoin mais il est vrai que les demandes de congés sont soumises à accord de l'entreprise en fonction des besoins du service ; les mois de janvier et février sont toujours très soutenus pour les clôtures ce n'est pas nouveau' par ailleurs dans la liste des tâches en cours/retard il y a aussi les factures d'immo des outillages, du transfert pour la subvention, [V] nous a déjà relancés pour cela, ça représente 20'000 euros en attente de versement.

. Madame [C] [P] à 14h55 : je suis censée travaillée dessus depuis novembre. Donc si je demande à récupérer et une journée c'est que j'en ai besoin exceptionnellement. On n'est plus à une journée pour les immos vu l'organisation.

- un courriel adressé le 10 février 2021 à Madame [I] [W] (infirmière de l'entreprise) en ces termes : « suite à notre entretien d'hier qui ne s'est pas très bien déroulé en présence de Madame [K], j'ai encore très mal dormi et contrariée. J'en ai marre de me chamailler avec [S] ([M]) pour des horaires de travail. J'entends trop souvent de sa part qu'elle et [J] terminent à 19 heures et qu'elle vient travailler le samedi matin. Je ne refuse pas le travail mais à chaque fois que je reste plus longtemps pour faire ce qu'elle me demande, en retour, j'aimerais lorsque j'ai besoin d'une heure ou d'une journée que l'on me l'accorde. Encore hier je suis restée jusqu'à 17h45, je ne mets aucune mauvaise volonté à ce sujet. Je demande juste que l'on respecte l'accord des 35 heures. Avant il n'y avait pas ces histoires »

- un courriel adressé à Monsieur [D] le 27 février 2021 en ces termes : «bonjour Monsieur [D], lorsque je viens travailler c'est pour effectuer mon travail pour le bien de l'entreprise dans une bonne ambiance et si possible dans le calme afin de pouvoir bien me concentrer. Je n'arrive plus à travailler dans une mauvaise ambiance, être contrariée par des accusations à tort, de me faire insulter et en plus dans l'histoire je n'ai même pas gain de cause. Déjà que l'on m'a remonté que j'étais une incompétente de service lors de mon entretien en décembre avec Monsieur [A] mais là ça va beaucoup trop loin. Je n'accepte pas que l'on me manque à ce point autant de respect même si c'est dur pour tout le monde. Sache que je passe de très mauvaises nuits, migraines, nervosité, anxiété, nausée, perte d'appétit, cela me gâche la vie. Personnellement je n'ai pas envie de vivre ça tous les jours et pourtant c'est ce qu'il se passe.

Madame [M] m'a convoquée de nouveau mercredi matin à 11h45 et vendredi soir 16h45 dans son bureau à titre informel pour me menacer sur mes horaires, mes temps de pause, la durée de mes tâches de travail' depuis plusieurs mois c'est du harcèlement moral.

Habituellement je n'hésite pas à rester pour finir le travail que ce soit sur ma pause déjeuner ou sur le soir mais je récupérais mes heures sur les jours suivants vu que l'on m'interdisait de les noter. En revanche j'ai noté mes heures de récupération pour le mois de février qu'elle a refusé de signer vu que je ne récupérais pas. Je n'ai que des histoires ces derniers mois concernant mes horaires et mon comportement. Je suis très patiente, tolérante et encaisse énormément mais là je sature ! J'en ai marre de subir des paroles blessantes oralement et de rentrer chez moi dans tous mes états. Vu que tu es le chef de service puisque nous formons un seul service, je te signale que mon médecin traitant a jugé nécessaire pour ma santé de prescrire un arrêt jusqu'au 19 mars qui sera déposé dès lundi à la conciergerie »

- un courriel qui lui a été adressé le 1er mars 2021 par Monsieur [D] en ces termes : « merci pour ces infos et ta franchise ; effectivement je constatais bien certains problèmes relationnels mais la situation était gérée exclusivement par le service du personnel et la psychologue, sans que j'ai aucun retour, sous couvert du secret médical' bref désolé qu'on en arrive là car la santé c'est important et c'est logique de vouloir travailler dans une bonne ambiance ! Bon rétablissement»

- un arrêt de travail initial du 26 février 2021 pour dépression, troubles de l'alimentation et du sommeil, auto-dévaluation et burnout. L'arrêt de travail a été prolongé jusqu'au début de l'année 2022,

- un email adressé le 29 juin 2021 à Monsieur [G], technicien qualité, département QSE, pour lui relater le harcèlement moral qu'elle a subi depuis 2017 qu'elle qualifie de calvaire,

- un certificat médical du médecin du travail du 4 juin 2021, destiné à son médecin traitant, qui recommande la poursuite de l'arrêt de travail et indique orienter la salariée vers un psychiatre,

- un certificat médical d'un psychiatre du 5 juillet 2021 indiquant que l'état de santé de Madame [C] [P] ne lui permet pas de reprendre son activité professionnelle dans son entreprise et prescrit des antidépresseurs et anxiolytiques,

- deux certificats de passage au centre hospitalier de [Localité 6] le 29 juillet 2021 et 31 juillet 2021,

- un certificat d'hospitalisation en psychiatrie à la clinique [5] du 16 août 2021 au 14 octobre 2021,

- un courrier du psychiatre de la clinique [5] en date du 14 octobre 2021 adressé au médecin traitant de Madame [C] [P] qui indique: "Patiente adressée pour des troubles anxieux et dépressifs sévères avec difficultés d'adaptation, suivi psychiatrique depuis juillet 2021, pas de toxicomanie, bon sommeil, pleurs et boule au ventre, ruminations sur les scènes de conflit au travail, vécu de harcèlement par sa directrice, perte de confiance et épuisement. Bonne réponse à la sophrologie, a pu décompresser, se sent pourtant marquée par ce qui s'est passé, sentiment d'irréparable. Personnalité obsessionnelle, s'obstine à essayer de tout planifier et contrôler, ce qui l'épuise",

- un bulletin d'hospitalisation en psychiatrie de la clinique [5] en date du 17 février 2022 mentionnant une date d'entrée au 13 janvier 2022,

- une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé pour la période du 24 mars 2022 jusqu'au 28 février 2027, par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de l'Aube en date du 24 mars 2022,

Les pièces produites aux débats par Madame [C] [P] établissent que :

- à compter du mois de novembre 2020, elle a alerté le responsable du personnel sur une surcharge de travail et des difficultés importantes avec sa responsable hiérarchique, Madame [M],

- elle a été placée en arrêt de travail pendant un an et a été hospitalisée deux fois en psychiatrie pour des séjours longs pour une dépression qu'elle reliait à ses conditions de travail.

Toutefois, elle n'établit pas la réalité de la surcharge de travail qu'elle allègue. Elle ne produit que des emails et courriers par lesquels elle fait état de son ressenti, subjectif, quant à sa charge de travail mais aucune pièce objectivant des horaires de travail dépassant le cadre contractuel ou de nombreuses heures supplémentaires. Dans l'un de ses mails elle fait état d'une seule heure supplémentaire à récupérer au mois de février 2021.

Par mail du samedi 2 janvier 2021, qui n'appelait pas de réponse immédiate, Madame [M] a désigné à Madame [C] [P] une tâche qu'il conviendrait d'effectuer le lundi suivant et non immédiatement contrairement à ce qu'affirme la salarié.

Elle n'établit pas davantage la réalité et la matérialité des pressions qu'elle affirme avoir subies de la part de Madame [M]. Les emails que la salariée a adressés au responsable du personnel démontrent qu'elle entretenait des relations et une communication difficile avec cette dernière mais les pièces produites révèlent des difficultés relationnelles réciproques et non des pressions exercées par Madame [M].

Dans le cadre de l'enquête diligentée par la CPAM à la suite de la contestation de l'accident du travail qui aurait eu lieu le 26 février 2022, Madame [C] [P], concernant ces faits a déclaré : « à son arrivée, Madame [M] m'a agressée verbalement, elle me parlait sur un ton énervé pour savoir comment je faisais un PDF, je lui ai montré et expliqué plusieurs fois mais elle ne comprenait toujours pas, malgré mon insistance à lui montrer alors cela m'a énervée car elle montait dans les aigus et cela me faisait mal aux oreilles, j'ai pleuré et je suis allée à l'infirmerie je pense vers 10 heures et je crois y être restée jusqu'à 13h30 puis je suis retournée à mon poste. À ma reprise à 13h30 on a chacune repris notre travail sans se parler. J'ai un entretien informel avec Madame [M] vers 16 heures, elle m'a convoquée oralement dans son bureau, elle m'a fait asseoir face à elle, le motif de cet entretien était que l'on ne travaillait pas dans une bonne ambiance, que cela ne pourrait pas durer, elle a fermé les deux portes. Je lui ai dit que moi je n'avais pas le bac+5, que je n'étais pas payée en conséquence et que je n'étais pas cadre. J'ai acquiescé en la laissant parler puis j'ai dit d'accord, je me suis levée je suis partie en lui souhaitant un bon week-end, j'ai pleuré dans ma voiture et je suis allée à mon rendez-vous programmé chez le médecin. Pour moi c'était une accumulation depuis des années qui a fait que le 26 février 2021, je suis tombée en larmes et je me suis rendue malade à en vomir avec tremblements. Mon médecin m'a arrêté en maladie ce soir-là, car il a hésité avec arrêt en accident du travail, puis suite à convocation par le service médical de la CPAM tout a été repassé en accident de travail »

Or, entendue dans le cadre de ladite enquête, Madame [W], infirmière, a contesté la présence de Madame [C] [P] à l'infirmerie le 26 février 2021.

En l'absence de faits matériellement établis et objectifs, les éléments médicaux produits par la salariée sont insuffisants, à eux seuls, à laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Il n'est pas contestable que Madame [C] [P] a rencontré des problèmes de dépression et qu'elle les a mis en lien avec son vécu professionnel mais les éléments présentés ne laissent pas présumer un harcèlement moral.

C'est à raison que Madame [C] [P] affirme que l'employeur ne peut se prévaloir de la perturbation du fonctionnement de l'entreprise causée par l'absence prolongée du salarié si cette absence est la conséquence d'un harcèlement moral subi, et que le licenciement, prononcé dans ces conditions, est nul.

Toutefois, en l'espèce, l'absence prolongée de Madame [C] [P] au sein de la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] n'est pas en lien avec un harcèlement moral de sorte que sa demande tendant à voir prononcer la nullité du licenciement pour perturbation du fonctionnement de l'entreprise et nécessité de la remplacer doit, par infirmation du jugement de première instance, être rejetée.

Madame [C] [P] doit également, par infirmation du jugement, être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral lié au harcèlement moral.

Sur la demande subsidiaire de Madame [C] [P] tendant à voir juger que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse :

Madame [C] [P] soutient, au visa de l'article L 4121-1 du code du travail, que la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] a manqué à son obligation de sécurité, que ce manquement est à l'origine de son absence prolongée pour maladie, motif de son licenciement, qui en conséquence est dénué de cause réelle et sérieuse.

Elle soutient qu'elle a alerté Monsieur [A] à plusieurs reprises sur ses conditions de travail et les relations conflictuelles avec Madame [Z] et Madame [M], par des mails du 23 mars 2018, 27 novembre 2020 et 18 décembre 2020 et que ce n'est que le 15 janvier 2021, à la suite d'une violente altercation avec Madame [M] que Monsieur [A] a enfin réagi en fixant un rendez-vous de médiation avec Madame [W], l'infirmière et Madame [K], la psychologue.

La société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] conteste avoir manqué à son obligation de sécurité et affirme que Monsieur [A] a mis en place toutes les mesures pour répondre aux alertes de Madame [C] [P].

En vertu des articles L 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, l'employeur est tenu à l'égard de son salarié d'une obligation de sécurité dont il doit assurer l'effectivité. Il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs (actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, actions d'information et de formation, mise en place d'une organisation et de moyens adaptés) en respectant les principes généraux de prévention, tels qu'éviter les risques, évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production.

Ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail et il lui appartient donc de rapporter la preuve qu'il a mis en place toutes les mesures de protection et prévention nécessaires, conformément à ses obligations, surtout lorsqu'il a connaissance des risques encourus par le salarié.

La société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] justifie qu'à la suite de l'entretien d'évaluation du 23 mars 2018, que Madame [C] [P] a contesté, Monsieur [A] a répondu à son email le 26 mars 2018 en ces termes : « suite à notre échange de ce jour, je me permets de synthétiser nos échanges et mes propos qui ont suivi le déroulement de votre mail. Le ton de votre mail initial n'est pas adapté à des échanges constructifs. Vos résultats ne sont pas satisfaisants quoi qu'en pensent vos collègues. Seul le hiérarchique possède la vue d'ensemble nécessaire à les apprécier. Votre autonomie ne sera acquise qu'une fois la totalité des fondamentaux du poste maîtrisée avec rigueur et dans le temps. Si l'appréciation de vos résultats vous paraît plus sévère, c'est que l'évolution souhaitée de vos compétences prend du retard. Je n'ai pas à juger de votre ressenti mais il n'existe aucun propos humiliant ou rabaissant dans votre feuille d'appréciation. Vous êtes intégrée au service contrôle de gestion et les missions qui pourraient vous être confiées dépendent de ce service. Vos engagements en guise de remarques sur la feuille d'appréciation laissent penser à une juste prise en compte, ce qui n'est pas le cas de votre mail. Aussi j'espère avoir apporté les éclaircissements nécessaires et que l'apprentissage de vos missions s'en ressentira. La solution d'un échange dédié hebdomadaire avec [O] sera, je l'espère, la solution à ces soucis. Plus subjectivement, il n'est pas d'usage de faire part autour de soi des résultats d'une appréciation et je pense qu'une prise de hauteur/de recul vous invitera à mieux prendre en compte les remarques qui peuvent vous être faites sur votre travail notamment dans son aspect qualitatif »

Le mail de contestation de Madame [C] [P] a donc été pris en compte par la direction et il lui a été répondu en des termes respectueux et soucieux de son évolution au sein du service.

Madame [C] [P] n'a pas adressé de nouvelles alertes à son employeur jusqu'au 27 novembre 2020, date à laquelle elle s'est plainte de subir une pression de la part de Madame [M], avec des désaccords continus et une fatigue morale intense, alerte réitérée le 18 décembre 2020.

La société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] justifie avoir pris en compte la dégradation des relations professionnelles, réciproque, entre Madame [C] [P] et Madame [M], en organisant d'une part un rendez-vous entre Monsieur [A] et Madame [C] [P] le 11 janvier 2021 et d'autre part une médiation confiée à la psychologue Madame [K], impliquant tant la salariée que Madame [M].

Or, si le premier entretien avec la psychologue s'est bien déroulé, il est établi que, à l'occasion du second entretien, Madame [C] [P] a brusquement quitté les lieux au bout de 15 minutes.

La société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] justifie avoir pris toutes les mesures de nature à éviter et à faire cesser le risque professionnel dont elle avait connaissance, risque professionnel tenant à une détérioration des relations entre Madame [C] [P] et sa supérieure hiérarchique.

Madame [C] [P] n'est pas fondée à soutenir que la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] a manqué à son obligation de sécurité, manquement à l'origine de son absence prolongée pour maladie.

Elle sera donc déboutée de sa demande tendant à voir juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Madame [C] [P] sera par ailleurs déboutée, par infirmation du jugement de première instance, de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité.

Sur les autres demandes:

Compte tenu de la solution donnée au litige, le jugement de première instance sera infirmé en ce qu'il a condamné la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] à payer à Madame [C] [P] la somme de 1800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a ordonné la rectification des bulletins de salaire et de l'attestation Pôle Emploi de Madame [C] [P] sous astreinte, ordonné l'exécution provisoire de la condamnation à dommages et intérêts pour licenciement nul, dit que la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] serait tenue de rembourser à Madame [C] [P] les frais d'huissier en cas d'exécution forcée en application de l'article 10 du décret 96-1080 du 12 décembre 1996, ordonné le remboursement par l'employeur fautif à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à la salariée du jour de son licenciement au jour du jugement dans la limite de six mois et dit que les dépens seraient à la charge de la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6].

Madame [C] [P] est condamnée à payer à la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Elle est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement de première instance en ce qu'il a déclaré Madame [C] [P] recevable en ses demandes ;

L'INFIRME pour le surplus ;

statuant à nouveau et y ajoutant,

DEBOUTE Madame [C] [P] de l'intégralité de ses demandes ;

CONDAMNE Madame [C] [P] à payer à la société ACCURIDE WHEELS [Localité 6] la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

DEBOUTE Madame [C] [P] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE Madame [C] [P] aux dépens de première instance et d'appel.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00383
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;23.00383 ?
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