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15/05/2024 | FRANCE | N°24/00017

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre premier président, 15 mai 2024, 24/00017


ORDONNANCE N°



DOSSIER N° : N° RG 24/00017 - N° Portalis DBVQ-V-B7I-FPEC-16







S.A.R.L. HAMY inscrite au RCS de PARIS sous le numéro 880 753 215, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège





c/



S.C.I. JUVENAL





















Expédition certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire

délivrée le

à

la SCP RAHOLA CREUSAT LEFEVRE

la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES

































L'AN DEUX MIL VINGT QUATRE,



Et le 15 mai,





A l'audience des référés de la cour d'appel de REIMS, où était présent et siégeait Mme Sandrine PILON, conseiller suppléant le premier pré...

ORDONNANCE N°

DOSSIER N° : N° RG 24/00017 - N° Portalis DBVQ-V-B7I-FPEC-16

S.A.R.L. HAMY inscrite au RCS de PARIS sous le numéro 880 753 215, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

c/

S.C.I. JUVENAL

Expédition certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire

délivrée le

à

la SCP RAHOLA CREUSAT LEFEVRE

la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES

L'AN DEUX MIL VINGT QUATRE,

Et le 15 mai,

A l'audience des référés de la cour d'appel de REIMS, où était présent et siégeait Mme Sandrine PILON, conseiller suppléant le premier président conformément à l'ordonnance du 30 janvier 2024, assistée de Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier,

Vu l'assignation délivrée par Maître [I] commissaire de justice à [Localité 6] en date du 2 Avril 2024,

A la requête de :

S.A.R.L. HAMY inscrite au RCS de PARIS sous le numéro 880 753 215, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Stanislas CREUSAT de la SCP RAHOLA CREUSAT LEFEVRE, avocat au barreau de REIMS

DEMANDEUR

à

S.C.I. JUVENAL

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Florence SIX de la SCP HERMINE AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

DÉFENDEUR

d'avoir à comparaître le 24 avril 2024, devant le premier président statuant en matière de référé.

A ladite audience, le conseiller a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, assistée de Monsieur Nicolas MUFFAT-GENDET, greffier, puis l'affaire a été mise en délibéré au 15 mai 2024,

Et ce jour, 15 mai 2024, a été rendue l'ordonnance suivante par mise à disposition au greffe du service des référés, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile :

Par acte du 20 janvier 2020, la SCI Juvénal a donné à bail à la SARL Hamy un local commercial situé [Adresse 3]), moyennant un loyer annuel de 16 800 euros.

Il n'est pas contesté que les lieux ont été atteints par un dégât des eaux le 29 juin 2021, causés par une fuite d'eau provenant d'un logement situé à l'étage supérieur et appartenant à la SCI Juvénal.

Le 22 mai 2023, la SCI Juvénal a fait délivrer à la SARL Hamy un commandement de payer la somme de 6 348.92 euros au titre de loyers impayés au 15 mai 2023. Ce commandement visait la clause résolutoire contenue dans le bail.

Le 19 juin 2023, la SARL Hamy a fait assigner la SCI Juvénal devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Troyes afin d'obtenir la suspension des effets de la clause résolutoire pendant un délai de 6 mois, ainsi que la condamnation du bailleur à lui payer la somme de 66 155 euros au titre d'une perte d'exploitation et celle de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral.

La SCI Juvénal s'est opposée à ces demandes et a sollicité, à titre reconventionnel, le constat de l'acquisition de la clause résolutoire, l'expulsion de la SARL Hamy et sa condamnation à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 7 367.30 euros au titre de l'arriéré locatif, ainsi qu'une indemnité d'occupation.

Par ordonnance du 30 janvier 2024, le juge des référés a :

- Constaté la résiliation de plein droit du bail conclu entre les parties, à compter du 22 juin 2023,

- Rejeté la demande de la SARL Hamy tendant à la suspension des effets de la clause résolutoire,

- Ordonné l'expulsion de la SARL Hamy et de tous occupants de son chef des locaux en cause, sans qu'il ne soit nécessaire d'ordonner d'astreinte,

- Condamné la SARL Hamy à payer à la SCI Juvénal, à titre de provision, la somme de 7 367.30 euros au titre des loyers et charges impayés, suivant dernier décompte des sommes dues en date du 22 juin 2023,

- Condamné la SARL Hamy à payer à la SCI Juvénal, à titre de provision une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du dernier loyer à compter du 22 juin 2023 et jusqu'à libération effective des lieux,

- Rejeté la demande de la SARL Hamy tendant à voir ordonner un échelonnement des paiements sur 24 mois,

- Rejeté la demande de la SARL Hamy tendant au paiement par la SCI Juvénal de la somme de 66 155 euros au titre d'une perte d'exploitation,

- Rejeté la demande de la SARL Hamy tendant au paiement par la SCI Juvénal de la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral,

- Condamné la SARL Hamy à verser à la SCI Juvénal la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la SARL Hamy aux entiers dépens.

La SARL Hamy a relevé appel de cette ordonnance par déclaration du 9 février 2024.

Par acte du 2 avril 2024, elle a fait assigner la SCI Juvénal devant le premier président de cette cour et demande :

- L'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance,

- Le rejet de toutes les demandes de la SCI Juvénal, notamment, de sa demande reconventionnelle tendant à voir prononcer la radiation de l'instance,

- La condamnation de la SCI Juvénal à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Elle invoque l'existence d'un moyen sérieux de réformation de l'ordonnance de référé en affirmant que le preneur victime d'un dégât des eaux peut obtenir la suspension de la clause résolutoire sans qu'il soit nécessaire de démontrer une éventuelle responsabilité.

Elle souligne le lien de causalité établi entre l'origine de la fuite et les désordres qu'elle subit et prétend qu'aucune réparation sérieuse n'a été effectuée contrairement à ce qu'indique la SCI Juvénal.

La SARL Hamy invoque en outre un risque de conséquences manifestement excessives et irréversibles en expliquant que la SCI Juvénal a déjà tenté à deux reprises de procéder à son expulsion et qu'une telle mesure entraînerait purement et simplement la perte de son droit au bail et la perte de son fonds de commerce et des revenus issus de son exploitation.

En réponse aux moyens développés par la SCI Juvénal, elle soutient que :

- L'existence d'un dégât des eaux est invoquée comme moyen de suspension de la clause résolutoire sans qu'il soit nécessaire de démontrer une éventuelle responsabilité ; l'origine du sinistre se trouve dans la salle de douche du logement appartenant à la SCI Juvénal, qui a fait preuve d'inertie pour y remédier, les travaux qu'elle affirme avoir réalisés au mois d'août 2021, non justifiés, ayant été inefficaces, puisque la bailleresse indique avoir fait de nouveaux travaux au mois de mars 2023 ; il n'est pas justifié de ces derniers travaux, alors que les désordres dans les locaux donnés à bail se sont aggravés,

- Elle a fait réaliser quelques travaux d'aménagement intérieurs qui ont nécessité un transfert temporaire pendant trois semaines ; une seconde boutique a été ouverte et il n'y a pas eu de transfert définitif et elle n'a pas délaissé les locaux.

La SARL Hamy s'oppose à la demande de radiation en affirmant que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives.

La SCI Juvénal, pour sa part, demande le rejet des prétentions de la société Hamy et, à titre reconventionnel, la radiation de l'appel, ainsi que la condamnation de la société Hamy à lui verser la somme de 2 000 euros à titre de dommages intérêts, outre celle de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

La SCI Juvénal conteste tout moyen sérieux qui soit propre à aboutir à l'infirmation de l'ordonnance en ce que :

- Le commandement de payer n'est pas apuré et la clause résolutoire est acquise,

- S'agissant de la demande de suspension de la clause résolutoire, le premier dégât des eaux était très léger et n'a concerné qu'une pièce arrière des locaux objets du bail, de sorte qu'il n'empêchait pas l'exploitation des lieux; la SARL Hamy avait en outre quitté les lieux avant le sinistre, sans plus se manifester auprès d'elle, mais tout en continuant à régler les loyers, jusqu'au mois de janvier 2023 ; le second dégât des eaux a été dénoncé au mois de janvier 2023, alors que les locaux n'étaient toujours pas exploités et que les loyers n'étaient plus réglés ; la SARL Hamy ne démontre pas l'existence des préjudices qu'elle invoque,

- Elle ne justifie pas de sa situation comptable et financière au soutien de sa demande de délais de paiement,

- Elle a tenté de solliciter du juge des référés des dommages intérêts et non une provision.

Elle fait valoir que la SARL Hamy n'a formulé aucune observation sur l'exécution provisoire.

Quant aux conséquences liées à l'exécution de l'ordonnance, la SCI Juvénal rappelle que la SARL Hamy occupe les locaux sans payer les loyers ni les charges depuis 15 mois et indique que ses comptes bancaires sont débiteurs et qu'elle semble manifestement déjà en état de cessation des paiements. Elle ajoute que la gérante de cette société a créé une nouvelle entité en juillet 2023, dont le nom commercial ressemble étrangement à celui rattaché à la SARL Hamy.

Pour ces motifs, elle demande en outre que l'affaire soit radiée du rôle.

MOTIFS

Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

Il résulte de l'article 514-3 du code de procédure civile qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Les deux conditions prévues par ce texte pour l'arrêt de l'exécution provisoire sont cumulatives.

Le juge ne pouvant écarter l'exécution provisoire de droit lorsqu'il statue en référé, ainsi que cela résulte de l'article 514-1 du code de procédure civile, la recevabilité de la demande de la SCI Hamy ne peut être subordonnée à la justification par celle-ci de ce qu'elle a fait valoir des observations sur l'exécution provisoire en première instance.

La SCI Hamy invoque un arrêt de la cour de cassation rappelant que le titulaire d'un bail commercial peut demander des délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire tant que la résiliation du bail n'est pas constatée par une décision passée en force de chose jugée ; elle invoque en outre deux arrêts de la cour d'appel de Lyon, l'un accordant au locataire des délais de paiement rétroactifs et l'autre, octroyant des délais après avoir constaté que le locataire avait cessé son activité à raison d'un sinistre dégât des eaux auquel il était totalement étranger et qu'il justifiait qu'il serait en mesure de régulariser l'arriéré à réception de l'indemnité d'assurance.

En l'espèce, si la SCI Hamy peut demander des délais de paiement, en l'absence de décision passée en force de chose jugée, elle ne justifie pas avec l'évidence requise pour la présente procédure des éléments de fait retenus par les décisions qu'elle invoque pour accorder des délais de paiement aux locataires et suspendre la clause résolutoire, notamment d'une impossibilité totale d'exploiter les locaux donnés à bail, ni du règlement des causes du commandement de payer, ainsi que des loyers échus depuis lors ou de sa capacité à assurer ce paiement à la faveur des délais dont elle demande l'octroi.

Elle ne justifie pas ainsi d'un moyen sérieux de réformation de l'ordonnance de référé et sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire doit donc être rejetée.

Sur la demande de radiation

L'article 524 alinéa 1er du code de procédure civile dispose : " Lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision ".

La SCI Juvénal ne justifie pas avoir exécuté l'ordonnance de référé qui ordonne son expulsion et la condamne à titre provisionnel au paiement des sommes dues au titre des loyers et charges impayés au 22 juin 2023 et d'une indemnité mensuelle d'occupation égale au montant du dernier loyer après cette date.

Toutefois, un départ immédiat des lieux, dans lesquels elle exploite son fonds de commerce, aurait nécessairement pour elle des conséquences manifestement excessives.

La radiation ne sera donc pas ordonnée.

Sur la demande en paiement de dommages intérêts

La SCI Juvénal ne justifie pas du caractère fautif de la demande de la SARL Hamy aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire. Elle sera donc déboutée de sa demande en paiement de dommages intérêts.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La SARL Hamy, qui succombe en sa demande, supportera la charge des dépens de la présente procédure et sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

Il est équitable d'allouer à la SCI Juvénal la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président, statuant en référé et contradictoirement,

Déboute la SARL Hamy de l'ensemble de ses demandes,

Dit n'y avoir lieu de radier l'affaire du rôle,

Déboute la SCI Juvénal de sa demande en paiement de dommages intérêts,

Condamne la SARL Hamy à payer à la SCI Juvénal la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Hamy aux dépens de la présente procédure.

Le greffier Le conseiller délégué


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 24/00017
Date de la décision : 15/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-15;24.00017 ?
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