Arrêt n°
du 03/04/2024
N° RG 23/01339
MLB/ML
Formule exécutoire le :
à :
COUR D'APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 03 avril 2024
APPELANTS :
d'un jugement rendu le 21 juillet 2023 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de TROYES (n° 21/00018)
1) Monsieur [E] [F]
[Adresse 12]
[Localité 22]
2) Madame [M] [U] épouse [F]
[Adresse 12]
[Localité 22]
3) Monsieur [V] [F]
[Adresse 6]
[Localité 22]
représentés par Me Richard HONNET, avocat au barreau de l'AUBE
INTIMÉES :
1) Madame [W] [B]
[Adresse 20]
[Localité 15]
2) La S.C.I. DE [Adresse 21]
[Adresse 13]
[Localité 14]
représentées par Maître Fabien BARTHE, de la SELARL CABINET LEMONNIER - BARTHE, avocat au barreau de RENNES
DÉBATS :
A l'audience publique du 12 février 2024, où l'affaire a été mise en délibéré au 3 avril 2024, Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés d'instruire l'affaire, ont entendu les plaidoiries en application de l'article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s'y étant pas opposées, et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Monsieur François MÉLIN, président de chambre
Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller
Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Madame Maureen LANGLET, greffier placé
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Maureen LANGLET, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Suivant acte authentique en date du 14 janvier 1974, Madame [S] [P] et Madame [W] [B]-[Z] ont donné à bail à Monsieur [Y] [F] des friches -que celui-ci s'engageait à planter en vignes- d'une contenance de 2 ha 29 a 81 ca, soit les parcelles cadastrées section AB n°[Cadastre 7],[Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10] et [Cadastre 11] -regroupées sous les parcelles section AB n°[Cadastre 16], [Cadastre 17] et [Cadastre 18]- et section A n°[Cadastre 1],[Cadastre 4],[Cadastre 5] et [Cadastre 7], sises sur la commune [Localité 22], [Adresse 23], et ce pour une durée de 30 ans à compter du 1er janvier 1974 pour se terminer après la vendange 2004, tacitement reconduit depuis le 31 octobre 2004.
Les parties ont signé, par acte authentique en date du 30 mai 1981, un avenant au contrat de bail, comprenant notamment un article 2 relatif à la propriété des plantations.
Par acte authentique en date du 31 juillet 1997, Monsieur [Y] [F] a cédé son droit au bail, portant notamment sur les parcelles section AB n°[Cadastre 16] et [Cadastre 17], à Monsieur [E] [F], lequel l'a ensuite cédé par acte authentique à son épouse, Madame [M] [U], le 28 mars 2019, et ce en présence de Madame [W] [B].
Lors des opérations de remembrement intervenues sur la commune de [Localité 22] en 2001, en ce qui concerne les parcelles AB n°[Cadastre 16] et [Cadastre 17], le bail a été reporté sur la parcelle ZI n°[Cadastre 4] d'une superficie de 54 a 34 ca dont 50 a en appellation Champagne.
Suivant acte en date du 30 avril 2021, Madame [W] [B] a donné congé à Monsieur [E] [F], Madame [M] [U] épouse [F] et Monsieur [V] [F] à effet au 31 octobre 2022 pour cession prohibée sur la parcelle cadastrée ZI n°[Cadastre 4], et à titre subsidiaire pour reprise par un descendant.
Le 20 mai 2021, Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Troyes d'une demande de nullité du congé.
Au dernier état de leurs écritures, ils contestaient la qualité à agir de Madame [W] [B], renoncaient à la contestation du congé litigieux et demandaient au tribunal de dire que les plantations appartiennent aux fermiers ainsi que les droits d'arrachage sans indemnité pour le bailleur.
Par jugement en date du 21 juillet 2023, le tribunal paritaire des baux ruraux a :
- donné acte à la SCI [Adresse 21] de son intervention volontaire ;
- déclaré Madame [W] [B] recevable en ses demandes reconventionnelles comme disposant de la qualité à agir ;
- constaté que Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] renoncent à contester le congé délivré le 30 avril 2021 ;
par conséquent, validé le congé ;
- dit que les plantations de vignes présentes sur la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 4], sise sur la commune [Localité 22], pour 54 a 34 ca et faisant l'objet du bail du 14 janvier 1974, sont la propriété du bailleur ;
- condamné solidairement Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] à procéder ou à faire procéder, à leurs frais, à la replantation de 50 a de vignes en pinot noir sur la dite parcelle section ZI n°[Cadastre 4], et ce à compter du 1er mars 2024 ;
- dit que cette condamnation sera assortie d'une astreinte de 50 euros par jour de retard pendant trois mois à compter du 15 mai 2024 ;
- débouté les parties de leurs demandes contraires ou plus amples ;
- condamné solidairement Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] aux dépens ;
- condamné solidairement Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] à payer à Madame [W] [B] la somme de 1000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire.
Le 4 août 2023, Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] ont formé une déclaration d'appel.
Dans leurs écritures en date du 9 février 2024 soutenues oralement lors de l'audience, Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] demandent à la cour, après avoir confirmé le jugement en ce qui concerne les dispositions relatives au congé contesté, de l'infirmer pour le surplus, et, statuant à nouveau :
- d'infirmer le jugement en toutes ses autres dispositions ;
- de déclarer Madame [W] [B] irrecevable à agir faute de démontrer sa qualité d'usufruitière ;
en tout état de cause ;
- de déclarer Madame [W] [B] irrecevable à agir relativement à la propriété les plantations ;
- de dire et juger que les plantations leur appartenaient par l'effet notamment de la clause insérée par acte notarié du 30 mai 1980 ;
- de débouter Madame [W] [B] de ses demandes d'arrachage ou de replantation ou encore d'indemnisation de préjudice ;
- de débouter les intimées de leurs prétentions contraires ou reconventionnelles ;
- de les condamner aux dépens et à leur payer la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 pour l'ensemble de la procédure.
Dans leurs écritures en date du 7 février 2024 soutenues oralement lors de l'audience, Madame [W] [B] et la SCI de [Adresse 21] demandent à la cour de confirmer le jugement puis, y ajoutant, de :
- juger que les droits d'arrachage et de replantations attachés aux plantations réalisées en 1975 sur la parcelle section ZI n°[Cadastre 4] (commune de [Localité 22]) reviennent au bailleur ; subsidiairement ;
- condamner solidairement Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] à payer à Madame [W] [B] la somme de 44900 euros au titre des frais de replantation et frais nécessaires jusqu'à l'entrée en production ;
en tout état de cause ;
- débouter Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] de leurs demandes ;
- condamner solidairement Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] à payer à Madame [W] [B] la somme de 3000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel ;
- condamner solidairement Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] aux dépens.
MOTIFS
- Sur la qualité à agir de Madame [W] [B] et de la SCI de [Adresse 21] :
Les consorts [F] soutiennent que, contrairement à ce que les premiers juges ont retenu, Madame [W] [B] n'a pas qualité à agir dès lors que non seulement elle ne justifie pas de sa qualité d'usufruitière, et qu'en toute hypothèse, seul le nu-propriétaire aurait qualité pour revendiquer une quelconque propriété et que le jugement doit être infirmé en ce sens. Dans les motifs de leurs écritures, ils écrivent que la SCI de [Adresse 21] ne pourrait intervenir faute d'établir des droits sur le bien litigieux.
Madame [W] [B] et la SCI de [Adresse 21] répliquent qu'elles établissent au vu des pièces produites que Madame [W] [B] est usufruitière de la parcelle en cause et bailleresse, ce qui lui donne qualité pour exercer les droits attachés au bail et agir au titre de ceux-ci. Elles font valoir en toute hypothèse que la SCI de [Adresse 21], dont elles établissent la qualité de nue-propriétaire de la parcelle en cause, est intervenue volontairement à l'instance.
La demande de Madame [W] [B] tend à se voir reconnaître la qualité de propriétaire des plantations de la parcelle ZI n°[Cadastre 4], en sa qualité d'usufruitière et de bailleresse.
Il ressort des mentions reprises dans un acte notarié du 10 août 2018 que par acte authentique en date du 28 octobre 1978, Madame [S] [P] a consenti une donation entre vifs au profit de Madame [W] [B] de ses droits indivis de moitié en nue-propriété et de l'usufruit éventuel sa vie durant de la totalité de ses droits en usufruit dans divers immeubles dont les n°[Cadastre 16] et [Cadastre 17] -devenus la parcelle ZI n°[Cadastre 4]. La qualité d'usufruitière de cette dernière de la parcelle en cause est donc établie
Toutefois, Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] opposent à juste titre aux intimées que leur demande, en ce qu'elle est relative à la propriété, ne relève pas des attributions de l'usufruitière mais de la nue-propriétaire, de sorte que Madame [W] [B] doit être déclarée irrecevable en sa demande et le jugement doit être infirmé en ce sens.
Les appelants contestent en revanche vainement la qualité de nue-propriétaire de la SCI [Adresse 21] de la parcelle ZI n°[Cadastre 4] alors qu'il ressort des actes notariés qu'ils produisent - et notamment ceux du 10 août 2018 et du 28 mars 2019- que par acte authentique du 28 octobre 1978, Madame [W] [B] a fait donation à Monsieur [I] [T] de la nue-propriété de parcelles dont les parcelles section AB n°[Cadastre 16] et [Cadastre 17], que la SCI de [Adresse 21] a été constituée aux termes d'un acte notarié du 4 novembre 1992 et que Monsieur [I] [T] a apporté la nue-propriété des parcelles AB n°[Cadastre 16] et [Cadastre 17], devenues la parcelle ZI n°[Cadastre 4]. En outre, la SCI de [Adresse 21] produit le relevé de propriété de 'l'année de MAJ 2022" de la mairie de [Localité 22] duquel il ressort que celle-ci est nue-propriétaire de ladite parcelle, de sorte qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, elle a qualité à agir.
Celle-ci doit donc être déclarée recevable en son action.
- Sur la propriété des plantations :
Les appelants reprochent aux premiers juges d'avoir retenu que les plantations de vignes présentes sur la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 4], sise sur la commune [Localité 22], sont la propriété du bailleur alors qu'ils ont motivé leur décision par deux moyens inopérants. D'une part la parcelle en cause n'a pas été plantée en 1973 mais en 1975, c'est-à-dire après la conclusion du bail. D'autre part l'arrêt de la Cour de cassation en date du 20 juin 2019 s'appliquait à un cas d'espèce différent puisqu'il restait des surfaces à planter. Ils ajoutent que c'est en vain que le tribunal a cru pouvoir se référer à un accord intervenu à propos des parcelles ZI n°[Cadastre 19],[Cadastre 2] et [Cadastre 3] pour en déduire que cet accord devait emporter des conséquences sur la parcelle ZI n°[Cadastre 4]. Ils font valoir que la cour de céans a rendu un arrêt le 27 septembre 2017 -qui a considéré que le preneur était propriétaire des plantations- dans une affaire où l'argumentation et le raisonnement des bailleurs étaient intégralement calqués sur ceux présentés à la cour et qu'un tel arrêt a été validé par la Cour de cassation et qu'il doit donc être retenu que l'avenant n'a fait qu'ajouter aux stipulations du bail initial en se plaçant à la date de celui-ci.
La SCI de [Adresse 21] fait observer en premier lieu que les appelants voudraient inviter la cour à transposer la solution retenue dans son arrêt du 27 septembre 2017, alors qu'il n'y a pas identité de parties et qu'en outre une circonstance majeure n'a pas été prise en considération dans l'appréciation de la commune intention des parties, la référence expresse par les parties, lors de la conclusion de l'avenant, à leur intention commune de 'satisfaire aux conditions imposées par le C.I.V.C'. Dans ces conditions, dès lors que lors de la conclusion de l'avenant du 30 mai 1981, les biens loués comprenaient encore des parties non plantées, les parties ont conclu ledit avenant afin de permettre au preneur de présenter pour les plantations postérieures, un bail répondant aux nouvelles conditions fixées par le C.I.V.C. Elle demande en conséquence la confirmation du jugement mais pour d'autres motifs que ceux retenus par les premiers juges.
Elle fait aussi valoir que la date de plantation -1973 ou 1975- est indifférente mais qu'il convient de rechercher quelle a été la commune intention des parties lors de la conclusion de l'avenant du 30 mai 1981 (article 1152 du code civil alors applicable) : celle d'une renonciation du bailleur à l'accession à la propriété des plantations pour toutes les plantations effectuées sur les biens loués ou uniquement pour les plantations effectuées après la conclusion de l'avenant. Elle soutient qu'au regard de la rédaction de la clause, la commune intention des parties était que seules les plantations non encore réalisées à la date de conclusion de l'avenant soient la propriété des preneurs, que la clause n'avait d'ailleurs d'effet que dans ce sens (article 1157 du code civil alors applicable) et qu'en toute hypothèse s'il subsistait un doute, il conviendrait alors de l'interpréter en faveur du bailleur qui avait contracté l'obligation de renonciation à l'accession (article 1162 du code civil alors applicable). Elle soutient encore qu'à l'occasion de la signature d'un acte le 10 août 2018, les preneurs ont reconnu que la renonciation à la propriété des plantations introduite par avenant le 30 mai 1981 n'avait d'effet que pour les plantations postérieures audit avenant.
Mesdames [S] [P] et [W] [Z] d'une part et Monsieur [Y] [F] d'autre part ont signé le 30 mai 1981un avenant au bail du 14 janvier 1974. Ceux-ci, aux termes 'd'un commun accord entre eux et pour satisfaire aux conditions imposées par le C.I.V.C ont apporté les modifications suivantes au bail ci-après énoncé en fin des présentes.
1-Durée (...)
2- Propriété des plantations-
Les parties conviennent d'ajouter aux conditions dudit bail, la clause suivante :
= LES BAILLEURS déclarent renoncer au droit
= d'accession à la propriété des plantations que leur
= confèrent les dispositions du Code civil (Article
= 555) et celles propres au statut des Baux Ruraux.
= En conséquence, lesdites plantations seront la
= propriété des PRENEURS dès leur réalisation effective
= et le resteront lors de la fin du bail ou de sa
= résiliation, ainsi que les droits de replantation
= correspondants sans que LES BAILLEURS puissent se
= prévaloir d'une quelconque indemnité au titre de
= l'arrachage'.
Une clause de renonciation expresse des bailleresses au droit d'accession à la propriété des plantations a donc été ajoutée par cet avenant aux conditions du bail d'origine.
L'imprécision des stipulations sur leur prise d'effet rend nécessaire leur interprétation.
Il est établi, au vu des pièces produites par les preneurs et des termes mêmes du bail -les parcelles données à bail étaient des friches qui seraient plantées en vignes par le preneur-, que la parcelle en cause a été plantée en 1975 et non pas en 1973 comme l'ont retenu à tort les premiers juges.
Il ressort de la lecture de l'avenant que celui-ci a été établi pour satisfaire aux conditions imposées par le C.I.V.C.
La SCI de [Adresse 21] établit, sans être contredite sur ce point par les appelants, au moyen d'une attestation du responsable du service du C.I.V.C en date du 6 novembre 2015, les nouvelles conditions imposées par le C.I.V.C. Le responsable atteste en effet que les critères d'attribution des plantations fixés à compter de la campagne 1980/1981 ont introduit les conditions suivantes quant aux baux :
. durée minimale de trente ans à dater de la dernière plantation,
. propriété des plantations au preneur,
. frais de plantation et de culture au preneur,
. prix payé en espèce, maximum au quart de la récolte pour les métayages.
Les nouvelles conditions de l'attribution des droits de plantation ne concernaient donc que ceux à compter de la campagne 1980/1981.
La SCI de [Adresse 21] soutient par ailleurs à raison que la commune intention des parties doit aussi être interprétée au regard d'un acte authentique en date du 10 août 2018 contenant avenant à bail et résiliation conventionnelle de bail rural à long terme signé entre Madame [W] [Z], l'une des bailleresses, Monsieur [E] [F], le preneur et auquel est notamment intervenue son épouse, lequel portait sur d'autres parcelles du bail à long terme du 24 janvier 1974. Un tel acte contenait un paragraphe relatif à la cession des plantations ainsi rédigé :
'Conformément aux dispositions des actes du 26 juin 1980 et 30 mai 1981, le bailleur a renoncé définitivement à la propriété des plantations, à l'exception des 58 a 05 ca à prendre dans le n°ZI [Cadastre 3].
De sorte que ces plantations restent la propriété du preneur lors de la présente résiliation'.
Ainsi dans cet acte et en application d'une clause de renonciation rédigée dans les mêmes termes que celle objet du présent litige (avenant du 30 mai 1981) et au vu des dates de plantation des parcelles qui y étaient reprises, les époux [F] reconnaissaient que les parcelles ZI n°[Cadastre 19] et [Cadastre 2] ainsi que 10 a 58 ca de la parcelle ZI n°[Cadastre 3] plantés après l'avenant du 30 mai 1981 restaient la propriété du preneur tandis que les 58 a 05 ca du surplus de la parcelle ZI n°[Cadastre 3], plantés avant l'avenant, restaient celle du bailleur.
Les consorts [F] soutiennent vainement que l'accord du 10 août 2018 ne saurait être pris en compte au motif qu'il s'inscrivait dans le cadre d'une résiliation conventionnelle et d'un accord global, alors qu'il résulte des termes mêmes du paragraphe relatif à la cession des plantations que leur sort a été réglé d'après la seule application des actes du 26 juin 1980 et du 30 mai 1981 qui contenaient ladite clause.
Il ressort donc de la rédaction de clause relative à la propriété des plantations, interprétée à la lumière des nouvelles conditions imposées par le C.I.V.C à une date contemporaine de l'avenant au titre des droits de plantation et des conditions d'application de la même clause par les époux [F] sur d'autres parcelles, que seules les plantations réalisées postérieurement à la date de l'avenant étaient concernées par la clause de renonciation. Une telle interprétation est d'ailleurs confirmée par les termes de l'avenant puisque si dans la première partie de la clause, le présent est employé, le futur l'est pour la partie relative aux plantations, ce qui exclut les parcelles déjà plantées.
C'est vainement que les preneurs entendent se prévaloir d'un arrêt de la cour de céans rendu le 27 septembre 2017 -définitif puisque la Cour de cassation a rejeté le pourvoi du bailleur contre cette décision- dans un litige opposant la SARL Champagne Laurenti à Madame [B] pour des parcelles issues d'un bail du 14 janvier 1974 et affecté par avenant de la même modification relative à la propriété des plantations, pour soutenir que la clause doit produire tous les effets et conserver toute la valeur qui lui a été reconnue dans l'arrêt, c'est-à-dire une renonciation des bailleresses à leur droit d'accession à la propriété des plantations qu'y réaliseraient les preneurs, et ce dès le commencement du bail.
Car, d'une part l'interprétation de la portée d'une telle clause est souveraine.
D'autre part, il ne ressort nullement de la lecture dudit arrêt que la cour a alors pris en compte les nouvelles conditions imposées par le C.I.V.C qui ne faisaient même pas partie de l'énoncé de la clause tel que repris dans son arrêt.
En conséquence, dès lors que la clause relative à la propriété des plantations s'interprète dans le sens d'une renonciation par le bailleur à la propriété des plantations pour les plantations postérieures à la date de l'avenant, le jugement doit être confirmé, et ce par substitution de motifs, en ce qu'il a dit que les plantations de vignes présentes sur la parcelle cadastrée section ZI n°[Cadastre 4], sise sur la commune [Localité 22], pour 54 a 34 ca et faisant l'objet du bail du 14 janvier 1974, sont la propriété du bailleur et d'y ajouter dans les termes de la demande faite par la SCI de [Adresse 21] à hauteur de cour, que les droits d'arrachage et de replantations attachés aux plantations réalisées en 1975 reviennent au bailleur.
Le jugement doit donc être également confirmé en ce qu'il a condamné solidairement Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] -qui ont arraché les plantations à leur départ des lieux- à procéder ou à faire procéder, à leurs frais, à la replantation de 50 a de vignes en pinot noir sur la dite parcelle section ZI n°[Cadastre 4], sauf à l'infirmer du chef des modalités de l'astreinte. Il y a lieu de dire que cette condamnation sera assortie d'une astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision.
*******
Partie succombante, Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] doivent être condamnés aux dépens de première instance et d'appel et déboutés de leur demande d'indemnité de procédure.
Madame [W] [B] étant déclarée irrecevable à agir, elle est irrecevable en sa demande d'indemnité de procédure, de sorte que le jugement qui lui a accordé une indemnité à ce titre, doit être infirmé.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Infirme le jugement déféré en ce qu'il a déclaré Madame [W] [B] recevable en ses demandes reconventionnelles comme disposant de la qualité à agir et en ce qu'il a condamné Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] solidairement à lui payer la somme de 1000 euros au titre de ses frais irrépétibles et du chef des modalités de l'astreinte ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :
Déclare Madame [W] [B] irrecevable à agir ;
Déclare Madame [W] [B] irrecevable en sa demande d'indemnité de procédure en première instance et à hauteur d'appel ;
Déclare la SCI de [Adresse 21] recevable à agir ;
Juge que les droits d'arrachage et de replantation attachés aux plantations réalisées en 1975 sur la parcelle ZI n°[Cadastre 4] (commune de [Localité 22]) reviennent au bailleur ;
Déboute Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] de leur demande d'indemnité de procédure ;
Condamne Madame [M] [U] épouse [F] et Messieurs [V] et [E] [F] aux dépens d'appel.
Le greffier, Le président,