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14/06/2023 | FRANCE | N°23/00022

France | France, Cour d'appel de Reims, Chambre premier président, 14 juin 2023, 23/00022


ORDONNANCE N° 26



DOSSIER N° RG 23/00022

N° Portalis DBVQ-V-B7H-FKNC







ASSOCIATION DE PARENTS DE PERSONNES HANDICAPEES ME NTALES ET LEURS AMIS APEI [Localité 6]





c/



[C] [F]





















Expédition certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire

délivrée le

à

- SELAS FIDAL

- SCP SCP ACG & ASSOCIES























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L'AN DEUX MIL VINGT TROIS,



Et le quatorze juin,





A l'audience des référés de la cour d'appel de REIMS, où était présente et siégeait Mme Sandrine PILON, conseillère, suppléant le premier président conformément à l'ordonnance du 15 février 2023, assistée de Mme Jocelyne DRAPIER, ...

ORDONNANCE N° 26

DOSSIER N° RG 23/00022

N° Portalis DBVQ-V-B7H-FKNC

ASSOCIATION DE PARENTS DE PERSONNES HANDICAPEES ME NTALES ET LEURS AMIS APEI [Localité 6]

c/

[C] [F]

Expédition certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire

délivrée le

à

- SELAS FIDAL

- SCP SCP ACG & ASSOCIES

L'AN DEUX MIL VINGT TROIS,

Et le quatorze juin,

A l'audience des référés de la cour d'appel de REIMS, où était présente et siégeait Mme Sandrine PILON, conseillère, suppléant le premier président conformément à l'ordonnance du 15 février 2023, assistée de Mme Jocelyne DRAPIER, greffier,

Vu l'assignation donnée par la SAS Acthuiss Grand Est, huissiers de justice associés à la résidence de [Adresse 7], ayant son siège social à [Adresse 5], en date du 20 avril 2023,

A la requête de :

l'Association APEI [Localité 6] (ASSOCIATION DE PARENTS DE PERSONNES HANDICAPEES ME NTALES ET LEURS AMIS), association Loi juillet 1901, dont le numéro SIRET est le 780 361 929 000 18, ayant son siège social [Adresse 2], à [Localité 6], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés de droit audit siège,

DEMANDERESSE,

représentée par Me William IVERNEL, avocat au barreau de REIMS (SELAS FIDAL),

à

M. [C] [F], né le 27 février 1984 à [Localité 3] (SOMME), de nationalité française, demeurant [Adresse 1],

à [Localité 4],

DEFENDEUR,

représenté par Me Gérald CHALON, avocat au barreau de REIMS (SCP ACG & ASSOCIES),

d'avoir à comparaître le 10 mai 2023, devant le premier président statuant en matière de référé.

L'affaire a fait l'objet d'un renvoi au mercredi 31 mai 2023.

A ladite audience, Mme Sandrine PILON, conseillère, assistée de Mme Jocelyne DRAPIER, greffier, a applé les parties puis l'affaire a été mise en délibéré au mercredi 14 juin 2023,

Et ce jour, 14 juin 2023, a été rendue l'ordonnance suivante par mise à disposition au greffe du service des référés, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile :

Par contrat à durée indéterminée du 26 août 2013, M [C] [F] a été embauché en qualité d'éducateur spécialisé à temps plein par l'association de Parents de Personnes Handicapées Mentales et leurs Amis de [Localité 6] (l'APEI).

Le 12 mars 2021, la présidente de l'APEI a notifié à M [F] une mise à pied à titre conservatoire au motif que celui-ci avait frappé à coups de poing dans le dos un jeune résident de l'internat de l'association.

Le 15 mars 2021, M [F] a été convoqué à un entretien préalable pour le 25 mars 2021 et le 22 avril 2021, l'APEI lui a notifié son licenciement pour faute grave.

M [F] a saisi le conseil de prud'homme de Châlons-en-Champagne le 10 janvier 2022, lequel par jugement du 17 janvier 2023, a :

Débouté M [F] de sa demande de requalification de mise à pied conservatoire en mise à pied disciplinaire,

Condamné l'association Groupement d'employeurs les Antes-APEI de [Localité 6] à verser à M [F] les sommes suivantes :

3 045.67 euros bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,

304.56 euros au titre des congés payés y afférant,

4 456.40 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

445.64 euros bruts au titre des congés payés y afférant,

8 848.59 euros bruts à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

10 000 euros nets à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1 000 euros nets en réparation du préjudice moral et financier lié à la mise à pied conservatoire injustifiée et disproportionnée dans le temps,

1 500 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonné l'exécution provisoire de l'intégralité du jugement, au visa de l'article 515 du code de procédure civile,

Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Rappelé l'exécution provisoire de droit,

Fixé le salaire de référence mensuel brut à 2 228.20 euros,

Prononcé l'exécution provisoire facultative,

Condamné l'association Groupement d'employeurs les Antes-APEI de [Localité 6], en la personne de son représentant légal, aux entiers dépens.

Ce jugement a fait l'objet d'une rectification d'erreur matérielle le 7 mars 2023 en ce qu'il convient de lire « l'association APEI [Localité 6] » au lieu et place de « l'association Groupement d'employeurs les Antes-APEI de [Localité 6] » dans le corps et le dispositif dudit jugement.

L'association APEI [Localité 6] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 20 avril 2023.

Le même jour, elle a fait assigner M [F] devant le premier président de cette cour, demandant :

L'arrêt de l'exécution provisoire du jugement,

L'autorisation, à titre subsidiaire, de consigner auprès de la CARPA les condamnations mises à sa charge par le jugement, dans l'attente de l'arrêt à intervenir de la cour d'appel de Reims, statuant sur l'appel qu'elle a interjeté à l'encontre du jugement,

La condamnation de M [F] à lui payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamnation de celui-ci aux entiers dépens, dont distraction requise au profit de la SELAS Fidal, représentée par Me Delphine Couchou-Meillot, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'association APEI [Localité 6] maintient ses demandes aux termes de conclusions notifiées le 25 mai 2023.

Elle invoque en premier lieu un moyen sérieux de réformation aux motifs que le conseil de prud'hommes a retenu l'existence d'un doute quant à l'existence d'une cause réelle et sérieuse au licenciement au regard d'un courrier rédigé par M [F] lui-même, donc en contradiction avec le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même et l'exigence d'impartialité de la preuve.

Elle soutient en outre que l'argumentation de M [F] consistant à contester les faits dans leur matérialité et à affirmer qu'il n'aurait aucun passif disciplinaire ne résiste pas à l'examen, alors que les faits en cause sont graves, s'agissant de coups de poings portés par un éducateur en charge d'un jeune vulnérable, en situation de handicap et bafouent l'ensemble des valeurs défendues par elle. Elle ajoute qu'une enquête menée auprès des professionnels de l'établissement après les faits a révélé qu'en plus de l'acte précité, le comportement de M [F] n'était pas toujours adapté au public vulnérable accueilli au sein de l'APEI. Elle estime que la faute grave est avérée et le licenciement disciplinaire totalement justifié.

L'association affirme qu'il existe en outre des conséquences manifestement excessives au regard du risque que M [F] ne puisse par rendre les sommes qu'il percevra, d'un montant total de 29 600.86 euros, si la décision du conseil de prud'hommes est infirmée.

Par conclusions notifiées le 16 mai 2023, M [F] sollicite :

Le rejet de l'ensemble des demandes de l'APEI,

La confirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes,

Le versement de toutes les sommes qui lui sont dues en exécution du jugement,

En tout état de cause,

La condamnation de l'APEI à lui verser la somme de 2 000 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Quant à l'existence d'un moyen sérieux de réformation, il affirme n'avoir jamais fait l'objet d'une quelconque sanction disciplinaire et entend faire la preuve de son implication et de ses qualités professionnelles. Il conteste avoir porté un quelconque coup, mais soutient avoir réagi de manière indispensable en pratiquant une immobilisation, qu'il qualifie d'acte purement professionnel et qui était, selon lui, nécessaire et indispensable en raison d'une attitude violente et agressive du jeune. Il soutient en outre que les propos de son ancien employeur quant à un comportement inadapté de sa part sont faux et non-fondés. Il en conclut que les motifs invoqués dans la lettre de licenciement sont inconsistants, faux et contradictoires.

S'agissant de la condition tenant au risque que l'exécution entraîne des conséquences manifestement excessives, M [F] soutient que les sommes qui lui sont dues, notamment en ce qu'elles accordent une provision, ne peuvent faire l'objet d'un arrêt de l'exécution provisoire et qu'il s'agit là d'une disposition d'ordre public. Il fait en outre valoir que le créancier doit apporter la preuve de ses difficultés financières et de ce que l'exécution provisoire du jugement est susceptible de rompre, de manière irréversible, son équilibre financier. Il précise que, pour sa part, il perçoit une rémunération mensuelle et dispose donc d'une garantie minimum pour rembourser les sommes versées en cas d'infirmation.

MOTIFS

Sur l'arrêt de l'exécution provisoire et la consignation

Les sommes allouées à M [F] par le conseil de prud'hommes consistent en un rappel de salaire, et de congés payés, en indemnités compensatrice de préavis et de licenciement et en dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ne constituent pas des provisions. L'APEI n'est donc pas fondée à soutenir qu'elles ne peuvent faire l'objet d'un arrêt de l'exécution provisoire pour ce motif.

Il résulte de l'article 514-3 du code de procédure civile qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les conditions ainsi prévues par ce texte, tenant à l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et à un risque de conséquences manifestement excessives sont cumulatives et il appartient au demandeur de démontrer leur réunion.

Les conséquences manifestement excessives s'apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d'infirmation de la décision assortie de l'exécution provisoire.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d'infirmation

Il résulte de l'article 521 du code de procédure civile que la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

En l'espèce, l'APEI estime que M [F] ne justifie pas d'une garantie suffisante pour rembourser les sommes versées en cas d'infirmation du jugement rendu.

Cependant, il n'appartient pas à M [F] de justifier de garanties suffisantes quant à ses capacités de remboursement des sommes allouées en première instance en cas de réformation, mais à l'APEI, de démontrer qu'au vu de la situation de celui-ci, il existe un risque d'insolvabilité de sa part et des conséquences potentiellement irréversibles pour elle.

M [F] dispose d'un emploi à temps plein et à durée indéterminée depuis le 16 août 2022, pour lequel il perçoit une rémunération mensuelle nette de 1 700 à 2 000 euros.

Il bénéficie ainsi, à tout le moins, de revenus réguliers et, à défaut de tous autres éléments sur la situation financière et patrimoniale de M [F], qu'il appartient à l'APEI de produire, comme d'éléments de nature à faire craindre pour la situation de l'association, il ne peut être conclu à l'existence d'un risque de conséquences manifestement excessives à l'exécution provisoire de la décision de première instance.

En conséquence, l'APEI ne peut qu'être déboutée de sa demande aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire, comme de celle tendant à la consignation de la somme en cause.

Sur les autres demandes

Il appartient à la cour de statuer sur la demande de M [F] aux fins de confirmation du jugement de première instance. En l'absence d'arrêt de l'exécution provisoire dont ce jugement est assorti, il n'y a pas lieu d'ordonner spécifiquement le versement à M [F] de toutes les sommes qui en résulte.

L'APEI succombe en sa demande ; elle est donc tenue aux dépens et sa demande en paiement au titre de ses frais irrépétibles doit être rejetée.

L'équité ne commande pas de faire droit à la demande de M [F] fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement,

Rejetons les demandes de l'association de Parents de Personnes Handicapées Mentales et leurs Amis de [Localité 6],

Disons que la demande de confirmation du jugement rendu le 17 janvier 2023 par le conseil de prud'hommes de Châlons-en-Champagne excède nos pouvoirs,

Rejetons le surplus des demandes de M [C] [F],

Condamnons l'association de Parents de Personnes Handicapées Mentales et leurs Amis de [Localité 6] aux dépens.

Le greffier, La conseillère,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Reims
Formation : Chambre premier président
Numéro d'arrêt : 23/00022
Date de la décision : 14/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-14;23.00022 ?
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