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12/06/2024 | FRANCE | N°23/00038

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre sociale, 12 juin 2024, 23/00038


Arrêt n°

du 12/06/2024





N° RG 23/00038





FM/FJ









Formule exécutoire le :







à :



COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 12 juin 2024





APPELANTE :

d'un jugement rendu le 12 décembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Activités Diverses (n° F 20/00576)



Madame [M] [V] épouse [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par la SELARL D. LEGRAS, avoca

t au barreau de REIMS





INTIMÉE :



SAS ADECCO FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par la SARL ORVA-VACCARO & ASSOCIES, avocats au barreau de TOURS

DÉBATS :



En audience publique, en application des dispositions des art...

Arrêt n°

du 12/06/2024

N° RG 23/00038

FM/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D'APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 12 juin 2024

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 12 décembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes de REIMS, section Activités Diverses (n° F 20/00576)

Madame [M] [V] épouse [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par la SELARL D. LEGRAS, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SAS ADECCO FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par la SARL ORVA-VACCARO & ASSOCIES, avocats au barreau de TOURS

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 avril 2024, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 12 juin 2024.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Monsieur François MÉLIN, président

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

Madame Isabelle FALEUR, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Mme [M] [V], épouse [D], et la société Adecco ont conclu à compter du 1er août 2018 différents contrats de mise à disposition, par lesquels la salariée a travaillé entre cette date et le 31 août 2020 au bénéfice de l'entreprise utilisatrice Compass Group France.

Mme [M] [V], épouse [D], a saisi le conseil de prud'hommes de Reims de différentes demandes à l'encontre de la société Adecco et de l'entreprise utilisatrice Compass Group France.

Cette dernière et Mme [M] [V], épouse [D], ont conclu une transaction le 19 novembre 2021.

Par un jugement du 12 décembre 2022, le conseil a, au visa de la transaction intervenue entre Mme [M] [V], épouse [D], et l'entreprise utilisatrice :

- déclaré non fondé l'ensemble des demandes de Mme [M] [V], épouse [D], et l'en a débouté ;

- laissé les dépens la charge de Mme [M] [V], épouse [D].

Mme [M] [V], épouse [D], a formé appel.

Par des conclusions remises au greffe le 18 juillet 2023, Mme [M] [V], épouse [D], demande à la cour de :

- la juger recevable et bien fondée en ses demandes,

en conséquence,

- infirmer le jugement des chefs suivants :

- déclaré non fondé l'ensemble des demandes de Mme [M] [V], épouse [D], et l'en déboute ; laissé les dépens à la charge de Mme [M] [V], épouse [D] ;

et statuant à nouveau,

- juger que les contrats de mission successifs régularisés entre Mme [M] [V], épouse [D], et Compass Group France C 730 dénommée également Compas Group France [Localité 5]) ont pour objet et pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise,

- en conséquence, requalifier la relation de travail en un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein sur la période du 1er août 2018 au 31 août 2020 et dire et juger cette requalification opposable à la société Adecco avec toutes conséquences légales,

- condamner la société Adecco à payer les sommes suivantes :

' rappel de salaire sur heures supplémentaires : .......................... 651,09 €,

' congés payés y afférents : ......................................................... ...65,10 €,

' indemnité compensatrice de repos compensateur 2019 .......... ...778,18 €,

' indemnité compensatrice de repos compensateur 2020 .......... ...552,83 €,

' rappel de prime de treizième mois 2019 et 2020 ................... ..3 733,53 €,

' prime d'activité continue ............................................................. 926,18 €,

' prime de service minimum : ..................................................... ...451,80 €,

' dommages et intérêts '''''''''''''''''5 000,00 €,

- condamner la société Adecco à payer une somme de 4 000 € au titre des frais irrépétibles, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens,

- débouter la société Adecco de toutes autres demandes plus amples ou contraires.

Par des conclusions remises au greffe le 26 avril 2023, la société Adecco demande à la cour de :

vu la transaction régularisée entre la société Compass et Mme [M] [V], épouse [D],

- confirmer la décision en toutes ses dispositions, sauf à y ajouter sur l'appel incident qu'il y soit ajouté après infirmation sur la recevabilité à titre principal :

statuant à nouveau,

- déclarer irrecevable Mme [M] [V], épouse [D], dans l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions et en son appel,

- et en tout état de cause, confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a déclaré non fondées l'ensemble des demandes de Mme [M] [V], épouse [D], et l'en a débouté,

- condamner Mme [M] [V], épouse [D], à verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Motifs :

Sur l'allégation d'irrecevabilité des demandes nouvelles formulées en première instance

La société Adecco soutient, sans aucune autre précision, «que la cour devra considérer comme irrecevables les demandes de Mme [M] [V], épouse [D], formulée le 4 mars 2021 sans lien suffisant avec les demandes initiales» (conclusions p. 3).

Au regard de cette allégation, la cour relève que la société Adecco se borne à procéder par une affirmation générale, sans indiquer les demandes qui seraient selon elle nouvelles.

En tout état de cause, Mme [M] [V], épouse [D], indique à juste titre que cette allégation est infondée, compte tenu des dispositions de l'article 70 du code de procédure civile selon lesquelles les demandes additionnelles sont recevables si elle se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant.

En effet, la requête, du 3 novembre 2020, saisissant le conseil des prud'hommes, qui a été rédigée par Mme [M] [V], épouse [D], qui n'était pas alors représentée, vise des dommages et intérêts suite au non-paiement de salaire, au retard de paiement d'heures travaillées et un prélèvement de plus de 10 % du salaire ainsi que des demandes de diverses primes.

Or, Mme [M] [V], épouse [D], a, dans ses conclusions du 4 mars 2021 devant le conseil, simplement précisé ces demandes, en formulant des demandes de rappel de salaire, de congés payés, d'indemnité compensatrice de repos compensateurs et de primes et en demandant des dommages-intérêts pour non-respect de différentes règles du droit du travail.

Les demandes de Mme [M] [V], épouse [D], sont donc recevables.

Sur l'allégation d'irrecevabilité au vu de la transaction

La société Adecco soutient que la transaction conclue par la salariée et l'entreprise utilisatrice le 19 novembre 2021 concerne des demandes trouvant leur source dans la relation de travail temporaire et liées à la requalification des contrats missions en contrat de travail à durée indéterminée. Elle indique que la transaction prévoit une indemnisation de tous les préjudices moraux, professionnel et financier et qu'elle a pour objet de mettre un terme définitif à la procédure actuellement pendante, qui concernait également la société Adecco. Elle en déduit que Mme [M] [V], épouse [D], a perdu toute qualité à agir contre elle et que ses demandes sont donc irrecevables.

Toutefois, Mme [M] [V], épouse [D], indique à juste titre que la transaction été conclue avec l'entreprise utilisatrice uniquement et que le protocole ne prévoit de mettre fin qu'au litige existant entre celle-ci et Mme [M] [V], épouse [D]. Dès lors, la société Adecco ne peut pas utilement se prévaloir à son profit de la transaction, dont l'effet est relatif.

Les demandes de Mme [M] [V], épouse [D], sont donc recevables.

Sur la requalification de la relation de travail

Moyens des parties

Mme [M] [V], épouse [D], indique qu'elle a travaillé de manière constante pour la société utilisatrice du 1er août 2018 au 31 août 2020, le plus souvent à raison de trois ou quatre jours de travail par semaine, y compris les samedis et dimanches, qu'au cours de cette période, 175 contrats de mission ont été conclus, que les seules brèves périodes au cours desquelles elle ne travaillait pas correspondaient en réalité à ses congés, qu'elle était contrainte de se tenir constamment à la disposition de l'entreprise utilisatrice, qu'elle occupait en réalité un emploi ayant à caractère permanent, et ce d'autant plus qu'elle occupait toujours les fonctions de cuisinière ou d'employée de restauration dans le même établissement situé à [Localité 5], que les délais de carence entre chaque contrat mission n'étaient pas respectés, que treize contrats de mission couvrant la période allant du 16 janvier au 26 février 2020 ont même été signés postérieurement à cette date, et qu'il en résulte qu'il convient de requalifier les contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée à temps plein sur l'ensemble de la période allant du 1er août 2018 au 31 août 2020.

La société Adecco répond que la demande de requalification lui est inopposable car le motif du recours au travail temporaire relève de la responsabilité exclusive de l'entreprise utilisatrice et car elle s'est elle-même bornée à indiquer le motif de recours transmis par cette dernière. Elle ajoute que Mme [M] [V], épouse [D], s'est engagée, dans le protocole transactionnel conclu avec l'entreprise utilisatrice, à renoncer à toute contestation sur l'exécution de la relation de travail.

Règles applicables

L'article L 1251-40 du code du travail dispose que « lorsqu'une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10, L. 1251-11, L. 1251-12-1, L. 1251-30 et L. 1251-35-1, et des stipulations des conventions ou des accords de branche conclus en application des articles L. 1251-12 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission ».

Les dispositions de l'article L. 1251-40 du code du travail, qui sanctionnent l'inobservation par l'entreprise utilisatrice des dispositions des articles L. 1251-5 à L.1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35 du même code, n'excluent pas la possibilité pour le salarié d'agir contre l'entreprise de travail temporaire lorsque les conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main d'oeuvre est interdite n'ont pas été respectées (Soc., 12 novembre 2020, n° 18-18.294).

Réponse de la cour

Si la société Adecco soutient qu'une requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein ne peut pas lui être opposable, elle ne conteste pas que 175 contrats missions ont été conclus du 1er août 2018 au 31 août 2020, que les délais de carence entre chaque contrat mission n'ont pas été respectés, que la salariée était toujours affectée aux mêmes fonctions et sur le même site, et qu'elle occupait en réalité un emploi permanent à temps plein.

Au regard de ces éléments, il y a lieu de prononcer la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein, cette qualification permettant à la salariée d'agir contre la société Adecco, ainsi qu'il résulte des principes rappelés ci-dessus.

Le jugement est donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [M] [V], épouse [D], de sa demande de requalification.

Sur la demande rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et sur la demande de repos compensateur

Moyens des parties

Mme [M] [V], épouse [D], indique qu'au cours de la relation de travail, elle a effectué des heures supplémentaires qui lui ont été rémunérées à hauteur de 7204,22 euros mais qu'une somme de 651,09 euros est encore due à ce titre, outre une somme de 65,10 euros de congés payés afférents. Elle ajoute que la convention collective de la restauration de collectivités prévoit un contingent annuel de 130 heures supplémentaires, qu'elle a pourtant effectué 151,25 supplémentaires au-delà de ce contingent en 2019 et 105 heures supplémentaires au-delà de ce contingent en 2000, de sorte qu'une somme de 778,18 euros lui est due à titre d'indemnité compensatrice de repos compensateur pour l'année 2019 ainsi qu'une somme de 552,83 euros pour l'année 2020.

La société Adecco répond notamment qu'elle a rempli ses obligations en matière de rémunération, qu'elle doit être mise hors de cause, et à titre subsidiaire, qu'elle a rémunéré la salariée conformément aux déclarations de l'entreprise utilisatrice, que Mme [M] [V], épouse [D], produit des documents à ce sujet alors que nul ne peut se constituer une preuve à soi-même et que sa demande viole le droit à un procès équitable puisqu'elle n'a aucun moyen de contrôle des heures effectivement effectuées au sein de l'entreprise utilisatrice.

Règles applicables

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, « En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable».

Ainsi, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant. » (Soc., 27 janvier 2021, n°17-31046, publié).

L'article 10 de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités énonce que les heures supplémentaires ouvrent droit à un repos compensateur défini par la législation en vigueur.

Réponse de la cour

Mme [M] [V], épouse [D], fournit un tableau récapitulatif des heures supplémentaires qu'elle indique avoir travaillées et fournit de la sorte des éléments suffisamment précis permettant à la société Adecco d'y répondre utilement.

Or, celle-ci ne fournit aucun élément pertinent quant aux heures de travail de Mme [M] [V], épouse [D], se bornant à alléguer qu'elle a rempli ses obligations au regard des éléments fournis par l'entreprise utilisatrice.

Il est donc fait droit à la demande de Mme [M] [V], épouse [D], au titre des heures supplémentaires ainsi qu'au titre des repos compensateurs, le jugement étant infirmé en ce qu'il l'a déboutée, la cour retenant que les heures supplémentaires litigieuses ont effectivement été travaillées.

Sur la demande de rappel de prime de treizième mois

Moyens des parties

Mme [M] [V], épouse [D], demande le paiement d'un rappel de prime de treizième mois au titre des années 2019 2020.

La société Adecco répond qu'elle a interrogé l'entreprise utilisatrice, qui lui a indiqué que la convention collective prévoit une prime de treizième mois uniquement au terme d'une année d'ancienneté continuée révolue, ce qui exclut nécessairement les intérimaires.

Règle applicable

L'article 16.3.2 la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités énonce que le treizième mois sera acquis au bout d'un an d'ancienneté continue et révolue, au prorata du nombre de mois travaillés dans l'année civile au-delà de cette période de douze mois.

Réponse de la cour

Ainsi que le soutient Mme [M] [V], épouse [D], la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée la rend éligible à la prime de treizième mois, dans la mesure où elle avait acquis une année d'ancienneté continue et révolue au 1er août 2019.

Il est donc fait droit à la demande de Mme [M] [V], épouse [D], au titre des années 2019 et 2020.

Sur la demande de prime d'activité

Moyens des parties

Mme [M] [V], épouse [D], demande le paiement d'une prime d'activité continue d'un montant de 926,18 euros en application de la convention collective, dans la mesure où elle travaillait par roulement, indifféremment chaque jour de la semaine, avec des périodes de coupures aléatoires et des horaires aléatoires.

La société Adecco répond que la convention collective prévoit une prime d'activité continue pour les salariés astreints dans un établissement fonctionnant sept jours sur sept et que cette prime ne se cumule pas avec les primes de dimanche ou de week-end. Elle ajoute que les bulletins de salaire faisant apparaître des primes de dimanche ou des primes de jours fériés, Mme [M] [V], épouse [D], ne peut pas prétendre au paiement de la prime d'activité continue.

Règles applicables

L'article 36. 1 de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités énonce que :

« L'évolution des attentes des clients ainsi que du contexte économique amène de plus en plus souvent à exercer l'activité dans des établissements où l'activité est continue.

Ces établissements (unités géographiques distinctes) s'entendent de ceux fonctionnant 7 jours sur 7 :

- dans lesquels sont assurés, dans ces conditions, production et/ou service aux convives ;

- dans lesquels, par voie de conséquence :

- le rythme de travail entraîne son exécution par roulement assorti d'horaires réguliers ou irréguliers, tant en semaine que les samedis, dimanches et jours fériés ;

- le rythme de jours de repos s'applique selon les dispositions de l'article 10.F de la convention collective nationale.

Le salarié affecté dans un établissement défini ci-dessus, où ces obligations s'imposent et auxquelles il est astreint, perçoit, en contrepartie, une prime mensuelle, dite prime d'activité continue (PAC), prime qui ne se cumule pas avec toute autre prime déjà existante ayant le même objet (par exemple : prime de dimanche, prime de week-end, prime de sujétion...).

Cette prime, dont le montant brut est égal à ... (voir textes salaires) pour l'horaire mensuel en vigueur et applicable dans l'entreprise, est versée au prorata du temps de travail effectif.

Toutefois, elle ne peut être inférieure à 50 % pour les salariés à temps partiel, pour 1 mois complet de travail ».

Réponse de la cour

Mme [M] [V], épouse [D], indique elle-même qu'elle percevait les primes de dimanche et de week-end.

En conséquence, sa demande d'attribution de la prime d'activité est rejetée, compte tenu des termes de l'article 36. 1 de la convention collective.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande.

Sur la demande de prime de service minimum

Moyens des parties

Mme [M] [V], épouse [D], demande la condamnation de la société Adecco à lui payer une somme de 451,80 euros à titre de prime de service minimum prévue par la convention collective dans les établissements prenants en charge des personnes dépendantes en raison d'un handicap physique et/ou psychique. Elle indique qu'elle était affectée dans un établissement accueillant des personnes souffrant de troubles psychiatriques, que l'activité ne pouvait donc s'arrêter, et qu'elle a travaillé y compris pendant la période de confinement de mars à mai 2020. Elle ajoute que l'article 114 du code de l'action sociale et des familles, « constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société Adecco subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ». Elle indique par ailleurs que l'une de ses collègues percevait la prime considérée.

La société Adecco répond qu'elle n'a pas versé la prime de service minimum à Mme [M] [V], épouse [D], à la demande de l'entreprise utilisatrice car si la convention collective prévoit une prime pour les salariés exerçant dans un service de restauration au bénéfice de convives dépendants, c'est-à-dire affectés par un handicap physique et/ou psychique, l'établissement où était affectée la salariée n'accueille pas de personnes handicapées.

Règles applicables

L'article 36. 2 de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités énonce que :

« Dans les établissements à activité continue dans lesquels les salariés sont amenés à exercer une activité de restauration, ou de services à caractère hôtelier, au bénéfice de convives dépendants, un service minimum, qui ne saurait remettre en cause le droit de grève, sera en tous cas assuré.

Les personnes dépendantes sont celles qui requièrent une aide pour accomplir les actes élémentaires de la vie courante, à titre temporaire ou permanent, en raison d'un handicap physique et/ou psychique.

Dès lors, et en contrepartie, une prime de « service minimum » d'un montant brut de 22,50 € pour l'horaire mensuel en vigueur et applicable dans l'entreprise est attribuée au salarié astreint à l'obligation de service minimum. Elle est versée au prorata du temps de travail effectif sans pouvoir être inférieure à 50 % pour les salariés à temps partiel, pour 1 mois complet de travail.

Les salariés concernés qui travaillent dans le secteur à activité continue et qui en subissent les contraintes perçoivent la prime d'activité continue et, si ils y ont droit, de service minimum durant leurs congés payés s'il n'en est pas déjà tenu compte dans leur mode de calcul.

Les salariés bénéficiant de dispositions plus avantageuses à la date d'application du présent accord conservent les avantages de ces dispositions qui ne peuvent, en aucun cas, se cumuler avec les dispositions présentes (par exemple : primes déjà existantes ayant le même objet, attribuées dans des conditions plus favorables et/ou d'un montant plus élevé que ceux prévus par le présent avenant).

Ces primes n'entrent pas dans le calcul du « revenu minimum annuel ».

Réponse de la cour

Il est constant que l'établissement dans lequel était affectée la salariée accueille des patients adultes présentant des pathologies psychiatriques.

En application de l'article 36. 2 de la convention collective qui prévoit une prime pour les salariés affectés dans des établissements accueillants des personnes présentant notamment un handicap psychique et de l'article 114 du code de l'action sociale et des familles, il est fait droit à la demande de Mme [M] [V], épouse [D], de sorte que le jugement est infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts

Moyens des parties

Mme [M] [V], épouse [D], demande la condamnation de la société Adecco à lui payer la somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts en faisant valoir notamment que la société Adecco n'a pas respecté ses obligations à son égard puisqu'elle ne lui versait pas différents éléments de la rémunération qui lui étaient pourtant dus, que les contrats de mission n'étaient pas rédigés de manière correcte en particulier car les noms des personnes remplacées comportaient fréquemment des fautes, que les motifs de recours aux contrats de mission étaient faux, et que les contrats de mission étaient signés par bloc par elle-même. Mme [M] [V], épouse [D], ajoute qu'une retenue a été opérée pour un montant de 303,30 euros sur son salaire du mois de décembre 2019.

La société Adecco répond que les éléments de rémunération litigieux n'étaient pas dus à Mme [M] [V], épouse [D], que les erreurs sur les noms des personnes remplacées n'ont causé aucun préjudice, que les contrats de mission étaient disponibles pour signature électronique sur un espace personnel et qu'il appartenait à la salariée de les signer en temps utile et non pas en bloc, qu'elle n'est pas elle-même responsable du respect des dispositions légales sur le temps travail sur l'amplitude horaire et sur le délai de carence, et qu'il n'y a pas eu de retenu sur le salaire du mois de décembre 2019 mais une simple régularisation en raison d'un trop perçu.

Réponse de la cour

La cour relève qu'il n'est pas contesté qu'une retenue de 303, 30 euros a été opérée sur le salaire du mois de décembre 2019. Si la société Adecco soutient qu'il s'agit d'une régularisation en raison d'un trop perçu, elle procède par une simple affirmation, qui n'est étayée par aucun élément de preuve.

La salariée a donc subi un préjudice du fait de la faute de la société, qui engage sa responsabilité au sens de l'article 1240 du code civil.

En revanche, elle ne justifie pas du principe du préjudice qu'elle allègue pour le surplus.

La société est donc condamnée à payer une somme de 303, 30 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Mme [M] [V], épouse [D], ne demandant pas que l'employeur soit condamné au titre de la première instance sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande à ce titre.

À hauteur d'appel, la société Adecco est condamnée à payer à Mme [M] [V], épouse [D], la somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700, sa demande étant quant à elle rejetée.

Sur les dépens

Le jugement est infirmé en ce qu'il a mis les dépens la charge de la salariée.

La société Adecco, qui succombe, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Juge recevables les demandes de Mme [M] [V], épouse [D], ;

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté Mme [M] [V], épouse [D], de sa demande de prime d'activité et rejeté sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Requalifie la relation de travail issue des contrats missions conclus du 1er août 2018 au 31 août 2020 par Mme [M] [V], épouse [D], et Compass Group France en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein ;

Condamne la société Adecco à payer à Mme [M] [V], épouse [D], les sommes suivantes :

- rappel de salaire sur heures supplémentaires : 651,09 euros,

- congés payés y afférents : 65,10 euros,

- indemnité compensatrice de repos compensateur 2019 : 778,18 euros,

- indemnité compensatrice de repos compensateur 2020 : 552,83 euros,

- rappel de prime de treizième mois 2019 et 2020 : 3 733,53 euros,

- prime de service minimum : 451,80 euros,

- dommages et intérêts : 303, 30 euros,

- article 700 du code de procédure civile : 4 000 euros ;

Rejette la demande formée par la société Adecco au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Adecco aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00038
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;23.00038 ?
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