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19/06/2024 | FRANCE | N°23/01178

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 19 juin 2024, 23/01178


Arrêt n° 399

du 19/06/2024





N° RG 23/01178





FM/ACH









Formule exécutoire le :

19 JUIN 2024





à :



- [K]

- [J]

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 19 juin 2024



APPELANT :

d'un jugement rendu le 23 juin 2023 par le Conseil de Prud'hommes de CHARLEVILLE-MEZIERES, section Industrie (n° F 22/00237)



Monsieur [B] [W]

[Adresse 2]

[Localité 1]



Représenté par la

SCP MEDEAU-LARDAUX, avocats au barreau des ARDENNES



INTIMÉES :



La SELARL [U],

prise en la personne de Maître [U] [F], en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société FONDERIES COLLIGNON

[Adresse 4]

[L...

Arrêt n° 399

du 19/06/2024

N° RG 23/01178

FM/ACH

Formule exécutoire le :

19 JUIN 2024

à :

- [K]

- [J]

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 19 juin 2024

APPELANT :

d'un jugement rendu le 23 juin 2023 par le Conseil de Prud'hommes de CHARLEVILLE-MEZIERES, section Industrie (n° F 22/00237)

Monsieur [B] [W]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par la SCP MEDEAU-LARDAUX, avocats au barreau des ARDENNES

INTIMÉES :

La SELARL [U],

prise en la personne de Maître [U] [F], en sa qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société FONDERIES COLLIGNON

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Sandy HARANT, avocat au barreau de REIMS

L'AGS CGEA D'[Localité 7]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Défaillante

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 mai 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseillère, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 19 juin 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président de chambre

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseillère

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseillère

GREFFIER lors des débats :

Madame Maureen LANGLET, greffière placée

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Allison CORNU HARROIS, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Par un jugement du 15 février 2013, le tribunal de commerce de Sedan a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la société Fonderies Collignon.

Par un jugement du 12 novembre 2015, le tribunal de commerce de Sedan a ouvert une procédure de redressement judiciaire à son égard.

Par un jugement du 21 juillet 2016, un plan de cession a été arrêté au profit de M. [P] [D], avec une faculté de substitution. Le tribunal a alors autorisé le licenciement de 31 salariés non repris.

Par un jugement de la même date, le tribunal de commerce de Sedan a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Fonderies Collignon, en nommant la Selarl [V] en qualité d'administrateur judiciaire et la SCP Tirmant [F] en qualité de liquidateur judiciaire.

Par une décision du 27 septembre 2016, l'inspectrice du travail a refusé l'autorisation de procéder au licenciement de M. [B] [W].

Par une décision du 13 avril 2017, le ministre du travail a notamment annulé la décision du 27 septembre 2016 et autorisé le licenciement de M. [B] [W].

Par un courrier du 27 avril 2017, M. [B] [W] a été licencié pour motif économique.

M. [B] [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Charleville-Mézières.

Par un jugement du 9 avril 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la requête de M. [B] [W] en annulation de la décision du ministre du travail du 13 avril 2017.

Par un arrêt du 8 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté la requête de M. [B] [W] en annulation de ce jugement.

Par un jugement du 23 juin 2023, le conseil a :

prononcé la mise hors de cause de Maître [V] et de la Selarl Ajilink Labis [V] ;

déclaré irrecevables les demandes formées contre la société Fonderies Collignon ;

dit M. [B] [W] irrecevable à contester tant la procédure de notification du licenciement que l'ordre des licenciements mais recevable et partiellement fondé sur ses autres demandes ;

ordonné à la liquidation judiciaire de la société Fonderies Collignon de verser à M. [B] [W] les sommes suivantes : 2 000 € au titre de dommages-intérêts pour défaut de formation ;

débouté M. [B] [W] de ses autres demandes ;

rejeté l'exécution provisoire ;

déclaré le présent jugement commun et opposable à l'AGS CGEA à qui devra garantir le paiement des sommes sus-énoncées dans la limite des textes légaux et réglementaires ;

Mis les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la société Fonderies Collignon.

Par des conclusions remises au greffe le 25 mars 2024, M. [B] [W] demande à la cour de :

infirmer la décision de première instance en toutes ses dispositions ;

le déclarer recevable et bien fondé en ses demandes ;

condamner la société Fonderies Collignon représentée par Me [F] en qualité de liquidateur et Maître [V] en qualité d'administrateur à verser, sous garantie de l'AGS CGEA, les sommes suivantes :

A titre principal

dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse : 50 880€

indemnité de préavis (deux mois) : 3 392€

congés payés sur indemnité de préavis : 339, 20€

A titre subsidiaire

dommages-intérêts pour violation des critères d'ordre : 50 880€

En tout état de cause

dommages-intérêts pour défaut de formation : 7500 €

déclarer la décision à intervenir commune et opposable à l'AGS CGEA.

Par des conclusions remises au greffe le 26 décembre 2023, Maître [F], en sa qualité de liquidateur judiciaire, demande à la cour de :

déclarer l'appel mal fondé

En conséquence,

confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] [W] de ses demandes et l'a déclaré irrecevable;

infirmer le jugement en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire une somme de 2 000 € au titre des dommages-intérêts pour absence de formation;

En conséquence,

débouter M. [B] [W] de sa demande au titre des dommages-intérêts pour absence de formation faute par lui de rapporter la preuve d'un préjudice en lien avec le manquement allégué;

déclarer irrecevable l'action de M. [B] [W] dans la mesure où elle a déjà donné lieu à des décisions rendues par les juridictions administratives étant revêtues de l'autorité de la chose jugée et étant aujourd'hui définitives;

En conséquence,

débouter M. [B] [W] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions, d'autant plus que seul le juge administratif peut apprécier les demandes formées, en raison de la séparation des pouvoirs;

En tout état de cause,

débouter M. [B] [W] de sa demande visant à déclarer sans cause réelle et sérieuse son licenciement économique dans la mesure où :

l'administrateur judiciaire a respecté l'obligation de reclassement tant interne que conventionnel, la société ne faisant partie d'aucun groupe et les Commissions paritaires de la métallurgie ayant été valablement saisies;

l'administrateur judiciaire a interrogé les sociétés du secteur ayant une activité similaire comme il s'y était engagé dans le PSE;

le salarié ne rapporte pas la preuve du défaut de respect des engagements pris dans le cadre du PSE, ce qui est légitime dans la mesure où le PSE a bien été respecté.

A titre subsidiaire,

réduire dans de très importantes proportions le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sollicités dans la mesure où le salarié n'a pas jugé utile de produire aux débats les justificatifs de ses 6 derniers mois de salaires, pas plus que sa situation professionnelle depuis son licenciement;

débouter M. [B] [W] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis dans la mesure où il a adhéré au CSP et dans la mesure où son licenciement n'est pas privé de son motif économique, s'agissant d'un licenciement prononcé suite à un plan de cession, et sur le fondement d'une décision du tribunal de commerce de Sedan ayant autorité de chose jugée;

débouter M. [B] [W] de sa demande de dommages-intérêts pour violation des critères d'ordre dans la mesure où l'employeur a justifié de l'application des critères et dans la mesure où l'appelant ne rapporte pas la preuve d'un préjudice particulier, lequel ne saurait être identique à celui issu d'un prétendu licenciement sans cause réelle et sérieuse et surtout dans la mesure où aucun critère n'avait à être appliqué, M. [B] [W] étant le seul à occuper le poste supprimé;

condamner M. [B] [W] au paiement des dépens d'appel.

L'AGS n'a pas constitué avocat, bien que la déclaration d'appel et les conclusions de l'appelant lui aient été signifiées par un acte du 20 septembre 2023 à personne et que les dernières conclusions de l'appelant lui aient été signifiées le 26 mars 2024 à personne.

MOTIFS:

Sur le reclassement:

À titre principal, M. [B] [W] soutient que la preuve n'est pas rapportée du respect des engagements du plan de sauvegarde de l'emploi en matière de reclassement externe, de sorte que le licenciement doit être jugé, sans cause réelle et sérieuse.

Il indique que le juge judiciaire est compétent à ce sujet, y compris lorsque le salarié est, comme lui, un salarié protégé.

Toutefois, comme le soutient le liquidateur judiciaire, le juge judiciaire ne peut, sans violer le principe de séparation des pouvoirs, en l'état d'une autorisation administrative de licenciement devenue définitive, apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement au regard de la cause économique ou du respect par l'employeur de son obligation de reclassement. En outre, lorsqu'une autorisation administrative a été accordée, le principe de la séparation de pouvoirs s'oppose à ce que le juge judiciaire se prononce sur le respect par l'employeur des obligations que des dispositions conventionnelles mettent à sa charge préalablement au licenciement pour favoriser le reclassement.

Or, en l'espèce, la requête formée par M. [B] [W] en annulation de la décision du 13 avril 2017 du ministre du travail d'autoriser le licenciement a été rejetée par le jugement du 9 avril 2019 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne puis par l'arrêt du 8 décembre 2020 de la cour administrative d'appel de Nancy.

Ces deux décisions ont examiné le grief de M. [B] [W] relatif au respect de l'obligation de reclassement.

La cour retient donc qu'il ne lui appartient pas d'apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement au regard du respect par l'employeur de son obligation de reclassement.

Sont jugées irrecevables les demandes formées par M. [B] [W] de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse, d'indemnité de préavis et de congés payés sur indemnité de préavis.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a, de manière générale, déclaré irrecevables les demandes formées contre la société Fonderies Collignon.

Sur les critères d'ordre du licenciement:

M. [B] [W] soutient que le liquidateur judiciaire n'apporte aucune pièce justificative quant à l'application des critères d'ordre des licenciements et demande en conséquence des dommages et intérêts à ce titre, à hauteur de 54075euros.

Il est vrai que le liquidateur judiciaire indique que l'employeur a appliqué les critères légaux, que ces critères ont été discutés avec les élus, que le comité d'entreprise a validé la répartition du personnel dans les catégories professionnelles et que le salarié était le seul à occuper le poste supprimé.

Toutefois, il procède par des allégations qui ne sont pas corroborées par des pièces pertinentes.

Dès lors, la cour, qui est compétente pour connaître de l'application par l'employeur des critères d'ordre malgré l'existence d'une autorisation administrative de licenciement, retient que le liquidateur judiciaire n'établit pas que l'ordre des licenciements a été respecté à l'égard de M. [B] [W].

Au regard de son ancienneté de 31 ans et de son salaire de référence de 1696euros, il y a lieu de fixer au passif la somme de 19 000 euros compte tenu du préjudice subi par le salarié.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a dit M. [B] [W] irrecevable à contester tant la procédure de notification du licenciement que l'ordre des licenciements mais recevable.

Sur la formation:

M. [B] [W] demande une somme de 7 500 euros de dommages et intérêts pour défaut de formation.

Le liquidateur judiciaire ne conteste pas l'absence de formations suivies par M.[B] [W] mais fait valoir que M. [B] [W] ne justifie pas de son préjudice.

Dans ce cadre, la cour retient que M. [B] [W] ne justifie effectivement pas du préjudice qu'il allègue, car il se borne à indiquer, sans autre précision, que l'absence de formations en nombre suffisant pendant sa carrière justifie l'allocation d'une indemnisation complémentaire au titre d'un préjudice distinct. Sa demande est dès lors rejetée.

Le jugement est donc infirmé en ce qu'il a ordonné à la liquidation judiciaire de verser la somme de 2000 euros de dommages et intérêts pour défaut de formation.

Sur les dépens:

La cour relève qu'aucune des parties ne demande la condamnation de l'autre au paiement des dépens de première instance. Le jugement est donc confirmé du chef des dépens.

Les dépens d'appel seront des frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement, sauf en ce qu'il a mis les dépens à la charge de la liquidation judiciaire de la société Fonderies Collignon.;

Statuant à nouveau,

Juge qu'il ne lui appartient pas d'apprécier le caractère réel et sérieux du motif de licenciement au regard du respect par l'employeur de son obligation de reclassement ;

Juge en conséquence irrecevables les demandes formées par M. [B] [W] de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse, d'indemnité de préavis et de congés payés sur indemnité de préavis.

Fixe à la liquidation judiciaire, au bénéfice de M. [B] [W], la somme de 196000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des critères d'ordre;

Juge cet arrêt opposable à l'AGS CGEA d'[Localité 7] ;

Juge que les dépens d'appel sont des frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/01178
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;23.01178 ?
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